Une
nouvelle année liturgique, un nouveau temps liturgique ; mais c’est
toujours la même foi qui nous réunit et qui nous met en route à la rencontre du
Dieu vivant et vrai. Pourtant, cet avent a quelque chose de particulier que les
avents des deux dernières années n’avaient pas. L’avez-vous remarqué ? En
ce temps de l’Avent du cycle C, ce n’est pas l’unique prophète Isaïe qui nous
accompagne, mais quatre prophètes : un pour chaque dimanche ! Quatre
prophètes de la première alliance vont nous apprendre à accueillir celui qui,
dans la nouvelle alliance, sera bien plus qu’un prophète : le Christ Sauveur.
En ce premier dimanche, c’est le prophète Jérémie qui nous livre une parole.
Connaissez-vous
Jérémie ? Il est encore très jeune lorsque le Seigneur l’appelle à quitter
son village d’Anatot pour se rendre à Jérusalem. Il est appelé pour porter aux
hommes la Parole de Dieu, comme tous les prophètes. Et pourtant, il a une place
particulière, selon moi, dans le concert des prophètes du Premier Testament. Au
début de son ministère, son pays est en paix, mais ses habitants ont oublié la
loi de Dieu. Chacun ne pense qu’à lui ; le mal semble triompher dans
certains milieux, et plus personne ne cherche vraiment Dieu. Mais bon, tout va
bien ! Jérémie est envoyé dire aux hommes qu’il faut revenir à la loi de
Dieu, qu’il serait bon de penser aux autres. Et si rien ne devait changer,
alors ce sera la guerre, la destruction et la ruine de Jérusalem. Personne ne
le croit ; tous rient de lui. Mais lui, fidèlement, porte la Parole de
Dieu, à temps et à contre temps, au risque de sa liberté, voire de sa vie !
Beaucoup, en effet, voudraient se débarrasser de ce gêneur, de cet empêcheur de
faire le mal, de ce dévot de Dieu d’un autre âge. Souvent gagné par le découragement,
Jérémie poursuit cependant avec une fidélité exemplaire sa mission. L’Histoire
lui donnera raison. L’armée de Nabuchodonosor assiège Jérusalem : c’est la
guerre ! Et ceux qui riaient de Jérémie comprennent trop tard. Jérémie,
lui, ne se réjouit pas d’avoir eu raison contre tous. Il reste fidèle à son
Dieu et à sa Parole. Lorsque le pays était en paix, il prêchait la guerre ;
maintenant que le pays est en guerre et qu’une partie de la population est
déportée, lui achète un champ, annonçant par-là que Dieu fera grâce et
miséricorde et que viendra le temps où cette terre reviendra au peuple de Dieu.
De prophète de malheur, il devient prophète d’espérance, car Dieu ne saurait
laisser son peuple aller vers sa perte.
Comme
les autres prophètes, Jérémie comprend vite que Dieu va envoyer son Messie. Nous
avons entendu, dans la première lecture, en quels termes il en parle : ce
Messie est Germe de Justice, il exercera
le droit et la justice. Cette insistance sur la justice ne doit pas nous
tromper. Le Messie qui vient n’est pas un juge à notre mesure ; il ne
vient pas venger Dieu de celles et ceux qui se sont détournés de lui. La justice
qu’exercera le Messie annoncé par Jérémie est d’abord source de salut. Nous
pouvons dire que, dans le langage de Jérémie, Germe de Justice équivaut à Germe
de Salut. Le Messie qu’il annonce est un Messie Sauveur ;sa justice est
celle qui place les humbles au premier plan. Dieu n’a que faire de vengeance. Ce
que Dieu veut, c’est un peuple qui lui soit acquis, un peuple fidèle à son
Alliance, un peuple qui respecte la loi de Dieu, la seule qui procure vie et
bonheur. Il existe un très beau passage dans le livre de Jérémie, au chapitre
31, 31-34 : Voici venir des jours,
oracle du Seigneur, où je conclurai avec la maison d’Israël une alliance
nouvelle. Non pas comme l’alliance que j’ai conclue avec leurs pères, le jour
où je les ai pris par la main pour les faire sortir du pays d’Egypte – mon alliance
qu’eux-mêmes ont rompue bien que je fusse leur Maître ! Mais voici l’Alliance
que je conclurai avec eux après ces jours-là. Je mettrai ma loi au fond de leur
être et je l’écrirai sur leur cœur. Alors je serai leur Dieu et ils seront mon
peuple. Une loi qui ne sera plus extérieure à l’homme, mais inscrite au
plus profond de son être. Lorsque l’on sait que l’homme de la Bible prend ses
décisions avec son cœur, on comprend la puissance de cette nouvelle alliance :
la loi de Dieu étant inscrite dans le cœur de chacun, chaque décision de l’homme
sera marquée de cette empreinte divine. Et le salut promis devient réalité :
Je serai leur Dieu et ils seront mon
peuple. N’est-ce pas cela « être sauvé » ? N’est-ce pas là
la source de l’unique et vrai bonheur ?
Malgré
les événements difficiles de sa vie, malgré des emprisonnements injustes et
injustifiés, Jérémie est resté fidèle au Dieu qui sauve, au Dieu de l’Alliance.
Il est celui envers qui Dieu a exercé sa justice au vu et au su de tous. Quand
il nous dit que le Messie promis est Germe
de Justice, source du salut, nous pouvons lui faire confiance et, avec lui,
entrer dans cette fidélité nécessaire au seul et vrai Dieu. Avec lui, attendons
ce Messie, Germe de Justice et source du salut. Amen.
(Dessin de Mr Leiterer)
(Dessin de Mr Leiterer)