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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 24 février 2012

01er dimanche de Carême B - 26 février 2012

Jésus, vainqueur du Mal.




Quand mon serviteur m’appelle, dit le Seigneur, je lui réponds, je reste près de lui dans son épreuve. Je vais le libérer, le glorifier, de longs jours, je vais le rassasier. Ainsi s’exprime l’Eglise en ce premier dimanche de Carême lorsqu’elle s’adresse à Dieu pour ouvrir la célébration de l’Eucharistie. Cette antienne d’ouverture que nous n’entendons que trop peu, nous fait comprendre que nous ne risquons rien entre les mains de Dieu, parce qu’il veille sur nous.

Ce qui est vrai de nous, l’est aussi du Christ. Dieu, le Père, veille sur son Fils et à travers lui, sur nous. Il veille sur lui lorsqu’il est poussé au désert pour affronter la tentation. Ce qui me surprend, c’est la discrétion de Marc au sujet des tentations auxquelles le Christ se trouve soumis lors de son séjour au désert, après son baptême. Si l’on compare son récit à ceux de Matthieu et Luc, la différence est flagrante. Chez Marc, cela tient en cette simple phrase : dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan. Comme si l’essentiel n’était pas dans le détail des tentations, mais bien dans cette réalité commune à toute l’humanité : nous sommes tentés, quelquefois, de faire le mal. Le fait de ne pas préciser les tentations semble indiquer que Jésus est comme nous, comme cette humanité qu’il a endossée, assumée. Comme nous, il est tenté. Comme nous, Jésus est vrai homme.

Ce qui compte aussi, chez Marc, c’est que Jésus en sort, de ces tentations. Il en sort pour proclamer une Bonne Nouvelle : Le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. L’annonce du règne de Dieu découle, me semble-t-il, directement de sa victoire sur le Mal. Jésus s’est montré plus fort que le tentateur, parce qu’il est totalement du côté de Dieu. Il n’est pas seulement dans la main de Dieu ; il ne fait qu’un avec lui. Ce faisant, rien de mauvais ne saurait avoir de prise sur lui. Vainqueur du Mal au désert, il peut, légitimement, annoncer la venue du règne de Dieu, qu’il inaugure déjà en cette première victoire au désert et qu’il réalisera lors de la victoire finale, lorsque, mis en croix, il vaincra la mort même, ultime refuge du Mal. Jésus se révèlera alors, plus que jamais, vrai Dieu.

Tout cela est bel et bien, me direz-vous ; mais en quoi cela nous concerne-t-il ? La victoire du Christ sur le Mal marque un tournant dans l’histoire de l’humanité. Désormais, il est possible à l’humanité, pleinement assumée par le Christ, de vaincre ses démons, de vaincre le Mal en assumant la divinité que le Christ nous partage. Il n’y a plus de fatalité du Mal. Il y a, pour chacun de nous, la possibilité offerte, en Jésus, de résister et de vaincre. Si nous nous rangeons aux côtés du Christ Sauveur, nous avons part à sa victoire, parce que sa victoire n’est pas une victoire pour lui tout seul, mais une victoire offerte à notre humanité perdue. Le Christ livre le combat contre le Mal dans le but de nous délivrer du Malin, une fois pour toutes. Si nous croyons en lui, il nous ouvre à sa victoire et nous pourrons vaincre nous aussi.

La célébration du baptême marque bien cette participation à la mort et à la résurrection du Christ ; et le rite de l’exorcisme, après la proclamation de la Parole de Dieu, dit bien que nous avons part à sa victoire sur les forces de la Mort. Dieu éternel et tout-puissant, dit le prêtre, tu as envoyé ton Fils dans le monde pour nous libérer du pouvoir de Satan, l’esprit du mal, et pour que l’homme, arraché aux ténèbres, soit introduit dans ton Royaume de lumière ; nous te supplions pour celui qui va être baptisé : qu’il soit racheté du péché originel, qu’il resplendisse de ta présence, et que l’Esprit Saint habite en lui. Et voilà que s’opère, par le baptême, une identification du baptisé au Christ Sauveur. Désormais, nous ne faisons plus qu’un avec lui.

Paul le dit à sa manière dans la deuxième lecture entendue : être baptisé, ce n’est pas être purifié de souillures extérieures, mais s’engager envers Dieu avec une conscience droite, et participer ainsi à la résurrection de Jésus Christ qui est monté au ciel. Participer à la résurrection du Christ, c’est bien vaincre définitivement le Mal et la Mort, comme Lui, avec Lui et par Lui. La victoire du Christ sur le Tentateur nous concerne donc bien, puisqu’elle nous montre que celui qui est tourné vers Dieu est libéré par lui, rétabli dans une harmonie avec toute la création, des bêtes sauvages jusqu’aux anges. Le règne de Dieu commence bien lorsque cette harmonie entre tous les êtres créés par Dieu est retrouvée.

Au début de ce Carême, nous est redite la certitude que le Christ est bien vainqueur de tout ce qui pouvait nous séparer de Dieu. Il nous est redit aussi que nous avons notre part, déjà, à cette victoire. A nous de travailler désormais à l’avènement de son Règne, à l’annonce de cette Bonne Nouvelle, pour que tous les hommes se découvrent sauvés et libérés par le Christ, dès aujourd’hui et pour toujours. Amen.






(Dessin de Coolus, Blog du Lapin bleu)

samedi 18 février 2012

07ème dimanche ordinaire B - 19 février 2012

Juste une histoire d'amitié !









C’est l’histoire d’une amitié entre Dieu et les hommes. Depuis le premier jour de la Création, Dieu a voulu le bonheur de l’homme et a ouvert pour lui le chemin de la Vie. Mais l’homme n’est pas très fidèle dans ses amitiés et Dieu va apprendre la patience et le pardon. C’est ce que nous dit la première lecture. Par amour pour l’homme, Dieu est prêt à oublier le passé, à effacer la faute de l’homme. C’est la grandeur de Dieu que de vouloir recommencer sans cesse ce que l’homme détruit : mais moi, oui, moi je pardonne tes révoltes, à cause de moi-même, et je ne veux plus me souvenir de tes péchés. Dieu est à ce point aimant, qu’il ne peut se renier lui-même. Il s’oblige à pardonner à l’homme, et prouve ainsi sa grandeur, sa divinité.

C’est l’histoire d’une amitié entre Dieu et les hommes, qui prend une nouvelle tournure avec l’avènement de Jésus, le fils unique de Dieu. Comme nous le redit Saint Paul, il n’a jamais été que OUI à Dieu ; en lui, toutes les promesses de Dieu ont trouvé leur OUI. Puisque l’homme semblait sourd aux appels de Dieu, il a fallu ce sacrifice qui s’achèvera sur la croix pour que l’homme comprenne combien il est aimé de Dieu, combien l’irruption de Dieu dans la vie des hommes est bonne nouvelle pour tous les peuples. A notre tour, nous avons à dire OUI à Dieu, à n’être que OUI au projet d’amour de Dieu tant de fois retardé, trop de fois rejeté.

C’est l’histoire d’une amitié entre des hommes que Marc nous rapporte dans son Evangile. Et cette histoire d’amitié humaine va rejoindre cette primordiale amitié entre Dieu et les hommes. C’est d’abord l’histoire d’un homme paralysé, incapable de vivre sans l’attention et la tendresse d’autrui ; lorsque ses amis apprennent la présence de Jésus, ils n’ont qu’une idée en tête : lui amener leur ami pour qu’il fasse quelque chose pour lui. Après tout, n’a-t-il pas guéri dans ce même village la belle-mère de Pierre et de nombreux malades ? Ne vient-il pas, dans un autre village, de guérir un lépreux ? La nouvelle a fait le tour du pays. Certainement, cet homme peut quelque chose pour ce paralysé. Mais voilà, il y a tant de monde qui se presse, tant de besoin chez les hommes, qu’il leur est impossible d’approcher Jésus. Exclu par sa maladie, le paralysé semble exclu de la guérison par cette foule compacte. Est-ce la fin de cette histoire ? L’amitié résistera-t-elle ou se découragera-t-elle ?

C’est l’histoire d’une amitié qui ne s’en laisse pas compter. Ils ne peuvent passer par la porte ! Qu’importe ! Dans ce pays chaud, le toit des maisons est plat, les murs sont faits de simples branchages, recouverts de boue. Pas difficile à construire ; pas difficile à démolir. Le malade est hissé sur le toit, les amis ont vite fait de faire une brèche et voilà le brancard qui descend et termine sa course devant Jésus. Un Jésus qui comprend que derrière cette intrusion se cache une histoire de cœur, une histoire qui fait que l’homme, quand il le veut, ne se décourage pas devant les difficultés, que l’homme ne se résigne pas devant la souffrance d’autrui. Il y a certainement quelque chose à faire. Ils ont le mérite d’avoir essayé.

C’est l’histoire d’une amitié entre les hommes qui rejoint à ce moment précis cette grande histoire d’amitié que Dieu a commencée avec les hommes à l’aube de la Création. Puisque ces quatre hommes ont fait l’impossible pour leur ami, il faut que Jésus, à son tour, s’engage envers ce malade. Comment pourrait-il le renvoyer chez lui sans une parole, sans un geste. La première parole donnée peut surprendre : mon fils, tes péchés sont pardonnés. Pourtant, elle dit toute la tendresse de Dieu pour un membre souffrant de son Corps ; elle dit l’engagement de Dieu au côté de celui que nous ne voyons pas et que nous laissons de côté. Jésus ne dit pas : Je te pardonne !, mais bien tes péchés sont remis. Autrement dit, Dieu te pardonne. Une nouvelle vie va commencer pour toi ; tu entres à nouveau dans cette grande amitié de Dieu pour les hommes. Aujourd’hui, il te manifeste cette amitié d’une manière toute particulière, en te donnant un cœur nouveau. Tous n’ont pas compris cette parole de Jésus, et dans le secret de leur cœur, ils s’interrogent : pourquoi parle-t-il ainsi ? Mais Jésus a compris, lui qui voit le fond des cœurs. Et pour leur montrer qu’il a pouvoir sur toutes les forces du mal, pour leur montrer que le moment est venu où Dieu va jeter hors de ce monde le prince des ténèbres, Jésus donne une seconde parole au paralysé : lève-toi, prends ton brancard et rentre chez toi ! Ce que l’homme fait sans attendre. Les quatre amis savaient-ils que cela se terminerait ainsi ? J’en doute ! Quand on s’engage pour un ami, on ne sait jamais jusqu’où cela mènera. Ce qu’il faut, c’est faire confiance ; la leur trouve sa récompense dans cette guérison.

C’est bien l’histoire d’une amitié entre les hommes et Dieu que Jésus est venu nous rappeler. En rendant la pleine santé à ce paralysé, il nous dit sa puissance sur tout ce qui empêche l’homme de vivre libre et heureux. Il nous redit que Dieu n’attend qu’un mot, qu’un geste pour restaurer l’amitié pleine et entière entre lui et nous. Lui a déjà fait le premier pas : il n’attend qu’un OUI de notre part pour que nous connaissions enfin une joie sans mesure. Nous n’en sommes encore qu’au début de l’histoire que Saint Marc nous raconte, mais déjà il nous faut nous prononcer sur ce Jésus : est-il pour nous celui qui nous ouvre à nouveau le chemin de l’amitié avec Dieu ou est-il celui qui nous en détourne comme le pensent certains opposants ? C’est l’histoire d’une amitié entre Dieu et les hommes. Cette histoire sera-t-elle notre histoire ?


(Dessin de Tomy Ungerer)

samedi 11 février 2012

06ème dimanche ordinaire B - 12 février 2012

Mon modèle, c'est le Christ !









Prenez-moi pour modèle : mon modèle à moi, c’est le Christ !
Sans doute, certains pensent-ils que cette affirmation a un je-ne-sais-quoi de prétentieux. Pourtant, elle fonde notre art de vivre, et Paul a raison d’inviter ses lecteurs, donc nous, à l’imiter, puisque lui-même imite le Christ. Qu’est-ce donc qu’être disciple, si ce n’est vivre selon l’enseignement d’un maître reconnu ? Qu’est-ce donc qu’être disciple du Christ, si ce n’est vivre comme le Christ ? Qu’est-ce donc être disciple du Christ, si ce n’est s’appuyer sur ceux et celles qui, à travers le temps et l’Histoire, ont cherché à vivre comme lui, répandant autour d’eux la bonne odeur du Christ ressuscité ?

Prenez-moi pour modèle : mon modèle à moi, c’est le Christ !
Il suffit de relire la vie et les œuvres de Paul pour constater que ce n’est plus lui qui vit, mais le Christ qui vit à travers lui. Lorsqu’il en vient à écrire ces lignes aux chrétiens de Corinthe, il invite ceux-ci à vivre dans la même liberté que lui, s’adaptant à tous, dans les diverses situations qu’il rencontre. Parce que cette liberté lui vient du Christ. A la question qui se pose à lui et aux Corinthiens – peut-on manger la viande qui a été offerte en sacrifice aux idoles – Paul applique ce principe de liberté : rien ne s’oppose à ce que je consomme une telle viande puisque pour moi, le Christ est le seul sauveur. Mais si, en en consommant je devais heurter quelqu’un qui est faible dans la foi, je préfère m’en abstenir pour ne pas l’entraîner vers la chute.

Prenez-moi pour modèle : mon modèle à moi, c’est le Christ !
L’art de vivre en chrétien que Paul propose, s’appuie sur la charité. Et le modèle de cette charité, c’est l’agir du Christ lui-même. La page d’Evangile que nous avons entendu en ce dimanche nous en donne un exemple. Jésus aurait pu faire comme tout le monde, sans que cela soit choquant, c’est-à-dire s’éloigner, ignorer le lépreux qui criait vers lui. Le lépreux lui-même n’exige rien : il ose à peine demander : si tu le veux, tu peux… Sans doute cet homme a-t-il entendu parler des guérisons que Jésus a déjà effectuées. Il veut lui aussi être guéri, et ce faisant, être réintégré dans la communauté humaine, dans la communauté croyante. Parce que la lèpre, la première lecture nous le rappelait, entraînait l’exclusion totale du malade et sa soustraction du peuple choisi. Frappé par la lèpre, il ne bénéficiait plus de l’Alliance avec Dieu ; il ne pouvait plus s’approcher du Temple, il ne pouvait plus s’approcher de Dieu.
Le Christ va répondre à sa demande : cet homme sera guéri, réintégré dans sa communauté. Le Père Michel CORBIN, Jésuite, fait remarquer dans une de ses homélies, qu’il le fait en prenant sur lui le mal qui accablait cet homme. Par un surprenant renversement, en effet, Jésus ne peut plus, après la guérison, s’approcher des lieux habités, et il est obligé de se retirer dans un endroit désert. C’était bien là l’obligation faite aux lépreux.

Prenez-moi pour modèle : mon modèle à moi, c’est le Christ !
Paul a bien raison de nous inviter à l’imitation du Christ. Notre art de vivre nous oblige à vivre la même attention aux autres que celle que le Christ déploie. Nous sommes tenus de le faire, parce que le Christ le fait encore pour nous. Ce qu’il a fait pour ce lépreux, il le réalise pour nous, jour après jour, en nous libérant de la lèpre du péché, et en nous réintégrant sans cesse dans la communauté des enfants de Dieu, que Dieu s’est acquis par le sang de son Fils. Lorsque nous sommes baptisés, nous sommes identifiés au Christ, appelés par Dieu à vivre en fils et filles à l’image du Fils unique de Dieu. Libérés de toutes les lèpres qui nous éloignent des autres et de Dieu lui-même, nous pouvons célébrer les merveilles qu’il accomplit pour nous.

Prenez-moi pour modèle : mon modèle à moi, c’est le Christ !
En nous appuyant sur la Parole de Dieu, en relisant l’enseignement donné par nos Pères dans la foi, nous apprendrons à maîtriser cet art de vivre que notre foi exige. Que nos eucharisties, semaine après semaine, nous révèlent la bonté de Dieu à notre égard et nous donne envie de le suivre et de vivre comme lui. Ainsi nous transformerons notre vie et le monde qui nous entoure, car notre modèle, c’est le Christ, qui ne laisse personne sur le bord du chemin. Puissions-nous vivre de l’exemple qu’il nous donne et dont nous sommes les premiers bénéficiaires : c’est le souhait que je formule pour chacun en cette année de la foi et de l’évangélisation. Amen.

(Dessin extrait de la revue L’image de notre paroisse, Février 2003)

vendredi 3 février 2012

05ème dimanche ordinaire B - 05 février 2012

Accueillir Jésus et le suivre, oui, mais...







Or, la belle-mère de Simon était au lit avec de la fièvre ! Est-ce bien vrai ? La belle-mère de Pierre est-elle réellement malade ou s’agit-il d’une de ces maladies diplomatiques dont le genre humain est friand ? Nous n’en saurons jamais rien, Saint Marc étant très discret à ce sujet. Nous pouvons donc nous rallier sans crainte à l’interprétation psychologique que donne Gérard Bessière de cet événement. A savoir, « quand la belle-mère de Simon Pierre a vu que son gendre ne rentrait pas à la maison, quand elle a su qu’il avait laissé les filets sur la plage et qu’il était parti avec un prédicateur ambulant, vous imaginez le choc ! Et quand on lui a dit que ce Jésus allait venir chez elle, elle en a été malade : elle s’est mise au lit ».

Rien ne nous empêche de lire ainsi le début de cette page d’Evangile. Une telle lecture n’enlève rien à la signification de ce texte, bien au contraire. Si nous supposons que la belle-mère de Pierre est bien malade, le signe de guérison que pose Jésus signifie sa puissance sur les forces du mal qui limitent la vie et les actions des hommes. Si nous penchons plutôt pour la maladie de circonstance, le signe de guérison de Jésus garde toute sa valeur puisqu’il nous montre Jésus plus fort que tous nos démons intérieurs, plus fort que nos craintes. Il vient restaurer en l’homme cette confiance nécessaire en la vie, cette vue favorable sur les choses et les hommes qui fait que nous pouvons vivre ensemble sans toujours nous méfier des autres, mais en avançant avec eux, en construisant avec eux le monde dans lequel nous vivons.

Si j’en reste à la maladie psychologique de la belle-mère de Pierre, j’imagine sans problème Jésus s’approchant d’elle, lui tenant la main, sans rien dire et apaisant, par ce simple geste, la tempête intérieure qui la clouait au lit. Elle est séduite à son tour par ce chevelu qui a pris à sa fille son époux. Elle comprend qu’elle n’a rien à craindre ; peut-être saisit-elle même les raisons profondes qui ont entraîné Simon Pierre à la suite de Jésus. Elle est rassurée et peut maintenant tenir son rôle de maîtresse de maison et accueillir dignement son invité.

N’en va t-il pas de même pour nous quelquefois ? Suivre Jésus, oui ; mais qu’il ne bouleverse pas trop nos vies. Etre sauvé par lui, oui ; mais que cela ne change pas trop nos habitudes. Pourvu que cela ne soit pas trop exigeant ! Cette peur devant ce qui est neuf, cette maladie toute humaine quand il s’agit d’être attentif et vrai, nous voulons à la fois nous en débarrasser parce qu’elle nous empêche de vivre, mais nous refusons quelquefois de prendre les moyens de parvenir à un résultat. Nous sommes alors comme malades, nous préférons nous retirer dans notre chambre, loin des autres, loin de ce Dieu qui vient à notre rencontre.

Cette attitude se révèle par exemple dans la désaffection de certains sacrements. Je pense en particulier aux deux sacrements de guérison que propose l’Eglise. Le sacrement des malades est souvent repoussé jusqu’à l’extrême limite, devenant alors un passage vers le Père plus qu’un sacrement de guérison et de réconfort. Nous avons du mal, avec notre esprit cartésien, à concevoir que Dieu puisse avoir une part dans notre guérison. Il y a la vie spirituelle et la vie humaine avec ses faiblesses et ses limites, et nous préférerions que les deux n’aient rien à faire ensemble. La désaffection du sacrement de la réconciliation dans sa forme individuelle révèle les mêmes difficultés : se reconnaître pécheur à l’intérieur d’un groupe, reconnaître ensemble que la nature humaine est limitée par le péché, cela ne pose pas de problème. Mais croire que Dieu vient à ma rencontre pour me libérer de mon péché, là cela devient plus difficile, parce qu’il faut lui en parler, personnellement, à travers les ministres qu’il nous envoie. Faire une démarche communautaire, oui ; rencontrer Dieu, à travers son prêtre et reconnaître ses limites, voilà qui pose difficulté. N’est-ce pas parce que nous avons du mal à croire à un pardon personnel, à une rencontre personnelle ? N’est-ce pas parce que nous avons peur des bouleversements que cela ne manquera pas d’entraîner dans nos petites vies bien tranquilles, bien rangées ?

Accueillir le Christ, le suivre, c’est accepter d’être touché par lui, par sa parole de vie et de libération. C’est accepter d’avoir besoin de lui, de son amour, de son pardon. C’est croire qu’il peut quelque chose pour moi, aujourd’hui, et accepter de changer ma vie. Il ne faut pas craindre ce changement : il ouvre à plus de vie, il permet d’être plus libre, plus grand. La belle-mère de Simon Pierre l’a bien compris : séduite par Jésus, elle se met aussitôt au service de ceux qui sont là. Elle a compris que rien ne pouvait plus s’opposer au projet d’amour de Dieu.

Seigneur, il n’y a rien de plus dangereux pour un malade que d’ignorer sa maladie. Souvent, quand on en prend conscience, il est trop tard ! Seigneur, envoie-moi ton Esprit pour que je discerne dans mon corps et dans mon âme ce qui ne va pas, ce qui me paralyse, ce qui me fragilise, ce qui me détruit… Avec ta grâce, j’irai mieux, je marcherai, je serai fort, je serai debout. Avec ta grâce, je vivrai ! Amen.


(Dessin de David RATTE, Extrait de Le voyage des pères, vol 1. Jonas, éd. Paquet, 2007. Une BD à découvrir si vous ne connaissez pas encore. Mais ça, c'est pas possible de ne pas connaître !)