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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 25 avril 2020

3ème dimanche de Pâques A - 26 avril 2020

Avec le Ressuscité, passer de la tristesse à la joie.






          Nous l’avons déjà dit la semaine passée : la fête de Pâques est la fête du Passage. Nous pouvons l’expérimenter durant la nuit pascale à travers les différents extraits de la Parole de Dieu que nous lisons. Nous le comprenons dans l’acte même de Jésus qui passe de la mort à la vie. Et nous avons commencé à comprendre que ce grand passage en entraînait une série d’autres, plus petits, moins spectaculaires, mais tout aussi importants. La semaine passée, nous étions invités à passer du doute à la foi. Cette semaine, avec l’épisode des disciples d’Emmaüs, le Ressuscité nous invite à passer de la tristesse à la joie. 

            Voyez-vous, l’histoire de ces deux hommes qui rentrent chez eux au soir de Pâques, c’est notre histoire. Et je dirai qu’elle est singulièrement notre histoire en cette année si particulière où nous ne pouvons nous rassembler pour célébrer Pâques. Il existe effectivement une réelle tristesse cette année chez de nombreux croyants, empêchés de se rassembler pour célébrer le cœur de leur foi, empêchés par la même occasion de communier au Christ Ressuscité. certains auront beau rappeler la communion de désir, cela n’est quand même pas tout-à-fait la même chose, et ne donne pas le même sentiment d’accomplissement et de présence réelle au cœur même de notre vie de Celui qui a livré la sienne pour nous. Sans trop couper les cheveux en quatre, nous pouvons donc affirmer que l’histoire de ces deux hommes, l’un nommé Cléophas, l’autre restant inconnu, qui s’en vont chez eux, tristes et abattus, c’est l’histoire de notre humanité, perdue dans ses rêves de gloire qui s’en retourne vers d’autres chimères, déçue par celui qu’elle n’a pas su reconnaître comme Sauveur lorsqu’il était pendu au bois de la croix. C’est l’histoire de notre humanité aujourd’hui, qui se rend compte soudainement qu’elle n’est pas toute puissante, et qui découvre qu’un petit rien, invisible mais destructeur, peut transformer le monde en immense prison, et réduire à néant notre style de vie et celle de toutes nos sociétés. 

            De ces deux hommes, si nous n’en connaissons qu’un, Cléophas, c’est pour nous rappeler que ce n’est pas une belle histoire pour enfant sage qui nous est ici racontée, mais que cela a bien eu lieu. Pour ceux qui vivaient à cette époque, il était ainsi possible de rencontrer ce témoin ; il était connu. L’autre, sans nom, est là pour nous permettre de nous identifier à lui. C’est nous qui marchons avec Cléophas aujourd’hui et qui revivons avec lui cette marche et cette rencontre sur le chemin vers Emmaüs. Nous pouvons donc, comme ces deux-là, être tenté par le repli sur nous ; nous pouvons être soupçonneux du sens que prend l’Histoire des hommes quand le monde semble devenu fou, quand la mort rôde dans nos quartiers et nos campagnes. Nous pouvons être ce deuxième homme qui, comme Cléophas, est révolté et abattu par ce qui est arrivé et qui ne comprend plus grand chose au projet de Dieu pour l’homme et pour le monde. Car comment croire que Dieu parlait par Pilate et les grands prêtres quand ils condamnaient Jésus ? Comment aujourd’hui, croire que c’est Dieu qui parle par nos autorités alors que ceux qui l’exercent à travers le monde sont incapables d’une conduite commune face au même fléau ? Parle-t-il par ceux qui disent : enfermez-les tous, et qui envoient la police, non pour protéger mais pour punir ? Parle-t-il par ceux qui disent qu’il suffit de quelques UV et d’un désinfectant injecté dans le sang pour retrouver une vie normale ? Parle-t-il par ceux qui choisissent d’identifier et de soigner les seuls malades et de laisser les autres assurer l’avenir de leur pays ? 

        Comme jadis sur la route d’Emmaüs, le Mal semble triompher dans notre quotidien. Comme jadis pour ces hommes déçus, de nombreuses questions se posent, l’avenir semble plus qu’incertain. Comme jadis sur la route d’Emmaüs, la perplexité nous saisit. Mais comme jadis sur le chemin d’Emmaüs, nous somme rejoints par quelqu’un, par Jésus. Nous avons peut-être du mal à le reconnaître, mais si nous sommes attentifs à sa Parole, il saura réchauffer notre cœur. Nous avons peut-être du mal à le croire vivant, ressuscité, mais si nous ouvrons nos yeux, nous le reconnaîtrons présent dans les gestes de solidarité, en attendant de le reconnaître à nouveau présent dans la fraction du pain à laquelle nous n’assistons plus. Car aujourd’hui comme hier, il vient nous rejoindre sur les routes de notre humanité. Aujourd’hui comme hier, il vient nous parler au cœur. Aujourd’hui comme hier, il s’offre à nous dans le partage du pain toujours vécu par les prêtres, et dans le partage de nos solidarités. Dans ces mots simples que nous entendions chaque dimanche, dans ce morceau de pain si souvent reçu, c’est toute sa vie qui nous était transmise ; c’est tout lui qui venait à notre rencontre. C’est bien peu, une parole et du pain, mais que faut-il de plus à l’homme pour exister vraiment, sinon une parole qui l’ouvre au sens des choses pour étancher sa soif de comprendre, et un peu de nourriture pour apaiser sa faim. 

         A tous ceux qui se détournent de Dieu parce que déçus dans leur foi, déçus par leur Eglise, déçus par un monde qui perd la tête, l’évangéliste rappelle la présence de Jésus à leur côté. A tous ceux pour qui le témoignage des Apôtres n’a pas suffi à les convaincre de sa toute-puissance sur le mal et la mort, Jésus donne l’occasion de dire leur souffrance, leur déception, pour qu’ils puissent passer de la tristesse réelle à la joie profonde. Il leur offre ainsi de faire un pas de plus et d’aller au-delà de leurs impressions. L’Eucharistie est toujours offerte comme le lieu où Dieu se révèle à ceux qui sont prêts à dépasser leur crainte pour le suivre sur le chemin difficile et exigeant de l’Evangile ; l’Eucharistie est toujours offerte comme LE lieu de la rencontre la plus proche entre Dieu et l’homme. Nous comprenons pourquoi de nombreux évêques insistent ces derniers jours pour que l’Eucharistie dominicale puisse à nouveau, rapidement, être célébrée non plus seulement pour le peuple, mais avec le peuple, comme il convient. Cette rencontre physique est essentielle pour que la joie revienne, pour que l’espérance triomphe et que la charité demeure vive. 

          Les disciples d’Emmaüs ont reçu la Parole de Jésus et le signe du Pain rompu pour reconnaître le Ressuscité, raviver leur espérance et partager leur joie. Même si nous ne pouvons y participer réellement, ces mêmes signes sont toujours offerts. Puissions-nous, en attendant de nous rassembler à nouveau, y reconnaître toujours la présence agissante de celui qui nous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. Ainsi la joie pascale se répandra en nous et à travers nous jusqu’aux extrémités du monde. AMEN.



(Tableau d'Arcabas, Les disciples d'Emmaüs, trouvé sur internet)


samedi 18 avril 2020

2ème dimanche de Pâques A - 19 avril 2020

Avec le Ressuscité, passer du doute à la foi.








Il faudra nous y faire : avec la fête de Pâques, quelque chose de neuf a surgi. Avec la fête de Pâques, Jésus, celui que nous connaissions comme homme, est devenu le Christ, celui que nous reconnaissons comme Messie et Sauveur. Le temps pascal que nous avons inauguré durant la grande nuit du passage, c’est avec lui, Jésus le Christ, qu’il nous faut le vivre. C’est lui qui nous permet de vivre à notre tour les différents passages qu’il nous faut effectuer, si nous voulons vivre avec lui pour toute éternité. Le premier passage à vivre, c’est celui du doute vers la foi. 

            Reconnaissons-le d’emblée : il n’est pas plus facile de croire en la résurrection aujourd’hui que cela ne l’était pour les Apôtres. Nous aurions aimé croire que ces hommes qui avaient vécu avec Jésus, qui avaient entendu son enseignement, qui avaient vu ses signes, auraient cru instantanément en Jésus ressuscité. L’événement de la Passion n’aurait été pour eux qu’un mauvais moment à passer. Après tout, ils avaient entendu Jésus, par trois fois, leur annoncer ces événements. Ils auraient dû comprendre instantanément le sens profond de ce qui se jouait sous leurs yeux. Les évangiles nous racontent qu’il en a été tout autrement. Il suffit de vérifier le nombre d’apparition nécessaires pour qu’enfin ces hommes s’ouvrent à cette nouveauté radicale d’une vie plus forte que la mort. Ni pour les Apôtres, ni pour nous, il n’a été simple de croire en la résurrection. Personne ne décide du jour au lendemain de croire en la résurrection de Jésus. Cet événement est tellement hors du commun, tellement nouveau, qu’il n’y a qu’un moyen pour le reconnaître : c’est que Jésus lui-même, celui-là même qui était mort, se révèle vivant à nous pour toujours. 

            L’histoire de Thomas, racontée dans l’évangile de ce dimanche, est révélatrice à ce sujet. Elle se déroule en deux temps. Le premier temps, les Apôtres le vivent en l’absence de Thomas. Ils se sont confinés dans un lieu verrouillé, par crainte des Juifs, nous dit Jean. Nous sommes au soir de la résurrection : Jésus s’est donc déjà révélé vivant à quelques-uns, et pourtant les Apôtres ne s’en trouvent pas raffermis ; je crois même qu’ils ne savent trop que penser de ce qu’ils ont pu entendre ou voir depuis le matin. Et voilà que Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur faudra malgré tout une parole de Jésus et un geste (il leur montre ses mains et son côté) pour qu’ils se laissent aller à la joie. Nous pouvons imaginer leur joie de partager ce moment avec Thomas lorsqu’il rejoint le groupe. Mais nous pouvons aussi comprendre son scepticisme : Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous… non, je ne croirai pas ! En fait, ce que demande Thomas, c’est de faire la même expérience que les autres. Ce qu’ils ont vu, il veut le voir aussi. Qui a-t-il de mal à cela ? Je sais bien, certains ne se priveront pas d’appuyer sur la parole de Jésus à Thomas, huit jours après : Heureux ceux qui croient sans avoir vu. C’est vrai pour tous ceux qui suivront ; c’est vrai pour nous. Nous n’avons pas la chance de voir Jésus comme Thomas et les autres ont pu le voir. Est-ce que cela rend caduque la demande de Thomas de voir comme les autres ? Je ne crois pas, parce qu’à la différence de nous, il a marché avec Jésus avant sa mort. Sa demande d’égalité de traitement est légitime parce que son expérience de Jésus est la même que celle des dix autres. 

            Pour nous qui suivons des siècles plus tard, il en va autrement. Nous sommes invités croire en Jésus sur la parole de l’Eglise qui, à la suite des Apôtres, répand la bonne nouvelle de sa présence réelle et agissante au cœur de notre vie. Mais il reste quand même nécessaire, pour chacun de nous, de faire cette rencontre personnelle avec Jésus, mort et ressuscité. Nous n’y couperons pas. Ce ne sera pas comme pour Thomas et les autres, mais ce sera une rencontre, une parole, un signe, quelque chose qui nous dit que c’est vrai, Jésus est ressuscité. Le signe le plus évident, c’est la vie des communautés chrétiennes. Relisez les Actes des Apôtres dont nous avons entendu un extrait significatif à ce sujet. Ce que vit ce groupe est contagieux ; d’autres ont envie de le vivre si bien que chaque jour, le Seigneur leur adjoignait ceux qui allaient être sauvés. La miséricorde que Dieu fait aux hommes par son Fils mort et ressuscité, est rendue manifeste par l’art de vivre des croyants au Christ. Et c’est par cet art de vivre des croyants au Christ que d’autres peuvent être mis en contact avec le Ressuscité. Il y a un enjeu majeur qui se joue dans la vie de nos communautés ; celui de son élargissement à ceux qui ne connaissent pas encore le Christ, à ceux qui ne l’ont pas encore rencontré. Et comment le rencontreront-ils ? Par notre manière d’être, notre manière de vivre notre foi. La miséricorde que Dieu nous a manifestée au moment de notre baptême doit déborder de nous, se répandre sur le monde. En ce sens, le moment de pandémie que nous vivons, a quelque chose de ressemblant avec ce temps de la Pâque de Jésus. Quelque chose de neuf devra jaillir de cette épreuve, comme quelque chose de neuf a jailli de l’épreuve de la Passion. Et les croyants au Christ sont tout autant concernés aujourd’hui que ne l’étaient alors les Onze Apôtres. Ce monde nouveau qui devrait advenir après la crise, monde nouveau dont on nous parle depuis quelques jours, ne se fera pas sur de bons sentiments. Il nécessitera le passage du doute que nous connaissons aujourd’hui, à la foi d’un monde nouveau possible ; sinon ce monde ne sera qu’un rêve, une illusion. 

            C’est en passant du doute à la foi, grâce à Jésus mort et ressuscité, que les Apôtres ont pu engendrer un monde nouveau, un art de vivre nouveau dont le Christ était le cœur. Et c’est par cet art de vivre qu’ils ont touché (que le Christ a pu toucher) le cœur de ceux qui ne le connaissaient pas encore. C’est là, me semble-t-il, que nous serons attendus. Il ne s’agit de faire confiance à tel parti plutôt qu’à tel parti, pour nous sortir de la crise. Il s’agit d’accorder pleinement confiance au Christ, celui qui a vaincu la mort, pour nous aider à reconstruire notre monde, à reconstruire nos rapports humains mis à mal par la distanciation sociale. Comme les Apôtres ont su inventer du neuf tout en restant fidèles à ce qui était essentiel de leur vie d’avant, il nous faudra réinventer nos communautés chrétiennes et humaines, pour que la fraternité, signe d’une vie toujours plus forte que la mort, fasse sens et permette aujourd’hui, comme au temps des premiers croyants, de reconnaître la présence du Ressuscité. Que le Christ miséricordieux nous fasse passer du doute à la foi pour qu’avec lui nous puissions construire ce monde nouveau qu’il a inauguré pour tous les hommes. Amen.

(Arcabas, Le Ressuscité, source internet)

dimanche 12 avril 2020

Saint Jour de Pâques - 12 avril 2020

Dieu nous apprend la confiance.





Tout s’est passé durant la nuit. Comme souvent, avec Dieu d’ailleurs. C’est toujours de nuit qu’il intervient. Une ancienne habitude. Déjà du temps de Moïse, la sortie d’Egypte, puis le passage de la Mer Rouge, c’était de nuit. Personne ne sait vraiment trop pourquoi. A moins que ce ne soit pour signifier qu’avec le jour qui se lève, quelque chose de neuf commence. Tout s’est passé durant la nuit, et personne n’a donc rien vu. 

Mais que s’est-il passé durant la nuit ? Personne ne sait vraiment ; personne ne se promène dans un cimetière la nuit. Et les gardes qui avaient été postés là, dormaient probablement, même si ce n’était que d’un œil. Ils n’ont rien vu, rien entendu. Toujours est-il qu’au petit matin, la lourde pierre avait été roulée ; c’est Marie Madeleine qui avait constaté les faits. Selon Jean, elle est aussitôt allée trouver Pierre et Jean, pour leur rapporter ce qu’elle avait constaté : On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons pas où on l’a déposé. Quelle affaire ! Voilà qui risque de faire du bruit ! 

Tout s’est passé durant la nuit, et quand Pierre et Jean arrivent à leur tour au tombeau, ils voient les linges posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place. Difficile d’imaginer des voleurs de tombes emporter le corps en le défaisant d’abord de ses linges et en les pliant soigneusement avant de partir. Avec des gardes, mêmes endormis, il aurait mieux valu ne pas traîner. Nous ne savons donc toujours pas ce qui s’est passé. Il y a juste le tombeau vide, les linges bien pliés, à leur place. Pierre est sans doute perplexe ; mais Jean, en entrant dans le tombeau a une réaction différente : Il vit et il crut. Mais il crut quoi ? 

Il crut que, durant la nuit, ce Jésus qu’il a dû tant pleurer en trois jours, eh bien il est ressuscité. Le tombeau vide et les linges bien pliés lui ont permis de remettre toutes les pièces en place. Sans doute s’est-il rappelé tout ce que Jésus leur avait dit ; ses annonces de la Passion et de la résurrection. Tout devient clair pour lui, instantanément. Il fait confiance à la Parole de Jésus et tout prend sens ; tout devient lumineux pour lui. 

Durant la nuit de Pâques, Dieu nous apprend la confiance. Il nous demande de croire Jésus sur parole. Personne n’aura d’explication sur ce qui s’est passé durant la nuit, ni sur comment cela s’est passé. Pour Pierre et Jean, et pour tous les autres, pour nous, il n’y aura jamais que ce tombeau vide, sans que personne n’ait vu Jésus l’ouvrir de l’intérieur et en sortir. C’est cela la foi : croire sur parole. Pierre et Jean et les autres, vont devoir apprendre à croire en tout ce que Jésus leur a dit. Et nous aujourd’hui, nous continuons de croire, sur la base de ces paroles de Jésus et sur la base du témoignage des Apôtres, qui n’ont rien vu, rien entendu de ce qui s’est passé durant la nuit, mais qui ont cette certitude que Jésus est vivant. Et ils ont cette autre certitude : ils doivent le faire savoir. D’Apôtres, ils deviennent témoins : témoins de tout ce qu’ils ont vécu avec Jésus ; témoins de ce que cette nuit de Pâques introduit comme nouveauté dans la vie des hommes. Avec Jésus, mort et ressuscité, les hommes ont accès à la vie de Dieu ; avec Jésus, mort et ressuscité, les hommes sont pardonnés par Dieu : Quiconque croit en lui reçoit par son nom le pardon de ses péchés. 

Cela s’est passé durant cette nuit. Au matin, rien n’avait vraiment changé et pourtant, tout était différent ; l’avenir s’éclairait de ce jour nouveau. Oh, les romains étaient toujours là, les disciples de Jésus avaient sans doute encore à craindre les autorités du Temple ; mais ils avaient désormais en eux une confiance qui leur venait de ce tombeau vide, signe que Jésus ne leur avait pas menti. C’est pareil pour nous : la pandémie n’a pas disparu durant cette nuit ; mais la puissance de vie qui se dégage de cette fête nous redit que la mort, pas plus aujourd’hui que jadis, n’aura le dernier mot. Pâques vient nous redire que la vie triomphe toujours. Nous le voyons déjà à travers les gestes de solidarité qui se multiplient ; nous le voyons encore à travers les efforts des soignants et des chercheurs qui luttent. Croyants au Christ, mort et ressuscité, nous pouvons légitimement être inquiets devant ce Mal qui ronge notre monde ; mais nous devons aussi indéfectiblement garder confiance en Jésus, le Vivant à jamais. Il a vaincu la Mort pour nous ouvrir à sa vie, à la vie en plénitude.  Désormais, rien ne pourra nous séparer de l’amour que le Christ a manifesté pour nous en mourant sur la croix. Comme Pierre, Jean et les autres, devenons témoins de cette vie nouvelle qui nous est donnée, devenons témoins de cet amour et apprenons de Dieu la confiance. Elle nous fera aller de l’avant ; elle nous fera triompher. Amen.





(Tableau d'Arcabas, Les femmes au tombeau, source internet) 


vendredi 10 avril 2020

Vendredi Saint - 10 avril 2020

Dieu nous apprend sa faiblesse.







            Car, lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. Ce verset, tiré de la deuxième lettre aux Corinthiens (12, 10), nous le comprenons souvent pour nous. Et Paul l’emploie bien dans ce sens. Il redit à ses amis que, quelle que soit la situation angoissante qu’il traverse, dans sa faiblesse, il est fort de l’amour que Dieu lui porte. En ce vendredi saint, je ne peux m’empêcher de penser que ce verset s’applique aussi au Christ. Voyez-vous, j’en suis convaincu, en livrant son Fils bien-aimé, Dieu nous apprend sa faiblesse. 

            Nous avons tellement l’habitude de parler de Dieu tout-puissant que nous en venons à oublier cette réalité : devant l’homme, Dieu est faible. Il a limité sa toute puissance en donnant à l’homme sa liberté. Car l’homme est libre d’accepter Dieu ou de le refuser. Et dans ce dernier cas, Dieu ne pourra rien. En ces fêtes pascales où nous disons que le Christ, par sa mort et sa résurrection, nous ouvre le ciel, il nous faut être plus que jamais conscient que n’iront au Paradis que ceux qui le désireront. Des deux larrons crucifiés en même temps que Jésus, il ne sera dit qu’à un seul : Aujourd’hui, tu seras avec moi en paradis. Dans ces mots, dans toute la Passion, c’est toute la faiblesse de Dieu qui s’exprime. 

            La première faiblesse de Dieu, c’est l’Homme, l’Homme qu’il a créé, désiré, avec lequel il veut faire alliance. Pour cet Homme, Dieu est prêt à tout. Il suffit de relire l’histoire biblique pour s’en rendre compte. D’alliance proposée par Dieu en rupture d’alliance provoquée par les hommes, Dieu ne peut consentir à se défaire de l’Homme. C’est sans doute le prophète Osée qui nous fait approcher du plus près cette faiblesse de Dieu pour l’Homme. Bien que les hommes se prostituent devant d’autres dieux, le Dieu de l’Alliance n’a de cesse de séduire et de conquérir à nouveau son peuple, les hommes qu’il a créés, choisis, sauvés… Que nous le voulions ou non, que nous le reconnaissions ou non, il y a un lien indéfectible entre Dieu et l’Homme. 

            Et c’est la seconde faiblesse de Dieu, son amour de toujours pour cette humanité. Le geste de la Passion est d’abord un acte d’amour pour tous les hommes que Dieu veut sauver une fois pour toutes. Et c’est en Jésus, obéissant jusqu’à la mort, que l’amour de Dieu trouve son expression la plus forte, la plus parfaite. Nous pouvons alors réentendre le verset de Paul donné en introduction : Car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. Y a-t-il plus grande faiblesse que d’être cloué injustement en croix ? Y a-t-il plus grande faiblesse que d’être livré par ceux-là mêmes que vous comptiez sauver ? Sur la croix, l’histoire semble s’arrêter, le match est joué et perdu par Dieu. Son fils meurt, rejeté, abandonné, humilié. Les hommes ont signifié qu’ils n’en voulaient pas. Et pourtant, sur la croix, les plus grandes faiblesses de Dieu (l’Homme et l’Amour) vont devenir la force de Dieu. Nous avons pour nous le recul de l’Histoire et le témoignage de la foi. Nous savons que la croix, si elle est le dernier mot des hommes, n’est pas le dernier mot de Dieu. Certes, nous pouvons dire que Dieu meurt en Jésus ; et notre humanité meurt avec lui. Mais nous savons aussi que sur la croix, la Mort elle-même meurt, parce qu’elle avait oublié qu’on ne peut faire mourir l’Amour. C’est encore Paul qui l’exprimera le mieux dans l’hymne à la charité : l’Amour ne passera jamais. 

            Les hommes ont oublié que la faiblesse que Dieu avait pour eux, c’était un Amour incommensurable, indestructible. Devant la croix, il semble mis en sourdine, comme jadis au temps de l’exil. Mais justement, l’exil nous apprend que l’Amour de Dieu pour les hommes s’est renforcé dans l’épreuve jusqu’à faire revivre l’amour des hommes pour Dieu. En ce vendredi saint, les hommes ont exilé le Fils de Dieu dans un sombre tombeau, bien gardé. Mais nous pouvons bien exiler Dieu hors de nos vies, Dieu ne peut s’exiler loin de nous. La lourde pierre du tombeau ne saurait résister longtemps à la puissance de son Amour. Devant le tombeau fermé, gardons le silence. Devant la croix, mesurons à quel point Dieu nous aime. Si Dieu est faible devant l’Homme qu’il aime, l’Homme devient fort par cet Amour quand il accepte Dieu dans sa vie. Mais ça, c’est déjà une autre histoire. Elle ne commencera qu’au matin de Pâques pour ceux qui auront su entrer dans la faiblesse de Dieu pour être forts avec Lui. Amen.




(Tableau d'Arcabas, Crucifixion, trouvé sur internet)

mercredi 8 avril 2020

Pour vous aider à vivre ces temps forts


Comme il n’y aura pas de liturgie publique pour les fêtes pascales, je vous propose une série de diaporama pour accompagner vos temps de prière ou d’intériorité durant la Semaine Sainte. Voici la démarche à suivre pour utiliser dans les meilleures conditions possibles ces outils. Ils sont tous stockés sur mon cloud.

Pour y accéder, cliquer sur le lien correspondant au jour qui vous intéresse :



Dimanche des Rameaux :                                                                    
 https://1drv.ms/u/s!AswlzNo-8N0Qg9cwgCZAOTt1snIxOw?e=ndtm6d










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Cliquer sur "Télécharger" en haut à gauche. Une nouvelle fenêtre s'ouvre : cliquer sur "Enregistrer".
les différents fichiers pour le jour choisi sont désormais sur votre ordinateur, dans un fichier compressé. Retrouvez-le à l'endroit où vous l'aurez enregistré. Faites un clic droit sur le fichier ; une fenêtre s'ouvre :














Cliquer sur "Extraire tout" en haut à droite. Une autre fenêtre s'ouvre :























Cliquer sur "Extraire". Vos fichiers sont désormais utilisables. Vous aurez le diaporama qu'il faut faire avancer manuellement en cliquant sur "Enter" sur votre clavier, un fichier "Commentaires" qui vous donne la méditation diapo par diapo et vous indique quand cliquer pour progresser dans le montage. Et un fichier qui redonne le texte biblique utilisé.

Bonne semaine sainte à toutes et à tous.

Jeudi Saint - 09 avril 2020

Dieu nous apprend son amour.






En ce soir du Jeudi Saint, où nous célébrons le dernier repas de Jésus et l’institution de l’Eucharistie comme signe de la présence de Jésus, mort et ressuscité, au milieu de son peuple, convenait-il de célébrer l’Eucharistie alors que le monde est presque entièrement confiné et le rassemblement, signe de la communauté chrétienne, interdit ? Est-ce normal pour les prêtres du monde entier de célébrer l’Eucharistie seul, sans peuple ? Certains y ont vu, sur les réseaux sociaux, la négation publique de la réforme voulue par le Pape François et un renforcement du cléricalisme, les prêtres étant (presque) les seuls à communier réellement, les laïcs devant se contenter d’une communion de désir. 

Bien qu’ayant personnellement beaucoup de difficultés à célébrer seul, je me plie pourtant à cette discipline de porter devant Dieu, dans le mémorial du sacrifice de son Fils, mes frères et sœurs en humanité, mes frères et sœurs dans la foi pour ceux qui sont croyants. Je suis peut-être seul dans l’église, mais avec moi, il y a tous ceux que le Christ m’a confié par l’Eglise ; avec moi, il y a tous ceux qui me sont chers ; avec moi, il y a tous ceux qui souffrent sur un lit d’hôpital et tous ceux qui les soignent. Et lorsque je communie, je n’avale pas l’hostie comme un gamin qui aurait chapardé un gros et bon gâteau pour le manger à l’abri du regard des autres, fier d’être le seul à goûter à ce plaisir. Je communie au Christ pour y trouver la force d’être prêtre encore, au service d’une communauté qui ne peut plus manifester son existence autrement que par l’union de prière. Je ne saurais confiner le Christ dans le tabernacle ; je ne saurais m’abstenir de le rendre toujours et encore présent pour que ceux et celles qui croient en Lui, sachant l’Eucharistie célébrée, ne se sentent pas abandonnés par l’Amour même. 

Oui, ce soir, puisque tous les prêtres du diocèse célèbrent l’Eucharistie à la même heure et que nos paroissiens en ont été informés, je communierai avec la certitude d’avoir rendu l’amour de Dieu présent dans le cœur de tous ceux et celles qui s’unissent à nous dans la prière. Ce soir, plus que jamais, m’apparaît l’impérieuse nécessité de célébrer ce don laissé par le Christ et par lequel Dieu nous apprend son amour. Ce soir, plus que jamais, il me faut refaire ces gestes en mémoire de Lui ; ce soir, plus que jamais, il me faut apprendre de Dieu son amour qui va jusqu’au don de Jésus sur la croix pour que nous puissions être sauvés. Je ne le fais pas par cléricalisme, ni avec la satisfaction de pouvoir faire quelque chose que la plupart ne peuvent faire ; je le fais avec cette douleur de l’absence du peuple de Dieu, mais aussi avec le sentiment réel de poser ainsi une pierre dans la lutte contre tout ce que cette crise sanitaire peut engendrer, à commencer par la solitude. Jamais la communion des saints n’est autant devenue une réalité pour moi. Souvenons-nous que « les saints », c’était l’appellation que Paul lui-même utilisait pour parler de ses frères dans la foi (voir début de la lettre aux Romains par exemple). 

Ce soir donc je célèbre l’eucharistie physiquement seul dans l’église paroissiale parce que je ne peux pas garder pour moi l’amour que Dieu a manifesté au monde ; ce soir, parce que prêtre, le Christ se sert de moi pour redire à tous ses disciples de quel amour il les aime, comme il l’a fait jadis au Cénacle ; il n’y avait que ses plus proches, non pas parce qu’ils étaient meilleurs que les autres (souvenons-nous que Pierre reniera, Judas trahira, et presque tous les autres s’enfuiront), mais parce qu’il les a choisis, appelés à sa suite et qu’il leur confie ce soir son grand secret : il offre sa vie par amour pour tous les hommes ; et ceux qui sont là, il les charge de le redire, il les charge de le rendre présent chaque fois qu’ils referont ces gestes et rediront ces paroles sur le pain et le vin. Et pour qu’ils n’oublient jamais que c’est par amour qu’ils doivent eux-aussi le refaire, il leur donne un autre geste, celui du lavement des pieds, pour qu’ils comprennent bien que ce n’est pas un pouvoir qu’il leur confie, mais un service, une mission. Ils exerceront, et nous les prêtres aujourd’hui, le sacerdoce comme un service de leurs frères et de Dieu. Comment pourrions-nous nous abstenir de ce service au soir-même où l’Eglise se souvient de cette première fois ? 

Ce soir, par le geste du lavement des pieds et par l’institution de l’Eucharistie, Dieu nous apprend son amour, un amour toujours à vivre, un amour toujours à partager. N’est-ce pas la première chose qu’il nous faut vivre en ces temps de crise où l’homme découvre sa faiblesse, où l’homme souffre, où l’homme se sent seul et abandonné ? Il n’y a que l’amour qui nous aide à ne pas désespérer. L’Eucharistie en est le plus beau et le plus grand signe. Je l’offre ce soir pour vous tous à qui je m’unis, pour vous tous qui vous unissez à moi. Faisons cela en mémoire de Lui. Amen.



(Tableau d'Arcabas, La fraction du pain, trouvé sur internet)


samedi 4 avril 2020

Dimanche des Rameaux et de la Passion - 05 avril 2020

Dieu nous apprend son chemin : la condition de serviteur.









            Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Cet extrait de la lettre aux Philippiens donne le ton de ce qui se joue en ce dimanche des Rameaux et de la Passion. Ce qui se joue, ce n’est pas tant le premier jour des événements de la Passion ; ce qui se joue, c’est l’apprentissage du chemin de Dieu. Le salut des hommes ne se fait pas par eux ; c’est le Christ qui sauve. Mais il ne se fait pas non plus sans eux : ils doivent (nous devons) apprendre le chemin de Dieu et entrer, comme Jésus, dans la condition de serviteur. Et si je lis bien l’hymne aux Philippiens, il revient aux hommes d’apprendre de Dieu à être véritablement hommes. 

            En effet, il semblerait que ce soit là la condition première des hommes. Relisez bien ce qui est dit de Jésus : Il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. La compréhension que j’ai de ce verset, c’est qu’en prenant la condition de serviteur, Jésus devient semblable aux hommes. Ou, pour le dire autrement, en devenant homme, il devient serviteur. Nous devons donc bien apprendre de Jésus à être pleinement homme, en entrant dans cette condition de serviteur. C’est là notre condition première. Et les événements de la Passion, pris dans leur totalité, nous le rediront. Jésus vit cette condition dans l’obéissance absolue à son Père, en se soumettant à la loi des hommes. Ce n’est pas Dieu qui condamnera son Fils à mort ; ce sont les hommes. Ce n’est pas Dieu qui veut faire mourir son Fils ; ce sont les hommes. Ce n’est pas Dieu qui a besoin d’une preuve de la relation qui l’unit à son Fils ; ce sont les hommes qui ne cessent de remettre en cause, dans les jours qui précèdent la Passion, la filiation divine de Jésus. Il suffit de relire les évangiles de la cinquième semaine de Carême pour s’en convaincre. 

            Être serviteur : voilà qui ne semble pas déranger Jésus. Il s’inscrit parfaitement, tout au long de sa Passion, dans les prophéties faites par Isaïe, présentant le Messie sous les traits d’un serviteur qui se laisse faire, qui n’oppose pas de résistance, qui accepte tout dans une grande confiance en Dieu : Le Seigneur Dieu vient à mon secours. Si notre Seigneur et Maître s’est fait serviteur en devenant homme, ou s’est fait homme en devenant serviteur, combien plus devons-nous entrer, nous qui sommes hommes, dans cette condition de serviteur. Là se trouve la condition de notre salut. Nous ne serons pas sauvés parce que Jésus a été à la mort ; nous serons sauvés, par Jésus, mort et ressuscité, parce que nous accepterons de nous situer en disciples de ce Maître, en serviteurs de Dieu et de nos frères. C’est en acceptant d’être pleinement serviteurs, que nous deviendrons fils, à la suite du Fils unique, qui livrera sa vie dans un unique sacrifice pour tous les hommes. C’est parce que nous serons pleinement homme, donc serviteurs, que nous aurons accès au salut que Jésus propose aux hommes. Si nous refusons de vivre notre humanité dans toutes ses dimensions, y compris celle du service, nous ne pourrons pas être sauvés. Refuser la condition de serviteur revient à refuser la condition humaine, condition nécessaire pour être sauvé par Jésus. Il s’est fait homme, pleinement, totalement, pour sauver les hommes. Si nous nous comportons comme des loups, nous ne pourrons pas être sauvés, parce que nous ne sommes ajustés ni à ce qu’est notre être profond (être humain), ni à Jésus qui a pris sur lui notre humanité. Il n’y a pas d’autre choix que d’accepter d’être serviteur. 

            Prenons le temps de relire ces textes que l’Eglise propose à notre méditation en ce dimanche. Apprenons de Jésus le chemin du serviteur pour avoir notre part à sa gloire quand il aura accompli son chemin jusqu’au bout. Aujourd’hui, prenons sur nous de le suivre sur ce chemin de la Passion, de le suivre jusque bout, en hommes libres, en serviteurs fidèles, en témoins véritables. Au bout, il y a la Pâques du Christ. Au bout, il y a notre Pâques, le passage de tous les serviteurs vers la gloire des fils de Dieu rassemblés. Suivons Jésus et vivons son enseignement. Amen.




(Tableau d'Arcabas, Christ outragé, source internet)