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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







dimanche 27 août 2017

21ème dimanche ordinaire A - 27 août 2017

Qu'as-tu compris de Jésus ?





Chaque année, nous avons droit à ce passage de l’Evangile où Jésus interroge ses disciples sur sa propre personne : Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? Un sondage d’opinion en quelque sorte, à moins que ce ne soit une manière d’évaluer les Apôtres : comprennent-ils bien tout ce que je dis, tout ce que je fais ? Si Matthieu, Marc et Luc ont en commun ce passage de la vie de Jésus, Matthieu est le seul, par contre, à introduire la figure du Fils de l’homme. Vous pouvez vérifier chez Marc et Luc, la question posée aux disciples au sujet des dires de la foule n’est pas : Au dire des gens qui est le Fils de l’homme ?  mais bien : Qui suis-je au dire des gens ? (Mc 8,27). Beaucoup de spécialistes s’accordent à dire que c’est la même chose, dit autrement. Mais, dans une lecture spirituelle, partons du principe que ce n’est pas, pour Jésus, à ce moment-là, une manière de parler de lui. 
 
Qui est ce Fils d’homme ? Dans la tradition du Premier Testament, l’expression fils d’homme apparaît très souvent comme un synonyme d’homme. Elle désigne un membre de l’espèce humaine, avec tout ce que cela suppose de fragilité, de petitesse, de condition pécheresse. L’expression fils d’homme permet de souligner la grandeur de Dieu et sa bonté envers l’homme, puisqu’on peut s’étonner qu’un être aussi faible ait été placé au sommet de toute la création. Souvenons-nous du psaume 8, 5 : qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? C’est le livre de Daniel qui va donner à l’expression un sens nouveau en présentant le Fils d’homme comme celui à qui sera remis la royauté sur tous les peuples. L’expression souligne alors plutôt son rapport avec le monde de Dieu et accentue sa transcendance. 
 
Dans l’option que j’ai retenu au départ, Jésus interrogerait donc ses disciples sur cette figure apocalyptique. Qui est le Fils d’homme (ou Fils de l’homme) pour les gens ? Les diverses réponses apportées par les disciples me confortent dans a lecture : Jean-Baptiste, Elie, Jérémie ou un des prophètes ! Mais ce n’est pas Jésus, au dire des gens ! La foule n’identifie pas encore Jésus avec ce Fils de l’homme ! D’où la question plus précise posée aux seuls disciples : Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? Autrement dit, est-ce que pour vous au moins c’est clair que je suis le Fils de l’homme ? La réponse de Pierre n’en prend que plus de relief : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! Non seulement Pierre reconnaît que Jésus vient de Dieu, mais il le proclame comme son Fils, reprenant ainsi ce que Dieu lui-même dira de Jésus au moment de la transfiguration, qui a ce moment-là n’avait pas encore eut lieu dans l’évangile de Matthieu. Nous comprenons donc pour quoi Jésus affirme à Pierre : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. Comprendre en profondeur qui est Jésus n’est pas le résultat d’une enquête minutieuse, ni un montage intellectuel : c’est une grâce reçue de Dieu lui-même. C’est une révélation ! 
 
Ceci devrait nous rassurer nous, les plus anciens, qui nous lamentons souvent sur la jeunesse qui ne reconnaît plus ce que nous lui avons enseigné au sujet de Jésus. Nous aurons beau parler de Jésus, nous aurons beau construire des catéchèses extraordinaires, si nos auditeurs ne sont pas ouverts à la rencontre avec Dieu, ils ne pourront pas reconnaître en Jésus celui que Dieu envoie pour sauver le monde. Même Pierre qui suit Jésus et vit avec lui tous les jours n’aurait pu reconnaître en Jésus le Christ, le Fils du Dieu vivant, si Dieu ne le lui avait pas révélé. Cela rendra humble les catéchistes, les prêtres et tous ceux qui essaient avec patience de présenter le Christ. Cela nous rappelle aussi que doit être premier la mise en lien avec Dieu. Nous devons permettre à ceux à qui nous nous adressons de faire l’expérience de Dieu. Cela passe par l’approfondissement de notre vie intérieure et de notre vie de prière. Avant de nous entendre parler de Dieu et de Jésus, il faudrait que les hommes et les femmes de notre temps nous voient prier Dieu et agir en son nom. Il faut que nos contemporains nous voient vivre de Dieu et qu’ils constatent que cela nous rend profondément heureux. N’est-ce pas, la messe du dimanche, ce n’est pas une obligation de plus, mais le rendez-vous joyeux ave celui qui nous appelle à la vie ! Venir en aide à celui qui a besoin de nous, ce n’est pas une manière de nous débarrasser de lui, ni une contrainte morale voire humanitaire, mais bien l’expression de notre attachement à Dieu qui vient croiser la route des hommes pour les soulager de leur misère. 
 
Aujourd’hui nous est renvoyée la question de savoir ce que nous avons appris de Jésus, ce que nous avons compris de Jésus et de sa mission, et surtout la question de comment nous témoignons de lui, comment nous vivons de lui. Est-il bien pour nous, chrétiens, le Christ, le Fils du Dieu vivant, celui qui vient pour notre vie et notre joie ? Les hommes et les femmes attendent des témoins authentiques pour qu’ils puissent croire à leur tour. Les hommes et les femmes attendent des croyants qu’ils vivent de ce Dieu pour qu’à leur tour ils découvrent la joie de croire et de vivre par Jésus. Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? De notre réponse dépend l’avenir de nos contemporains et l’avenir de l’Eglise qui est en France. Amen.





samedi 19 août 2017

20ème dimanche ordinaire A - 20 août 2017

Une miette de grâce suffit pour être sauvé.






Mais quelle mouche a bien pu le piquer, Jésus, pour qu’il agisse et réponde ainsi à cette femme ? Est-ce parce qu’elle est femme ? Ce n’est pourtant pas la première femme qu’il rencontre, ni la première femme qui s’adresse à lui pour obtenir une guérison ! Est-ce parce qu’elle est étrangère ? Ce n’est pas davantage la première étrangère qui s’adresse à lui pour obtenir une faveur ! Pourquoi faire la sourde oreille ? 
 
Les disciples de Jésus ne font guère mieux. Face à cette femme qui implore Jésus en reconnaissant sa seigneurie et sa filiation davidique (donc sa qualité de Messie, d’envoyé de Dieu), ils ne demandent pas à Jésus d’intervenir pour des motifs humanitaires, ni pour montrer sa grandeur et sa force, mais bien parce qu’elle les poursuit de ses cris ! Trop, c’est trop : fais quelque chose, mais qu’on ne l’entende plus ; qu’elle se taise ! 
 
Reconnaissons-le : nous avons du mal à comprendre cette histoire, et le fait qu’elle se finira bien n’y change rien. Fallait-il que Jésus rappelle à ce moment-là que le salut était d’abord pour Israël, et que c’est pour son peuple seulement qu’il est venu ? Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. Jésus ne s’intéresse-t-il donc plus qu’aux gens bien nés, issus des douze tribus d’Israël ? Devant l’insistance de la femme prosternée devant lui (Seigneur, viens à mon secours), la réponse de Jésus n’est-elle qu’un jeu pour éprouver ses Apôtres (que vont-ils faire, que vont-ils dire si j’agis ainsi ?) ? Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. Tout cela n’est-il qu’une manière d’éprouver cette femme (Jusqu’où ira-t-elle ?) ? Pour les disciples, nous ne savons pas grand-chose, à part qu’ils sont sensibles des oreilles et qu’ils veulent que cela s’arrête. La femme, par contre, ne se laisse pas démonter. Elle reconnaît la primauté d’Israël : Oui, Seigneur ! c’est-à-dire : c’est vrai, Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. Autrement dit, il y en aura bien assez pour tout le monde, sans rien prendre aux premiers. C’est comme si elle rappelait une évidence : le salut de Dieu déborde toujours ; la grâce de Dieu est sans frontière, sans limite. Il y en aura forcément un peu pour les autres, pour ceux qui ne sont pas assis à la bonne table. Une miette de grâce suffirait pour que ma fille soit guérie ! Sinon pourquoi Jésus se promènerait-il en pleine zone étrangère, dans la région de Tyr et de Sidon, bien loin finalement de chez lui ? S’il vient en terre païenne, n’est-ce pas qu’il a un message pour eux aussi ? 
 
La foi de cette femme étant éprouvée, la guérison demandée a lieu : Femme, grande est ta foi ; que tout se passe pour toi comme tu le veux ! Nous retrouvons là le Jésus que nous aimons bien, celui qui manifeste le salut de Dieu à tout homme, qu’importe ses origines, qu’importe sa foi première. Si quelqu’un vient vers Jésus, sachant qu’il peut quelque chose pour lui, il recevra de lui ce qu’il lui faut. Jésus rappelle aux siens qu’il ne remet pas en cause la primauté d’Israël dans l’œuvre de salut de Dieu. Paul le redira à sa manière dans la lettre aux Romains : les dons gratuits de Dieu et son appel sont sans repentance : Dieu ne regrette pas d’avoir choisi Israël, il ne revient pas sur les promesses de salut faites à son peuple. Mais ce salut a été étendu. L’appel d’Israël était bien d’être lumière pour les nations. Voici que ces nations sont prises à leur tour dans ce mouvement de miséricorde que Dieu accorde à son peuple. Au bout du compte, ce que Dieu veut, c’est faire miséricorde à tous ceux qui crient vers lui. Une miette de grâce suffit pour que tous les hommes soient sauvés. 
 
Ces miettes de grâce nous en usons liturgiquement dans la prière des fidèles, la prière universelle. En effet, si nous commençons toujours par prier pour l’Eglise et si nous terminons toujours par prier pour notre communauté, nous ouvrons toujours cette prière à tous les hommes. Nous y faisons une place pour ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, pour ceux qui sont comme nous et ceux qui nous diffèrent. Et il est bon qu’il en soit ainsi. Nous ne pouvons pas nous replier sur nous-mêmes ; nous ne pouvons pas faire comme si le salut n’était que pour nous qui sommes nés au bon endroit, partageons « la bonne foi » et que sais-je encore. Nous les portons devant Dieu parce que nous savons que les miettes de sa grâce et de sa miséricorde peuvent sauver le monde ; nous les portons devant Dieu comme nous-mêmes avons été portés devant Dieu pour qu’une miette de sa grâce change notre vie. 
 
Avec cette Cananéenne, crions vers Dieu notre détresse. Avec cette Cananéenne, réjouissons-nous que des miettes de grâce soient tombés de la table du peuple choisi. Pour toutes les Cananéennes d’aujourd’hui, laissons généreusement tomber de notre table des miettes de la grâce de Dieu : ne soyons ni des gardiens jaloux de cette grâce, ni des obstacles à cette grâce de salut que Dieu veut accorder à tous ses enfants. Une miette de la grâce de Dieu : c’est si peu, c’est beaucoup, c’est tout. Amen.

(Détail d'un dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, éd. Les Presses d'Ile de France)

mardi 15 août 2017

Assomption de la Vierge Marie - 15 août 2017

Heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent !







La fête de l’Assomption bénéficie d’une messe de la veille au soir. C’est à cette liturgie que je puise le verset que je voudrais méditer avec vous. Vous le trouverez dans l’évangile de Luc au chapitre 11 : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! Cette béatitude nous vient de Jésus après qu’une femme se soit exclamée : Heureuse la mère qui t’a porté en elle, et dont les seins t’ont nourri ! En cette fête de l’Assomption de la Vierge Marie, fête mariale par excellence, un tel choix de lecture peut surprendre. Et pourtant ! 
 
Qui célébrons au juste aujourd’hui ? Marie qui monte au ciel ou Dieu qui manifeste sa justice en faisant entrer, corps et âme, Marie au paradis, là où son Fils l’a précédée ? Est-ce Marie, qui par la force de ses poignets qui se hisse jusqu’au paradis ? Ou est-ce Dieu qui reconnaît et proclame ainsi les mérites de sa servante, celle-là même qu’il a choisie pour donner corps à son Fils Jésus, envoyé dans le monde pour sauver les hommes ? A travers Marie, n’en déplaise à certains, c’est bien Dieu que nous célébrons et honorons aujourd’hui. A travers Marie, c’est bien la gloire de Dieu promise à tous ses fidèles qui est célébrée. L’auteur principal et premier du mystère de l’Assomption, c’est Dieu qui, en sa bonté, récompense celle qui a écouté la parole de Dieu et qui l’a gardé toute sa vie, méditant sans cesse ce qu’elle ne comprenait pas toujours. Elle est récompensée aujourd’hui parce qu’elle est cette femme de la béatitude prononcée par Jésus. Elle est la femme de toutes les béatitudes données par Jésus. La vie de Marie se confond avec la parole qu’elle a entendue et gardée. Pour vous en convaincre, relisez son cantique d’action de grâce entendue dans l’évangile de la messe du jour. Chaque verset est une référence à autant de passages de l’Ancien Testament, parole de Dieu donnée à nos Pères dans la foi et qui annonçait l’ultime parole de Dieu, le Christ, le Messie de Dieu, le Fils de Marie. Faut-il s’étonner de la récompense obtenue par Marie à la fin de sa vie ? Elle entre dans la gloire du ciel là où est son Fils, la Parole éternelle de Dieu. Elle l’a gardée de son vivant, en chair et en os comme Mère de Jésus. Elle l’a gardée, en disciple fidèle, dans les paroles prononcées par lui et les gestes posés par lui, autant de paroles de Dieu dispersées au vent de l’Histoire. Partout où il y aura un témoin de Jésus Christ, sa parole retentira. Partout où il y aura un disciple de Jésus Christ, sa parole pourra être entendue et gardée. 
 
A y regarder de près, nous constatons que la béatitude de Jésus reprend celle d’Elisabeth, sa tante, lorsque Marie va la visiter alors qu’elles sont enceintes toutes deux : Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. Il n’y a pas que Dieu qui reconnaît les mérites de Marie. Une simple femme, enceinte dans sa vieillesse, reconnaît en Marie une femme toute donnée, toute consacrée à la Parole dite de la part du Seigneur. C’est donc bien une attitude fondamentale de Marie. Ce n’est pas une simple posture spirituelle ou intellectuelle, c’est la respiration même de Marie que d’écouter la parole de Dieu et d’en vivre. Avant même que Jésus ne parle et n’agisse, Marie suit cette parole, Marie respecte cette parole, Marie vit de cette parole. Une parole est prononcée par Dieu et Marie y engage toute sa vie, ne sachant pas tout ce que cette vie lui réservera. Oui, ce que Dieu récompense dans le mystère de l’Assomption, Elisabeth l’avait reconnu en accueillant une jeune fille promise en mariage. Comment ne pas être encouragé nous-mêmes à suivre son exemple ? Il ne s’agit pas tant d’imiter Marie : je ne crois pas à une spiritualité du perroquet qui nous ferait répéter simplement ce qu’on nous dit. Je crois à une spiritualité du disciple qui nous fait prendre au sérieux la parole de Dieu dans notre propre vie, qui nous fait croire que cette parole peut changer notre vie. Oui, il nous faut croire que cette parole apportera un changement profond et vrai à notre existence, pour notre plus grande joie. Personne n’a jamais été triste d’écouter la parole ! Personne n’a jamais été triste de garder cette parole ! Elle porte en elle la vie véritable. Elle porte en elle la vie éternelle à laquelle nous sommes destinés. L’Assomption de Marie annonce notre avenir de la même manière que l’annonçait déjà la fête de la Transfiguration. Nous sommes faits pour vivre, faits pour vivre avec Dieu, faits pour vivre de Dieu, faits pour vivre en Dieu. 

Rendons grâce à Dieu, par Marie élevée aujourd’hui dans la gloire, pour cet avenir que Dieu nous promet et qu’il réalise pour nous en Jésus. Rendons grâce à Dieu pour sa parole qui nous éclaire et nous fait vivre. Rendons grâce à Dieu qui nous a donné en Marie un exemple de vie à l’écoute de la parole de Dieu. Qu’à sa suite, nous chantions la louange de Dieu. Qu’à sa suite, nous devenions disciples d’une parole à vivre aujourd’hui et chaque jour jusqu’à la fin des temps. Amen.

(Dessin de Mr. Leiterer)

samedi 5 août 2017

Transfiguration du Seigneur A - 06 août 2017

La transfiguration, révélation de notre nature véritable.





Est-ce l’air pur de la haute montagne qui trouble la vision des Apôtres ? Ont-ils consommé quelque champignon hallucinogène en accompagnant Jésus ? Ou la transfiguration, cette révélation prématurée de la gloire de Jésus, est-elle pour eux une réalité ? Si l’Eglise a fait de cet événement une fête, c’est qu’il doit bien avoir existé ! Pierre ne s’en fait-il pas l’écho dans la seconde lecture entendue lorsqu’il affirme que ce n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur ? Partant de là, que signifie cette fête ? Quel impact a-t-elle dans notre vie ? 
 
La transfiguration est d’abord un événement qui concerne Jésus. C’est sa gloire qui est révélée, c’est une parole le concernant qui se fait entendre. Tout tourne autour de sa personne et de la compréhension que nous pouvons avoir de sa mission. La présence de Moïse et d’Elie le situe bien dans la lignée des envoyés de Dieu ; elle le situe même à une place particulière : celui qui accomplit parfaitement la Loi (représentée par Moïse) et les Prophètes (représentés par Elie). Nous ne saurions dire mieux le lien qui unit Jésus à Dieu ; nous ne saurions dire mieux la mission qui est celle de Jésus : récapituler toute l’Histoire de l’humanité, récapituler toute l’Alliance pour la mener à son achèvement. La parole qui vient de la nuée (signe de la présence de Dieu lui-même dans l’Ancien Testament) vient renforcer encore la révélation de la gloire de Jésus : il n’est pas qu’un prophète parmi les autres, il n’est pas qu’un nouveau Moïse, il est le Fils bien-aimé de Dieu, celui en qui Dieu lui-même trouve sa joie. Pour Pierre, Jacques et Jean, le doute n’est plus permis ; ils savent désormais avec certitude qui est Jésus. Nous comprenons aussi alors pourquoi Jésus leur impose le silence : ce privilège qui est le leur ne saurait être interprété justement par les autres s’il était révélé avant le mystère de la croix. Jésus ne peut être révélé aux hommes comme Fils de Dieu avant sa mort en croix. Sa mort sera sa parole la plus puissante et la plus vraie sur sa réalité divine. Ces trois Apôtres ont bénéficié d’une grâce particulière pour qu’ils s’en souviennent quand viendront les événements douloureux et déconcertants de la Passion. Ils auront à affermir leurs frères dans la foi lorsque tout semblera perdu. 
 
Si la transfiguration est un événement qui concerne Jésus, il n’en est pas moins vrai que cette révélation nous concerne tous. Si elle est une annonce prématurée de la gloire de Jésus, elle est aussi une annonce prématurée de la gloire qui est la nôtre ! La transfiguration est notre vocation, ce à quoi nous sommes destinés par le baptême. N’oublions jamais que le baptême fait de nous des fils et des filles de Dieu, appelés à vivre de la sainteté de Dieu. La gloire de Jésus est notre gloire. Comme l’affirme saint Basile, l’homme est une créature qui a reçu l’ordre de devenir Dieu ! Nous ne pouvons pas vivre comme si le baptême n’avait pas profondément marqué notre nature humaine. Nous ne pouvons pas vivre dans l’ignorance de la gloire qui est la nôtre. Notre vie a un but : la gloire du ciel. Notre vie de baptisés nous révèle ce que nous sommes profondément par appel de Dieu : fils du Très-Haut, frères de Jésus Christ, appelés à vivre de sa vie, appelés à partager sa gloire. Ce n’est pas rien ; il fallait bien une fête pour nous le rappeler. La parole de Jésus adressées à ses Apôtres : Relevez-vous et soyez sans crainte, nous pouvons alors la comprendre dans un sens pascal. Relevez-vous, c’est-à-dire ressuscités à cette vie nouvelle, à cette vie de gloire : n’ayez pas peur de ce que vous êtes, n’ayez pas peur de l’appel de Dieu à partager sa gloire. Relevez-vous, n’ayez pas peur de vous laisser libérer de la mort et du péché. Il y a une vie au-delà de la mort ! Il y a une vie au-delà du péché ! Laissez-moi vivre en vous ! 
 
Avez-vous compris l’impact de cette fête sur notre vie ? Elle nous invite à nous élever à la hauteur de Dieu ; elle nous invite à vivre selon notre vocation baptismale. Nous ne sommes pas faits pour la fange du péché ; nous ne sommes pas faits pour la mort et les ténèbres de l’oubli. Nous sommes faits pour la gloire de Dieu. Nous sommes faits pour une vie marquée du sceau de l’éternité. Si nous l’avions oublié, la fête de ce jour vient heureusement nous le rappeler. Demandons à Dieu la grâce de vivre selon son appel ; demandons la grâce de devenir toujours plus ce que nous sommes déjà : le corps du Christ, vainqueur du péché et de la mort. Amen.

(Tableau de Fra Angelico, La Transfiguration)