Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 31 octobre 2020

Toussaint - 01er novembre 2020

 La fête de ceux qui ont réussi ?




(Source internet)



            A écouter le livre de l’Apocalypse, nous pourrions croire que la fête de la Toussaint est la fête de ceux qui ont réussi. Ils sont parvenus au but, ils sont cette foule immense que nul ne pouvait dénombrer, au point que les jours de notre calendrier ne suffisent pas pour laisser une place unique à chacun. Mais alors, la Toussaint nous concerne-t-elle ? Et en quoi ? 

            Certes, et les oraisons de la fête vont dans le même sens, le sens premier de la fête est bien de célébrer en une seule fois, la sainteté de tous les élus, qui déjà intercèdent pour nous. Au-delà de nos dévotions particulières pour tel saint ou telle sainte, voici un jour pour célébrer tous ceux qui déjà vivent en Dieu, tous ceux qui nous sont donnés comme autant de modèles pour affermir notre vie chrétienne. En les célébrant tous ensemble, et en reconnaissant qu’ils intercèdent pour nous, nous reconnaissons qu’il subsiste un lien entre eux et nous. Ils peuvent quelque chose pour nous puisqu’ils partagent la gloire de Dieu. Ils sont autant de chemins, autant de modèles pour vivre jour après jour notre propre sainteté. 

            Nous aurions tort, en effet, de croire que la sainteté est pour plus tard, pour quand nous serons morts et enterrés. C’est certes une condition nécessaire pour être déclaré saint, mais ce n’est de loin pas la condition pour vivre en saint dès maintenant. Car la sainteté, Dieu l’offre à tous et à chacun de ceux qui choisissent le Christ. Dès maintenant, dit Jean dans sa première lettre, nous sommes enfants de Dieu. Si Dieu est saint, ce que je crois et affirme, alors les enfants de Dieu que nous sommes partageons avec lui cette sainteté. Nous sommes faits à son image et à sa ressemblance, au départ de notre vie croyante. Notre baptême a fait de nous des saints. Mais le péché qui rôde dans nos vies, obscurcit cette sainteté, l’empêche de briller vraiment. En méditant la vie des saints et des saintes reconnus par l’Eglise, nous pouvons trouver notre chemin vers la sainteté librement acceptée et vécue dans l’ordinaire de nos jours. 

            Car voyez-vous, nous sommes aussi de cette foule immense que nul ne peut dénombrer, car Dieu seul connaît la sainteté de chacun. Nous sommes de cette foule immense, même si ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous devons nous souvenir toujours que nous sommes appelés par Dieu ; nous ne devons jamais oublier que, dès maintenant, Dieu nous aime et nous veut avec lui, toujours, chaque jour. La sainteté n’est pas notre récompense ; la sainteté est notre être profond de baptisé. C’est la marque de fabrique de ceux que Dieu a appelés. Nous mesurons là la grandeur que Dieu a déposé en nous, qui n’est autre que sa propre vie. Plutôt que d’être la fête de ceux qui ont réussi, la Toussaint est la fête de celles et ceux qui choisissent de réussir avec Dieu, la fête de celles et ceux qui choisissent de vivre avec Dieu, dès maintenant et pour toujours. 

            En cette année marquée depuis trop longtemps par la pandémie qui bouleverse la vie du monde entier, une fois de plus, nous serons interdits de rassemblement, parce que jugés, avec d’autres, comme non nécessaires à la vie du monde, non nécessaires à la bonne marche de la société. Je regrette profondément cette conception utilitaire de l’homme à laquelle nos gouvernants nous réduisent. Je regrette profondément la perte du sens de la prière comme pierre à apporter à l’édifice qui lutte contre la pandémie. Je regrette profondément, qu’une fois de plus, l’Etat porte atteinte à ce qu’il y a de plus sacré en l’homme : son humanité et sa sainteté. Je veux bien entendre qu’il nous faut tous participer à la lutte contre la propagation de ce virus ; mais je ne peux accepter que l’homme en soit réduit à n’être qu’un esclave au service d’une idéologie, juste bon à travailler, à se taire et à s’enfermer. Ce que nous appelions autrefois le secours de la religion, s’il n’est plus reconnu, n’en est pas moins nécessaire pour autant. Parce que nous sommes déjà ce peuple saint, engageons-nous à prier pour que Dieu éclaire l’intelligence de ceux qui cherchent, donne un peu plus de bon sens à ceux qui nous gouvernent et à tous la force de résister à la colère qui monte chaque jour davantage devant ce qui semble quand même être une série de décisions catastrophiques pour tous les peuples. Nous vivons malheureusement dans un monde où l’on n’accepte plus que l’on meure de maladie, mais où le fait de devenir pauvre ne dérange personne. Qui a le souci du million de pauvres supplémentaires en France depuis le début de cette pandémie ? Les béatitudes que nous avons proclamées nous placent résolument à leur côté. 

            Avec nos amis les saints qui vivent déjà en Dieu, rangeons-nous du côté de Dieu et du côté des hommes, particulièrement ceux et celles qui souffrent le plus en ces temps difficiles. L’Evangile nous rappelle que l’amour que nous avons pour le premier se manifeste par l’amour que nous portons à tous nos frères et sœurs en humanité. Puisque nous ne pourrons plus unir nos voix désormais, unissons nos cœurs en une prière fervente pour le salut de tous les hommes. Nous manifesterons ainsi au monde la puissance de la sainteté que Dieu offre à tous. Amen.

samedi 24 octobre 2020

30ème dimanche ordinaire A - 25 octobre 2020

 Fratelli tutti et tutti quanti !



(Source internet : https://selmourconceptions.com/lamour-comme-source-de-vie-invisible-et-indivisible/)


        Le 03 octobre dernier, à Assise, le Pape François signait sa troisième encyclique, intitulée « Fratelli tutti », Tous frères ! A côté des explications de texte officielles, nous avons vu fleurir sur les réseaux sociaux tout un tas de commentaires plutôt acerbes, loin du contenu de l’encyclique. C’était comme si celui qui venait de nous inviter à la fraternité universelle s’attirait par le fait même l’inimitié de tous, en tous les cas de beaucoup. « Pape rouge qui ferait mieux de parler à son Eglise plutôt que de s’occuper de politique », pour ne prendre que les remarques les plus tendres ! Et ne croyons pas que les attaques ne venaient que des autres, de ceux qui ne croient pas comme nous, voire de ceux qui ne croient pas du tout. J’aurais aimé que ce soit le cas ; mais non, les attaques les plus virulentes venaient de son propre camp. L’idée d’une fraternité universelle a encore du mal à faire son chemin, même chez les chrétiens. 

            Pourtant, on aurait pu croire, après des siècles de méditations des textes bibliques proposés en première lecture et en évangile ce dimanche, on aurait pu croire donc que l’amour serait passé dans les mœurs, que la fraternité ne serait pas un problème. On aurait pu croire que, après des conflits mondiaux qui avaient déchiré la planète au siècle dernier, après l’horreur des camps de concentration (ceux du nazisme comme ceux du bolchévisme), on aurait pu croire donc que les hommes avaient fait le choix d’un « plus jamais ça » et que la fraternité s’imposait comme le chemin naturel pour rassembler les hommes, garantir la paix et assurer le bonheur de tous. Il semblerait que ce ne soit pas encore le cas. Il nous faut donc reprendre sans cesse la méditation de ces textes fondamentaux de notre foi que la liturgie de ce dimanche nous donne d’entendre encore. 

            Dans l’encyclique, le Pape François propose une méditation de la parabole du bon samaritain, dont il rappelle l’arrière-plan. Et pour ce faire, il cite, entre autres, l’extrait du livre de l’Exode que nous avons entendu aujourd’hui. En effet, la fraternité ou l’urgence de l’amour du prochain, est une réalité fortement ancrée dans les textes de la Bible. Le pape rappelle, je le cite : Dans les traditions juives, le commandement d’aimer et de prendre soin de l’autre semblait se limiter aux relations entre les membres d’une même nation. Le précepte ancien « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19, 18) était généralement censé se rapporter à des concitoyens. Cependant, surtout dans le judaïsme qui s’est développé hors de la terre d’Israël, les frontières se sont élargies. L’invitation à ne pas faire aux autres ce que tu ne veux pas qu’ils te fassent est apparue (cf. Tb 4,15). Le sage Hillel (1er siècle avant Jésus Christ) disait à ce sujet : « Voilà la loi et les prophètes ! Tout le reste n’est que commentaire ». Le désir d’imiter les attitudes divines a conduit à surmonter cette tendance à se limiter aux plus proches : « La pitié de l’homme est pour son prochain, mais la pitié du Seigneur est pour toute chair » (Si 18,13) (FT 59). Il y a donc là la raison première de la nécessité d’aimer : aimer le prochain, quel qu’il soit, c’est entrer dans l’imitation de l’amour de Dieu. Le croyant en Dieu ne peut pas aimer moins que son Dieu ; le croyant en Dieu se doit, par sa manière d’agir et d’aimer, enseigner comment Dieu agit et aime. Il ne peut donc faire moins bien que Dieu. Il doit tendre vers cette perfection de l’amour qui est en Dieu, qui est Dieu. Il nous faudrait relire ici l’enseignement d’un saint Jean qui nous dit que Dieu est amour, mais aussi que celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, ne saurait aimer Dieu qu’il ne voit pas ! (1Jn 4,20). 

            Ecoutons encore le Pape François (FT 88). A partir de l’intimité de chaque cœur, l’amour crée des liens et élargit l’existence s’il fait sortir la personne d’elle-même vers l’autre. Faits pour l’amour, nous avons en chacun d’entre nous « une loi d’extase : sortir de soi-même pour trouver en autrui un accroissement d’être ». Voilà pourquoi l’homme doit de toute manière mener à bien cette entreprise : sortir de lui-même. François explique ainsi pourquoi je ne peux pas m’enfermer dans un amour limité à une personne ou à un groupe restreint de personnes. L’amour ne vit et ne grandit qu’à mesure qu’il s’ouvre toujours plus, qu’il inclut toujours plus de monde. Sinon, il rapetisse, se recroqueville jusqu’à disparaître, jusqu’à n’être plus un amour authentique. Le plus grand danger de l’amour, c’est l’illusion de l’amour qui est présente dès que je limite celui-ci à une personne, à un groupe de personnes. Apprendre à aimer nous oblige à apprendre à aimer tout le monde ! Ou nous courons le risque de n’aimer jamais vraiment. 

            Un des aspects de notre condition chrétienne est de n’être que de passage sur cette terre. Venant de Dieu et allant vers Dieu, nous pouvons dire que nous ne sommes que des étrangers en terre étrangère. Notre patrie véritable, c’est le royaume où Dieu nous attend. Notre pèlerinage sur cette terre ne peut être qu’un pèlerinage d’amour si nous ne voulons pas perdre la boussole qui nous mènera vers le Père éternel. Mettons en œuvre le double commandement de l’amour en vivant une fraternité universelle plus que jamais nécessaire en ces temps troublés qui sont les nôtres. Par l’amour de Jésus, vers l’amour en Dieu, en passant par l’amour des autres. De tous les autres. Il n’y a pas d’autre chemin possible. C’est ce que le Christ a enseigné par sa vie ; c’est ce que nous devons enseigner par la nôtre. Amen.  

samedi 17 octobre 2020

29ème dimanche ordinaire A - 18 octobre 2020

 La vie d'un chrétien.





Il y a des clins d’œil de Dieu que l’on ne peut ignorer. Nous célébrons aujourd’hui la clôture de la semaine missionnaire, semaine de prière pour celles et ceux qui, aux quatre coins du globe, sont appelés à répandre la Bonne Nouvelle afin que le monde croie ! Et c’est en ce dernier jour que nous commençons justement la lecture du plus ancien écrit chrétien, la lettre aux Thessaloniciens. L’apôtre y parle, dès sa salutation, de la manière dont doivent vivre les croyants au Christ. Quatre attitudes sont soulignées.

 En premier lieu, avoir une foi active. On peut être surpris de la juxtaposition du mot foi et de l’adjectif active. La foi aurait donc quelque chose à faire ? La foi nous mettrait donc en mouvement ? A ceux qui croyaient que la foi se réfléchissait d’abord (ou seulement), Paul rappelle qu’elle est un principe de vie. N’est-ce pas, la foi, ce n’est pas d’abord quelque formule obscure à répéter, c’est aussi et surtout un art de vivre. Personne ne peut avoir la foi s’il n’en vit pas. Une foi active, ce serait alors une foi qui se réfléchit, s’approfondit, pour un meilleur service de l’Eglise et des frères. Saint Matthieu nous le rappellera en la fête du Christ Roi : ce sont aussi nos actes qui nous jugeront lorsque le Fils de Dieu reviendra ! J’avais faim, soif, j’étais malade, en prison, … qu’as-tu fais pour moi ? Ce n’est qu’en accueillant sans cesse la Parole de Dieu au cœur de notre vie, que nous pouvons découvrir ce que Dieu attend de nous et essayer de le réaliser. Une foi active, ce n’est pas s’occuper à ne rien faire, mais bien se mettre à l’écoute de Dieu, et l’ayant écouté, se mettre au service des frères. 

Peut-être est-ce pour cela qu’en deuxième lieu, Paul rappelle qu’un croyant au Christ doit avoir une charité qui se donne de la peine. Un amour passionné des autres qui met l’autre en premier, en tout cas avant moi. Un amour attentif et créatif pour trouver sans cesse comment, avec d’autres, soulager la misère humaine. Un amour attentif à l’autre qui m’oblige au respect de chacun, même s’il n’est pas comme moi, même s’il ne croit pas comme moi. Notre foi se vérifie dans les actes que nous posons tout au long de notre vie. Si nous croyons au Christ Sauveur, nous ne pouvons pas vivre comme les autres qui n’y croient pas. Nous ne pouvons pas nous détourner des autres sous prétexte que nous avons nos propres problèmes ; nous ne pouvons pas exiger que nos prêtres travaillent d’abord chez nous avant d’aller vers ceux et celles qui sont loin. Nous ne pouvons pas exiger de vivre notre foi et notre vie de communauté sans nous soucier de la communauté qui est juste à côté, dans le prochain village. 

En troisième lieu, Paul parle de la dernière des vertus théologales : l’espérance qui doit tenir bon dans le Seigneur. Notre foi et notre charité sont orientées par notre espérance. Même si nous n’en avons pas toujours conscience : nous ne croyons pas en vain et nous n’agissons pas en vain. Nous sommes orientés vers la fin des temps, vers le retour glorieux du Christ, vainqueur du mal et de la mort. Nous ne pouvons pas oublier l’espérance, sous peine de transformer notre foi en vague théorie humaniste et notre charité en activisme stérile. L’espérance nous rappelle en qui nous croyons et pourquoi nous vivons en conformité avec cette foi : parce que le Christ a offert sa vie pour que le monde soit meilleur, et que nous voulons aider, à notre manière, à établir son règne au milieu de nous. Paul est heureux de constater qu’il en est ainsi pour la jeune communauté de Thessalonique et il en rend grâce à Dieu. 

La dernière attitude du croyant que Paul souligne est la suivante : Vous avez été choisis par Dieu. Une affirmation en guise de rappel. Ne l’oubliez pas ! Votre foi, qui entraîne votre agir et fonde votre espérance, est d’abord un don de Dieu que vous avez accueilli, un appel auquel vous avez répondu ! Il n’y a pas à s’enorgueillir d’être croyant : cela nous est offert par Dieu ! Il n’y a pas à s’enorgueillir du bien que nous faisons : cela nous est offert par Dieu ! Il n’y a pas à s’enorgueillir d’avoir une espérance alors que tant d’autres désespèrent : cela nous est offert par Dieu ! « C’est cet appel de Dieu, ce don gracieux qui a permis aux Thessaloniciens d’accueillir la Parole comme parole de Dieu, dans toute sa plénitude. C’est elle qui, à présent, se déploie en eux et les dynamise ». 

Baptisés, nous sommes appelés par Dieu à vivre selon sa Parole. Ouvrons nos cœurs à son appel et vivons selon ce que nous aurons entendu et discerné : nous parviendrons ainsi au Royaume où Dieu nous attend. Amen.


samedi 10 octobre 2020

28ème dimanche ordinaire A - 11 octobre 2020

 C'est quoi être missionnaire ?




(Pieter Brueghel l'Ancien, Le repas de noces, 1568, Kunsthistorisches Museum, Vienne, Autriche)


       Nous venons d’entendre non pas une, mais deux paraboles de Jésus, que Matthieu a astucieusement tricotées ensemble : celle des invités au festin des noces et celle du vêtement de la fête. Et puisque l’Eglise nous propose aujourd’hui d’entrer dans la Semaine Missionnaire Mondiale, je voudrais les relire avec vous sous cet angle particulier. Elles nous apprennent à être missionnaires, à nous ouvrir aux autres et à Dieu, et nous ouvrent ainsi le chemin vers le festin éternel que le Père prépare pour nous. Pour ce faire, observons les personnages. 

            Le royaume des Cieux est comparable à un roi qui célébra les noces de son fils. Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités. Voilà posé le décor général. Nous comprenons, avec les auditeurs de Jésus en son époque, que le roi, c’est Dieu lui-même. Il a préparé un repas de noces pour l’humanité. C’est une image ancienne déjà, souvent utilisée par les prophètes, pour dire l’essentiel du projet d’amour de Dieu pour tous les hommes : l’humanité est faite pour vivre avec Dieu, en Dieu ; et cette vie avec Dieu n’est ni triste, ni monotone : c’est une vie de joie, une vie d’amour. Pour le chrétien que je suis, Dieu s’unit à l’humanité en Jésus, vrai Dieu et vrai homme. Comme membre de l’humanité, je fais partie des invités à la noce, parce que personne n’est exclu de la fête. Comme chrétien, je suis de ces serviteurs que Dieu envoie porter à tous les hommes la Bonne Nouvelle du Salut. J'ai bien dit : comme chrétien et non comme prêtre. Car oui, frères et sœurs en Christ, nous sommes à la fois les invités, parce que c’est toute l’humanité que Dieu veut sauver, et les serviteurs, parce que, déjà membres de l’Eglise, nous avons à témoigner de l’amour de Dieu, à répandre cet amour afin que le monde puisse croire. Et nous sommes serviteurs, non parce qu’un matin, au réveil, nous nous serions dit : tiens, ce serait bien que je parle de Jésus autour de moi ; non, nous sommes serviteurs parce qu’envoyés par Dieu. Nous sommes constitués serviteurs par appel de Dieu ; et cet appel a retenti dans la vie de chacun au jour même de notre baptême. Nous ne naissons pas à la foi pour nous blottir auprès de Dieu ; nous naissons à la foi pour partager les dons que Dieu nous fait. Un chrétien qui ne voudrait pas être serviteur, n’aurait pas vraiment intégré le sens même de son baptême. Les missionnaires ne sont pas uniquement des prêtres, des religieux et des religieuses avec une vocation particulière consistant à porter le Christ au loin ; est missionnaire chaque personne qui s’unit à Jésus par le baptême. Et notre mission commune n’est pas de convaincre les gens, mais de leur transmettre une invitation à la fête avec Dieu. 

            Revenons à nos paraboles. Dans la première, il est dit : Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités, mais ceux-ci ne voulaient pas venir. Il envoya encore d’autres serviteurs dire aux invités : « Voilà, j’ai préparé mon banquet, mes bœufs et mes bêtes grasses sont égorgés ; tout est prêt : venez à la noce. » Mais ils n’en tinrent aucun compte et s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce ; les autres empoignèrent les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Nous constatons là la persévérance de ce roi, la persévérance de Dieu à appeler l’humanité au salut. Nous constatons aussi qu’il n’est pas avare : il a préparé un festin somptueux, à l’image de celui annoncé par le prophète Isaïe dans la première lecture de ce dimanche. Dieu n’est pas avare en amour ; il ne donne pas un petit peu, il ne donne pas un bout ; il donne tout son amour. Le roi n’a pas fait tuer quelques bœufs et quelques bêtes grasses ; il dit bien : mes bœufs et mes bêtes grasses. Tout a été livré ! Chrétiens, nous sommes encore plus conscients que Dieu a tout livré, puisque nous proclamons, en Jésus, un Messie livré, crucifié par amour des hommes. Oui, Dieu a tout livré pour nous sauver, pour nous inviter à la fête. Et nous refuserions ? Nous refuserions de nous laisser ainsi aimer, totalement, parce que nous aurions mieux à faire ? Peut-on répondre à Dieu qui nous invite : désolé, je ne peux pas, j’ai piscine ? Cette parabole des invités à la noce est aussi une parabole qui nous invite à nous laisser aimer par Dieu, vraiment, et à entrer dans ce mouvement d’amour. Dieu ne se lasse pas d’inviter. La preuve : quand les premiers invités ont refusé, le roi dit à ses serviteurs : « Le repas de noce est prêt, mais les invités n’en étaient pas dignes. Allez donc aux croisées des chemins : tous ceux que vous trouverez, invitez-les à la noce. » Les serviteurs allèrent sur les chemins, rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, les mauvais comme les bons, et la salle de noce fut remplie de convives. Vous aurez noté au passage, la petite incise : les mauvais comme les bons. L’amour de Dieu est sans limite ; tout le monde est vraiment invité à se laisser aimer de Dieu, à se laisser transformer par son amour, à se laisser bonifier par son amour. 

            Tout va bien donc ? Eh bien pas tout à fait. C’est là qu’intervient la deuxième parabole. Elle commence ainsi : Le roi entra pour examiner les convives, et là il vit un homme qui ne portait pas le vêtement de noce. La logique humaine voudrait qu’il n’y ait là rien de surprenant. Vous invitez du monde à la dernière minute, les ramassant dans le quartier de manière pressante puisque tout est prêt et que personne n'aime que son rôti soit trop cuit. Vous ne pouvez pas vraiment vous étonner qu’un quidam entre sans vêtement de noce. Ce qui est surprenant, à vue humaine, c’est plutôt qu’il n’y en ait qu’un qui soit vêtu à l’ordinaire. Et pourtant, si tous les autres, invités dans les mêmes conditions, ont eu le temps de se préparer, étonnons-nous, avec le roi, qu’il y en ait un qui n’ait pas pris ce temps. On n’entre pas dans le mouvement de l’amour de Dieu parce qu’on a vu de la lumière ; on entre dans le mouvement de l’amour de Dieu parce qu’on a été saisi par lui et qu’on se laisse transformer par lui. C’est cela, le vêtement de la fête : l’amour de Dieu qui nous prend et nous transforme, nous rendant identiques au Christ. Paul le dira dans une de ses lettres : Vous avez revêtu le Christ. Voilà notre vêtement de fête ! Ce qui doit nous surprendre dans ces deux paraboles, ce n’est pas que le roi fasse tuer les meurtriers, ni qu’il fasse jeter dehors, pieds et poings liés, celui qui ne porte pas le vêtement de noce. Non, ce qui doit nous surprendre, c’est que l’homme puisse refuser le mouvement d’amour initié par Dieu ; ce qui doit nous surprendre, c’est que des gens pensent encore que nous irons tous au paradis. Sans le vêtement de l’amour, vous aurez beau voir de la lumière ; c’est à peu près tout ce que vous verrez du paradis. Ce qui doit nous surprendre le plus, c’est que Dieu ait choisi, par amour, de nous laisser aller, de nous laisser la possibilité de refuser son amour. Là nous voyons vraiment à quel point il nous aime. Il nous aime au point de se laisser entendre dire : je ne veux pas de ton amour. Chrétiens, nous devons comprendre aussi qu’il ne suffit pas d’avoir revêtu le Christ pour être automatiquement admis dans la salle des noces. Entrer dans le mouvement de l’amour de Dieu n’est pas un moment unique à l’image de notre baptême ; c’est un mouvement quotidien, un mouvement dans lequel il nous entrer chaque jour. C’est pour cela que nous sommes à la fois serviteurs et invités. Nous ne devons jamais l’oublier. 

            Transmettre l’invitation : voilà notre mission de serviteur ; nous laisser aimer, entrer dans le mouvement de l’amour Dieu, porter chaque jour le vêtement de noces : voilà notre mission d’invité. Il nous faut tenir les deux, ensemble, sans cesse. Si nous ne nous sentons pas aimés de Dieu, nous ne pourrons pas transmettre l’invitation ; si nous ne transmettons pas l’invitation, nous ne sommes plus dans le mouvement de l’amour de Dieu. Le salut, c’est ensemble, ou il n’est pas ; de même que l’amour, c’est pour tous, ou il n’est pas. Je ne peux garder ni l’invitation, ni l’amour de Dieu pour moi tout seul. Amen. 


samedi 3 octobre 2020

27ème dimanche ordinaire A - 04 octobre 2020

 Ne soyez inquiets de rien, même en temps de COVID.




Nous ne voulons plus être gouvernés par la peur. Ainsi s’intitulaient la tribune signée par plus de deux cents médecins et chercheurs en médecine publiée au cœur du mois de septembre, dénonçant la manière particulièrement anxiogène utilisée par ceux qui nous gouvernent pour communiquer au sujet de la crise sanitaire. Ils ne remettaient pas en cause la nécessité d’une vigilance et de gestes dits barrière pour nous protéger les uns les autres, mais bien une attitude profonde devenue insupportable. Le mensonge, la peur, la répression et la manipulation par les chiffres : voilà qui est insupportable, voilà qui porte gravement atteinte à la conception française de la démocratie ; voilà ce qui engendre la peur chez de nombreux concitoyens qui, bien que le déconfinement ait été prononcé en mois de mai, continuent de s’auto-confiner physiquement et psychologiquement. Non contents de détruire une économie, ils détruisent l’humain en nous, faisant de l’autre, du frère, celui qui est un danger, celui qui peut potentiellement vouloir ma mort et me la donner. 

En écho à cet appel, j’entends aujourd’hui l’appel de Paul aux Philippiens : Ne soyez inquiets de rien. Non pas qu’il nous pousse à l’insouciance, mais il remet nous remet dans la bonne direction. Au cœur des difficultés d’une vie, au cœur des dangers, le croyant doit se souvenir qu’il est né d’un projet d’amour, qu’il vient de Dieu, qu’il est dans la main de Dieu. Cela n’empêche pas de respecter les autres, de veiller sur eux, de se protéger et les protéger si nécessaire – comme nous devons le faire en ces temps incertains – bien au contraire. Paul le souligne d’ailleurs dans ce passage entendu : tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d’être aimé et honoré, tout ce qui s’appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela, prenez-le en compte. Il ne s’agit pas de vivre isolé, comme sur une île déserte ; il s’agit de faire le bien en toute chose et de rester tournés vers Dieu, source de notre vie et de notre salut : en toutes circonstances, priez et suppliez, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu vos demandes. Paul rejoint ainsi le Christ lui-même qui appelait ses Apôtres à ne pas avoir peur. 

La peur doit être notre ennemi n°1. Elle est incompatible avec la confiance que nous devons avoir en nous, en l’homme, en Dieu. La peur empêche de vivre ; elle empêche d’être libre ; elle empêche des relations saines ; elle empêche de s’ouvrir à l’avenir. La peur nous enferme, alors que notre foi au Christ nous rend libres. Pour combattre la peur, le croyant s’appuiera sur sa foi d’abord ; il approfondira le mystère de l’amour de Dieu qui aime tout homme et qui a pour lui un projet de salut. Ensuite il cultivera son intelligence et éclairera sa conscience : il trouvera ainsi le chemin pour sortir de la peur qui paralyse. Ne renonçons pas à réfléchir librement. On nous manipule avec des chiffres ? Cherchons à les comprendre et à les mettre en perspective. L’OMS s’affole du million de morts du coronavirus ; certes, c’est beaucoup : pourtant cela ne fait que 0,015 % de la population mondiale. A côté de cela, un enfant meurt toutes les cinq seconde dans le monde, selon l’UNICEF : je n’ai entendu personne s’en émouvoir, ni supprimer la faim, ni empêcher certains de se goinfrer ! Certes, ces enfants ne meurent pas dans les pays riches ; ils sont invisibles bien que bien plus nombreux que 0, 015 % de la population mondiale. 

Nous ne sommes pas faits pour la peur ; nous ne sommes pas faits pour nous inquiéter toujours et de tout. La peur est mauvaise conseillère, dit la sagesse populaire avec raison. Elle fait prendre des décisions contestables, elle fait poser des actes regrettables. Il nous faut, de manière urgente, retrouver la confiance en l’homme pour vivre à nouveau sereinement. Il nous faut retrouver la confiance en Dieu pour croire à nouveau qu’il nous appelle à une vie plus grande et plus belle. Nous sommes la vigne que Dieu a plantée, dont il prend soin et dont il attend de bons fruits. La peur fera pourrir nos fruits ; la peur fait déjà pourrir nos vies. Reprenons la prière du psalmiste pour retrouver confiance et espérance : Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ; que ton visage s’éclaire et nous serons sauvés. Amen.