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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 25 juillet 2014

17ème dimanche ordinaire A - 27 juillet 2014

Qu'est-ce qui est vraiment important pour toi ?




Donne à ton serviteur un cœur attentif pour qu’il sache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal. Combien d’entre nous aurait formulé cette demande en réponse à cette question : Demande-moi ce que tu veux et je te le donnerai ? La réponse appartient à chacun de nous, tant il est vrai que chacun définit comme important pour lui des choses diverses et variées. Mais reconnaissons-le : de la part d’un enfant (car Salomon n’est alors qu’un enfant), la réponse donnée surprend. Elle nous place cependant au cœur de toutes les lectures entendues en ce jour. Qu’est-ce qui est vraiment important pour toi ? 
 
L’auteur du livre des rois donne des réponses humaines à cette question : une longue vie, beaucoup d’argent, la mort ou tout au moins l’éloignement de l’ennemi (c’est-à-dire de celui qui ne correspond pas à ce que je veux, qui ne me convient pas, qui ne pense pas comme moi). Nous pourrions rallonger la liste à l’envie. Il est vrai que les besoins humains sont nombreux. A celui qui crève de faim, lui reprochera-t-on d’oser demander une assiette pleine chaque jour ? A celui qui est sans travail et qui a charge de famille, lui fera-t-on grief d’avoir osé demander de quoi assurer une vie digne aux siens ? A celui qui est véritablement opprimé, dont les droits fondamentaux sont bafoués, lui interdira-t-on de demander une vie plus juste, voire la mort de l’oppresseur ? Chaque homme sensé reconnaîtra en ces demandes des besoins légitimes et moraux, et nous aurions tort de les classer trop vite dans la catégorie : ne correspond pas à ce que nous avons en stock, ou évangéliquement inacceptable. L’Evangile ne demande pas aux gens de se contenter de ce qu’ils ont, de la situation dans laquelle ils sont et d’en remercier Dieu en attendant un jour meilleur ; l’Evangile veut nous inviter à aller plus loin, à regarder plus loin. Ce plus loin, cet ailleurs, n’est pas un idéal mais un présent vécu différemment. C’est la réalisation, dès maintenant, du Royaume de Dieu, ce Royaume où il n’y aura plus de gens tristes, malades ou malheureux. Ce Royaume peut devenir réalité dès aujourd’hui si nous savons discerner, être attentif au vrai projet de Dieu pour tous les hommes. 
 
Le projet de Dieu pour chaque homme, Paul nous le rappelle en ces simples mots : faire de nous ses fils. Chaque homme, chaque femme est appelé à devenir un autre Christ, quelqu’un d’entièrement tendu vers la réalisation de ce Royaume, quelqu’un dont la volonté et l’action ne font plus qu’un avec la volonté d’amour de Dieu. Appelés à nous décentrer de nous–mêmes, nous devenons capable de penser aussi aux autres, à ceux qui n’ont pas la même chance que nous ; et nous pouvons nous engager à améliorer l’ordinaire de toute l’humanité. Salomon avait tout pour lui ; il aurait pu demander plus pour lui ; mais sa prière l’a orienté vers ce peuple qui lui est confié à la mort de son père David et dont il a désormais la charge. C’est à ce peuple qu’il veut penser, c’est au bonheur de ces gens qu’il veut travailler. C’est une question de choix ; c’est une question de vie ! A quoi cela sert-il d’être riche, en bonne santé et sans ennemi si je suis seul et malheureux ? 
 
Pour Matthieu, le bonheur véritable n’existe que dans la découverte du Royaume de Dieu. Ce Royaume ne s’achète pas, même si l’évangéliste nous montre des hommes qui laissent tout ce qu’ils ont pour l’acquérir. Ce qui compte dans ces paraboles, ce ne sont pas les efforts faits pour obtenir le trésor recherché, mais la joie que procure la découverte de ce trésor. Devant cette joie immense, rien n’a plus de valeur, rien ne vaut d’être conservé. Tout doit être fait pour profiter longtemps de cette joie. Le Royaume se présente à chacun de nous sous une forme différente. Il est tellement divers qu’une seule réalité ne suffit pas à l’expliquer. A chacun de le découvrir, de le discerner au cœur de sa vie ; à chacun de savoir si la joie qu’il procure est supérieur à ce que nous possédons déjà. 
 
Qu’est-ce qui compte le plus pour toi ? Que veux-tu que je fasse pour toi ? Des questions qui nous renvoient d’abord à notre vie, à notre manière de la concevoir. Pour le chrétien, la vie, c’est le Christ et sa Parole d’amour et de liberté, et ce sont les frères que le Christ lui donne. Savons-nous toujours, comme Salomon, comme Paul, leur donner la priorité au prix d’un dépassement de nous-mêmes ?  Osons demander à Dieu de faire de nous de véritables disciples, de ceux qui ont découvert la beauté du Royaume et veulent le partager aux autres. Avec le psalmiste, nous pourrons redire cette prière : Mon partage, Seigneur, je l’ai dit, c’est d’observer tes paroles. Mon bonheur, c’est la loi de ta bouche, plus qu’un monceau d’or ou d’argent. Amen.
 
 
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, In Mille dimanches et fêtes, Année A, éd. Les Presses d'Ile de France)

vendredi 18 juillet 2014

16ème dimanche ordinaire A - 20 juillet 2014

Les paraboles du Royaume des cieux : un semeur, une graine de moutarde, du levain.



Quand la liturgie propose une version longue et une version courte de l’évangile à proclamer, la sagesse recommande de prendre la version longue, car seule cette version donne la clé de l’histoire. C’était vrai dimanche dernier avec la parabole du semeur sorti pour ensemencer son champ ; c’est vrai encore ce dimanche avec la parabole du bon grain et de l’ivraie. Si nous avions fait choix de la lecture courte, nous n’aurions entendu ni la parabole de la graine de moutarde, ni celle du levain, ni surtout l’explication que Jésus donne de la première parabole.
La parabole du bon grain et de l’ivraie commence ainsi : le Royaume des cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Il n’y a rien qui vous choque dans cette phrase ? Elle m’a embrouillé l’esprit pendant un temps cette semaine. Comment ce que nous imaginions être un lieu (Le royaume des cieux) pouvait-il être comparé à un homme qui sème ? Et qui est cet homme ? Jésus lui-même donne la réponse plus loin : Celui qui sème, c’est le Fils de l’homme. Autrement dit, le Royaume des cieux, c’est Jésus ! Le Royaume n’est pas un endroit à découvrir ou à atteindre par une perfection de vie, mais un homme à connaître, un homme à écouter, un homme à suivre ! J’aurais dû le comprendre instinctivement, puisque Jean le Baptiste, annonçant la venue prochaine du Messie, prophétisait : Le Royaume des cieux est tout proche, convertissez-vous ! Ces trois paraboles nous parlent donc de Jésus et de nous, puisque, toujours selon l’explication de Jésus, le champ, c’est le monde. Qu’apprenons-nous alors et de Jésus et de nous ?
Nous apprenons au sujet de Jésus, dans la première parabole, qu’il vient semer dans le monde un grain bon, dont il attend de beaux fruits. Et il sème en plein jour, sans se cacher, contrairement à l’ennemi qui vient de nuit. Il sème les fils du Royaume, ce qui fait de nous des hommes « capax Dei », capables de Dieu. C’est lui qui fait tout : nous n’avons qu’à pousser, qu’à grandir. C’est Jésus qui nous sème, c’est lui qui nous récoltera, c’est lui qui en attendant prend patience lorsqu’il constate que l’ennemi a semé les fils du Mauvais. Ceci nous invite à la réalité : nous ne pouvons rien faire pour Dieu ; c’est lui qui fait tout pour nous. Cela nous invite aussi à cette autre réalité : nous avons peut-être en nous une part de fils du Royaume et une part de fils du Mauvais. Il n’y a pas nécessairement des bons et des mauvais, des gentils et des méchants, mais au gré de notre croissance, nous sommes peut-être plus fils du Royaume ou fils du Mauvais selon les circonstances. Ceci expliquerait bien la patience de Dieu qui toujours croit en l’homme, qui toujours espère en l’homme et en sa capacité à choisir le bien, à choisir Dieu.
Nous apprenons encore au sujet de Jésus, dans la deuxième parabole, celle de la graine de moutarde, que le Royaume des cieux n’est pas dans la grandeur, mais dans la petitesse d’une graine de moutarde. C’est la plus petite de toutes les semences, mais, quand elle a poussé, elle dépasse toutes les autres plantes potagères et devient un arbre, si bien que les oiseaux du ciel font leurs nids dans ses branches. N’est-ce pas ce que Jésus réalise pour nous sur la croix. A ce moment précis, il n’est plus rien, il est broyé par la souffrance ; mais c’est là qu’il devient grand, dans son obéissance jusqu’au bout, jusqu’au don de sa vie. Et la croix sur laquelle il s’offre est bien l’arbre de vie à l’ombre duquel nous nous réfugions. Cette parabole nous invite à l’humilité. Si nous sommes fils du Royaume, nous ne pouvons vivre à notre tour que comme le Fils de l’Homme, donné à tous. Puisons notre force dans l’exemple du Christ et l’Esprit dans la puissance duquel il est ressuscité, nous sera donné aussi pour notre vie.
Nous apprenons encore au sujet de Jésus, dans la troisième parabole, celle du levain dans la pâte, que le Royaume des cieux n’est pas dans le spectaculaire, mais dans la discrétion. Un peu de levure, ce n’est rien, c’est invisible, mais cela fait beaucoup. N’est-ce pas ce à quoi Jésus nous invite après l’Ascension : il n’est plus là, visible au milieu de nous, mais il agit en nous, à travers nous, à travers l’Eglise qui sans cesse l’offre au monde, pour que les hommes se convertissent et vivent. Il est le levain de notre pâte humaine, nous invitant sans cesse à devenir plus humain, donc plus divin. Cette parabole nous invite alors à l’espérance : si nous pouvons nous laisser travailler par le levain tel une pâte, alors  les hommes et les femmes de notre temps, entendant la parole largement semée dans le monde, peuvent eux-aussi grandir, se convertir et faire le choix du Christ. Nous pouvons tous faire le choix de nous laisser davantage travailler par l’Esprit du Christ, par sa Parole, pour que lève en nous le désir toujours plus grand d’être Un en Christ.
Cela valait la peine de se prendre un peu la tête sur ces trois paraboles, car devant nous s’ouvre maintenant un chemin : et il nous faut décider de l’emprunter… ou pas ! Serons-nous des fils du Royaume ? Serons de ceux qui se réfugient à l’ombre de la croix ? Serons-nous, à la suite du Christ, levain dans la pâte pour que se lève une humanité nouvelle ? Si nous ne pouvons rien faire pour Dieu, nous pouvons quelque chose pour nous, nous pouvons faire quelque chose pour l’humain : faire le choix de Dieu pour que tout homme sente l’importance de cette présence au cœur de sa vie. Amen.
 
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année A, Les Presses d'Ile de France)

samedi 12 juillet 2014

15ème dimanche du Temps ordinaire A - 13 juillet 2014

Notre vie comme un enfantement à Dieu (Rm 8 18-23)




Il arrive quelquefois que des croyants se plaignent de ce que notre monde ne soit plus aussi ouvert à la question de Dieu qu’il a pu l’être par le passé. Nous remarquons tous que tous les habitants d’un village ne vont plus à la messe le dimanche comme un seul homme ; nous constatons tous que la pratique des sacrements n’est plus générale. Il y a beaucoup d’enfants qui ne sont pas baptisés ; d’autres, bien que baptisés ne poursuivent pas l’initiation chrétienne et ne font ni première communion, ni confirmation. Et cela se passe même quelquefois dans des familles dites « pratiquantes ». Le leurre de la liberté individuelle a pris le dessus. « Vous comprenez, monsieur le curé, il ne veut pas ; on ne peut quand même pas le forcer ! » Face à cette situation, on peut se désoler. Mais on peut aussi, avec Paul, lire l’histoire de l’humanité de manière globale, et non de manière cyclique. En clair, essayer de comprendre le dessein de Dieu qui est continu au long de notre histoire. 
 
Lorsque Paul écrit sa lettre aux Romains, il ne vit pas dans un monde chrétien, loin de là. Il y a même des persécutions à cause de la foi au Christ. Certains meurent pour oser dire que Jésus est le Seigneur, le seul Seigneur. Et pourtant, Paul est plein d’espérance. Il comprend que la création est comme prise dans un enfantement. Chaque femme qui a eu au moins un enfant sait que l’enfantement peut être long et douloureux. Faire naître à la vie demande quelque effort et un peu de temps. C’est cette image de l’enfantement que Paul utilise pour parler du passage de l’humanité à la vie de Dieu. La création toute entière crie sa souffrance, elle passe par les douleurs d’un enfantement qui dure encore. Cette souffrance, c’est d’être encore soumise au mal, au péché, en attendant la pleine délivrance de l’esclavage dans lequel elle est plongée. Il ne suffit pas de claquer des doigts pour se débarrasser du mal et de la souffrance ; il ne suffit pas d’un peu de bonne volonté pour faire reculer le mal. Il faut accueillir celui qui a définitivement vaincu la Mort et le Mal, celui qui, par son sacrifice, nous obtient la vie, par amour, par grâce. C’est le Christ qui réalise pour nous cette libération : c’est ce que nous célébrons à Pâques. 
 
Ceux qui sont devenus croyants, Paul affirme qu’ils ont déjà leur part à cette victoire. Ils sont déjà sauvés. Il suffit de relire les 8 premiers chapitres de la lettre aux Romains pour le comprendre. Je vous laisse cet exercice à faire dans la semaine qui vient. Vous découvrirez que, parce qu’ils sont encore de ce monde, les croyants au Christ attendent eux-aussi la délivrance de leur corps et leur adoption. La foi qui est nôtre (être sauvés par Jésus, devenir par le baptême fils et fille de Dieu) nous ouvre à l’espérance d’être cela un jour pleinement. Nous le savons bien : bien que baptisés, il nous arrive encore de faire le Mal et d’être soumis à lui. Mais nous ne désespérons plus. Nous savons qu’en Jésus, mort et ressuscité, nous sommes déjà sauvés. Nous savons que si nous laissons le Christ vivre en nous, il pourra réaliser cette pleine libération. Il nous donne son Esprit Saint pour que nous puissions vivre selon notre baptême. Le croyant vit en permanence cette tension entre le fait d’être déjà sauvé par la grâce du sacrifice du Fils unique, et le fait de l’être totalement un jour, lorsque le Christ reviendra dans sa gloire. Bien que notre enfantement dure encore (parce que ça prend du temps de laisser Dieu être Dieu), nous savons que cela finira bien, que le salut en plénitude est au bout. C’est l’Esprit Saint reçu à notre baptême qui nous permet cette certitude, parce que dès maintenant, il nous permet de faire l’expérience de la vie avec Dieu, de la liberté que le Christ nous procure lorsque nous choisissons avec lui de refuser le Mal. Baptisés, nous savons que le Christ est vivant, présent en nous, qu’il veille sur nous et nous protège. 
 
Le projet permanent de Dieu, c’est bien le salut de toute l’humanité. La révélation de sa gloire, lui seul en connaît le moment. Sans doute marquera-t-elle le temps où tous, nous ne ferons plus qu’un en Christ, le moment où toute l’humanité sera parvenue à la pleine connaissance de Dieu. Si nous, baptisés, avons quelquefois encore du mal à connaître et reconnaître Dieu tel qu’il est, nous pouvons comprendre les douleurs de l’humanité en enfantement à la vie de Dieu. Ne nous lamentons donc pas mais poursuivons avec confiance la route tracée par le Christ. Amen.
 
(Image de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'Eglise, éd. Les Presses d'Ile de France)

samedi 5 juillet 2014

14ème dimanche du temps ordinaire A - 06 juillet 2014

Garder un coeur humble devant Dieu.



Ne nous y trompons pas : ce passage de l’évangile de Matthieu a beau être fait de bric et de broc, il n’en est pas moins essentiel pour notre progression dans la foi. Ce texte, sans grande construction littéraire, nous dit des choses essentielles sur Dieu et sur notre rapport à lui. 
 
La première des choses qu’il nous affirme, c’est la relation qui unit Jésus à Dieu. C’est une relation filiale : Dieu est Père, Jésus est son fils. Et ce lien entre les deux est absolument unique, absolument nouveau. Jésus n’est pas le Fils de Dieu par analogie (il serait comme le Fils de Dieu) ; non, il l’est réellement. Et la joie que connaît Jésus vient de là, de ce lien puissant qui l’unit à son Père. C’est aussi à cause de ce lien unique que Jésus est, et sera toujours, celui qui proclame la louange de Dieu. Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange. 
 
La deuxième chose qu’affirme cette collection de paroles de Jésus, c’est que nous pouvons tous faire l’expérience d’une filiation divine. Nous pouvons tous reconnaître que Dieu est notre Père. A condition de suivre et d’écouter Jésus. S’il est celui qui chante sans cesse la louange de Dieu, son Père, il est aussi celui qui nous le révèle. A travers ces paroles et ses actes, Jésus dit la paternité de Dieu à tous ; il nous montre comment Dieu est Père pour nous, comment il prend soin de tous ses enfants ; il nous rappelle que nous pouvons, en toutes circonstances, compter sur Dieu. 
 
Ceci étant posé, nous apprenons alors de Jésus une troisième chose importante : pour entrer dans cette connaissance de la paternité de Dieu, il nous faut être, non sage et savant, mais tout-petits. Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Cela ne signifie nullement que nous n’avons pas à entrer dans une intelligence de la foi, ni que nous pourrions nous passer d’approfondir notre connaissance des choses de Dieu. Cela nous indique juste comment nous devons aborder cette étude. Avec un cœur humble, disponible, attentif à Dieu, un cœur d’enfant qui a tout à apprendre, tout à découvrir et qui ne s’enferme pas dans son savoir, dans la suffisance d’une intelligence visant à écraser les autres. Lorsque le sage se met à l’écoute de Dieu, avec humilité, il est lui aussi un de ces tout-petits à qui Dieu se révèle. 
 
Est tout-petit devant Dieu, est humble devant Dieu, celui qui accueille la Parole de Dieu et se laisse enseigner par elle. Est tout-petit devant Dieu, celui qui ne croit pas tout savoir sur Dieu parce qu’il a fait quelques études ou parce qu’il aurait appris par cœur son catéchisme. Est tout-petit devant Dieu, celui qui se laisse surprendre par Dieu, qui accepte que Dieu se révèle sans cesse différent de ce qu’il croit savoir. Est tout-petit devant Dieu, celui qui accepte qu’un autre, Jésus en l’occurrence, parle mieux de Dieu qu’il ne le ferait lui-même. Est tout-petit devant Dieu, celui qui accepte d’entrer dans cette relation filiale, se découvrant ainsi fils de ce Père éternel, frère de Jésus Christ. Est tout-petit devant Dieu, cela qui comprend qu’il ne saura jamais tout sur Dieu et qu’il ne le connaîtra vraiment que lorsque Dieu l’appellera à vivre auprès de lui. 
 
Vous le savez sans doute, la réforme liturgique issue du Concile a réparti notre découverte de la Parole de Dieu sur un cycle de trois années liturgiques. Celui qui, ayant vécu tout un cycle, dirait : voilà, j’ai tout entendu, tout vu ; désormais je sais tout, serait semblable à ces sages et savants dont parle Jésus et à qui Dieu refuse la connaissance véritable. Le cycle liturgique n’est pas un cercle que nous aurions à revivre chaque année. Il est plutôt une spirale sans fin qui nous fait progresser, d’année en année, dans une connaissance meilleure de Dieu. Nous n’aurons donc jamais fini de découvrir Dieu et d’entrer dans la connaissance de son mystère. Même après vingt ans, Noël, Pâques et toutes nos fêtes et nos dimanches auront toujours une saveur différente, ne serait-ce que parce que nous avons grandi, nous avons vieilli, et que notre histoire personnelle vient enrichir notre connaissance de Dieu. Découvrir qui est Dieu pour moi est l’œuvre d’une vie, parce que je le découvre différent selon l’âge qui est le mien, et parce que d’année en année, je peux approfondir ce que je crois savoir déjà.
 
Demandons alors au Seigneur la grâce de garder un cœur humble devant lui, un cœur qui se laisse enseigner, un cœur à qui Jésus peut révéler qui est Dieu et ainsi le rapprocher du cœur de Dieu. Que la célébration de l’Eucharistie nous permette de rester tout-petits devant Dieu, en faisant nôtre l’attitude de Jésus lui-même. Nous pourrons alors redire en vérité ce que la liturgie de ce dimanche nous fait prier : comblés d’un si grand bien, nous te supplions, Seigneur ; fais que nous en retirions des fruits pour notre salut et que jamais nous ne cessions de chanter ta louange. Amen.

(Dessin de Jean-François KIEFFER, Mille images d'Evangile, éd. Les Presses d'Ile de France)