Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







Enseignement catholique

Depuis septembre 2012, j'accompagne l'équipe diocésaine de l'Enseignement Catholique. Je redonne ici les lettres pastorales envoyées aux établissements du diocèse et d'éventuelles homélies.





Lettre pastorale pour le Carême 2024

L'Amour n'oblige personne ; l'Amour n'empêche personne !

 

 

             Chance pour les uns, malheur pour les autres : cette année, le Mercredi des Cendres, jour de jeûne et d’abstinence de viande, va éclipser, liturgiquement, Saint Valentin, patron des amoureux, dont le jour est marqué par une frénésie d’achats dont nos publicitaires ont le secret. Je laisse chacun libre de choisir sa manière d’exprimer son amour à sa personne bien-aimée, et aux chrétiens, le meilleur moyen d’exprimer leur amour à l’Autre, notre Bien-Aimé, Jésus le Christ. Je rappelle juste que l’Eglise nous en indique trois : le Jeûne, la Prière et la Charité. Ce qu’il ne faudrait pas manquer en ce jour, c’est justement de redire notre amour, que ce soit à un homme ou une femme, ou à Dieu. Que ce soit l’amour qui guide nos actions en ce premier jour de Carême, mais aussi dans les trente-neuf jours suivants qui constituent le temps de préparation à Pâques. 

             Ce qu’il y a d’intéressant, en matière d’amour, c’est qu’il ne s’impose pas. Il est donné librement ; il est accepté librement. Je ne peux pas dire à quelqu’un :  Je t’aime, donc tu dois m’aimer en retour, puisque Dieu, la Source de tout amour véritable, ne le fait pas pour nous. Ne vous méprenez pas : j’aime que Dieu aime tout le monde ; et comme prêtre, j’aimerais que tout le monde aime Dieu, parce que beaucoup de conflits seraient réglés de cette manière. Et je sais pouvoir dire, sans me tromper, que Dieu nous aime tous, qu’il aime toute l’humanité, dans sa diversité d’origines, de religions, de genres, d’opinions, … Mais je sais aussi pouvoir dire que cet amour de Dieu pour chaque humain n’est pas conditionné par l’amour que nous lui rendrions en retour. Dieu aime tout le monde sans n’obliger personne. C’est la condition d’un amour véritable, d’un amour éternel. 

             Les récentes polémiques autour d’un établissement catholique nous obligent tous à une attention particulière envers tous ceux qui fréquentent nos établissements. L’Amour que je porte à Dieu, et que j’essaie de porter à mes semblables, m’oblige à ne pas les obliger justement. Le cours d’enseignement religieux, lors duquel nous faisons découvrir à tous la manière dont ceux qui se disent croyants vivent, croient, prient ne saurait être transformé en catéchèse qui demande de croire. Nos activités pastorales et nos célébrations lors desquelles les chrétiens chantent et prient le Dieu de Jésus Christ, ne sauraient être imposées à quiconque, fût-il chrétien ! Suivre le Christ ne peut être qu’une invitation ; elle doit le rester ! Proposer à tous nos élèves de découvrir le Christ et de vivre un temps spirituel, c’est une chose que nous avons le droit et le devoir de faire ; demander à tous nos élèves de participer à ces temps, parce que nous sommes une école catholique après tout, nous ne pouvons pas et nous ne devons pas le faire. Par Amour pour tous ceux que Dieu aime, nous proposerons. Par Amour pour tous ceux que Dieu aime, nous renoncerons à imposer. Dieu aimera les catholiques parce qu’ils auront témoigné authentiquement de lui, en parole et en actes, et non parce qu’ils auront obligé les autres à Le suivre, « parce qu’après tout cela ne peut pas leur faire de mal » ! L’Eglise catholique est la première à revendiquer pour elle, et à défendre pour tous, la liberté religieuse et sa compagne inséparable, la liberté de conscience. Elle peut s’énoncer ainsi : chacun doit avoir la possibilité de faire le choix de croire et de vivre sa foi ; personne ne saurait y être contraint ; personne ne saurait en être empêché. Le Concile Vatican II l’a rappelé dans sa Déclaration sur la liberté religieuse « Dignitatis humanae » : Ce Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être exempts de toute contrainte de la part tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres. Il déclare, en outre, que le droit à la liberté religieuse a son fondement réel dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la Parole de Dieu et la raison elle-même (DH 2). En écrivant ces lignes, et en reprenant cette citation conciliaire, je garde en mémoire l’intelligence et le sens du service de nos équipes enseignantes et éducatives qui ne refuseront pas, même s’ils ne partagent pas nos convictions, d’encadrer les élèves qui souhaiteront participer à des manifestations pastorales ou cultuelles, et je les remercie d’assurer ainsi à leurs élèves le cadre sécurisé auquel ils ont droit. 

L’école catholique, ouverte à tous par choix pastoral et par vocation, est un lieu de brassage culturel, religieux et social. Elle peut être un laboratoire efficace de cette liberté religieuse conjuguée avec la liberté de conscience, au nom de l’Amour que les croyants portent à Dieu et au nom de l’Amour que tous doivent porter aux autres. Durant ce Carême, entraînons-nous à l’Amour qui ni n’oblige, ni n’empêche, mais qui respecte chacun dans ce qu’il est et dans ce qu’il vit.  Que ce soit bien l’Amour qui guide nos actions tous les jours de notre vie. Bon Carême 2024 ! 



Lettre pastorale pour l'Avent 2023

La paix, rêve ou réalité toujours à construire ?

  

             Dimanche, l’Eglise va entrer dans le temps de l’Avent : une nouvelle année liturgique commencera qui nous fera découvrir et suivre Jésus selon ce qu’en dit Marc dans son Evangile. Il ne connaît aucun récit de l’enfance de Jésus. Son évangile s’ouvre par la prédication de Jean le Baptiste, le cousin de Jésus.  Quand il annonce la venue de celui qui est plus fort que lui, il parle de Jésus qui ne va pas tarder à commencer son propre ministère. Et c’est pour que nous puissions recevoir le message de Jésus que Jean invite à recevoir un baptême de conversion pour le pardon des péchés. Le nom Jésus signifie : Le Seigneur sauve. Matthieu précise dans son évangile que Jésus est bien celui qui sauvera son peuple de ses péchés. Ce que l’Eglise nous invite à vivre est bien un temps de préparation de notre vie, de notre cœur, pour que le Christ qui vient y trouve sa place. 

             Quand je regarde notre monde, je ne peux m’empêcher de penser que nous ne sommes pas prêts, et que notre monde risque fort de n’être pas prêt à accueillir le Messie, que les prophètes appellent le Prince de la Paix. Tant de conflits déchirent notre monde et le rendent incapable d’entendre un message de Paix. La Paix, nous l’espérons, mais la désirons-nous vraiment ? Nous ne pouvons certes pas grand-chose pour les conflits qui traversent notre monde, j’en conviens ; encore que la force de notre prière en faveur de la Paix ne soit pas à sous-estimer ! Mais peut-être devons-nous, en plus de notre prière, à ceux qui connaissent de graves conflits, de ne pas commencer de petits conflits entre nous ! La Paix dans le monde commence par la Paix dans nos foyers, dans nos écoles, dans nos quartiers. Je reste sans voix devant les chiffres des enfants harcelés à l’école. Selon les sources, ce sont entre 5 et 10% des élèves qui sont harcelés ! Nous ne pouvons pas dire que c’est juste dans l’école publique et que cela ne nous concerne pas ! Pour tous ces élèves et pour les harceleurs, travaillons à la Paix ! Je reste sans voix devant les chiffres des incidents lors de la minute de silence après l’attentat d’Arras : quelque chose de notre vivre ensemble est rompu. Et nous ne pouvons pas dire que c’est juste dans l’école publique et que cela ne nous concerne pas ! Pour un monde de plus grand respect, travaillons à la Paix ! 

             Dans l’Enseignement catholique d’Alsace, nous avons une chance et une clé pour travailler à la Paix, pour tisser du lien et donner sens au vivre ensemble. Il s’agit de l’heure d’enseignement religieux. Cette heure est obligatoire, pas d’abord parce que nous sommes écoles catholiques, mais parce que nous croyons que, dans un monde fracturé, il convient non pas d’ignorer ou marginaliser voire pointer du doigt les religions comme source de tous les maux, mais bien d’expliquer ce qu’elles apportent de positif à l’humanité. Et de grâce, ne parlons pas juste de vagues valeurs ! L’étymologie du mot ‘religion’ nous rappelle que le but des religions, c’est de relier les hommes, faire du lien ! Il n’y a rien de plus urgent quand on veut construire la Paix. Ne renonçons à cette heure pour aucun de nos élèves ; ne renonçons pas à cette prétention à vouloir faire du lien ! C’est en apprenant à mieux nous connaître, y compris au niveau de notre religion, que nous arriverons à mieux parler ensemble, à mieux vivre ensemble. En approfondissant ce que croient et vivent les hommes et femmes de religion différentes, nous comprendrons qu’ils partagent tous ce désir de vivre en Paix, et nous pourrons y travailler ensemble. 

             Que ce temps de l’Avent nous donne de vivre en Paix en nous-mêmes d’abord, entre nous ensuite. Que Celui qui vient à notre rencontre, Jésus, le Prince de la Paix, nous donne d’accueillir ce don de Dieu fait à l’humanité dans sa diversité. Que la Paix ne soit pas un doux rêve ; qu’elle devienne notre réalité ! Travaillons-y chacun, là où nous sommes engagés. Que ce soit par conviction religieuse ou par humanisme, construisons-la sans nous décourager. Bon temps de l’Avent ! 



Lettre pastorale pour la rentrée 2023


Regarder de haut ?
 

             Au cœur de cet été, j’ai eu la chance et la joie d’accompagner aux JMJ de Lisbonne, avec une équipe du SGEC, un groupe de jeunes enseignants de l’Enseignement catholique, venus de toutes les régions de France. Il semblait important de pouvoir faire cette proposition à nos jeunes professionnels qui veulent vivre davantage la dimension spirituelle de leur engagement au service de nos communautés éducatives. Le groupe était à l’image de l’ouverture que nous prônons pour nos établissements puisqu’il était constitué de jeunes catholiques, protestants et musulmans. Nous avons vécu un moment de fraternité véritable, dans le respect de chacun. Nos différences de pensée, d’engagement, de religion n’ont pas été des obstacles, mais une réelle chance, la profondeur des échanges entre nous en témoignaient. Nous avons tous vécu un temps intense et beau. 

Lors des rencontres avec le Pape François, deux paroles nous ont tous marqués. La première, donnée lors de son discours d’accueil, où il nous faisait comprendre qu’il y avait de la place pour tous dans l’Eglise catholique. Il a insisté longuement sur cette affirmation faisant scander aux milliers de jeunes rassemblés dans le Parc Edouard VII : Todos, todos, todos, plusieurs fois. Si cela est vrai de l’Eglise, ce doit être encore plus vrai de nos établissements qui sont pour beaucoup un lieu de contact avec cette même Eglise. Il doit y avoir de la place dans nos établissements, pour tous ceux qui veulent vivre notre projet au service de l’homme, quelles que soient leurs convictions religieuses et leurs origines. 

La deuxième parole a été donnée dans l’homélie du dimanche. Il nous interrogeait ainsi : Quand a-t-on le droit de regarder quelqu’un de haut ? Sa réponse est lumineuse : La seule fois où vous avez le droit de regarder quelqu’un de haut, c’est quand vous vous penchez vers lui pour le relever ! Nous retrouvons ici une image de l’Eglise qui lui est chère : celle de l’hôpital de campagne qui accueille et qui soigne tout un chacun. Et à ce moment-là, votre regard de haut n’est pas hautain, il est regard de compassion envers celui qui est tombé. 

Il y a là, me semble-t-il, une leçon pour tous. Comment nous regardons-nous ? Regardons-nous certaines personnes de haut parce que nous nous sentons supérieurs ? Regardons-nous celles et ceux qui sont différents de nous, qui pensent autrement que nous, avec suffisance ? Ou sommes-nous encore capables de leur tendre la main et d’échanger, non pour les convaincre que nous avons raison, mais pour faire juste un bout de chemin avec eux ? Regardons-nous de haut les propositions pédagogiques qui peuvent être faites, en n’hésitant pas à critiquer vertement celles qui ne correspondent pas tout-à-fait à notre propre idéologie, cherchant même à en interdire la réalisation ? Nous penchons-nous vers les autres pour les reprendre, les corriger, les critiquer au regard de nos croyances ? Ou nous penchons-nous vers les autres parce que nous croyons qu’ils ont peut-être aussi quelque chose à nous apprendre et qu’ils peuvent nous faire grandir et ouvrir notre regard ? 

Nos communautés éducatives ne sont-elles pas plus belles quand elles savent ainsi se pencher vers l’autre, non pas avec un esprit de supériorité (chez nous, tu vas apprendre à bien penser, sous-entendu comme nous pensons), mais pour le relever, l’écouter, faire un bout de chemin avec lui et le mener vers son excellence ? Voilà un beau défi que je vous propose de relever au cours cette nouvelle année scolaire que je vous souhaite belle et féconde. Que Dieu se penche vers vous et vous apprenne à regarder le monde comme il le fait toujours : avec tendresse et miséricorde.




Lettre pastorale pour le Carême 2023

Agir en frères

 

Les vacances qui s’achèvent auront permis aux chrétiens de nos communautés éducatives de vivre en famille et en paroisse l’entrée en Carême. Mais comment oublier que ce même jour, le Mercredi des Cendres donc, une enseignante d’un établissement catholique trouvait la mort après avoir été poignardée par l’un de ses élèves ? Comment oublier l’irruption du mal absolu dans la vie d’une classe, d’un établissement, d’une ville et du réseau de l’Enseignement catholique ? Ce n’est pas parce que cela a eu lieu à l’autre bout de la France que cela ne nous atteint pas. J’en suis d’autant plus touché que je prépare en ces mêmes jours une intervention pour nos amis lorrains sur le thème « Agir en frères ». Il n’y a rien de plus opposé à l’agir fraternel qu’un coup de couteau mortel ! Mais que pouvons-nous y faire ? 

S’il est clair pour moi que nous n’arriverons sans doute jamais totalement à éviter des gestes de ce genre, nous pouvons déjà nous montrer attentifs les uns aux autres. Il y a tellement de moyens de « tuer » socialement quelqu’un : moqueries, paroles déplacées, gestes déplacés, harcèlement et cyberharcèlement… L’Enseignement catholique a mis un place un Plan de Protection des Publics Fragiles : le connaissons-nous ? Des établissements réfléchissent aux procédures internes à mettre en place quand des cas de harcèlement sont détectés : y sommes-nous sensibles ? Nous devons tous être vigilants, nous devons tous être éducateurs et apprendre à vivre et agir en frères, et ce quelle que soit notre religion. L’autre, celui qui comme moi tient son existence de Dieu, est un frère, une sœur à aimer, à respecter. J’invite volontiers les adultes et nos élèves les plus grands à relire dans le Livre de la Genèse (chapitre 4) l’histoire de Caïn et d’Abel, deux frères dont la jalousie de l’aîné entrainera la mort du cadet. Entendez la question de Dieu à Caïn après le meurtre d’Abel : Où est Abel ton frère ? Entendez aussi la réponse de Caïn : Suis-je le gardien de mon frère ? Et bien oui, toute la Bible nous l’apprend et Jésus plus encore dans son enseignement : Tout ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ! (Mt 25, 40). Nous sommes le gardien de nos frères et sœurs que Dieu met sur notre route ; nous sommes responsables d’eux, responsables les uns des autres. Ou bien nous arriverons à vivre ensemble, en bonne intelligence et avec un minimum de respect, ou nous mourrons ensemble de n’avoir pas su voir que notre vie passe par la vie des autres, que notre bonheur passe par le bonheur des autres. Nous sommes liés les uns aux autres depuis que le Christ s’est lié à nous en venant dans notre monde ; nous sommes liés les uns aux autres depuis que le Christ a livré sa vie pour le salut de tous. 

Le temps du Carême est un temps favorable pour redécouvrir la force d’une fraternité universelle qui va au-delà des liens du sang. Si les histoires de frères ou de sœurs dans la Bible sont toutes compliquées, c’est pour nous rappeler que la fraternité n’est ni simple, ni naturelle : elle est toujours à travailler. C’est pour cela que la Bible nous montre aussi, dans la plupart de ses histoires, que la réconciliation est possible : voyez Joseph, vendu comme esclave par ses frères jaloux de lui (Gn 37, 2-28), qui, ayant acquis un pouvoir presque identique à celui de pharaon, ne se venge pourtant pas de ses frères et leur offre son pardon (Gn 44, 4-11). Le jeûne, la prière et le partage, moyens privilégiés de la conversion au temps du Carême, nous permettront de retrouver le sens de l’essentiel : l’amour de Dieu pour nous que nous avons à vivre avec tous. Entendons encore l’avertissement de saint Jean dans sa première lettre (chapitre 4, versets 20-21) : Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. Et voici le commandement que nous tenons de lui : celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. Que cette parole nous aide à vivre et à agir en frères dans nos communautés éducatives. Bon temps de Carême et belle montée vers Pâques.




Lettre pastorale pour l'Avent 2022

Allons-nous fêter Noël ?


             Crise écologique, crise financière, crise du COVID qui rebondit, crise de confiance dans l’Eglise, crise énergétique : je pourrais continuer à aligner les raisons qui font que certains décident de ne pas fêter Noël cette année. N’est-ce pas : comme on ne peut pas faire comme les années passées, on ne fait rien plutôt que de faire au rabais. Mais ne rien faire n’est-ce pas pire que de faire autrement ?

            Ne pas fêter Noël, et donc ne pas s’y préparer durant ce temps de l’Avent qui s’ouvre ce dimanche, reviendrait, pour moi, à abdiquer ma foi et mon espérance. Dieu s’est fait homme en Jésus Christ, c’est un fait que des millions d’hommes et de femmes partagent à travers le monde. Nous ne pouvons pas renoncer à fêter cela. Noël marque un renouveau dans l’histoire des hommes au sens où Dieu manifeste plus que jamais de l’intérêt pour ce que vivent les hommes. Faut-il rappeler qu’il vient en un peuple et en un pays en crise, occupé par l’envahisseur romain ? Sa naissance est source d’avenir, comme chaque naissance d’ailleurs. Pour les chrétiens, cette naissance est aussi source d’espérance : celui dont nous préparons la venue est celui qui sauvera le monde. Prenons le temps, durant cet Avent, de relire les prophéties d’Isaïe que nos liturgies dominicales nous feront proclamer. Ne perdons pas notre espérance en un monde plus fraternel que Dieu veut construire avec nous et par nous juste parce que nous devrons peut-être faire autrement.

            La sobriété dont on nous parle tant ces dernières semaines n’a rien à voir avec l’abandon de l’esprit de fête. Peut-être même qu’elle nous fera redécouvrir la vraie dimension de Noël. Au-delà d’une débauche de cadeaux achetés à grands frais, peut-être retrouverons-nous le plaisir des choses simples. L’esprit de Noël, c’est le partage, la solidarité, l’accueil de celui que Dieu nous envoie comme un cadeau. Et cela nous rappelle que celles et ceux que je croise sont un cadeau que Dieu me fait, et donc que je suis, moi-aussi, un cadeau que Dieu fait aux autres. Nous avons du prix, de la valeur, non pas parce que nous savons faire de beaux et chers cadeaux, mais parce que nous sommes nous, tout simplement, avec nos qualités et nos défauts, mais nous absolument uniques. Nous ne sommes pas remplaçables par un autre, comme le serait un bol fêlé par un bol non fêlé. La sagesse populaire ne dit-elle pas « qu’un seul être vous manque et la terre est dépeuplée » ?

    Prendre quatre semaines pour nous préparer à fêter Noël, c’est faire preuve de confiance en l’avenir. La promesse d’un monde meilleur est vraie ; la promesse d’un monde meilleur est réalisable. Dieu l’a réalisé pour nous en Jésus, que les chrétiens reconnaissent comme Christ et Seigneur. Cette promesse nous est confiée pour qu’à notre tour nous entrions dans sa réalisation par tous les petits pas que nous pouvons faire autour de nous pour construire ce monde plus fraternel. Une seule chose est nécessaire : il faut le courage d’essayer. Essayons le partage d’un sourire, d’une présence, de quelques « bredele » faits avec amour. Et si nous sommes croyants, essayons le partage de notre foi et de notre espérance. Si nous trouvons ces deux choses bonnes pour nous, pourquoi ne pas les proposer autour de nous ? Bon temps de l’Avent et belles fêtes de Noël.



Lettre pastorale pour la rentrée 2022

Crise climatique ?



Nous en avons tous fait l’expérience cet été : le climat est en crise. Il perd la tête. Les très fortes chaleurs, qui étaient l’apanage des pays tropicaux, ne connaissent plus de frontières. Et quand le climat fait sa crise, il entraîne d’autres maux : sècheresse, manque d’eau jusqu’à devoir rationner notre consommation, incendies en masse sur des surfaces de plus en plus étendues. Au 20 août 2022, 62 154 ha avaient brûlé en France, soit 621,54 km2. Pour ceux qui ont besoin d’images pour mieux se représenter les choses, cela représente la superficie de 88 000 terrains de foot ! Selon le média franceinfo, cela représente 13,1% du Bas-Rhin, soit 8 fois la surface de Strasbourg ; et 17,6 % du Haut-Rhin, soit 9,3 fois la surface de Colmar ! Et un principal responsable de tous ces dégâts : l’homme ! Après l’été que nous venons de vivre, les climato-sceptiques devront batailler pour nous expliquer qu’il n’y a pas de crise climatique, que l’homme et son mode de vie n’y sont pour rien. C’est peine perdue ; nous avons tous, à un degré ou à un autre, fait l’expérience très concrète de ce que les scientifiques nous annoncent depuis longtemps. La terre se réchauffe, et à ce rythme, des zones entières de notre planète seront inhabitables.  

             Ces réflexions et ces dérives du climat nous invitent à réfléchir à un autre climat, celui de nos établissements catholiques. Y fait-il bon vivre et travailler ? Quel climat avons-nous favorisé et favoriserons-nous à l’avenir ? Quand l’Eglise parle de la différence entre l’école catholique et les autres écoles, c’est sur ce point précis qu’elle appuie sa réflexion. Quand le Concile Vatican II, dans sa déclaration Gravissimum educationis définit l’école catholique, il affirme : « La présence de l’Église dans le domaine scolaire se manifeste à un titre particulier par l’école catholique. Tout autant que les autres écoles, celle-ci poursuit des fins culturelles et la formation humaine des jeunes. Ce qui lui appartient en propre, c’est de créer pour la communauté scolaire une atmosphère animée d’un esprit évangélique de liberté et de charité (…) » (GE n° 8). Ce que nous traduisons par un climat évangélique. Est-ce bien l’Evangile, dans toute sa richesse, qui donne le ton de ce qui est à vivre dans nos écoles ? Est-ce bien l’Evangile qui définit le climat de nos établissements ? Chefs d’établissement et agents pastoraux, est-ce bien ce climat évangélique que nous avons à cœur lorsque nous accueillons quelqu’un ? Enseignants et personnels éducatifs, est-ce bien l’Evangile qui nous guide et nous anime quand nous avons à nous prononcer sur un élève ? Familles et élèves, est-ce bien ce climat évangélique que nous recherchons prioritairement et que nous voulons contribuer à faire vivre ? Membres de nos communautés éducatives, est-ce bien ensemble que nous voulons permettre ce climat évangélique où chacun se sent respecté, écouté, mis en valeur, pour grandir dans notre humanité ? 

             A ceux qui penseraient qu’ils sont dispensés de vivre ce climat parce qu’ils ne partagent pas la foi chrétienne ou ne croient en rien, je rappelle que le climat évangélique est non négociable. Il n’est pas l’apanage des chrétiens, même si ces derniers doivent en porter le souci à cause de leur foi. Mais chacun, quelle que soit sa foi ou sa non foi, est appelé à vivre le respect de tous, l’ouverture à tous, la non-discrimination ; chacun, quelle que soit sa foi ou sa non foi, doit s’obliger à ne pas faire aux autres ce qu’il ne voudrait qu’on lui fasse ; chacun, quelle que soit sa foi ou sa non foi, est appelé à faire sien cet art de vivre que le Christ a rappelé tout au long de sa vie. Il nous dit que nous sommes tous frères ; il nous dit que nous sommes tous fils et filles d’un même Père ; il nous dit que nous sommes tous responsables des autres et du bonheur des autres. La fraternité n’a pas de religion, mais chaque religion la promeut. L’attention au bonheur des autres n’a pas de religion, mais chaque religion y invite. Le respect de tous n’a pas de religion, mais chaque religion demande à ses membres de le pratiquer. Et pour ceux qui ne reconnaissent aucune religion, je rappelle que la laïcité bien comprise fait de même ! 

             En cette rentrée 2022, prenons l’engagement, là où nous sommes, de découvrir, d’approfondir et de vivre ce climat évangélique qui doit caractériser nos écoles. Faisons le choix de changer le monde par ce que nous avons de plus précieux : l’art de vivre de celles et ceux qui veulent vraiment grandir en humanité, art de vivre que le Christ a confirmé en s’offrant sur le bois de la croix. Oui, il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d'être unis ! (Ps 132,1). Bonne rentrée, dans un climat doux tout au long de cette année.




Lettre pastorale pour le Carême 2022

Marcher avec Jésus.


            Nous avions l’espérance d’un retour progressif à une vie normale après une crise sanitaire de plus de deux ans ; les chiffres nous laissaient croire que tout irait mieux. Et voilà qu’à l’Orient se fait entendre le bruit des bottes et des bombes, une autre crise autrement plus grave, qui va impacter l’Europe au premier chef et l’équilibre du monde au second. Est-ce donc à cela que nous sommes destinés : passer d’une crise à une autre en spectateurs impuissants ? Que deviennent nos grandes aspirations comme la liberté, la paix, la fraternité ?

            Ce mercredi 2 mars, les chrétiens entrent en Carême, en quarantaine spirituelle. Il n’est pas question, là, de confinement ou d’isolement, bien au contraire. Une quarantaine spirituelle pour guérir du Mal qui ronge toujours et encore notre vie, pour devenir vraiment libres. Une quarantaine spirituelle pour guérir de nos tentations de replis identitaires, pour réapprendre à voir en tout homme un frère à respecter, un frère à aimer. Une quarantaine spirituelle pour marcher à la suite du Christ vers ce Royaume de paix où Dieu nous attend. Ce Royaume n’est pas que pour demain, quand sonnera l’heure de notre grand passage. Ce Royaume, nous avons à le construire dès maintenant, dès aujourd’hui. La liberté et la paix ici et maintenant, la fraternité vécue au quotidien en sont des signes de réalisation.

            Sur ce chemin sans cesse à refaire, sans cesse à approfondir, le Christ reste notre guide et notre frère. Il nous dit la voie la plus juste pour parvenir là où Dieu nous attend. Sur cette route, nul besoin de bottes, nul besoin d’armes. Ceux qui marchent avec nous sont nos frères ; ceux que nous rencontrerons sur le chemin sont appelés à le devenir. Avec le Christ, nous sommes appelés à faire reculer la haine pour ne laisser place qu’à l’Amour ; avec le Christ, nous sommes appelés à refuser le mensonge pour faire rayonner la Vérité. Tout le contraire des nombreux discours qu’on nous sert depuis quelques jours pour justifier cette crise politique qui se joue à l’Est.  

            De crise en crise, nous voyons bien combien la paix, la liberté et la fraternité sont fragiles ; notre propre société n’est-elle pas devenue plus violente depuis deux ans ? L’impatience face aux crises qui perdurent ou qui se suivent, l’exaspération devant les mensonges de ceux qui nous gouvernent, la fatigue sans doute aussi, auront eu raison de nos bons sentiments. Mais justement, ce ne sont pas de bons sentiments que nous devons vivre, mais d’une réelle aspiration à la liberté, d’une réelle aspiration à la paix, d’une réelle aspiration à la fraternité. Ce Carême, à la suite du Christ, doit nous permettre d’ancrer solidement en nous ces signes du Royaume. N’attendons pas que tous les hommes soient libres pour vivre libres de toute haine et de tout mensonge. N’attendons pas que le monde soit en paix pour vivre une paix véritable à l’échelle de nos familles, de nos quartiers et de nos écoles. N’attendons pas la fin de toutes les guerres pour vivre une vraie fraternité avec celles et ceux qui croisent notre route. A trop attendre, nous risquons de passer à côté et de n’être jamais ni libres, ni en paix, ni fraternels.

             Que le Christ qui a donné sa vie pour que nous puissions vivre libres, en paix et en frères, nous guide durant ces quarante jours. Au bout du chemin, il y a Pâques, la Vie véritable plus forte que toutes les forces de Mort. Bon Carême, avec le Christ. 




Lettre pastorale pour l'Avent 2021

Evaluation, quand tu nous tiens !




                L’évaluation : c’est le mot à la tendance en ces jours. Evaluation des établissements, évaluation de nos élèves, évaluation au sein de l’Eglise. Difficile pour moi d’échapper à ce mot qui, je l’espère, va dépasser le simple cadre d’une tendance, d’une mode. Ce n’est pas tant le mot qui m’effraie que ce que l’on pourrait être tenté d’en faire. Je veux rester ici optimiste et me souvenir que, dans une autre vie, lorsque j’étais curé de paroisse il y a vingt ans, je proposais déjà à celles et à ceux qui travaillaient avec moi à la conduite de la pastorale, de faire, au mois de juin, une évaluation de ce que nous avions vécu, de ce qui pourrait être mieux fait encore, de ce qu’il faudrait abandonner. Je me souviens aussi des réticences de certains, parce que ce n’est jamais simple de jeter un regard en arrière. Pourquoi se soucier du passé, l’avenir est devant nous. 

             C’est vrai, l’avenir est devant nous ! Mais comment aller vers cet avenir, comment le construire mieux, sans prendre le temps de s’arrêter, de regarder honnêtement ce que nous vivons, ce que nous avons vécu pour en tirer des forces neuves, un désir nouveau, pour servir mieux, pour construire mieux. Il y a alors deux manières de faire, me semble-t-il. Lorsque j’étais moi-même écolier, j’avais l’impression que le système scolaire évaluait mes manques : c’est comme si les enseignants partaient d’un point idéal où je me devais d’être à l’âge qui était le mien (grâce à leur excellent enseignement). Et mes notes ne me disaient pas ce que je savais, mais le chemin qu’il restait à parcourir pour arriver à cet idéal décidé par je ne sais qui. Ce qui était évident pour moi, c’est que cet idéal fixé n’était pas toujours (selon les matières) le mien ! L’autre manière de faire est de tenir compte de la personne, des progrès qu’elle a accomplis, du chemin qui a été parcouru. Il ne s’agit pas de nous lamenter sur nos échecs, mais de repérer nos points forts pour les développer encore et voir à quoi ils nous appellent encore, autrement dit d’additionner les pas nouveaux réalisés. Dans le premier cas, on souligne les efforts qu’il reste à faire ; dans le second cas, on voit les progrès réalisés. 

             Et là, relisant la deuxième lecture de notre premier dimanche de l’Avent (1 Th 3, 12 – 4,2), je me rends compte que l’évaluation est une démarche authentiquement spirituelle. Paul écrit à ces frères pour les encourager à un art de vivre chrétien, conforme à la foi au Christ Sauveur. Dans ce passage, il formule d’abord des vœux : Que le Seigneur vous donne un amour de plus en plus intense et débordant… qu’il affermisse vos cœurs, les rendant irréprochables en sainteté. Ce dont il est question, ce n’est pas de se fatiguer à faire quelque chose, mais d’accueillir ce qui est donné : la capacité d’aimer et la sainteté. Puis il rappelle qu’il leur a enseigné ce que c’est que de vivre en chrétien, avant de leur donner une parole que je trouve sublime parce que rare : c’est ainsi que vous vous conduisez déjà. Faites donc de nouveaux progrès. Il leur dit qu’ils font déjà bien. Il ne leur parle pas d’efforts et de sueur, mais de persévérance et de confiance. Une évaluation bienveillante sans être naïve. 

             C’est ainsi que je suis entré dans ce temps de l’Avent ; c’est ainsi que je vous invite à le vivre en cette nouvelle année liturgique. Non pas comme un temps où je me dis que cette année, je dois absolument faire mieux que l’an passé. Mais comme un temps pour me réjouir de ce que le Seigneur m’a déjà donné de vivre depuis tant d’années, et un temps pour réaliser que cela vaut la peine de poursuivre encore, de croire encore en ce Dieu qui ne cesse de venir dans notre monde, de croire encore en ce Dieu qui ne cesse de venir à ma rencontre pour me faire vivre de sa vie. Que ce temps de l’Avent nous permette d’évaluer et d’apprécier l’amour de Dieu pour nous ; qu’il renouvelle notre désir d’accueillir celui qui frappe à notre porte pour partager notre vie. Préparons-nous, préparons notre vie à accueillir encore Celui qui vient nous sauver, le Christ Rédempteur. Bon temps de l’Avent, dans la célébration de tout ce que vous avez déjà vécu avec le Christ, dans la joie de tout ce que vous pourrez encore vivre avec lui.




Lettre pastorale pour la rentrée 2021


Liberté chérie...


        Les vacances sont désormais terminées et nous avons repris le chemin de l’école avec plus ou moins d’enthousiasme, plus ou moins rassurés par les mesures sanitaires qui accompagnent encore cette rentrée. Je mesure toujours plus le fossé qui se creuse entre les personnes et surtout l’incapacité à discuter sereinement. Je le constate à la sortie des églises où je célèbre ; je l’entends aussi chaque matin lorsque j’écoute les informations à la radio. Cette crise sanitaire en a entraîné une autre dans son sillage, la crise de l’intelligence. Certains mourront encore et de ce virus et de la bêtise qu’il génère. Nous avons pu voir, lors des manifestations qui ont rythmées les samedis de nos vacances, des gens chercher volontairement à être contaminés. Ceux que je connais et qui ont eu à souffrir du COVID en ont été profondément choqués. Comment peut-on vouloir tomber malade en sachant qu’il y a un risque avéré (pas seulement en France, mais dans le monde entier) d’en être gravement affecté, voire d’en mourir.

             Ceux qui manifestent le plus bruyamment, le font au nom de notre liberté. Mais que vaut ma liberté si elle peut entraîner ma mort et celles de ceux qui me côtoient ? Suis-je libre jusqu’à semer la maladie et possiblement la mort ? Je n’entends personne crier à l’atteinte à la liberté lorsque, voulant voyager dans des pays d’Asie ou d’Afrique, il leur est demandé d’être vacciné contre la fièvre jaune, par exemple. Si un voyage de noces sous les tropiques vaut bien un vaccin, notre vie quotidienne et le retour à une normalité dans nos relations sociales n’en valent-ils pas autant ? L’exigence d’un vaccin serait légitime pour assouvir nos plaisirs, mais totalement hors de propos pour assurer un quotidien libre de tout danger grave ?

             Puisque nous avons en charge l’école catholique qui est en Alsace, nous devons insister pour que ceux qui la fréquentent,  retrouvent au moins le sens de ce qui compte vraiment. L’éducation fait partie de notre cœur de métier. Nous ne saurions nous contenter de dire : ainsi va le monde ! Même si c’est difficile, il faut éduquer au sens du bien commun, à la vraie liberté qui prend en compte l’autre et sa sécurité. Je ne peux qu’inviter les plus réticents au nom de leur foi à relire, sur le site du Saint Siège, les différentes communications du Pape François et de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi au sujet du vaccin et de cette crise qui continue de bouleverser le quotidien des hommes et des femmes dans le monde entier. Il me semble qu’en matière sanitaire, l’effort à faire est le même qu’au niveau de la foi : il ne faut pas contraindre, mais éclairer les consciences. Le Dieu que nous servons et annonçons est le Dieu de la Vie, le Dieu qui nous engage pour la Vie. Certains diront : ben justement, je refuse le vaccin parce qu’il serait fait à partir de cellules d’embryons avortés ; comme je ne peux pas soutenir l’avortement, je refuse le vaccin. Est-ce à dire que les chrétiens soutiennent la peine de mort parce qu’ils confessent un Christ ressuscité certes, mais d’abord condamné et mis à mort par les hommes ? De plus, seulement deux vaccins sur les quatre disponibles utilisent des « lignées cellulaires non éthiques » dans leur production[1].

             Notre souci premier doit rester le droit à l’éducation et le combat contre toute forme d’obscurantisme. Notre souci, cette année, doit être d’éviter que nos écoles deviennent des foyers d’infection et de propagation d’une maladie que nous ne combattrons qu’ensemble. Notre souci doit rester la vie et le bien de tous, avant d’être celui d’une liberté égoïste. Liberté, liberté chérie… oui, je crois à l’importance de ce mot écrit sur le fronton des bâtiments publics. Mais je sais aussi que je ne saurais être libre seul ; je ne saurais être libre si ma liberté entrave celle des autres. Bonne reprise à toutes et à tous, avec la liberté garantie de pouvoir veiller sur les autres.





Lettre pastorale pour l'été 2021

Atteindrons-nous le niveau intellectuel de la sardine ?



            Au terme d’une année scolaire à nouveau marquée par le COVID (les nouvelles éditions des dictionnaires français en ont fait définitivement un masculin), nous nous apprêtons tous à quelques vacances bien méritées. Des vacances que je nous souhaite réelles, en présentiel et non virtuelles, parce que notre fatigue est réelle et que le repos réparateur se doit de l’être aussi. Au moment de rédiger ce billet, je n’ai pu m’empêcher de regarder à nouveau cette vidéo – que je vous conseille de visionner avant de poursuivre la lecture – (https://www.youtube.com/watch?v=_48gKagPaB0) qui nous permet, au-delà de l’humour, de réfléchir à notre vivre ensemble depuis qu’a éclaté cette crise sanitaire qui affecte notre quotidien depuis un an et demi. Je ne pense pas qu’il y ait quelque humain responsable qui ait vraiment envie de vivre une année supplémentaire avec la perspective d’un retour en confinement dès le mois de septembre.

             Pourtant, c’est ce que nous annoncent les autorités sanitaires depuis l’assouplissement des mesures qui entravaient notre quotidien. En fait, à peine le changement des règles sanitaires était-ils annoncé que déjà les prophètes de malheur élevaient leur voix : la quatrième vague est pour septembre, cela ne fait aucun doute. Ils voudraient nous gâcher nos vacances, ils ne s’y prendraient pas autrement ! Il faut dire que les Français ne sont ni très disciplinés, ni très enclins à prendre la seule mesure qui s’impose : le vaccin. Il y aurait un plafond de verre qui nous empêcherait d’atteindre cette fameuse immunité collective qui nous protégerait tous. Il resterait des irréductibles opposants, qui résisteraient toujours et encore. Un rapide voyage sur les réseaux sociaux ne rassure guère quant à leur capacité à se convertir.

              Au Vatican, le pape François n’y est pas allé par quatre chemins. La vaccination a été rendue obligatoire pour tous les employés de ce petit État. Que voulez-vous ? Fort de la Doctrine sociale de l’Eglise, le pape nous invite au respect du bien commun, c’est-à-dire du bien de tous. Dans un entretien avec la presse au mois de janvier, le pape disait : « il y a un négationnisme suicidaire que je ne saurais pas expliquer, mais aujourd’hui il faut se faire vacciner. Je crois que d’un point de vie éthique tout le monde doit se faire vacciner, c’est un choix éthique, parce qu’on met à risque sa santé, sa vie, mais aussi la vie des autres ». Et en bon chef, il a été le premier vacciné de son petit État.

 

             Et c’est là que je reviens avec mes sardines. J’aurais pu choisir les fourmis ou les gnous, le résultat eut été le même. Tous ces animaux savent aller dans une même direction. Pourquoi pas nous ? Je n’ai pas plus de réponse que le pape François ou l’humoriste de la vidéo. Mais, comme responsable pastoral, je ne peux que rappeler que le bien de tous est supérieur à mon bien individuel et que s’il existe un chemin qui assure le bien du plus grand nombre, je me dois de l’emprunter. Je ne peux pas me désolidariser de mes frères en humanité. Si une sardine y arrive, pourquoi pas nous ? A propos des sardines, savez-vous quel est le seul moment de sa vie où une sardine ne vas pas dans le même sens que ses sœurs ? Quand l’homme la met en boîte ; il les range tête-bêche pour mieux les serrer ! Il est urgent que nous égalions le niveau intellectuel d’une sardine et que nous allions dans la même direction : le bien de tous ! A ce prix, nous aurons tous de belles vacances, reposantes et protégées. A ce prix surtout, nous pourrons espérer une vie scolaire plus normale à la rentrée.

 

Bonnes vacances à tous les membres de nos communautés éducatives !




Lettre pastorale pour le Carême 2021

Le Carême, un temps de confinement ?


Alors que de voix nombreuses s’élèvent pour un nouveau confinement, voici que nous entrons en Carême. Chouette, diront certains, joignons l’utile (le Carême) au désagréable (le confinement). Nous pourrons vivre ce temps imposé par la rigueur de la loi et la crainte du virus qui paralyse le monde depuis trop longtemps de manière sainte : repliés chez nous, entièrement tournés vers Dieu. Quel bonheur ! Eh bien non ! Trois fois non !

Comme je le rappelais déjà dans ma lettre pastorale pour le Carême de l’an passé, le Carême est un temps de préparation, de purification qui nous entraîne vers Pâques, vers la vie en plénitude. Il est aussi, me semble-t-il, un événement communautaire. Le Carême est un temps de l’Eglise, c'est-à-dire un temps de la communauté croyante et pas uniquement des individus qui la composent. Dit autrement, si ce temps me tourne vers Dieu, il me tourne aussi nécessairement vers mes frères en humanité et pas seulement vers mes frères dans ma foi. Nous le sentons bien dans l’Enseignement catholique lorsque chaque année, à cette période, nous organisons divers temps de solidarité. Imaginer que ce temps puisse être, en cas de re-confinement, juste un temps pour moi et mon Dieu, serait une erreur. Un Carême qui serait vécu comme un auto-confinement, qui ne me tournerait plus vers les plus pauvres, serait un Carême à demi-vécu pour ne pas dire mal vécu. Je ne peux laisser tomber mes frères sous prétexte que la situation sanitaire ne me permet pas de sortir de chez moi. Je ne peux pas m’isoler avec mon Dieu ; Dieu se charge toujours de nous renvoyer vers nos frères et sœurs dont il a partagé l’humanité en son Fils Jésus.

C’est la raison pour laquelle je demande à chaque Adjoint (ou Animateur) en Pastorale Scolaire de veiller, comme beaucoup l’ont déjà fait l’an passé, à utiliser tous les moyens techniques possibles afin de garder le lien avec nos communautés éducatives au cas où nous nous retrouverions reconfinés. De la même manière, je demande à chaque enseignant de religion de considérer son enseignement comme absolument essentiel en ces temps difficiles. Il nous permet de remettre du sens là où pour beaucoup de nos concitoyens il n’y en a plus depuis un an. La situation sanitaire que nous connaissons, entraîne, au-delà des malades de ce virus, une détresse psychologique et spirituelle qui ne peut ni ne doit nous laisser indifférents. L’enseignement religieux n’est pas une matière secondaire dont nous pourrions nous dispenser ; il est à assurer, y compris en visio-conférence, de manière régulière, comme n’importe quel enseignement. Je demande aux chrétiens de nos communautés éducatives d’être des veilleurs auprès de leurs frères et sœurs pour que ceux qui ont plus de difficultés à vivre ces temps difficiles se sentent soutenus. J’adresse aussi cet appel à tous les hommes et femmes de bonne volonté qui ne partagent pas notre foi ; ensemble, nous démontrerons que nos communautés éducatives sont aussi d’abord des communautés humaines qui portent le souci de chacun.

Je ne souhaite pas plus que beaucoup d’entre vous un nouveau confinement. Mais s’il devait nous être imposé à nouveau en ce temps de Carême, je souhaite que nous le vivions dans le souci constant des plus faibles de nos communautés, dans le souci constant d’accomplir, envers et contre tout, notre mission d’éducation dans un véritable esprit fraternel. Je prie Dieu qu’il accorde à tous et à chacun un esprit fraternel renouvelé et l’espérance de jours meilleurs. C’est, pour le prêtre que je suis, l’espérance du matin de Pâques, quand la vie reprend ses droits et s’affirme, en Jésus mort et ressuscité, plus forte que toutes les forces du Mal. Bon Carême, peut-être confiné, mais sans confinement spirituel, sans confinement fraternel. Que les frères que Dieu nous donne soient toujours notre souci constant.



Lettre pastorale à l'occasion de la nouvelle année

L'année d'après, le monde d'après ?

Nous voici donc passés à l’année d’après. L’année d’après l’émergence de ce virus qui nous gâche la vie depuis trop longtemps maintenant. Vous souvenez-vous de ce temps où nous pouvions embrasser quelqu’un en l’accueillant, réconforter quelqu’un en le serrant dans nos bras, inviter largement à notre table pour un temps d’amitié et de convivialité ? C’était le temps d’avant ! Les efforts que nous faisons tous en acceptant des restrictions de liberté (confinement, couvre-feu), des contraintes pas toujours comprises parce que mal expliquées (masque, gel…) semblent sans effet puisque, régulièrement, le virus semble déjouer toutes nos tentatives de l’éradiquer ou du moins de limiter ses effets. Le vaccin promis est livré au compte-goutte ; il a été promis une accélération de sa distribution qui entraîne une méfiance plus grande encore de la part de nos concitoyens. Avec tout cela, c’est le monde d’après qu’on nous a promis dès le début de la pandémie qui semble s’éloigner : plus d’un million de nouveaux pauvres, des commerces qui disparaissent, des entreprises fragilisées, un avenir incertain pour beaucoup, une angoisse qui grandit, une incertitude quant aux examens que nous préparons, … : rien de très réjouissant ! 

Pourtant, je ne peux oublier cette promesse d’un monde d’après qui serait meilleur. Je m’y accroche même pour ne pas désespérer. Et je me mets à rêver : pourquoi attendrions-nous la fin de la pandémie pour inaugurer ce monde d’après ? Avec une nouvelle année, ne pouvons-nous pas décider de commencer ce monde d’après ? Ne risquons-nous pas de devoir le remettre aux calendes grecques si nous attendons la mort du virus ? Rien ne nous empêche de commencer à vivre ce monde d’après dans lequel chacun serait respecté pour ce qu’il est ; ce monde où la fraternité ne serait plus un mot mais une attitude profondément ancrée en chacun ; ce monde où la différence ne serait pas un obstacle, voire une crainte, mais une chance et une qualité recherchée ; ce monde où quelles que soient votre origine, votre croyance, votre couleur de peau, vos qualités et vos limites, vous ayez tous les mêmes chances, les mêmes droits, la même valeur. Chacun peut décider de commencer à vivre ce monde d’après, sans attendre que l’autre ne commence ! Chacun peut décider que la distanciation sociale, si elle est nécessaire encore quelques temps, ne doit pas devenir repli sur soi, ni rejet de l’autre. Chacun peut décider, dès maintenant, malgré les mesures barrières nécessaires encore quelques temps, de ne pas transformer l’autre en danger permanent et donc en personne à éviter. Si nous attendons la fin du virus pour retisser le tissu social qu’il aura méthodiquement déchiré, nous risquons forts de ne pas avoir assez de fil pour tout reprendre. 

Le monde d’après, les chrétiens ont accepté de le construire dès le lendemain de la Pentecôte. Ils n’ont pas attendu le retour du Christ dans la gloire pour se dire : c’est maintenant qu’il faut y aller. Nos établissements scolaires reposent sur cette intuition des premiers croyants, intuition qui repose elle-même sur l’ordre du Christ : Allez, de toutes les nations faites des disciples ! (Mt 28,19). Par la seule force de leur exemple et de leur foi, ils ont fait des merveilles. Nous mesurons là toutes les merveilles que nous pouvons réaliser dans nos communautés éducatives pour que ce monde d’après soit le monde d’aujourd’hui, le monde non pas dans lequel nous voudrions vivre, mais le monde dans lequel nous vivons déjà. Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps, dit encore le Christ à ses Apôtres quand il les envoie (Mt 28, 20). Cette promesse est toujours d’actualité. Avec Lui dont nous venons de fêter l’entrée dans le monde des humains, construisons dès maintenant ce monde, sans plus attendre. En se faisant humain, il nous a montré le chemin à suivre pour réaliser cette œuvre : une humanité accomplie. Alors toi aussi, fais-le comme Dieu, deviens humain (Mach’s wie Gott, werde Mensch, Mgr Franz KAMPHAUS) et ce monde sera ton quotidien. 

A toutes et à tous, une belle année 2021, faites de joie et de réussite, pour un monde meilleur dès aujourd’hui.



Lettre pastorale à l'occasion de la reprise après la Toussaint


Le Christ est annoncé, et de cela je me réjouis. C’est un extrait de la lettre de Paul aux Philippiens que j’ai commenté ce samedi lors de la messe au Carmel de Marienthal. Je disais en substance aux sœurs que « Paul doit tourner sur lui-même, en ce moment au Paradis, lui qui affirme que l’important, c’est l’annonce du Christ. En effet, à partir de mardi, cette annonce publique ne pourra plus se faire, les églises étant interdites au culte public, parce que non essentielles pour la vie des hommes, au même rang donc que les lieux de culture et les lieux de sociabilité voire d’humanité, privés eux-aussi de public. Il nous faut bien mesurer ce que cela signifie : à force d’être étiqueté non-essentiel, nous finirons tous inutiles. Déjà, les communautés croyantes ont perdu entre dix et vingt pour cent de leurs membres. La peur, que les gouvernants ont savamment et patiemment distillée, fait son effet ». 

Non-essentiel : il y a quelque chose de méprisant dans cette expression, et je ne parle pas seulement pour l’Eglise. Je pense à toutes ces personnes qui travaillent dans des conditions difficiles quelquefois pour que nous ayons des lieux de convivialité, de joie ; des lieux dans lesquels notre humanité peut s’épanouir et nos relations s’élargir. C’était le monde d’avant ! Maintenant, tous ces lieux d’humanité, tous ces métiers qui permettent à l’humain de rayonner, ont été décrétés non-essentiels, inutiles parce qu’on pourrait s’en passer sans vivre moins bien, paraît-il ! Mais là où se forge notre humanité, là se forge aussi notre sainteté ! Je crains donc qu’à voir rapetisser notre humanité, nous ne voyions aussi rapetisser notre sainteté. Peut-être faudrait-il que tous les non-essentiels, tous les inutiles se donnent la main (après passage au gel hydroalcoolique bien sûr) : juste pour voir combien ça fait de non-essentiels, d’inutiles.

Au moment où nous reprenons les cours dans nos écoles catholiques, revenons à nos fondamentaux et osons réaffirmer fortement que la dimension spirituelle n’est pas inutile, n’est pas non-essentielle. Bien au contraire ! La formation intégrale de la personne que nous prônons nous rappelle justement que cette dimension spirituelle fait partie intégrante de l’humanité que nous avons à cultiver et à faire grandir chez tous les élèves qui nous sont confiés. Nous ne lutterons pas contre les extrémismes en niant cette dimension ; nous risquons fort, à considérer la spiritualité et l’ouverture à Dieu comme non-essentielles, de voir justement ces extrémismes grandir et prospérer. Il nous faut donc annoncer toujours et encore le Christ, selon la parole de Paul. Il est la vérité qui rend libre ; il est la lumière qui éclaire les ténèbres de notre ignorance, la lumière qui repousse les ténèbres de nos haines et de nos peurs. 

Parmi tous les documents que vous avez reçu pour l’hommage à Samuel PATY, l’enseignant assassiné pour sa liberté de parole, il y a aussi un temps de prière proposé par le Secrétariat Général. Il est loin d’être accessoire. Il me semble même le document le plus important, parce qu’il nous permettra de prendre encore plus de hauteur et de nous remettre les uns et les autres, quelle que soit notre foi ou notre non foi entre les mains de celui que les croyants reconnaissent comme Père, comme origine de la vie et de l’amour, comme source de notre liberté. En nous plaçant sous le regard de ce Dieu de vie et d’amour, nous comprendrons mieux que nos paroles peuvent conduire à plus de vie quand elles sont respectueuses de tous, comme elles peuvent conduire aussi à la mort quand elles se font méchantes voire assassines. La liberté d’expression ne nous dispense pas de faire œuvre d’intelligence ; elle ne nous dispense pas du respect élémentaire dû à tout être humain. Il y a des paroles qui font grandir et vivre ; il y a des paroles qui tuent, sans même que le sang ne coule. Il y a aussi des paroles bonnes qui peuvent mener à la mort ; regardez le Christ : c’est sa liberté de parole qui l’a mené à la croix pour le salut de tous les hommes. Vous comprenez pourquoi Paul disait qu’il n’y a rien de plus urgent à annoncer que Lui, Jésus, offert sur la croix pour la vie de tous les hommes. 

Quant aux fameuses caricatures qui n’ont fait couler que trop d’encre et trop de sang, Dieu saura bien s’en accommoder. Après tout, ne le caricaturons-nous pas tous chaque fois que notre vie, nos paroles, nos gestes sont contraires à son enseignement ? Si Dieu décidait de tuer tous ceux qui le caricaturent, je crains qu’il ne fût bien seul en ce monde. Ne nous offusquons pas de ce que Dieu soit mal représenté par des gens qui ne croient pas forcément en lui ; offusquons-nous plutôt de ne pas mieux le représenter, nous qui affirmons croire en lui. Et reconnaissons que Dieu est bien plus grand, bien plus sage, bref bien meilleur que tout ce que nous pourrons en dire ou en dessiner. Laissons à Dieu le droit d’avoir de l’humour et aux hommes le droit d’en rire. Rien n’est plus essentiel à l’homme qu’un Dieu qui sait rire, même de nous, même de Lui !  Bonne reprise à tous !



Lettre pastorale pour l'été


Homme, où es-tu donc ?

Encore quelques jours, et les vacances seront notre réalité. Pas comme lors du confinement où, bloqués chez nous, nous avions subitement du temps pour nous une fois le travail quotidien effectué. Ce temps pour nous était pris sur le temps que nous aurions normalement consacré à nos déplacements pour aller qui au travail, qui à l’école, qui au sport… Nous avons tous pu nous rendre compte que cela en faisait, du temps. Quand, en plus, nous sommes coincés chez nous, à plusieurs dans un espace plus ou moins réduit, ce temps semble soudainement compter double. Les vacances, qui sont à notre porte, seront dé-confinées, le temps sera tout entier pour nous. 

Puisque le pape François a décrété une année « Laudato Si » (mai 2020 à mai 2021) à l’occasion du cinquième anniversaire de ce texte majeur, nos vacances, mais bien plus encore l’année scolaire prochaine, seront tout entières imprégnées dans cette thématique. Pour beaucoup, la question écologique est devenue l’enjeu majeur aujourd’hui pour construire un demain plus responsable. Nos établissements, qu’ils soient diocésains, épiscopaux ou congréganistes, ont déjà fait beaucoup en matière de tri des déchets, de saisonnalité des aliments, d’apprentissage au respect de la nature. C’est très bien ! Mais n’oublions pas qu’au cœur du défi écologique, il y a l’homme qui, s’il est quelquefois le prédateur de la nature, n’en est pas moins un élément de cette nature. Peut-être qu’il nous faudra aborder la question de l’écologie intégrale davantage sous cet angle-là : l’homme comme faisant partie de cette nature, l’homme dont il faut prendre soin, l’homme qu’il faut respecter, l’homme qu’on ne peut pas trier comme un déchet (celui qui est utile, celui qui est à éliminer, celui qui est à recycler…). La pandémie que nous avons vécue, et dont nous ne sommes pas encore sortis complètement, nous aura rappelé la faiblesse de l’homme, mis à genoux par une créature invisible à l’œil nu. Une réflexion sur la place de l’homme dans cette nature, mais aussi sur ce qu’est un Homme finalement, me semble alors nécessaire. Les acteurs pastoraux des établissements épiscopaux et diocésains, qui n’auraient pas encore finis leur réflexion sur la pastorale pour l’année à venir, pourraient trouver dans cette question un défi à relever, un chantier à mener. 

Deux versets bibliques me viennent alors à l’esprit : le premier vient du beau livre de la Genèse, à ce moment précis où l’homme prend la liberté de désobéir à Dieu. Se rendant compte que quelque chose était brisé, l’homme et la femme se cachent aux regards du Seigneur, et quand Dieu, se promenant dans le jardin, ne les trouve pas, il interroge : Où donc es-tu ? (Gn 3, 9). Où est l’homme dans cette création de Dieu ? Où est l’homme dans son rapport à Dieu ? Je suis toujours émerveillé par ce Dieu qui cherche l’homme et qui ne peut se résoudre à perdre sa proximité. Le second verset vient du Psaume 8 qui chante la grandeur de Dieu et de son œuvre créatrice : Qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui ? (Ps 8, 5). Il ne fait pas de l’homme le prédateur de la nature, mais bien celui qui doit en prendre soin. Si Dieu porte le souci de l’homme, celui-ci, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, ne doit-il pas aussi porter le souci de l’homme, de lui-même, de toute l’humanité ? Je suis toujours inquiet par certains discours écologiques, qui dénoncent comme l’abomination de la désolation le fait que l’homme manipule un grain de blé, et chantent en même temps - comme un progrès nécessaire - le fait de manipuler les cellules humaines, sans discernement aucun, simplement parce qu’on peut le faire. C’est bien, utile et nécessaire de respecter la nature ; c’est bien de protéger les espèces menacées ; mais c’est bien aussi, et tout aussi utile et nécessaire de protéger et respecter l’Homme, tout l’Homme, et tout homme, quel que soit son sexe et son orientation, sa couleur de peau, son origine, ses croyances. 

Que ces vacances vous donnent l’occasion de prendre soin de vous et de vos proches, dans le respect les uns des autres et du cadre dans lequel vous vivrez ce temps. Nous en avons tous grand besoin.



Lettre aux APS pour accompagner la reprise

(Lettre co-signée par Mgr Kratz, évêque auxiliaire, accompagnant l'Enseignement catholique)



Cher(e)s ami(e)s,



            C’est une réalité à laquelle il faudra nous habituer : nous vivrons sans doute longtemps avec ce coronavirus et les risques qu’il fait courir à tous. Et même s’il venait à disparaître, nous pouvons, sans jouer au prophète de malheur, nous dire que d’autres pandémies suivront celle que nous connaissons. Vivre avec ce risque, ce n’est pas s’enfermer, ni se confiner à perpétuité. L’homme n’est pas fait pour l’isolement. Notre art de vivre est profondément et durablement touché par cette pandémie, mais ce qui fait notre humanité ne saurait être atteint aussi durablement. Nous avons besoin de relations, nous avons besoin d’expression, nous avons besoin de lieux de rencontre et de socialisation. 

           Dès la semaine prochaine, nos écoles vont accueillir en plus grand nombre leurs élèves. Nous n’ignorons rien des tensions et des questions que pose cette décision. Nous croyons cet accueil nécessaire pour tous les élèves laissés sur le côté, non pas de notre fait (nos équipes ont fait le nécessaire pour garder le lien et assurer continuité pédagogique et pastorale) mais tout simplement à cause de la crise qui nous frappe : nous ne sommes pas égaux face au numérique, nous ne sommes pas égaux dans la capacité à gérer les temps particuliers. Et nous savons, par les sources ministérielles elles-mêmes, qu’au moins 5 à 8 % d’élèves ont décroché. Certains diront que c’est peu ; nous pensons que c’est déjà trop. Avec ces décrochages, ce sont les inégalités qui augmentent ; avec ces décrochages, ce sont des chances de réussite qui diminuent. Il nous faut redonner une chance égale à tous ; c’est notre cœur de métier dans l’Enseignement Catholique. 

            Les responsables de l’animation pastorale ne sauraient rester à l’écart de ce temps nouveau qui s’ouvre. Certes, il ne concerne qu’une petite dizaine de semaines avant les vacances d’été. Mais il pourrait bien se révéler comme un temps d’apprivoisement d’une situation nouvelle que nous pourrions encore connaître au mois de septembre. Ce n’est hélas pas de la sciences fiction ! Si aucun médicament assurant une guérison rapide et efficace n’est trouvé, si le vaccin tarde à venir, nous pourrions bien vivre l’année scolaire 2020/2021 au rythme des confinements et déconfinements, à tout le moins entre cours en présentiel et cours en virtuel. De même pour tout ce qui relève de la pastorale.

            Pour l’instant, nous n’aborderons pas la question de la célébration des sacrements qui ont été préparés au cours de l’année 2019/2020. Il nous faut attendre pour cela les consignes qui viendront de la Conférence Episcopale Française, reprise ensuite par notre diocèse dans leurs applications concrètes. Nous aurons bien l’occasion d’en reparler à ce moment-là. Il s’agit, dans l’immédiat, pour les responsables de l’animation pastorale, d’être présents, dès le 11 mai 2020, auprès des enseignants et des divers personnels déjà, puis, au fur et à mesure que les élèves reviendront, d’être disponibles pour les jeunes et les adultes, en respectant le protocole sanitaire mis en place dans vos établissements. Peut-être d’abord pour libérer la parole, écouter les joies et les difficultés et rendre confiance. Nous joignons au présent courrier un document validé par les ADP et le Responsable national de l’animation pastorale ; il a été établi par une équipe diocésaine en vue de la reprise. Leurs propositions sont multiples pour vous aider à assurer une présence discrète mais nécessaire. Et si vous deviez faire partie des personnes fragiles, non autorisées à reprendre le travail pour l’instant, nous savons pouvoir compter sur vous pour garder un lien à distance, mais réel, avec vos chefs d’établissement et trouver les relais nécessaires pour qu’une présence puisse être effective.       

            Le décret du 30 avril 2020 de Mgr Ravel précise ce qu’il est possible de faire en matière de pastorale dans les paroisses. Mutatis mutandis, cela est valable pour nos établissements, en particulier les points suivants, toujours dans le respect des mesures sanitaires. Sont possibles : la tenue de réunions de moins de 10 personnes (donc nos groupes de catéchèses peuvent fonctionner pour reprendre les parcours vers le baptême, la première communion, la profession de foi et la confirmation), l’accueil dans les églises pour la prière personnelle libre ou guidée, l’adoration, l’entretien spirituel et le sacrement de la réconciliation. Il est préférable de laisser la porte de la chapelle ouverte pour éviter de devoir manipuler trop souvent sa poignée. Par contre, toujours pas de célébration publique, donc pas davantage de baptême, ni de première communion, ni de confirmation, jusqu’à nouvel ordre.          

Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos, dit le Seigneur (Mt 11, 28). Cet appel du Christ devient notre mission en ce temps particulier. Elle est un appel à un accompagnement de tous, chrétiens ou non, croyants ou non. C’est par notre présence auprès de nos communautés éducatives que nous rendrons le Christ visible ; c’est par notre présence que les hommes sauront qu’ils ne sont pas seuls dans cette épreuve, et que Celui que les chrétiens confessent comme Christ et Sauveur marche encore et toujours à leurs côtés, portant le souci de tous.

            Que le Seigneur vous accorde sa grâce, vous garde dans sa paix et vous bénisse dans le travail qui est le vôtre.




(Ajouté manuscritement par Mgr Kratz) : 

Avec notre grande estime et notre amitié fraternelle, confiance et courage !





Lettre aux APS pour accompagner le confinement (4)




Cher(e)s ami(e)s,





Nous voici à la veille d’une grande nouvelle ; au cœur de cette nuit, un cri d’espérance jaillira : Christ est ressuscité, alléluia ! Alors que les disciples de Jésus croyaient l’histoire de Jésus terminée, voilà que s’ouvre quelque chose de neuf, quelque chose de fou. La vie reprend ses droits ; la mort est morte. Cet homme, livré selon le dessein bien arrêté et la prescience de Dieu, vous l’avez supprimé en le clouant sur le bois par la main des impies. Mais Dieu l’a ressuscité en le délivrant des douleurs de la mort (Ac 2, 23, 24). 


Ce témoignage de Pierre doit devenir notre témoignage, particulièrement en ces temps difficiles où les prêtres célèbreront Pâques sans la présence physique du peuple de Dieu, et où le peuple de Dieu fêtera Pâques confiné dans les maisons, pour les plus chanceux dans un bout de jardin. Oui, alors que la maladie et la mort rôdent encore dans nos villes et villages, il nous faut plus que jamais faire entendre ce cri de joyeuse espérance qui est au cœur de notre foi. Il faut faire entendre que Dieu n’abandonne pas son peuple, comme nous le découvrons en parcourant la longue liste des lectures de la vigile de Pâques. Si vous êtes familiers des icônes, vous savez que l’icône du jour de Pâques ne représente pas le Christ sortant de son tombeau, mais descendant aux enfers pour en tirer ceux que la Mort retenait captifs. 


Avec Pâques, un monde nouveau s’ouvre aux hommes. Nous avons un avant-goût de ce nouveau monde à travers toutes les actions de solidarités qui ont vu le jour en ce temps de crise sanitaire que nous vivons. Partout se lèvent des voix pour dire que rien ne sera plus comme avant, et que notre monde ne pourra pas tout simplement reprendre comme avant. Ce serait même dramatique si nous ne tirions aucune leçon de ce drame planétaire. 


En matière d’éducation et d’enseignement, il en va de même. Nous réinventons notre agir pastoral ; les enseignants réinventent leur métier. Je vous invite à prendre le temps de regarder le dernier webinaire du Secrétariat Général, intitulé : Faire moins, est-ce faire moins bien ? Vous trouverez la vidéo à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch?v=oY4bbXYgjDM. N’hésitez pas à faire suivre ce lien aux enseignants de vos équipes éducatives. N’oubliez pas, après avoir regardé la vidéo de cliquer sur « Plus » en bas de celle-ci pour avoir accès aux nombreux documents complémentaires.


Je vous remercie toutes et tous du travail que vous accomplissez auprès de nos élèves en ces circonstances difficiles. Même si ce temps de confinement nous semble long et lourd, il nous faut demeurer témoins de l’espérance que la fête de Pâques fait naître en notre monde. Soyez assurés de ma prière pour vous et vos proches, et de ma disponibilité.


« Dis-nous, Marie Madeleine, qu’as-tu vu en chemin ? – J’ai vu le sépulcre du Christ vivant, j’ai vu la gloire du Ressuscité. J’ai vu les anges ses témoins, le suaire et les vêtements. Le Christ, mon espérance, est ressuscité ! Il vous précède en Galilée. » (Séquence de Pâques).


Belles fêtes de Pâques à toutes et à tous !



Lettre aux APS pour accompagner le confinement (3)



Cher(e)s ami(e)s,



Nous allons entrer dans la grande semaine, la Semaine Sainte, qui nous fera revivre tous les événements de la Passion, ceux-là mêmes qui forment le cœur de notre foi. Et nous le ferons dans cette situation inhabituelle de confinement, sans pouvoir nous rendre physiquement dans une église pour participer avec nos frères et sœurs croyants à la Pâque du Seigneur.

De nombreuses propositions sont faites. J’ai déposé sur le Padlet un document sous la colonne « Une proposition à vivre » un document vous donnant accès à des temps de prière pour les Rameaux, le Jeudi Saint, le Vendredi Saint et le Jour de Pâques. Ce sont des power-point que j’ai réalisé avec des œuvres d’Arcabas, utilisables en l’état. Le document du Padlet vous indique comment les récupérer. N’hésitez pas à vous en servir et à transmettre plus loin.

La maison Bayard propose aussi des liens vers des documents, des moments à partager pour que nous ne passions pas à côté de cette Semaine Sainte. Voici le lien vers la page de présentation générale : http://1r7j.mj.am/nl2/1r7j/m6ljz.html?m=AMQAAG3HTLAAAckk0hYAALCH4FUAAYCq0QsAJGEgAAIA5QBehyXtvFjhOcSUS7C_VdYJHAsJugAB6ys&b=14b8928c&e=de49e92f&x=ToTsa-4p1BgLFdo7t1AeiCKpmQj7KNt1lTiRLqJI1h8

Sur le Padlet toujours, vous trouverez la troisième lettre de notre archevêque ; il aborde une question importante : Comment soigner le remède ? Autrement dit comment faire pour que le remède (le confinement) ne soit pas, à terme, pire que le mal (le corona virus). A lire absolument !

Une autre ressource, plus quotidienne, le travail d’un de vos collègues du diocèse de Chartres. Des petites vidéos, sur un ton très décalé, pour un temps de catéchèse quotidien. Vous trouverez ceci ici :  https://www.youtube.com/channel/UCVyFCbYALrKGoMK1msRVDhw

             Poursuivons avec une proposition d’Etienne TARNAUD, auteur compositeur interprète : quatre chants pour la Semaine Sainte. Vous trouverez son travail ici :

Rameaux/Passion :


La brebis perdue :


Jeudi Saint :


Pâques/Résurrection





Unis en Christ, à qui je vous confie chaque jour dans l’Eucharistie



Lettre aux APS pour accompagner le confinement (2)




Cher(e)s ami(e)s,




Vous l’aurez compris comme moi : nous sommes engagés dans un temps long avec cette période de confinement. Et cela n’est pas sans nous interroger quant à notre mission. Nous avons tellement l’habitude de faire, de prévoir, d’organiser que cette période de dessaisissement peut nous sembler difficile. Pastoralement, nous faisons forcément moins puisque nous ne pouvons pas nous rassembler. Mais est-ce moins bien de faire moins ? C’est une question que nous aborderons avec mes collègues ADP au niveau national lors d’un prochain webinaire. Je vous donnerai les éléments pour le suivre sur le Padlet mis en place (pour rappel : https://padlet.com/pjyk/confinement code d’accès : ddecalsace).

Ce temps long nous renvoie à la question de nos communautés. Comment faire communauté quand on ne se voit pas, quand on ne se rencontre pas ? Ma précédente lettre vous donnait quelques outils et je ne doute pas que vous y veillez dans vos établissements. Merci pour tout ce que vous faites déjà ; merci pour tout ce que vous ferez encore pour garder vive cette conscience communautaire. Loin de nous enfermer ou de nous replier sur nous-mêmes, la situation que nous connaissons peut nous ouvrir davantage à la dimension diocésaine de nos communautés. 

Pour les croyants de vos communautés éducatives, je vous signale le travail réalisé par le Service Diocésain de l’Enseignement et la Catéchèse sur son site. Je vous donne le lien vers la page qui peut intéresser nos familles :  http://www.ere-oca.com/oca/actualites. Sur le Padlet, j’ai mis aussi le lien vers les propositions faites aux familles pour vivre le dimanche (voir colonne : Une proposition à vivre). Je l’ai aussi enrichi d’une colonne Ressources : vous y trouverez les deux lettres de Mgr Ravel ainsi qu’un article du journal La Croix et un lien vers un site internet qui peut intéresser des familles qui seraient touchées par un deuil en cette période. Vous savez qu’il n’est pas possible d’organiser des funérailles rassemblant plus de 20 personnes. Ce site vous donnera (et leur donnera) des ressources pour aborder ce moment difficile avec des enfants et des jeunes. 

Lors d’un temps en visio conférence avec Joseph HERVEAU, il nous a été demandé si des APS assuraient des temps de présence dans les établissements accueillants des enfants de personnels soignants. J’aurais besoin de votre retour par mail sur cette question. 

Toujours au niveau national, le Laboratoire des initiatives a ouvert une page internet Carnet de bord de confinement. Il s’agit d’articles rédigés par divers acteurs de l’Enseignement catholique sur la manière dont ils vivent ce temps spécial. Des parents d’élèves, des enseignants, des chefs d’établissements, des élèves… ont déjà déposé leurs articles. Si l’un de vous se sent l’envie d’écrire et de partager ce qu’il vit, voici l’adresse : http://laboratoiredesinitiatives.fr/carnet-de-bord-de-confinement/. Vous pouvez consulter ce qui a déjà été déposé ; peut-être que cela éveillera l’envie chez l’un ou l’autre d’entre vous de partager. 

Je vous redis ma proximité et ma disponibilité à chacun et chacune d’entre vous et vous assure de ma prière chaque jour au moment de l’eucharistie que je célèbre. Gardons confiance en Celui qui nous sauve : Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus Christ, notre Seigneur.



Lettre aux APS pour accompagner le confinement





Il faut bien le reconnaître, nous vivons une période curieuse, où les sentiments les plus opposés se mêlent. Nous comprenons bien qu’il faut se préserver et préserver les autres, et en même temps, nous pouvons nous sentir frustrés de n’être plus vraiment libres, confinés que nous sommes dans nos logements, ou, si le télétravail n’est pas possible pour nous, obligés de nous méfier de tout et de tous. Est-ce que je ne prends pas un risque démesuré en allant à tel endroit ? Est-ce que je ne fais pas prendre de risque à telle personne en me retrouvant dans un même espace avec elle ? A moins de vivre seul, vous rencontrez forcément des personnes, ne serait-ce que votre conjoint si vous êtes mariés, ou vos enfants si vous en avez. Que devient dans tout cela notre responsabilité pastorale ? Le Covid-19 a-t-il eu raison d’elle ? 

Vous le savez : les chefs d’établissement assurent une continuité administrative, les enseignants, une continuité éducative. Qu’en est-il de la continuité pastorale ? Je sais que sans doute cela ne semble pas primordial, et pourtant, n’avons-nous pas à accompagner nos communautés éducatives en ce moment si particulier de l’histoire de l’humanité ? N’avons-nous pas à chercher à faire sens à ce qui semble un non-sens absolu ? Comment témoigner encore, alors que le danger rôde, de la proximité et de la fidélité de Dieu à son Alliance ? 


Si les cérémonies religieuses sont repoussées à des temps meilleurs, pouvons-nous simplement oublier ces enfants et ces jeunes que nous avons accompagné vers un sacrement ? Il ne s’agit pas de braver la loi et de les rassembler quand même, mais de réfléchir à la manière de les accompagner encore dans ce temps de l’attente qui peut bien s’éterniser si nos gouvernants se décident à prolonger le confinement. Ce matin, un médecin demandait que ce temps s’étire sur six semaines ! Comment rassurer, comment encourager, comment veiller sur celles et ceux qui nous sont confiés ? 


Si, à l’annonce de ce temps de réclusion, certains ont pu se réjouir (chouette, des vacances !), je doute que, s’ils se retrouvent enfermés à plusieurs, dans un logement exigu, sans pouvoir en sortir sur un temps long, je doute donc qu’ils continuent à afficher longtemps encore des mines réjouies. Ce qui semblait une opportunité se transformera vite en cauchemar pour ceux et celles qui n’ont ni jardin, ni balcon pour prendre l’air. La durée aura nécessairement un impact sur la vie familiale et fraternelle. 


A côté des chefs d’établissement qui portent encore plus lourds que d’habitude, à côté des enseignants qui réinventent leur métier, à côté de tous nos personnels qui accueillent dans nos établissements les enfants des parents engagés dans un métier lié à la santé, à côté des familles qui réinventent un vivre ensemble, nous devons nous tenir fermement et être prêts à l’écoute, à la présence simple et amicale, à une parole d’encouragement… Comme le rappelait ce matin aux ADP Joseph HERVEAU, Responsable national de l’animation pastorale au SGEC, au gré des situations des écoles et après discernement et accord impératif du chef d’établissement, mais aussi de la direction diocésaine ou de la tutelle, il peut être opportun que des APS volontaires et se conformant de façon stricte à toutes les obligations sanitaires d’usage, se joignent aux équipes enseignantes et éducatives qui accueillent les enfants dans les établissements scolaires. Non pas d’abord pour « proposer du caté », mais pour être présent au milieu de ces équipes, soutenir les adultes et le cas échéant, leur prêter main forte, ou être disponible simplement pour écouter. 


D’autres possibilités d’assurer cette continuité pastorale à distance existent : chaine de prière à développer, tente de la rencontre à mettre en place grâce aux moyens de communication sociaux, intentions de prière à confier à vos prêtres référents. J’ai moi-même ouvert ce jour un mur sur padlet pour que vous puissiez y déposer, en texte ou en image, vos petits bonheurs, vos intentions de prière, et ce qui vous pèse (http://padlet.com/pjyk/confinement code d’accès : ddecalsace).  Je me tiens également disponible pour chacun de vous si vous souhaitez un entretien plus personnel en visio-conférence ou si le besoin se faisait sentir d’une réunion plus large que ce soit au niveau du réseau Enseignement catholique d’Alsace ou plus particulièrement auprès des établissements épiscopaux et diocésains. Chaque jour, je célèbre la messe tout seul en pensant à chacun de vous. Les intentions qui seront déposés sur le mur seront offertes quotidiennement dans cette eucharistie. Je vous joins quelques ressources que nous avons partagées ce matin entre ADP lors d’un webinaire proposé par Joseph HERVEAU. Vous pouvez écouter son intervention sur la chaine Youtube du Département éducation : https://www.youtube.com/watch?v=uwwlzOzK4kY . Enfin, je vous invite à relayer largement le message des évêques de France à nos concitoyens et à participer à l’initiative qu’ils proposent pour le 25 mars, fête de l’Annonciation. Le message se trouve à l’adresse suivante : https://eglise.catholique.fr/espace-presse/communiques-de-presse/495268-covid-19-message-eveques-de-france-aux-catholiques-a-nos-concitoyens/ 


Que la situation présente modifie pleinement nos manières de vivre est une évidence. Mais elle ne nous empêchera ni de vivre notre foi, ni de la partager encore et d’être ainsi témoins de celui qui est la Vie en plénitude. Au bout de notre Carême, il y a Pâques et la puissance de vie du Christ qui se déploie en nous. N’hésitons pas à puiser largement à cette vie ; n’hésitons pas à la partager largement. Nous ne pouvons peut-être pas grand-chose, mais nous pouvons toujours nous tenir comme Marie, à Cana, près de Jésus, pour lui dire : « Ils n’ont plus de vin » (Jn 2, 3). Le Christ nous donnera aujourd’hui encore, comme jadis, le vin de la fête qui redonne espoir et joie au cœur des hommes. 


A toutes et à tous, je redis ma proximité et mon espérance de nous retrouver en virtuel pour l’instant, en réel quand ces événements ne seront plus que des souvenirs lointains. A vous, la grâce et la paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ (1 Co 1,3).





Lettre pastorale pour le Carême 2020

Le Carême : un moyen pour nous conduire à Pâques.




Il y a quelques jours, l’Eglise entrait en Carême, et nous mettait ainsi en route vers les fêtes pascales. Dans nos établissements, le carême est toujours un temps particulier, marqué particulièrement par nos actions de solidarités. L’évangile que nous entendons chaque année au Mercredi des Cendres n’y est pas étranger : il rappelle, en effet, les trois piliers du Carême : Jeûne, Prière, Aumône. Ce sont des moyens qui nous sont donnés pour marquer notre désir d’un retour à Dieu. Les outils ne manquent pas pour nous accompagner dans notre démarche ; l’A.P.E.L. national, le SGEC et le CCFD nous proposent des démarches particulières pour vivre ce temps, sans compter tout ce que vous aurez pu imaginer vous-mêmes pour faire vivre à votre communauté éducative ce temps si particulier. Et c’est très bien. 

Pourtant, je constate de plus en plus, y compris dans les paroisses, que le Carême est vécu comme un en soi. De « moyen pour parvenir à… », il devient presque un sommet pour lui-même. Je m’explique. Nous nous efforçons de mettre l’accent sur ce temps de l’année liturgique, nous multiplions les propositions, les activités à vivre. Mais qui pense encore au temps pascal ? Et une fois passés les jours saints que nous marquerons d’un certain faste, que deviendront les autres dimanches de Pâques ? Or, c’est pour vivre pleinement ce temps pascal que le Carême nous est donné. Il est le moyen de nous y préparer. Un simple moyen qui doit nous tourner vers plus de vie, plus d’attachement au Christ qui aura livré sa vie sur la croix et qui se montrera vivant à ses disciples qu’il enverra ensuite en mission. Les fêtes de Pâques auxquelles nous nous préparons durant le Carême vont jusqu’à la Pentecôte comprise. 

Comprenez-moi bien : je ne dis pas qu’il ne faut pas vivre intensément ce Carême ; mais vivons-le vraiment tournés déjà vers Pâques et n’oublions pas de vivre plus intensément encore les semaines qui suivront le temps du Carême et qui nous mèneront vers les examens pour certains, vers la fin de l’année scolaire pour tous, dans la joie et la puissance de vie du Ressuscité. Que notre Carême soit bien le moyen de nous tourner vers Pâques, et non ce temps qui nous aura tellement mobilisés et fatigués que nous n’aurons plus un souffle de vie au matin de Pâques. D’autant qu’en Alsace, ce temps de Pâques 2020 sera marqué par le Jubilé de Sainte Odile. Des établissements ont déjà prévu une participation à cet événement. L’Enseignement Catholique d’Alsace sera amené à vivre un temps de pèlerinage après les vacances d’été, le mercredi 30 septembre 2020. Les informations vous parviendront avant l’été. 

A force de nous investir dans nos activités, nos bols de riz et nos solidarités, n’oublions pas le but de ce chemin, le but de ce temps : entrer dans une vie plus belle et plus grande qui se déploiera en nous et autour de nous par la force de l’Esprit Saint. Nous ne pouvons pas mesurer la réussite de notre Carême à l’aune du produit récolté pour nos actions de solidarité, ni à l’aune du nombre d’élèves qui auront davantage prié ou qui se seront confessés. Notre Carême sera réussi s’il permet à la vie pascale de se déployer en nous et de nous rendre plus missionnaires à la suite du Christ ressuscité. Il sera réussi s’il permet à la vie pascale d’être visible dans nos établissements, par le climat évangélique qui s’y vit. 

Bon Carême à tous dans l’espérance d’une vie renouvelée par le Ressuscité.





Homélie donnée lors de la messe célébrée le jeudi après les cendres dans le cadre du congrès international des écoles de la congrégation des Sœurs de Notre Dame de Sion (27/02/2020)


Choisissez la vie !




         En introduisant votre congrès lundi matin, je méditais avec vous le bel épisode du buisson ardent, inaugurant la mission de Moïse auprès de son peuple, pour vous rendre attentif à l’équilibre nécessaire et vital entre la Tutelle, le CE et le responsable des finances dans une école catholique. Ce soir, l’Eglise nous donne d’entendre un autre moment de la vie de Moïse. Il se situe à la fin de sa vie. Il va bientôt être enlevé de ce monde, et il relit, dans un discours à Israël, l’histoire de l’Alliance qu’ils ont vécu ensemble depuis la sortie d’Egypte. Le passage des deux voies que nous avons entendu constitue la finale de ce dernier discours. Autant dire que ces paroles sont comme testamentaires et donc à prendre avec un très grand sérieux. 

            Ce passage n’a rien de bien compliqué à comprendre. Il y a deux voies : la vie et le bonheur ou bien la mort et le malheur. La vie est du côté de Dieu, la mort est dans le refus de Dieu. Tant que le peuple vivra dans la fidélité à l’Alliance, il sera heureux et prospèrera dans le pays que Dieu s’apprête à lui donner. Mais s’il s’éloigne de l’Alliance, s’il se laisse entraîner à se prosterner devant d’autres dieux et à les servir, [ils ne vivront] pas de longs jours. Il y a là quelque chose de réconfortant et en même temps de terrifiant. Réconfortant parce qu’il suffira de dire que nous serons fidèles en toutes choses à la volonté de Dieu ; terrifiant, parce que nul ne sait de quoi demain sera fait et comment nous pourrions être amené à composer avec les autres. La terre que Dieu donne n’est pas une terre vierge ; il y a des peuples installés là, et je ne suis pas bien sûr qu’ils accepteront de partager, voire d’abandonner cette terre au profit de ce peuple étranger ; même si c’est leur Dieu qui leur offre ce pays ! Chez Moïse, il y a cette assurance fondamentale que Dieu veille sur son peuple et que sa Parole se réalisera. Le peuple doit faire confiance ; le peuple doit être fidèle à son Dieu. 

            Comment, au terme de ce congrès consacré à la gouvernance de vos écoles, qui vous a réunis sur les traces de vos fondateurs, ne pas entendre ce discours de Moïse comme un appel adressé à votre congrégation enseignante et à l’Enseignement catholique en général à rester fidèle à l’intuition des grands éducateurs d’une part, et à l’ordre fondamental et fondateur du Christ lui-même ? Comment ne pas entendre, dans ce rappel des deux voies, les deux voies qui s’offrent en permanence à l’Enseignement catholique : la fidélité à l’Evangile ou l’adaptation de notre offre à la demande, quand bien même cette demande serait contraire à l’Evangile ? Nos écoles catholiques ne vivront que dans la mesure où elles défendront leur singularité dans le paysage scolaire. Singularité caractérisée par le climat évangélique dans lequel elles doivent vivre et par la mise en œuvre d’une formation intégrale de la personne, rappelant sans cesse que la personne humaine vaut plus que des chiffres, que ces chiffres soient ceux d’une note, d’un pourcentage de réussite ou ceux de bilans financiers. Ne sacrifions ni aux idoles de la bien-pensance, ni aux idoles des taux de réussite aux examens, ni aux idoles des bilans financiers, toutes ces idoles qui voudraient nous obliger à leur sacrifier les élèves à besoins particuliers, les petits, les faibles, les pas rentables. Je comprends qu’en certains lieux et certaines situations il peut être difficile d’y résister, et que la fidélité au Christ et à nos fondateurs puisse être crucifiante, mais là seulement se trouve la vie et la survie de nos écoles. Nos écoles mourront d’avoir rejeté ceux dont plus personne ne veut, parce qu’elles auront renoncé à leur âme, renoncé à leur mission sacrée. Si l’école catholique n’est plus catholique dans ses fondements et dans sa gouvernance, je crains qu’elle ne soit plus rien, pas même une école, mais juste une entreprise à faire du fric, écrasant davantage encore les pauvres sans recours. 

            Sans angélisme aucun, nous pouvons reprendre dans notre prière le psaume premier qui a suivi notre lecture du Deutéronome : Heureux est l’homme qui met sa foi dans le Seigneur… Il est comme un arbre planté près d’un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et jamais son feuillage ne meurt ; tout ce qu’il entreprend réussira. Ce n’est pas qu’un beau poème ; c’est la Parole du Dieu vivant et vrai, la Parole dont Moïse fut le prophète ; c’est la Parole que le Christ a accomplie ; c’est la Parole qui s’accomplit chaque jour pour les fidèles du Seigneur. Le psaume ne dit pas que l’homme fidèle ne connaîtra ni difficulté, ni épreuve ; mais le psaume assure qu’en tout, il réussira ; au final, il sera toujours debout, toujours vivant. N’est-ce pas ce que dit le Christ lui-même à ses disciples : puisque lui connaîtra l’épreuve de la croix et de la mort avant de ressusciter, comment ses disciples pourraient-ils espérer y échapper ? Le chemin qui passe par la croix est le seul chemin possible, non parce qu’il est chemin de souffrance, mais parce qu’il est le chemin qui a conduit le Christ lui-même de la mort à la vie, et que sur ce chemin, il nous a déjà obtenu la victoire. 

             Quel avantage un homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il se perd ou se ruine lui-même en suivant un autre chemin que celui du Christ ? Quel avantage ont nos écoles à gagner le monde, si le prix à payer est celui de quitter le chemin du Christ, le chemin de leurs fondateurs ? Elles seront comme la paille balayée par le vent. Ce n’est pas ce que nous souhaitons, ni pour nos écoles, ni pour nous, ni pour nos communautés éducatives.  Où que soient vos écoles, quelles que soient les difficultés qu’elles puissent rencontrer, soyez fidèles au Christ ; soyez fidèles à vos fondateurs. Choisissez la vie pour que les familles qui vous choisissent puissent découvrir un reflet de cette vie que Dieu promet éternelle à celles et ceux qui lui sont fidèles. Amen.




Lettre pastorale pour l'Avent 2019

Prendre soin de soi.




Ceux qui ont déjà eu l’occasion d’entendre Philippe DELORME, le nouveau Secrétaire Général de l’Enseignement catholique, auront peut-être été marqués comme moi par son insistance à l’obligation de prendre soin de nous. Il l’a dit aux chefs d’établissement d’Alsace lors de leur journée de rentrée au mois de septembre : « Vous devez prendre soin de vous pour pouvoir prendre soin des autres ». Comme il a raison, n’est-ce pas ! 

Prendre soin de nous, c’est ce que nous propose le temps de l’Avent qui s’est ouvert ce dimanche 1er décembre. Il n’est pas, à la différence du Carême, un temps de pénitence ; il est un temps de préparation joyeuse à l’accueil du Messie que Dieu envoie à son peuple. Les promesses faites par Dieu à ses prophètes et l’espérance qu’il a suscité dans le cœur de son peuple, vont trouver, dans la nuit de Noël, leur accomplissement dans un Nouveau-Né. Les chrétiens accueilleront, en cette nuit, Dieu qui, en Jésus, s’abaisse à la taille de l’homme afin que l’homme, par Jésus, puisse s’élever à la taille de Dieu. C’est un grand mystère, et nous comprenons alors la nécessité de nous préparer à ce moment. Il serait dommage que Dieu frappe à notre porte et que nous soyons absents, ou pire, que nous restions enfermés à l’intérieur de nos maisons, sans ouvrir ni la porte, ni notre cœur à celui qui frappe. 

Prendre soin de nous, c’est vraiment nous préparer intérieurement à cette rencontre entre l’homme et Dieu, par une écoute renouvelée de la Parole de Dieu, particulièrement riche durant le temps de l’Avent. Nous pourrions ainsi commencer chacune de nos journées par quelques lignes du prophète du jour ou de l’évangile du jour. Pour les croyants, ce serait l’occasion d’écouter cette parole que nous considérons donnée par Dieu. Pour les croyants autrement ou pour ceux qui ne connaissent pas Dieu, ce serait l’occasion d’écouter un texte de notre patrimoine religieux qui appelle tous les hommes à un style de vie autre que celui qui est vanté aujourd’hui. Peut-être n’est-ce pas vraiment un hasard alors que cette lettre pastorale soit écrite le jour du Black Friday. Il prône un style de vie qui ne correspond pas vraiment à ce que les prophètes nous diront pendant le temps de l’Avent. Il prône un style de vie qui ne va pas vraiment dans le sens du prendre soin de soi, ni du prendre soin de l’autre, encore moins du prendre soin de notre planète. La consommation à outrance, si elle peut sembler à certains un bien immédiat, ne l’est jamais à long terme. Elle est à l’opposé du prendre soin de soi, quoi qu’en dise les publicitaires. 

Durant ce temps de l’Avent, prenons soin de nous pour que Dieu lui-même puisse prendre soin de nous. Soyons attentifs à sa voix pour mieux prendre soin des autres et de notre terre. Ce n’est jamais égoïste de prendre soin de soi pour mieux se mettre au service des autres. C’est au contraire une nécessité. Le temps de l’Avent, en nous invitant à veiller et à préparer activement la venue du Sauveur, nous ouvre déjà à la paix de Dieu, à un désir d’une plus grande justice, à la nécessité d’une vraie fraternité fondée sur le Christ, ami de tous les hommes. Que ce temps de l’Avent soit un temps qui vous fasse du bien ; que ce temps de l’Avent vous permette de faire du bien autour de vous. Bon temps de l’Avent à toutes et à tous !



Lettre pastorale pour la rentrée 2019

Baptisés et envoyés : l'Eglise du Christ en mission dans le monde.



         Le titre de cette lettre pastorale n’est rien d’autre que le thème du mois missionnaire extraordinaire (mois d’octobre 2019), voulu par le Pape François et encouragé dans notre diocèse par Mgr Ravel, notre archevêque. Les catholiques sont ainsi invités à vivre une attention renouvelée à leur baptême et à ses conséquences très concrètes dans la vie quotidienne. L’une de ces conséquences est le fait de témoigner de la foi, partager le Christ, largement, dans un esprit de respect. Il ne s’agit pas de faire du prosélytisme, ni d’user de force pour convertir : il s’agit d’éveiller chez les hommes le désir du salut. 

               Le Décret Ad Gentes du Concile Vatican II rappelle, dans son chapitre 2, en quoi consiste cette œuvre missionnaire qui incombe à chaque baptisé. En premier lieu, il s’agit d’un témoignage de vie et du dialogue nécessaire avec ceux qui ne connaissent pas le Christ comme celui qui sauve les hommes. Le décret affirme : « Tous les fidèles, partout où ils vivent, sont tenus de manifester, par l’exemple de leur vie et le témoignage de leur parole, l’homme nouveau qu’ils ont revêtu par le baptême et la force du Saint-Esprit qui les a fortifiés par la confirmation, afin que les autres, considérant leurs bonnes œuvres, glorifient le Père (cf. Mt 5, 16) et perçoivent plus pleinement le sens authentique de la vie humaine et le lien universel de communion entre les hommes » (A.G. n°11). Avant d’engager les non croyants ou les croyants autrement, l’activité missionnaire engage d’abord les catholiques à un style de vie qui reflète leur foi. Ceci ne peut se faire sans un dialogue authentique, à la manière du Christ lui-même. Ecoutons encore les Pères conciliaires : « Le Christ lui-même a scruté le cœur des hommes et les a amenés par un dialogue vraiment humain à la lumière divine ; de même ses disciples, profondément pénétrés de l’Esprit du Christ, doivent connaître les hommes au milieu desquels ils vivent, engager conversation avec eux, afin qu’eux aussi apprennent dans un dialogue sincère et patient, quelles richesses Dieu, dans sa munificence, a dispensées aux nations ; ils doivent en même temps s’efforcer d’éclairer ces richesses de la lumière évangélique, de les libérer, de les ramener sous la Seigneurie du Dieu Sauveur » (A.G. n°11). Témoignage de vie et dialogue sincère avec les autres pour donner le goût du Christ, deux axes que nous pouvons développer dans nos écoles. 

               Il est un autre axe que souligne le même décret : celui de la charité. Il nous faut réentendre ce que le Concile affirme : « La présence des chrétiens dans les groupes humains doit être animée de cette charité dont nous a aimés Dieu, qui veut que nous aussi nous nous aimions mutuellement de la même charité (cf. 1 Jn 4, 11). La charité chrétienne s’étend véritablement à tous les hommes, sans aucune distinction de race, de condition sociale ou de religion ; elle n’attend aucun profit ni aucune reconnaissance. Dieu nous a aimés d’un amour gratuit ; de même, que les fidèles soient préoccupés dans leur charité de l’homme lui-même, en l’aimant du même mouvement dont Dieu nous a cherchés » (A.G. n° 12). Ces phrases se passent de commentaire. 

               Ayant relu ainsi ce beau texte conciliaire sur la mission de l’Eglise, personne ne saurait penser que cela ne nous concerne pas sous prétexte que nous accueillons des jeunes d’autres religions, voire des non croyants et, qu’étant sous contrat avec l’Etat, nous ne pouvons pas faire vivre cette dimension de la vie chrétienne. Il est plus que nécessaire de nous y engager, la meilleure connaissance des uns et des autres permettant une vie plus fraternelle et donc des conditions optimales pour la mission qui nous est confiée : éduquer nos jeunes à la lumière de l’Evangile, qu’ils soient croyants ou non. Ce que le statut de l’Enseignement catholique, en son article 74 exprime ainsi : « La mission éducative se fonde sur la pédagogie du Christ. Elle déploie solidairement une attention : ‘Que veux-tu que je fasse pour toi ?’, un appel toujours personnel : ‘Viens…’, une confiance en chacun : ‘Va…’, une promesse d’accompagnement : ‘Je serai avec vous…’ ». Que chaque catholique de nos communautés se sente ainsi appelé à témoigner toujours plus de ce Christ qui nous fait vivre ; que chaque croyant autrement ou non croyant ait à cœur d’entendre ce que nous avons à proposer pour qu’il puisse progresser dans son propre cheminement et ses questionnements. Le reste dépend de Dieu seul.
   
             Bonne rentrée et bon mois missionnaire extraordinaire.



Homélie donnée pour la messe d'action de grâce d'un chef d'établissement qui change d'affectation à la rentrée

à l'exemple de Moïse…




Qui suis-je pour aller trouver Pharaon, et pour faire sortir d’Egypte les fils d’Israël ? Cette interrogation de Moïse, qui se voulait sans doute un moyen d’échapper au projet de Dieu, est une question essentielle que nous devons toujours nous poser. Elle permet cette juste humilité qui rejette aussi bien la grosse tête et les chevilles qui enflent d’une part que l’excès de discrétion qui pousse quelquefois à une autodépréciation d’autre part. Il est une certitude qui doit toujours nous habiter, dont toute la Bible témoigne, d’Abraham à saint Paul, et dont Moïse est une parfaite illustration. Elle peut s’exprimer ainsi : Dieu n’appelle pas des gens capables, mais il rend capable les gens qu’il appelle. Au moment où nous célébrons l’action de grâce pour le travail accompli ici par Sandrine Bathilde et toutes les personnes de son équipe, il me semblait juste de relire cette belle page de l’A.T., d’une part parce qu’elle est une des pages, si ce n’est LA page préférée de Sandrine, et d’autre part parce que tout devrait toujours commencer (et finir ?) de cette même manière. Elle comporte plusieurs phases : l’étonnement, l’interrogation, la révélation. 

Pour éviter toute interprétation triviale, je vais rassurer tout le monde de suite et préciser que la tutelle de Sion n’est pas Dieu même si elle a créé l’école, que Sandrine n’est pas Moïse même si, comme chef d’établissement, elle doit guider une communauté, et que Sion Strasbourg, comme Sion Marseille ne sont pas le peuple hébreu réduit en esclave en Egypte. La Tutelle n’a appelé Sandrine à changer d’établissement ni pour sauver celui qu’elle quitte, parce que tout y serait devenu impossible, ni celui de Marseille parce que son prédécesseur se serait pris pour pharaon. Le cadre juste étant ainsi posé, nous pouvons revenir au texte et découvrir ce que Dieu (le vrai) veut nous dire.

Tout commence, pour Moïse, par un phénomène peu banal : un buisson qui brûle sans se consumer. Devant ce phénomène étrange, la première réaction est donc l’étonnement, et c’est bien normal. Personne n’avait jamais vu cela. Il ne s’agit pas, pour nous, d’essayer de comprendre ce phénomène, mais de nous rendre compte qu’un buisson qui brûle sans se consumer apparaît souvent dans notre vie sous des formes diverses et variées. En effet, les sujets d’étonnement devant des choses extraordinaires que nous ne comprenons pas, ne manquent pas, surtout dans une vie professionnelle. Par exemple, un de mes grands buissons ardents à moi, ce sont les relations humaines. Ça ne fonctionne jamais comme je voudrais, et il m’est arrivé de pouvoir faire un excellent travail avec des personnes qui m’étaient opposées, alors qu’avec d’autres, que j’aurais volontiers qualifié de plus proches, le travail fut impossible. J’ai beau regarder les hommes et les femmes de mon temps, quelquefois ils sont pour moi ce buisson ardent, un phénomène que je ne comprends pas. Au moment, Sandrine, où tu rends grâce avec nous pour ce que ces quinze années t’ont permis de vivre ici, il est bon que tu puisses te rappeler ces buissons ardents rencontrés ici et surtout identifier ceux de Marseille que tu t’apprêtes à rejoindre pour t’en étonner positivement. En effet, notre première réaction, devant ce qui nous arrive, devrait toujours être cet étonnement qui doit nous ouvrir à la bienveillance et non à la méfiance. Je vais faire un détour pour voir cette chose extraordinaire dit Moïse ; autrement dit, il ne fuit pas devant l’étrange. Et l’étonnement de Moïse se prolonge dans cette parole qui lui est adressée par Dieu : Retire tes sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte ! Dépaysement total assuré. Non seulement c’est curieux, étrange, inhabituel, mais en plus c’est saint ! N’en est-il pas ainsi pour nous ? Les buissons ardents que nous identifions dans notre vie sont toujours des lieux saints, autrement dit des lieux d’où Dieu nous parle. Je me rends bien compte que ces hommes et ces femmes que Dieu met sur ma route (mes fameux buissons ardents), que je ne comprends pas toujours, sont pourtant les instruments que Dieu choisit pour me parler, pour me faire progresser. L’école que tu quittes était le lieu saint où tu avais à te tenir ; celle que tu rejoins devient ton nouveau lieu saint, où Dieu t’attend pour une nouvelle mission. N’oublions jamais que nos écoles sont des lieux saints, des lieux où Dieu se dit, des lieux où Dieu se manifeste, des lieux où Dieu est à servir à travers tous les membres de nos communautés éducatives, des lieux où Dieu est à annoncer. S’il est clair que nous ne pouvons pas imposer Dieu aux hommes, il est tout aussi clair que nous ne devons pas renoncer à en parler, ni renoncer à parler de ce que Dieu propose à tous : une libération de ce qui les empêche de vivre. L’école, que certains peuvent vivre comme un temps contraint parce qu’obligatoire, est un lieu de participation à l’œuvre de salut du Christ en tant qu’elle ouvre les esprits, forme les intelligences, exerce les jugements, permet de grandir. Dans ces lieux, sans nous prendre pour Dieu, nous formons l’humain et nous pouvons faire grandir des saints. 


C’est en réalisant cela que commence alors la phase d’interrogation : Qui suis-je pour ? Qu’est-ce que l’école pour avoir une telle prétention ? Cette phase est importante et nécessaire pour ne pas nous gonfler d’orgueil. D’ailleurs souvent, par excès d’humilité mal comprise, on trouve toutes les bonnes excuses soit pour ne pas répondre, soit pour répondre de manière non ajustée à la mission. Je vous invite, en lecture du soir avant le repos de cette nuit, à relire le chapitre 4 du livre de l’Exode : vous entendrez Moïse argumenter avec Dieu pour ne pas faire ce que Dieu attend de lui : Je ne sais pas parler… ma langue est pesante (je bégaye)… trouve quelqu’un d’autre… Mais Dieu insiste, il rend capable. Nous l’avons déjà entendu dans notre lecture. Il rend capable par sa présence à nos côtés. Je suis avec toi. Il nous rend capable de relever les défis que posent les missions pour lesquelles il nous appelle, en nous y ajustant. Comme c’est une messe d’action de grâce et non un éloge funèbre, je ne m’étendrai pas sur tout ce que tu as réalisé, mais le bilan que tu m’as envoyé à ma demande, montre comment tu t’es révélée en permettant à d’autres de se révéler. Travailler dans cette terre sainte qu’est l’humanité, faite à l’image et à la ressemblance de Dieu, c’est toujours réaliser cela. Je grandis à mesure que je permets aux autres de grandir. A l’école catholique, nous appelons cela l’esprit de famille, l’accueil de tous, la conjugaison des différences, l’accompagnement personnalisé selon les besoins de chacun… mais au final, c’est toujours le service de l’homme, donc le service de notre Dieu qui s’est incarné, que nous réalisons. Quand je vous dis qu’une école catholique est une terre sainte, croyez-le ! Cette certitude, doublée par la certitude que Dieu nous rend capable parce qu’il est avec nous, fait lever nos doutes et nos interrogations. 

Passée la phase de questionnement et d’évitement, nous pouvons alors entrer dans la dernière phase, celle de la révélation. Et c’est toujours Dieu qui se révèle en premier : Je suis qui je suis. Les commentateurs et traducteurs ont beaucoup glosé sur cette affirmation. Mais tous s’accordent à dire que Dieu dit à Moïse : Je suis celui que tu auras besoin que je sois, selon les circonstances, selon les moments de ta vie, selon les épreuves que tu auras à traverser… aie une certitude, je serai là, avec toi. Cette révélation du nom de Dieu, nous pouvons la faire nôtre. Ne devrions-nous pas pouvoir dire à chaque enfant, à chaque famille qui demande à entrer chez nous : Je serai toujours là pour toi ? J’ai conscience de l’immensité de la déclaration ainsi posée, mais je sais aussi qu’elle est notre défi permanent, à nous croyants. Elle ne peut être vraie que si nous fondons notre vie sur le roc qu’est le Christ ; l’évangile nous l’a rappelé. Le plus grand danger pour nos écoles, ce n’est pas d’ignorer Dieu, ni même, selon les dires de certains, d’être envahies par des gens qui croient autrement en Dieu ; non, le plus grand danger pour nos écoles, c’est d’avoir Dieu à la bouche – ou dans nos projets – sans l’avoir au cœur ; c’est de l’invoquer à certains moments de manière litanique sans le donner à voir de manière pratique. Il nous faut réentendre l’avertissement sévère de Jésus lui-même : Ce n’est pas en me disant : “Seigneur, Seigneur !” qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux. Ce jour-là, beaucoup me diront : “Seigneur, Seigneur, n’est- ce pas en ton nom que nous avons prophétisé, en ton nom que nous avons expulsé les démons, en ton nom que nous avons fait beaucoup de miracles ?” Alors je leur déclarerai : “Je ne vous ai jamais connus. Écartez- vous de moi, vous qui commettez le mal !” Moïse n’a pas connu le Christ, mais nous pouvons dire qu’il a comme fondé sa vie sur lui, en prenant au sérieux la parole de Dieu entendue au buisson ardent. Le Christ n’est-il pas pour nous, chrétiens, la Parole de Dieu révélée aux hommes de manière ultime, Parole qui était depuis le commencement auprès de Dieu ? Il n’y a pas de révélation de Dieu possible sans écoute de la Parole de Dieu. Il n’y a pas de révélation personnelle possible sans cette confrontation à la Parole de Dieu. En Sion encore moins qu’ailleurs, quand on sait l’importance qu’y prend l’étude biblique. Au moment où tu rends grâce à Dieu pour ton service ici, mesure tout ce que cette Parole t’a permis de réaliser ; au moment où tu prendras les rennes de ton nouvel établissement, aies conscience de ce que cette Parole peut réaliser dans le cœur de chaque membre de ta nouvelle communauté éducative. 


En relisant la vie de Moïse, nous pouvons nous rendre compte d’une réelle proximité de ce qu’il vit avec ce que nous pouvons vivre. L’épisode du buisson ardent n’en est qu’un exemple. Quand, comme moi, on est alsacien, on peut même se plaire à penser que Moïse, s’il revenait aujourd’hui, serait nécessairement alsacien : parce que, comme nous, il ne va ni trop vite, ni à moitié. Ni trop vite dans sa confiance – il n’est pas inconscient, il négocie, il cherche à éviter… comme l’alsacien qui met du temps à accorder à sa confiance – ni à moitié parce qu’une fois qu’il a accepté, il y va, franchement, dans un abandon total … comme l’alsacien : une fois qu’il est l’ami de quelqu’un, c’est pour la vie. Dans la nouvelle mission qui t’attend un peu plus loin que le Sud de Strasbourg, prends exemple sur Moïse ou sur les Alsaciens que tu quittes : n’y va ni trop vite, ni à moitié. Et vas-y avec la certitude que Dieu est avec toi et qu’il sera pour toujours celui que tu auras besoin qu’il soit. Amen.




Lettre pastorale pour le Carême 2019

Enfin… le Carême !


La date de Pâques étant variable d’une année à l’autre, celle du Carême l’est tout autant, avec des écarts qui peuvent sembler impressionnants. Ainsi, il est arrivé que le Carême commence début février alors que cette année, nous célèbrerons l’entrée en Carême le Mercredi 06 mars seulement. C’est sans doute pour cela que la maison Bayard fait titrer son éditorial sur le site Croire de cette manière : Enfin… le carême !  

J’avoue que cela m’a interpelé. En le lisant pour la première fois, il m’apparaissait comme un cri de libération ! Ils l’ont tellement attendu, le Carême ; le voici qui approche, enfin ! Mes souvenirs d’enfance sont assez loin de ce cri de libération à l’approche de ce temps qui était pour moi synonyme d’efforts à faire, de privations en tous genres… bref quelque chose de plutôt pas joyeux pour ne pas dire triste à mourir. Comment peut-on ainsi presque exulter de joie à l’approche du carême ? 

Je regarde alors ce que l’Eglise et le monde traversent en ce moment : crise de la pédophilie dans l’Eglise (mais pas seulement là…), crise de confiance, manque d’écoute, crises politiques en diverses régions du monde, y compris chez nous, résurgence de l’antisémitisme… Et là, ce cri : Enfin… le carême ! m’apparaît plus pertinent. Un temps de recul, un temps de réflexion, un temps de conversion : cela ne peut pas faire de mal. Peut-être même que cela pourra nous aider à repartir du bon pied quand résonnera l’alléluia de la nuit de Pâques. Oui, nous pourrions prendre ce temps pour relire nos vies, relire les événements du monde à la lumière de l’Evangile. Et oser demander pardon pour nos failles, nos lâchetés, nos manques d’espérance, nos manques d’attention à l’autre…  

Comme je l’ai déjà annoncé aux APS et aux chefs d’établissement, notre évêque nous invite à vivre un temps de jeûne, de prière et de pénitence le vendredi 29 mars en lien avec toutes les personnes victimes d’abus sexuels, d’abus de pouvoir et d’abus de conscience. Je sais le malaise que cela a pu engendrer dans vos communautés. Mais à bien y réfléchir, cela ne va-t-il pas dans le bon sens ? Relisant le mail transmis par l’archevêché, je constate qu’il s’agit bien plus que de la question de la pédophilie. C’est avant tout une question de relation avec les autres. Est-ce que j’abuse de ma position, de mes connaissances, pour contraindre l’autre ou porter atteinte à sa dignité ? Ce carême peut être l’occasion de prendre un peu de temps pour aborder avec nos jeunes et avec les adultes de nos communautés, la question des abus en tous genres dont ils peuvent être victimes… ou auteurs ? Les réseaux sociaux tant utilisés par tous aujourd’hui, sont quelquefois le lieu de bien des abus, exutoires anonymes de nos lâchetés, de nos peurs, de nos côtés les plus sombres. Ce que nos petits peuvent considérer comme un jeu de récréation ou une moquerie, peut cacher bien plus qu’une plaisanterie de mauvais goût. Ce n’est qu’un jeu, madame… diront-ils ; peut-être, mais en attendant, une personne souffre, une personne perd le goût et l’envie d’aller à l’école, à cause d’un jeu ! N’est-ce pas abuser d’elle ? 

Enfin… le carême ! Finalement, il n’est pas si malvenu ce cri. J’oserai même le pousser plus loin, plus fort s’il nous permet de mettre une fin à tous les abus dont nous sommes capables. J’irai jusqu’à crier : Vive le carême ! Sans en abuser quand même ! 

Bon temps de conversion à toutes et à tous,



Homélie Messe du Centenaire de l'école Notre Dame de Sion
donnée le 02 mars 2019 en la chapelle de l'établissement


C'est quoi une école de Sion ?




Voici donc le moment redoutable où, sans trop vous endormir, je dois vous adresser quelques mots pour vous édifier, si cela m’est possible, en prenant en compte la Parole de Dieu proclamée et l’événement célébré. Et puisqu’un centenaire de Notre Dame de Sion je n’en connaîtrai vraisemblablement qu’un, permettez-moi de vous livrez ma réponse à cette question qui m’a saisi dès la demande exprimée par la Directrice de présider pour vous cette eucharistie. La question est la suivante : qu’est-ce qu’une école catholique placée sous le patronage de Notre Dame de Sion ? Que doit-elle être, selon moi, pour être fidèle à sa vocation et à ses fondateurs ? La célébration de ce centenaire, si elle nous fait rendre grâce pour les fruits portés jusqu’ici, doit aussi nous redonner du souffle pour l’avenir. Et quoi de mieux pour reprendre souffle, que de s’interroger sur ce que nous sommes fondamentalement ? Quoi de mieux que de revenir au commencement ? 


Une école de Sion, c’est d’abord une école catholique comme les autres. C’est donc une école où l’on apprend des choses. Je sais, cela fait un peu ras des pâquerettes, mais c’est bien la réalité d’une école. Ce n’est pas forcément le lieu où l’on s’éclate tous les jours, même si cela arrive ! Car il y a des enfants qui aiment l’école ! Justement parce qu’ils y apprennent pleins de choses, qu’ils y élargissent leurs horizons, qu’ils y découvrent et approfondissent leurs compétences, qu’ils creusent en eux le désir de savoir. C’est une chance de pouvoir aller à l’école, c’est une chance de se coucher chaque jour plus intelligent que la veille. Pour cela, merci à ceux qui ont fondé l’institution Notre Dame de Sion et merci à ceux qui la font vivre. 


C’est aussi une école où, comme dans toutes les écoles catholiques, l’on apprend à être, c’est-à-dire où l’on grandit dans notre humanité. Une école de Sion doit donc avoir au cœur de ses préoccupations l’élève – pas les élèves entendus comme un grand troupeau – mais bien l’élève qui vient frapper à sa porte. Un enfant, avec sa vie, ses difficultés, ses joies, ses envies, un élève à faire grandir, à faire devenir homme ou femme, citoyen d’un pays qui a depuis longtemps une certaine idée du vivre ensemble. On ne forme pas que des cerveaux dans une école catholique, on fait grandir toutes les personnes qui y travaillent ! Merci à Théodore Ratisbonne de rappeler dès les commencements de son œuvre que ceux qui le rejoignent, doivent être [rendus] accueillants à tous leurs frères sans distinction de religion, de race, de pays ou de classe. 


C’est une école où, comme dans toutes les écoles catholiques, certains vivent leur foi. Catholique n’est pas qu’un adjectif de convenance, ni un synonyme de privé. Catholique, c’est une marque de fabrique, une manière d’être, reliée à une foi : la foi au Christ qui a donné sa vie par amour pour tous les hommes ; la foi au Christ qui, des deux, le Juif et le païen, a fait une seule réalité. Tous, dans l’école, ne partagent pas cette foi, et ils n’y sont pas obligés. Mais ceux qui la partagent n’y sont pas interdit, et il ne leur est interdit ni de la vivre, ni de la proposer. Merci à celles et à ceux qui prennent du temps, dans cette chapelle, pour célébrer le Christ qui les fait vivre.
Enfin, c’est une école où, comme dans toutes les écoles catholiques, la vérité de la foi est proposée à tous, dans le respect de chacun. Non seulement la foi y est vécue, mais elle y est aussi proposée. Non dans le but de convertir : Dieu seul convertit les cœurs ; mais pour rendre cette rencontre entre l’homme et Dieu possible. Car nous croyons que celui qui mène le monde et le conduit à son achèvement, ce n’est pas l’argent roi, mais le Dieu qui va à la rencontre des hommes et leur propose une Alliance à vivre. Je sais bien que notre société de consommation à outrance a rangé Dieu au rayon des idées passées ; mais je crois que Dieu n’est pas une idée, si belle soit-elle, mais bien quelqu’un qui nous appelle sans cesse à plus de vie.  Merci donc à celles et à ceux qui portent les propositions pastorales dans cet établissement, pour le témoignage donné, pour le temps passé à rendre cette foi active, visible, désirable. 

Une école de Sion, c’est donc tout cela, comme n’importe quelle école. Mais c’est aussi plus que cela, parce qu’elle est marquée par une mission particulière. Cette mission, c’est la vocation des Sœurs de Sion que l’on peut exprimer ainsi : œuvrer au rapprochement, dans le respect de chacun, des Juifs et des Chrétiens, frères dans la foi au Dieu unique et vrai. Les écoles de Sion doivent donc être des écoles où, plus que dans toutes les autres écoles, l’amitié entre croyants différents doit être vraie et la paix entre les croyants promue. Une école ne peut pas se réclamer de l’esprit de la congrégation de Sion et permettre le communautarisme, la ségrégation et pire, entretenir des conflits d’un autre âge. Plus qu’ailleurs, il faut favoriser la bonne entente, la compréhension mutuelle. Pour cela, cultiver ce sens particulier de l’amitié qui nous fait aimer l’autre dans sa différence, vécue non comme un danger mais comme une chance. 

Une école de Sion est donc aussi une école où, plus que dans toutes les autres écoles, la haine et l’antisémitisme – que l’on voit hélas refleurir – doivent être combattus. Ici, plus qu’ailleurs, un travail de mémoire est important pour que l’unité et la complémentarité des peuples soient reconnues. Ici, plus qu’ailleurs, judaïsme et christianisme doivent être étudiés, connus et reconnus comme facteurs de promotion du genre humain. Chrétiens, n’oublions pas ce que Paul a écrit aux Ephésiens : par sa chair crucifiée, le Christ a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine… en sa personne, il a tué la haine. Pour cela, veillez à transmettre fidèlement l’enseignement du Concile Vatican II et de sa déclaration Nostra Aetate. Qu’aucun élève ne quitte Sion en fin de troisième sans avoir entendu parler de ce texte court mais majeur dans le rapprochement entre la foi chrétienne et la foi du peuple juif.
Une école de Sion sera donc encore une école où, plus que dans toutes les autres écoles, nos racines respectives seront honorées. Faut-il rappeler ici que le Christ n’était pas chrétien ? Il est né Juif, a vécu comme tous les Juifs de son époque et il est mort Juif. Il n’a jamais été chrétien parce qu’il ne s’est jamais réclamé de lui, mais de Dieu son Père, comme nous le rappelle l’évangile : J’ai gardé les commandements de mon père, et je demeure dans son amour. Ceux qui ont fondé cette école, et ceux à qui elle est confiée aujourd’hui, sont chrétiens parce qu’il se réclame de lui, le Christ, qui se réclame de Dieu, son Père. Nous devons suivre son exemple et vivre de son enseignement. Pour cela, tenez ensemble, dans l’enseignement religieux, l’étude du Premier Testament et du Nouveau Testament, comme source de la révélation du même Dieu, Père de tous les hommes.

Une école de Sion sera donc enfin une école où, plus que dans toutes les autres écoles, les croyants seront accueillants à l’Esprit du Dieu unique et vrai, pour vivre de sa Parole et de ses dons. La suite de la lettre aux Ephésiens rappelle quelques caractéristiques de celui qui se laisse guider par l’Esprit de Dieu : il a beaucoup d’humilité, de douceur, de patience. Il sait supporter les autres avec amour ; il a soin de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix. Il est plein de générosité et de tendresse, et il sait pardonner aux autres comme Dieu [nous] a pardonné dans le Christ. Pour cela, revenez à la vie de vos fondateurs ; et s’ils vous semblent vraiment trop anciens, rapprochez-vous de Sœur Emmanuelle. De mémoire, elle appartient à votre famille ! Sa vie est un exemple stimulant pour tous aujourd’hui.

Je termine ainsi en faisant ce rapprochement que me permet le beau nom de Sion, ma mère, car en elle tout homme est né (Ps 86, 5). Une école de Sion, si elle vit tout cela, sera comme un avant-goût de la Jérusalem nouvelle dont parle le livre de l’Apocalypse, celle dont nous attendons la réalisation à la fin des temps. Elle est cette cité où plus rien ne se fera de mal ! Puisse le passage des enfants et des jeunes dans cette école leur donner le dégoût du Mal et le goût des autres, de tous les autres. Amen.


Lettre pastorale pour l'Avent 2018

Le salut, une responsabilité en partage ?



Levez le doigt, ceux qui n’ont pas encore entendu cette expression qui marque notre année scolaire dans l’Enseignement catholique : La responsabilité en partage ou la responsabilité partagée ? Elle sera au cœur de la semaine du réenchantement que nous serons invités à vivre au mois de février et de la journée du 08 mars proposée par l’équipe diocésaine. Je voudrais en parler dès maintenant, au début de notre nouvelle année liturgique, parce qu’en religion aussi, tout est une question de responsabilité partagée. 

Le temps de l’Avent qui s’ouvre permet aux chrétiens de préparer la venue de Celui qui vient sauver les hommes. Mesurons-nous bien tout ce que nous affirmons dans cette phrase ? Nous qui attendons souvent que tout nous tombe tout cuit dans la bouche, voilà que nous devons faire quelque chose pour notre salut : nous y préparer ! Et cette préparation est active ; il ne s’agit pas d’attendre en regardant notre série préférée, ou en lisant notre auteur préféré, ou en écoutant notre musique préférée. Activement signifie bien que nous avons une part dans l’avènement de celui qui vient. Il s’agit bien que tout soit prêt, en nous, pour qu’il ne trouve pas porte close quand il viendra. Ceux qui disent connaître l’histoire se souviendront que les évangiles nous disent, qu’à sa naissance, il fut rejeté par beaucoup : pas assez de place, trop occupé pour loger un nouveau-né et sa famille. Sans le savoir, c’est au Sauveur des hommes qu’ils ont claqué la porte au nez.  

Se préparer activement à accueillir celui qui vient, c’est aussi dire quelque chose de Celui qui vient et de notre rapport à lui. Parce que celui qui vient, celui que les chrétiens appellent « le Messie », ne vient pas malgré eux, ni contre eux. Il vient pour eux et pour tous les hommes, pour qu’avec Lui, ils deviennent capables de lutter contre le Mal, pour qu’avec Lui, ils deviennent capables du salut, capables de Dieu. Jésus n’est pas comme un Avenger qui viendrait régler nos problèmes en luttant contre un super méchant. Jésus vient pour établir une alliance avec les hommes, donc avec moi, avec chacun, pour que chacun ait en lui la force même de Dieu (l’Esprit Saint) qui lui permettra de lutter dans sa propre vie déjà pour que toujours le Mal recule. Nous avons donc une part à tenir dans l’avènement de notre salut. Nous avons bel et bien une responsabilité partagée en matière de salut. Jésus pourra bien faire tout ce qu’il voudra pour nous sauver, même mourir sur une croix : si nous ne l’accueillons pas, si nous ne consentons pas à notre salut, celui-là ne viendra pas pour nous. Tout est dit par Jean dans le prologue de son évangile : Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. Il était dans le monde, et le monde était venu par lui à l’existence, mais le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. Le salut vient du Christ, il n’y a pas à en douter, mais il ne viendra pas pour moi si je n’en veux pas.

Nous touchons alors une part du travail de l’Ecole catholique : éveiller le désir Dieu, éveiller le désir du salut par des propositions pastorales adaptées. C’est plus que du faire, plus que du bien faire les choses. C’est annoncer clairement qui nous sommes, par la parole et par les actes, afin que cette Lumière qui est venue dans le monde ne soit pas cachée, mais resplendisse pleinement dans nos écoles. Il appartiendra à chacun de décider s’il veut l’accueillir dans sa vie, mais nous aurons fait notre part en la présentant sans cesse. 

Bon avent, bonne préparation à la venue de celui qui vient nous associer à son œuvre de salut.



Lettre pastorale pour la rentrée 2018

Quels souvenirs de vacances ?




Il faudra bien s’y faire, les vacances sont finies : vive la rentrée ! Mais quel souvenir vous restera de ces vacances d’été 2018 ? La victoire de la France à la coupe du monde de football ? Une canicule exceptionnellement longue ? La chute du viaduc de Gênes ? Telle rencontre ou tel sourire ? Tel lieu ou tel événement ? Pour ma part, sans être insensible à ces événements, rien de tout cela, mais un événement bien plus discret, ignoré de tous, et qui aura coloré et illuminé toutes mes vacances. Cet événement, c’est la décision de deux chefs d’établissement catholique de Strasbourg d’accueillir à la rentrée des MNA (des Mineurs Non Accompagnés) ; je manque de mots pour leur dire combien leur décision m’a touché. Ces jeunes ont bravé mille dangers et la mort même, pour venir en France. Ils ont laissé leurs familles, leurs amis, leur vie, non pour nous prendre des choses, non pour profiter de nous, mais pour avoir la chance d’aller à l’école chez nous ! Ils seront treize en tout à faire leur rentrée au milieu de nos élèves. Et maintenant ?
           Maintenant, tout commence. Il ne faudrait pas que ces élèves accueillis soient notre bonne conscience : on a fait un effort, c’est bien ! Maintenant, il s’agit de les accueillir vraiment et de les considérer comme nos élèves habituels. Ne les regardons pas comme des bêtes curieuses, mais donnons-leur une chance comme nous le faisons avec tous les élèves. Je remercie déjà les enseignants qui les auront dans leur classe et qui auront à cœur leur épanouissement et leur réussite. Je remercie tous les personnels éducatifs, administratifs et de service qui sauront leur apprendre à se sentir bien chez nous. Je remercie encore les membres de l’AREC qui offriront du temps pour un soutien scolaire et une aide aux devoirs. Je remercie aussi les élèves qui sauront tisser avec eux des liens fraternels réels. Je remercie enfin les parents d’élèves pour le soutien qu’ils sauront apporter à ces jeunes en les accueillant comme ils accueillent les autres copains de leur fils ou de leur fille. Ne serait-ce pas un beau signe pour tous, et une manière de réenchanter nos vies si, à l’occasion des vacances de la Toussaint ou de Noël, ou de toutes autres occasions, ces jeunes étaient les bienvenus chez l’un ou l’autre de leurs camarades de classe ?
Pour l’instant, ces jeunes sont accueillis et logés à la paroisse des étudiants de Strasbourg (église du Christ ressuscité). Concrètement, cela signifie qu’ils dorment dans une chapelle. Oserons-nous pousser la fraternité jusqu’à les accueillir, à tour de rôle, pour un trimestre ou plus, selon les possibilités, dans nos familles, pour leur offrir un cadre de vie plus propice aux études ? J’ai peur d’en demander trop, mais la charité du Christ nous presse (2 Co 5, 14). Il y a là un terrain favorable pour les APS et les aumôniers et prêtres référents pour nous faire réfléchir à cette élémentaire charité qui est la marque de fabrique du croyant au Christ.
Le geste de ces deux chefs d’établissement (et peut-être d’autres encore, mais dont j’ignore tout) n’est pas, et ne doit pas être anodin pour nous. Il dit quelque chose de l’ADN de l’Enseignement catholique et de son désir de donner une réelle chance à tous, quelles que soient son origine ou ses croyances. Leur geste devient notre affaire à tous ; nous ne saurions les laisser se débrouiller tout seul. Nous sommes tous concernés par l’appel du Christ : J’étais un étranger et vous m’avez accueilli (Mt 25, 35).

Bonne rentrée, dans la charité du Christ.



lettre pastorale pour le temps du Carême 2018

Si tu le veux, tu peux me guérir !





Voici que s’ouvre à nouveau le temps du Carême ! Il revient chaque année pour nous préparer aux fêtes de Pâques. Il est accompagné d’actions de solidarité, d’un renouveau de la vie de prière, d’une vie personnelle plus sobre. Je voudrais vous inviter à y entrer cette année avec l’interpellation adressée à Jésus par le lépreux dans l’Evangile du 6ème dimanche du temps ordinaire (le 11 février 2018). Il disait : Si tu le veux, tu peux me guérir.  

Tu peux… Voici un verbe intéressant. Nous comprenons spontanément que l’homme reconnaît ainsi la puissance de Jésus. Il a la capacité de le guérir ; il peut le faire. Et il est vrai que Jésus l’a largement démontré durant son séjour à Capharnaüm (voir le chapitre 1 de l’évangile selon Marc). La liste des personnes guéries est sans fin. Jésus a même chassé des démons. Il a un vrai pouvoir. Nous aimerions qu’il utilise quelquefois ce pouvoir en notre faveur, pour pleins de raisons qui nous sont propres.  Nous voudrions utiliser ce pouvoir à notre service. Mais rien ne se passe. Peut-être parce que cela n’est pas dans le projet de Jésus : Si tu le veux, dit le lépreux en préambule ; autrement dit, si cela correspond à ton désir de salut pour moi. Au moment où nous entrons en Carême, n’oublions pas cela : Dieu a un projet d’amour pour chacun de nous, et c’est à nous d’entrer dans ce projet et non pas à Dieu de faire entrer son projet dans les nôtres.  

Tu peux… Ce verbe a un deuxième sens. Nous l’utilisons aussi pour autoriser quelqu’un. Tu veux faire cela ? eh bien tu peux le faire, je t’y autorise. Et voilà que l’interpellation du lépreux reçoit un nouvel éclairage : non seulement il reconnaît la puissance de Jésus et sa possibilité de le guérir, mais en plus il l’autorise à le faire. Tu peux me guérir parce que je me laisserai faire par toi. N’est-ce pas là une attitude à développer durant ce temps de Carême ? Avec le recul du temps, nous savons que Jésus peut beaucoup de choses ; mais le laissons-nous toujours faire selon ce qu’il veut ? L’autorisons-nous à agir dans notre vie pour la rendre non pas telle que nous la voudrions, mais telle que lui la veut pour nous ? Jésus est venu pour le bonheur et la vie des hommes ; sa longue marche vers Pâques, marche douloureuse et exigeante, nous le rappelle. Jésus ne peut agir pour nous contre notre volonté. Si je ne veux pas laisser Jésus agir selon ce qu’il estime le plus juste ou le meilleur pour moi, comment puis-je lui reprocher de ne pas répondre à mes prières ? Si je ne veux pas laisser Jésus agir selon son projet d’amour pour moi, comment puis-je lui reprocher que ma vie ne soit pas à la hauteur du projet de Dieu pour moi ? 

Le temps du Carême est un temps pour réajuster notre vie à la volonté de Dieu. Ce faisant, nous n’abdiquons ni notre liberté, ni notre vie, ni notre bonheur, mais nous les trouvons réellement. Notre liberté n’existe qu’en Jésus ; notre vie n’existe qu’en Jésus ; notre bonheur n’existe qu’en Jésus. En nous engageant résolument sur le chemin du Carême, nous disons à Jésus ce que le lépreux jadis lui disait déjà : Si tu le veux, tu peux me guérir ! Si tu veux me guérir, je me laisserai guérir par toi, sûr que je suis que tu ne veux que le meilleur pour moi. Apprenons, durant ce Carême, à entrer dans la volonté de Dieu pour guérir de la lèpre du péché par la puissance de Jésus. Ainsi, au terme de la route, nous vivrons par lui, avec lui et en lui chaque jour.  

Je vous souhaite un bon Carême, à la découverte de ce que Dieu veut pour vous. Laissez-vous approcher par Jésus, laissez-le agir dans votre vie. Il peut vous guérir de tout ce qui vous empêche d’être vraiment libre ; il veut vous guérir de ce qui vous retient loin de lui ; le voulez-vous aussi ?


Lettre pastorale pour le temps de l'Avent 2017.

Et si pour une fois, nous nous laissions tenter par Dieu...



Qui ignore encore que la prière du Notre Père a été modifiée et qu’à partir du premier dimanche de l’Avent, nous ne dirons plus « et ne nous soumets pas à la tentation » mais « et ne nous laisse pas entrer en tentation » ? Pour beaucoup, même chez les chrétiens, il n’y aura là qu’une nouvelle phrase à apprendre, qui ne changera rien à leur vie. Et pourtant, en modifiant une simple phrase, ne précisons-nous pas mieux ce que nous disons et croyons de Dieu ? 
La traduction encore en vigueur au moment où j’écris ces lignes pouvait laisser croire que Dieu serait à l’origine de la tentation, autrement dit : qu’il nous pousserait au Mal ou, à tout le moins, qu’il serait celui qui vérifierait ainsi notre résistance au Mal. Il serait comme une mère de famille qui, ayant fait un bon et gros biscuit, le mettrait sous les yeux de son enfant en disant : « Tu as vu comme il est grand et beau, mon gâteau ? Comme il doit être bon ! Tu n’y toucheras pas ! » Toutes les conditions réunies pour qu’un enfant un peu gourmet et gourmand s’y précipite dès qu’elle aura le dos tourné. Qui n’a jamais passé le doigt dans la crème d’un biscuit pour vérifier combien ce serait bon de se délecter de cette chose en entier ? 
Pour être honnête dans ma réflexion, j’ai vérifié dans un dictionnaire (Le Petit Robert, édition 2003), la définition du mot tentation. Elle est triple, ce qui nous donne dans l’ordre : 1. ce qui porte à enfreindre une loi religieuse, moral ; impulsion qui pousse au péché, au mal, en éveillant le désir : 2. Action du tentateur ; 3. (av. 1650) ce qui incite (à une action) en éveillant le désir. J’ai pu vérifier que la tentation est quand même connotée négativement. Ce n’est pas bien d’être tenté, ce n’est pas bien de tenter quelqu’un. N’y a-t-il donc que de mauvaises tentations, auquel cas je comprends qu’on modifie la formulation du Notre Père. Dieu étant bon par nature, il ne peut nous induire en tentation, il ne peut nous pousser au Mal. 
Cependant, être incité à agir après que notre désir eut été éveillé (3ème sens dans le Petit Robert) n’est pas nécessairement mauvais. Ne puis-je pas désirer le bien ? Ne puis-je pas désirer renoncer au Mal ? Ne puis-je pas désirer Dieu ? Ne puis-je pas désirer vivre comme Dieu me le demande ? Bref, le désir n’a-t-il pas sa place en religion ? 
Au moment où nous nous préparons à accueillir Dieu qui vient à notre rencontre dans un Enfant nouveau-né, creusons en nous le désir de Dieu. Creusons en nous le désir de paix que cette naissance annonce. Creusons en nous le désir de répondre favorablement à cette irruption de Dieu au cœur de notre monde. Laissons-nous tenter par ce Dieu qui vient établir un règne de paix. Laissons-nous tenter par cet Enfant, signe de l’amour de Dieu pour chacun de nous. Laissons-nous tenter par lui à faire le bien, à répandre le bien, à dire le bien. 
Si nous nous laissons tenter à faire des actions positives, des actions qui font grandir notre humanité, des actions qui rendent notre monde plus beau et plus fraternel, nous comprendrons alors mieux le sens de la nouvelle traduction du Notre Père, qui ne fait que préciser ce que sous-entendait l’ancienne : sois avec nous quand nous avons à choisir entre le Bien et le Mal ; sois avec nous, Seigneur, pour que nous orientions notre désir vers toi plutôt que vers l’Adversaire. Que nous nous laissions tenter uniquement par Toi, source de tout bien et de toute vie, source de tout bonheur et de toute paix. Réenchantons la tentation pour qu’elle nous détourne du Mal et nous tourne vers Dieu et nos frères. Bon temps de l’Avent à toutes et à tous.




Lettre pastorale pour la rentrée (septembre 2017)

Catholique... ma non troppo ?



Il est un reproche fait à nos établissements qui me paraît particulièrement injustifié, car il traduit une méconnaissance de notre projet éducatif. Ce reproche, comme l’indique le titre de ce billet, c’est que nous serions catholiques, mais pas trop, entendez : pas assez ! Certaines personnes n’hésitent pas à aller encore plus loin en affirmant de manière péremptoire qu’il y a trop « d’exotisme » chez nous, comprenez bien : que nous poussons l’ouverture trop loin, d’où une perte évidente de la dimension catholique. Bref, nous serions mieux entre nous ! 
Je n’ai ni la place, ni le temps de faire un précis de théologie sur la catholicité. Mais elle se traduit d’abord et surtout, dans nos établissements, par notre ouverture à tous. La totalité du monde est concernée par l’annonce du message de l’Evangile ; la totalité du monde a donc sa place dans nos écoles, parce qu’elles sont catholiques. Si les catholiques que nous sommes ne savent plus faire place à la différence, y compris en matière de foi ou de non foi, pourrions-nous encore annoncer le message de l’Evangile ? Le signe évident de notre catholicité réside bien, selon moi, dans le fait que nous accueillons toutes celles et tous ceux qui frappent à notre porte et acceptent notre proposition éducative. Notre dimension catholique n’est pas à remettre en cause ; mais elle nous oblige ! 
Notre catholicité nous oblige à l’ouverture, à l’accueil et aussi à la compréhension de l’autre. Accueillir, c’est bien et utile. Entrer dans la compréhension de l’autre, de son histoire, de sa foi, sans rien renier de la nôtre, voilà qui est assurément un pas de plus, un pas nécessaire. Durant cette année, des outils seront proposés par le Secrétariat général pour engager plus avant le dialogue interculturel et interreligieux. Dans une société mondialisée, nous ne pouvons pas nous replier sur nous-mêmes sous peine de devenir un « exotisme anachronique » pour les autres. Le document Eduquer au dialogue interculturel et interreligieux en école catholique, dont nous attendions la publication l’an passé, sera enfin livré à tous. J’encourage chaque équipe éducative à s’en saisir ; il doit permettre un meilleur vivre-ensemble tellement nécessaire après les épisodes d’attentats de cet été. Plus que jamais, nous devons accueillir tout en étant vigilant, comprendre tout en condamnant les excès (y compris les nôtres !), rencontrer tout en approfondissant qui nous sommes. Seule la clarté de nos propositions pourra éviter le mélange des genres, l’approximation dans les débats, le syncrétisme dans les propositions pastorales. La session diocésaine proposée en février 2018 aux chefs d’établissement et aux APS de notre diocèse permettra à ceux qui portent la dimension pastorale dans nos établissements d’être plus au clair sur ces questions. 
Catholique ma non troppo ? Sans doute ne serons-nous jamais totalement catholiques, mais pas à cause des raisons invoquées plus haut. Nous ne serons pas totalement catholiques tant que le Mal rongera notre cœur ; nous ne serons pas totalement catholiques tant que la peur empêchera notre charité d’être inventive ; nous ne serons pas totalement catholiques tant que nous jugerons les autres à l’aune de notre propre foi ; nous ne serons pas totalement catholiques tant que nous préfèrerons le repli à l’ouverture. Il n’y a aucune issue au repli identitaire si ce n’est la violence. Et rien n’est plus anticatholique que la violence faite à l’autre au nom de sa différence. 
Catholique ma non troppo ! Décidons d’assumer ce reproche et de l’entendre comme un engagement à toujours nous convertir au Dieu de Jésus Christ, le Dieu dont le nom est Amour ; à l’entendre comme un engagement à toujours nous ouvrir à l’autre, en particulier le plus pauvre au sens chrétien du terme. Sans doute ceux qui nous font ce reproche en font-ils partie. Aimons-les donc et éclairons-les afin qu’ils deviennent authentiquement catholiques avec nous. Bonne rentrée à toutes et à tous !


Lettre pastorale aux jeunes de 16 à 29 ans de l'Enseignement catholique d'Alsace


A l’occasion de la préparation du Synode sur les jeunes, la foi et le discernement vocationnel



 

Bonjour,


Le pape François a convoqué un synode (une assemblée d’évêques) pour le mois d’octobre 2018 sur la question suivante : les jeunes, la foi et le discernement vocationnel. Il montre ainsi l’intérêt qu’il porte à la jeunesse, à ce qu’elle pense, à ce qu’elle vit, à ce qu’elle rêve, à son avenir aussi… Ce sera une belle et grande expérience d’Eglise. C’est à cette occasion que je t’écris.


En quoi es-tu concerné ? Le pape François souhaite consulter largement les jeunes du monde entier, qu’ils soient catholiques, croyants d’une autre religion ou non-croyants. Il veut vous connaître mieux ; il veut que l’Eglise vous connaisse mieux. C’est une belle opportunité qui t’est offerte de faire connaître ce que tu penses, ce que tu crois avant que les évêques ne parlent de vous tous. En fait, cette grande consultation servira de base au travail des évêques qui seront réunis à Rome autour du pape François.


Comment participer ? C’est très simple : tu te rends à l’adresse suivante (https://survey-synod2018.glauco.it/limesurvey/index.php/147718) et tu remplis le questionnaire. Il est totalement anonyme. Réponds le plus simplement et le plus honnêtement possible. Tes réponses sont envoyées directement au Secrétariat Général du Synode qui les collectera et les traitera avec toutes les réponses qui lui parviendront.


Je tiens à souligner que c’est une occasion unique qui est donnée à ta génération de peser directement sur les travaux d’un Synode. Tu as aujourd’hui la possibilité de te faire entendre, de dire ce qui compte le plus pour toi. A l’issue du Synode, le pape François prendra le temps de la réflexion puis rédigera un texte (une exhortation apostolique post-synodale) dans laquelle il reprendra les conclusions du  Synode et donnera des orientations à l’Eglise pour l’avenir.


Je voudrais t’encourager à participer à cette grande consultation. Il faut environ une demi-heure de ton temps pour répondre à l’ensemble du questionnaire. Pas besoin d’être un grand écrivain, ni de savoir faire de belles phrases : il s’agit surtout de cocher les réponses qui te semblent les plus justes. Les questions concernent ta vie, ton rapport à la famille, au travail, à l’Eglise et à sa foi, et aux réseaux sociaux. Tu peux remplir le questionnaire quand tu veux, mais avant le mois de novembre 2017.


Ce questionnaire s’adresse à tout jeune de 16 à 29 ans, qu’il soit étudiant ou déjà salarié. Dans nos établissements catholiques d’enseignement, il te concerne dès lors que tu es lycéen ou étudiant, ou jeune enseignant ou jeune personnel de service ou administratif. Personne n’est exclu. Si tu as des amis qui ne fréquentent pas nos établissements, n’hésite pas à leur donner le lien vers le questionnaire : la parole de chacun enrichira la réflexion de tous.


La parole t’est donnée, prends-la ! La parole t’est donnée, libère-la !


Cordialement,



Lettre pastorale pour le Carême 2016

Un Carême à vivre avec les attentes du pape François


Ce mercredi nous entrerons en Carême, temps béni pour redonner un peu de profondeur à notre vie spirituelle et marcher à nouveau humblement avec notre Dieu. Jeûne, prière et charité sont les moyens ordinaires proposés par l’Eglise pour creuser en nous le désir de Dieu. Je voudrais vous inviter à vivre ce Carême 2017 en communion avec le pape François. Dans un discours donné le 09 février 2017 aux membres de la Congrégation pour l’Education Catholique, il a formulé trois attentes qu’il espérait prises en charge par l’Enseignement catholique. Je les reçois et vous les transmets comme une déclinaison contemporaine du triptyque « Jeûne, Prière, Partage ».
La première attente signalée par le pape François, c’est la nécessité d’humaniser l’éducation. En effet, écrit-il, l’école et l’université ne possèdent tout leur sens qu’en relation avec la formation de la personne. Tous les éducateurs sont appelés à collaborer à ce processus de croissance humaine avec leur professionnalisme et avec la richesse d’humanité dont ils sont porteurs, pour aider les jeunes à être des bâtisseurs d’un monde plus solidaire et pacifique. Nous pouvons mettre ce besoin d’humaniser l’éducation en lien avec le souci d’éveiller l’intériorité chez nos élèves et pourquoi pas, pour ceux qui en veulent plus, avec la nécessité d’éduquer à la prière. Chrétiens, nous croyons que la relation à Dieu humanise l’homme tout entier : plus l’homme grandit dans sa relation à Dieu, donc en sainteté, plus il grandit dans son humanité. 
La deuxième attente exprimée par le pape François, c’est le développement de la culture du dialogue. En effet, poursuit le pape, notre monde est devenu un village mondial avec de multiples processus d’interaction, où chaque personne appartient à l’humanité et partage l’espérance d’un avenir meilleur avec la famille entière des peuples. Dans le même temps, malheureusement, il existe de nombreuses formes de violence, de pauvreté, d’exploitation, de discrimination, de marginalisation, d’approches restrictives des libertés fondamentales qui créent une culture du rejet. Dans ce contexte, les instituts éducatifs catholiques sont appelés en première ligne à pratiquer la grammaire du dialogue qui forme à la rencontre et à la valorisation des diversités culturelles et religieuses. En effet, le dialogue éduque quand la personne entre en relation avec respect, estime, écoute sincère et qu’elle s’exprime avec authenticité sans voiler ni amoindrir son identité nourrie par l’inspiration évangélique. Nous sommes encouragés par la conviction que les nouvelles générations, éduquées chrétiennement au dialogue, sortiront des salles de classe et des universités motivées pour construire des ponts et, par conséquent, pour trouver de nouvelles réponses aux nombreux défis de notre temps. Dans un sens plus spécifique, les écoles et les universités sont appelées à enseigner une méthode de dialogue intellectuel dont l’objectif est la recherche de la vérité. Saint Thomas a été et est encore maître dans cette méthode qui consiste à prendre l’autre au sérieux, l’interlocuteur, en cherchant à saisir jusqu’au fond ses raisons et ses objections, pour pouvoir répondre de manière non pas superficielle, mais appropriée. C’est seulement ainsi que l’on peut vraiment avancer ensemble dans la connaissance de la vérité. Ne trouvons-là pas la belle notion de partage que le Carême nous invite à vivre ? Entrer en dialogue, c’est nécessairement savoir recevoir et savoir donner, respectueusement. Le partage porte en lui cette double exigence de donner et recevoir, sinon nos gestes de solidarité ne seront que condescendance envers ceux qui ont moins de chance que nous. 
Enfin, le pape termine par la contribution de l’éducation pour « semer l’espérance ». Il nous rappelle que l’homme ne peut vivre sans espérance et l’éducation est génératrice d’espérance. En effet, l’éducation fait naître, elle fait grandir, elle se situe dans la dynamique du don de la vie. Et la vie qui naît est la source la plus jaillissante d’espérance ; une vie tendue vers la recherche du beau, du bon, du vrai et de la communion avec les autres pour une croissance commune. Je suis convaincu que les jeunes d’aujourd’hui ont surtout besoin de cette vie qui construit un avenir. C’est pourquoi, le véritable éducateur est comme un père et une mère qui transmet une vie capable d’avenir. Pour avoir ce tempérament, il faut se mettre à l’écoute des jeunes : le « travail de l’oreille ». Se mettre à l’écoute des jeunes ! Et nous le ferons en particulier avec le prochain synode des évêques qui leur sera consacré. Ensuite, l’éducation a en commun avec l’espérance la même «étoffe» du risque. L’espérance n’est pas un optimisme superficiel, ni la capacité de regarder les choses avec bienveillance, mais elle est tout d’abord savoir risquer de manière juste, précisément comme l’éducation. Je vois là une belle occasion de jeûner le pessimisme ambiant qui veut que « tout est foutu et que rien ne va plus ». Je vois deux occasions de semer un peu d’espérance dans nos écoles en Alsace. La première, c’est l’accueil de notre nouvel archevêque et de tout ce qu’il a à apporter à l’Eglise qui est en Alsace. La seconde, ce sont les différentes échéances électorales que nous allons vivre. Dans nos établissements, certains seront appelés à voter pour la première fois. Nous pourrions prendre un peu de temps avec eux pour leur permettre une prise de hauteur dans un débat jusque-là peu enthousiasmant. Il ne s’agit bien sûr pas de donner des consignes de votes, mais des clés de lecture pour que leur premier acte citoyen ne soit pas un acte de défiance, mais bien un acte d’espérance en notre avenir commun. Nous pourrions jeûner tous les poncifs, toutes les opinions ‘surgelées, juste à réchauffer’, et inviter à une réflexion vraie, à une analyse juste des enjeux pour une prise de décision éclairée. 
La triple attente du pape François et le triptyque ‘prière, jeûne et partage’ s’éclairent mutuellement et donnent sens, me semble-t-il, au Carême qui s’ouvre. En conjuguant les deux, d’abord dans notre propre vie, nous deviendrons toujours plus des témoins et des éducateurs crédibles parce que respectueux de l’homme, ouverts au dialogue et porteurs d’espérance. N’est-ce pas une belle manière d’imiter le Christ ? 
Bon Carême à vous, dans l’espérance pascale.



Lettre pastorale pour l'Avent 2016

Tout est fini ?



Reconnaissons-le : l'année qui vient de s'écouler a été riche de sens pour l'Enseignement catholique d'Alsace. À l'échelle de la DDEC, nous avons vécu tout le processus de réflexion autour du projet diocésain et sa proclamation le 08 octobre dernier. A l'échelle de l'Eglise, ce fut le Jubilé de la Miséricorde voulu par le pape François. Et maintenant ? Tout est fini ? 

Le projet diocésain, nous l'avons reçu des mains de notre archevêque. Qu'allons-nous en faire ? Le ranger dans un tiroir ? Le garder sur un coin de bureau, bien visible ? L'afficher dans un, voire plusieurs couloirs ? Un peu de décoration ne peut pas faire de mal… 

La miséricorde, c'était bien une année ; nous avons fait des efforts, rappelé les œuvres de miséricordes à nos élèves ; peut-être sommes-nous allés jusqu'à oser proposer des célébrations de la miséricorde durant l'un ou l'autre temps fort. Mais bon, nous sommes dans une nouvelle année scolaire ; le pape a refermé la porte de la miséricorde, c'est fini ; passons à autre chose…  

Nous sentons bien que, dans l'un et l'autre cas, nous ne pouvons pas simplement tourner la page.

Le projet diocésain, il nous faut maintenant l'accueillir, le travailler, décider concrètement des axes à mettre en œuvre dans nos établissements. Après tout, ce n'est pas qu'un beau document ! Il ne peut rester lettre morte. Entre les projets d'établissement, les projets de tutelle, il doit bien trouver sa place ; mieux, il doit d'une certaine manière s'y retrouver. C'est bien l'Enseignement catholique d'Alsace qui fait que les trente-trois sites scolaires catholiques sont une même famille, par-delà les tutelles qui les ont fondés.

La miséricorde ne peut pas être éteinte parce que son Jubilé est clos. L'attention aux plus faibles que le pape François nous demandait d'avoir et de vivre à travers les œuvres de miséricorde, ne saurait se relâcher. Plus que jamais, nous devons éveiller les membres de nos communautés éducatives à l'attention au plus faible, à tous les niveaux.

Je sais bien que notre société nous pousse toujours à la consommation : elle nous fait passer d'une urgence à une autre, d'une idée à une autre, d'un produit à un autre. Sitôt proposé, déjà dépassé. Elle nous pousse à sans cesse passer à autre chose et à oublier le passé sous peine de passer pour un conservateur, voire un réactionnaire. Nos anciennes idées sur l'Homme, sur la Famille, sur l'Education : dépassées, à oublier, à changer !

L'Eglise, au contraire, nous invite toujours à reprendre, à approfondir, à grandir ! Nous entrons dans le temps de l'Avent. Nous pourrions dire : encore une fois ? C'est toujours la même chose ; rien ne change, rien n'avance ! C'est faux ! Nous changeons, nous avançons, ne serait-ce qu'en âge ! Ce que j'ai compris du mystère de Jésus l'an passé grâce à l'Enseignement religieux, grâce aux activités pastorales, je vais pouvoir l'approfondir avec un peu plus de hauteur de vue si j'ai accepté de grandir dans ma réflexion, dans ma foi si je suis croyant. La nouvelle année liturgique va déployer les mêmes temps que l'année précédente, mais elle le fait pour des hommes et des femmes toujours nouveaux, des hommes et des femmes en chemin, en progrès. Rien n'est jamais fini de notre découverte de Dieu, du Christ et de son amour, de la puissance de l'Esprit en nos vies.

Puisqu'une nouvelle année liturgique a commencé en ce premier dimanche de l'Avent, ouvrons-nous à la nouveauté que Dieu nous propose de vivre à la suite du Christ. Et que ce soit en matière de découverte du Christ, de miséricorde sans cesse à vivre, de projet diocésain à accueillir, soyons convaincu que rien n'est fini tant que notre histoire n'est pas finie. Tout nous a été donné en germe ; tout doit maintenant grandir et s'épanouir pour qu'à notre tour, nous puissions grandir encore et nous épanouir encore.

Bon temps de l'Avent à tous ! 



Lettre pastorale pour la rentrée 2016

La fraternité, bien plus qu'un mot !

Je ne sais pas pour vous, mais jamais, de toute ma vie, je n'ai espéré la rentrée avec autant d'impatience. L'été que nous avons vécu marquera mes souvenirs à jamais, tant la violence que certains se sont évertués à nous faire subir est grande. Attentat à Nice au moment-même où nous étions à la joie de la fête nationale et quelques jours plus tard assassinat d'un prêtre âgé alors même qu'il célébrait l'amour de Dieu pour tous les hommes dans le sacrement de l'Eucharistie. Rien ne sera plus comme avant et petit à petit, nous abandonnons notre liberté pour un semblant de sécurité qui ne rassure vraiment personne. L'illusion de la sécurité est-elle la sécurité ? L'illusion de la sécurité vaut-elle la renonciation à être vraiment libre, sans peur et sans haine ? On nous avait promis, après les premiers attentats l'an passé, que la France ne cèderait pas ; on nous avait promis que la France ne changerait pas ; mais tout avait déjà changé ; et ces promesses, comme souvent les promesses politiques, ne valent rien. Avons-nous une issue ? 
Comme vous l'a écrit Mgr Dollmann, l'école catholique doit être un lieu de reprise, de raison et de réflexion. Plus que jamais, nous devons avoir à cœur de former des jeunes capables d'affronter le monde de manière juste. Plus que jamais, nous devons avoir à cœur de former des jeunes capables de relations humaines vraies, libérées de la crainte de l'autre, libérées de la haine. Plus que jamais, nous avons un besoin de fraternité. Ce sera le mot d'ordre de notre Directeur Diocésain pour cette année scolaire… et bien au-delà. Parce que la fraternité ne peut pas être seulement le mot d'ordre des mois à venir. Au-delà de ce mot, il y a une réalité à vivre ; au-delà de ce mot, il y a des actes concrets à poser pour bâtir une humanité fraternelle bien que diverse dans ses opinions, dans ses croyances, dans ses modes de vie. La fraternité n'est ni catholique, ni juive, ni musulmane : elle est universelle ! Elle ne concerne pas que celui qui est comme moi, pense comme moi, vit comme moi ; elle concerne chaque homme, chaque femme, chaque enfant qui croise ma route et dont je croise la route. 
Une plongée dans la Bible peut nous aider à étayer notre réflexion ; les appels à un vivre ensemble dans le respect de chacun ne manquent pas, que ce soit dans les textes de la Première Alliance ou dans ceux de la Nouvelle Alliance scellée dans le sang versé par le Christ sur la croix. La croix du Christ nous rappelle justement que la religion n'est ni un opium pour le peuple, ni de la guimauve pour enfant sage. Il y a une exigence de vérité, une exigence de fraternité, une exigence de sérieux dans nos démarches. Selon l'enseignement du Christ, l'amour et le respect dus à chaque homme ne peuvent être ni optionnels, ni conditionnels. Avec le Christ, je ne choisis pas d'aimer celui qui m'aime, j'apprends à aimer, y compris mon ennemi. Saint Matthieu enfonce le clou en invitant les croyants au Christ à être les premiers à prendre la voie du bien : Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : c'est la Loi et les Prophètes (Mt 7, 12). 
La fraternité ne peut donc rester un mot, un slogan, une idée ; la fraternité sera notre seule porte de sortie de ce monde pris dans la tourmente, la violence et la haine. Seule la fraternité nous permettra d'aller à la rencontre de l'autre ; seule la fraternité nous permettra de ne plus avoir peur de l'autre ; seule la fraternité nous permettra de construire un monde plus juste et plus humain. À condition d'en faire plus qu'un beau mot… Et cela commence dans nos établissements. A quoi cela sert-il de parler de la fraternité entre les peuples, si nos cours de récréation sont des lieux d'exclusion, nos salles de classe des lieux de sélection, nos diverses instances des lieux d'affrontements… ? Que nos établissements ne soient pas des lieux où l'on parle de fraternité, mais des lieux où se vit la fraternité : tel est mon vœu pour cette nouvelle année scolaire. 
Bonne rentrée à toutes et à tous !


Lettre pastorale donnée pour l'été 2016


Cahier de vacances : qui n'a jamais rouspété, comme enfant, à devoir remplir assidûment son cahier de vacances gentiment offert par des parents pour compenser la longue période de l'été. Tu ne vas quand même pas rester tout l'été à ne rien faire ! Un peu d'exercice chaque jour pour ne pas perdre les bonnes habitudes ! Et chaque année, cela recommence, les maisons d'éditions rivalisant de génie pour empêcher les chères têtes blondes de vraiment se reposer et de ne rien faire ! A croire qu'un adulte rêve de vacances pour lui, tout en réfléchissant au meilleur moyen de limiter celles de ses rejetons. À moins qu'il ne s'agisse d'une basse vengeance : j'ai passé par là, y'a pas de raison que mon gamin y échappe !  Même les religions s'y mettent : vous pourrez trouver pour cet été un cahier de vacances avec une caricature du Pape François en couverture… sans oublier un cahier de vacances spécial laïcité par l'association Coexister qui vous permettra de jouer avec les grandes religions, l'athéisme, les spiritualités et la laïcité…. Tout est pastoral dans l'Enseignement catholique, même les vacances ! Il ne manque plus qu'un cahier de vacances spécial EARS, à moins que celui-ci ne soit totalement superflu !

Permettez donc que je vous propose, à mon tour, un petit devoir de vacances : un peu de lecture qui nous vient du diocèse de Versailles : Je ne rougis pas de l'Evangile. Aider les jeunes chrétiens à dialoguer avec les musulmans, éd. Mame. 112 pages pour redécouvrir la foi chrétienne à l'aune des objections qui nous sont faites par l'Islam. 10 questions et un chapitre pour comprendre le dialogue islamo-chrétien. Il se lit aisément et permet une vraie reprise des grandes questions liées à ce qui fait l'originalité de la foi chrétienne. Le vocabulaire est volontairement simple (les auteurs s'adressent à des jeunes) sans être simpliste.

Nous pouvons tous, et devons tous, approfondir notre propre foi si nous voulons entrer en dialogue avec des croyants d'autres religions. Nous devons tous pouvoir être en mesure de rendre compte de l'espérance qui est la nôtre. Comme Paul le demande à Timothée, n'ayons pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur (2Tm 1, 8). Nous ne pourrons dialoguer en vérité sans faire cet effort d'approfondissement, non pas pour nous raidir sur nos positions, mais pour être plus souples justement. Notre session diocésaine en mars nous aura permis d'aborder déjà cette question du dialogue interreligieux et interculturel. L'année prochaine, l'Enseignement catholique nous proposera des outils concrets pour aborder encore mieux ce dialogue. C'est un grand chantier qui s'ouvre devant nous. Cette lecture de vacances que je vous propose peut servir de mise en bouche. Il ne vous manque plus que le soleil, un coin tranquille, une boisson fraîche…

Bonne lecture, bonnes vacances !

Références des cahiers de vacances disponibles dans nos CEDIDOC :

Cahier de vacances pour les familles chrétiennes, éd. Mame / Edifa

Basile de Koch & Richard de Seze, Le Cahier de vacances catho, éd. Du Cerf (avec une caricature du pape François en couverture)

Coexister, Cahier de vacances "Coexistez, bons dieux !, éd. Du Cerf

Le cahier de vacances avec la Bible pour toute la famille, éd. Transmettre.


Homélie donnée au collège Notre Dame de Sion à Strasbourg à l'occasion de la célébration de première communion et profession de foi, le 11 juin 2016


C’est une double démarche qui nous rassemble ce matin en cette chapelle du collège Notre Dame de Sion : la profession de foi de certains et la première communion d’autres. Deux démarches qui sont un engagement plus avant avec le Christ ; deux démarches qui marquent un approfondissement de la foi de ces jeunes qui se présentent ici. Ils se présentent devant nous accompagnés de leurs familles, de leurs catéchistes, de leurs amis, et de deux figures majeures de la foi chrétienne : Pierre et Paul, que nous avons croisé, l’un dans la lecture, l’autre dans l’Evangile qui vient d’être proclamé. Ils ne sont pas que des personnages illustres ; ils se font aujourd’hui nos compagnons et maîtres.
Commençons par Paul. Faut-il encore le présenter ? Persécuteur de chrétiens, il devient l’un d’eux à la faveur d’une rencontre bouleversante sur le chemin de Damas. Il est le premier théologien de l’Eglise, le premier à expliquer par écrit la foi de celles et ceux qui suivent Jésus, le Christ, celui-là même que les hommes ont rejeté et crucifié, pensant ainsi s’en débarrasser une fois pour toutes. Le texte qui a été lu, extrait de sa première lettre aux chrétiens de Corinthe, est le plus ancien texte qui nous parle du dernier repas de Jésus. Il a été écrit avant même les évangiles ! En ce sens, il est un témoignage précieux, car il témoigne de ce que tout chrétien avait reçu et était appelé à vivre. Il nous donne le sens de l’Eucharistie, le sens de ce repas qui nous rassemble dimanche après dimanche et auquel 6 jeunes de ce collège vont participer pour la première fois ce matin. Chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. Tout est dit.  La messe nous rend présent le sacrifice unique du Christ et nous en fait participant. Le pain reçu nous unit étroitement à Jésus qui se livre totalement parce qu’il nous aime. Le corps et le sang de Jésus, que nous reconnaissons dans le pain et le vin consacré, sont le signe que Dieu nous aime, qu’il se donne entièrement pour notre vie. Communier au corps et au sang du Christ, c’est entrer dans une intimité plus grande avec Jésus, et dire notre désir et notre espérance de le voir revenir un jour, pour appeler tous les hommes en son Royaume. Nous ne pourrons jamais cesser d’accomplir cet ordre du Christ : faites cela en mémoire de moi ! car nous ne pourrons jamais empêcher Dieu de nous aimer et de se livrer pour nous. Dieu ne nous prend rien ; Dieu nous donne tout ; il se donne tout entier à nous pour que nous retrouvions une fois pour toutes cette image et ressemblance que le péché nous a fait perdre. Dieu nous aime à en perdre la raison ; il n’attend même pas de savoir si nous l’aimons en retour ; il se donne, totalement ; il attend juste que nous le recevions, que nous l’accueillions dans notre vie. Lorsque nous communions, c’est Jésus lui-même qui vient dans notre vie, dans nos entrailles pour nous attirer à lui. Si nous l’accueillons vraiment, si nous avons en nous ce désir de vivre pour Jésus, avec Jésus, nous pourrons dire un jour, comme Paul : ce n’est plus moi, mais le Christ qui vit en moi ! Car c’est bien le résultat que nous pouvons attendre de la fréquentation de l’eucharistie : que le Christ prenne les rennes de notre vie, que nous le laissions agir en nous. Nous pouvons le faire avec confiance sachant qu’il ne veut que notre bonheur et notre vie. Avec Jésus, nous ne risquons rien, si ce n’est de finir saint, parce que Dieu est saint. 
Quand nous croisons Pierre et les autres disciples, dans cette barque agitée par le vent, il n’en est pas encore à ce point. Il a compris, me semble-t-il, que Jésus n’est pas un homme ordinaire ; il a quitté sa vie d’avant pour se mettre à sa suite. Mais il ne sait pas encore trop comment ce Jésus va bouleverser sa vie. Il n’a pas encore changé. Pierre, c’est un homme entier, un peu grande gueule : il manque toutes les occasions de se taire. En fait, il faut toujours qu’il la ramène. C’est plus fort que lui. Ce qui fait qu’il est tiraillé : il aimerait sincèrement faire confiance à Jésus, toujours, mais son humanité le rattrape toujours. Regardez-le s’agiter avec les autres dans cette barque. Quand Jésus se fait reconnaître, il a cette parole folle : si c’est bien toi, Seigneur, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux ! Ce que Jésus peut faire, je peux le faire aussi, y’a pas de raison. Et il n’a pas complètement tort. Si Jésus nous demande quelque chose, il nous donne la possibilité de l’accomplir, toujours. Et Pierre commence plutôt bien : quelques pas sur l’eau, à la rencontre de Jésus. Mais voilà qu’une vague sans doute un peu plus forte le fait douter, le ramène à sa réalité d’humain qui n’est pas vraiment fait pour marcher sur l’eau. Et il commence à enfoncer. Tout finit bien puisque Jésus est là et qu’il intervient. Mais Pierre a quand même droit à une petite réflexion : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? 
Ce qui m’amène une question : de qui Pierre a-t-il douté ? A-t-il douté de Jésus ? Il devrait pourtant maintenant savoir que Jésus peut beaucoup : il a eu droit, dans l’Evangile de Matthieu, à un grand enseignement de Jésus sur le Royaume de Dieu et sur la puissance de ce Royaume. Puis il a assisté à la multiplication des pains : avec cinq pains et deux poissons, Jésus a non seulement nourri environ cinq mille hommes, mais en plus il restait douze paniers pleins après que tout le monde eut mangé à sa faim. Cela, il ne peut pas l’avoir oublié déjà, puisque c’était le jour même, juste avant que Jésus ne les mette en barque pour traverser le lac. Je crois plutôt que Pierre a douté de lui, de ce qu’il était capable de faire dès lors qu’il laissait Jésus entrer dans sa vie. Devant les vagues, il a dû se souvenir qu’il n’était qu’un homme, un pêcheur (donc un homme de la mer) qui ne peut rien d’habitude quand la mer est démontée. Il a pris peur, comme nous l’aurions tous fait, et sa peur a bloqué sa confiance en Jésus, elle l’a annulée. Il a oublié, dans sa peur, que c’est Jésus qui l’avait appelé et que Jésus lui donnait la force de réussir ce qu’il lui demandait. 
Que vous fassiez votre première communion ou votre profession de foi (ou les deux !), apprenez de Paul à toujours approfondir votre foi. Vous ne pourrez pas rester toute votre vie à la foi de votre catéchisme ; vos catéchistes vous ont expliqué de grands mystères avec des mots que vous pouviez comprendre aujourd’hui. En grandissant, votre intelligence se développera encore ; pensez aussi à développer encore l’intelligence de votre foi. Avec Pierre, apprenez à toujours davantage faire confiance à Jésus ; il ne vous laisse jamais seul, il ne vous demande rien d’impossible. Avec Pierre et Paul, venez puiser au repas de l’eucharistie la force de vivre votre foi au quotidien et l’intelligence des choses de Dieu. Que le pas que vous faites aujourd’hui ne soit pas un pas unique, mais le début d’un long et beau chemin à la suite du Christ. Amen.



Lettre pastorale donnée pour le Carême 2016


Ré-enchanter l’école ! C’est ce à quoi nous invite Pascal BALMAND, le secrétaire général de l’Enseignement catholique depuis cette rentrée. Au moment où nous entrons en Carême, pourquoi ne pas chercher aussi à ré-enchanter notre vie de foi ? 

Le Carême n’est-il pas ce temps favorable à une relecture saine de notre vie de foi, de nos pratiques ecclésiales, de notre rapport à Dieu ? Comme pour le ré-enchantement de l’école, il ne s’agit pas de faire des trucs en plus, mais de reprendre ce que nous faisons déjà et peut-être de le faire avec une conscience renouvelée. Ceci nous évitera au moins de croire que le jeûne, la charité et la prière sont des choses réservées au Carême, nos bons vieux efforts à ressortir une fois l’an et à bien ranger, lorsque nous serons rendus au temps de Pâques. 


Ne pas faire des choses parce qu’il faut les faire, ne pas se servir des outils de la foi comme de prétextes, mais vivre en vérité les rites et les temps que propose notre foi ; voilà sans doute le chemin à faire pour que notre vie de foi questionne et ouvre un chemin de possible pour qui est non-croyant ou mal croyant ou croyant autrement. Avant de vouloir convertir, cherchons à vivre : c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que le monde saura que vous êtes mes disciples, avertit le Christ. Peut-être que l’amour saura faire un bout de chemin dans le cœur des hommes, des femmes, des enfants et des jeunes qui composent nos communautés éducatives. 


L’amour n’est jamais un truc en plus ; ce n’est pas un truc à faire quand j’ai du temps. L’amour est un incontournable, notre seule obligation, le seul commandement laissé par le Christ. Dans notre vie de foi, tout a commencé par un acte d’amour : celui d’un Dieu qui nous aime tellement qu’il a envoyé son Fils unique dans le monde pour le sauver. C’est encore un acte d’amour qui nous vaut notre vie et notre salut : ce Fils unique, envoyé dans le monde pour le sauver, l’a fait en donnant sa vie, en offrant sa vie, librement, sur la croix. Comme le rappelait le pape François dans son discours lors du Congrès mondial sur l’éducation en novembre 2015, notre salut vient des blessures d’un homme blessé sur la croix. C’est un acte d’amour qui mènera notre vie de foi à son terme, quand Dieu nous unira à lui dans la joie de son Royaume. 


En attendant ce jour, vivons de cet amour, transmettons cet amour. Ré-enchantons-nous, ré-enchantons notre manière de croire et de vivre notre foi. 


Bon carême à toutes et à tous.



Lettre pastorale donnée pour l'Avent 2015


L'état d'urgence a donc été décrété, conséquence logique après les attentats de Paris. Et nous mesurons pleinement ce qu'il signifie comme changement dans notre vie quotidienne et dans la vie de nos établissements. Déjà nous avons dû annuler des manifestations ; des chefs d'établissement s'interrogent sur la faisabilité des voyages scolaires programmés… Dans la rue, les forces de l'ordre, par une visibilité accrue, veulent nous rassurer,  et nous nous plions de bonne grâce aux contrôles et aux fouilles qu'en d'autres temps nous aurions jugé attentatoires à nos libertés. Les responsables de la vie publique nous assurent que nous ne changerons pas ; mais, reconnaissons-le : nous avons déjà changé. Nous avons changé dès que le Mal a fait irruption dans notre vie de façon brutale ce 13 novembre. Jamais plus nous ne serons tout-à-fait les mêmes. N'ont-ils pas déjà gagnés, ceux qui nous ont lâchement attaqués alors que nous vaquions à nos occupations, à nos loisirs, à nos plaisirs ?  

C'est avec cette terrible histoire que nous entrerons en Avent dans quelques heures maintenant.  Ce qui devait être un temps de joyeuse attente, comment le vivrons-nous ? Pour retrouver la sérénité de ce temps, pour nous préparer à accueillir celui qui doit venir (le Messie, le Prince de la Paix), ne devrions-nous pas déclencher un état d'urgence spirituel et être ainsi plus vigilants ? Nous vivrons nos propres fouilles et contrôles, à savoir une introspection, un regard honnête sur nous-mêmes pour que nous puissions offrir à celui qui vient nos faiblesses à guérir, nos soifs à étancher, nos désirs de vivre libres à réaliser. Nous déploierons nos forces de l'ordre, à savoir toute occasion de reprendre le chemin de la prière, de la confession, de la célébration de l'eucharistie pour lutter mieux contre le Mal, à commencer par celui qui rôde en nous. Et nous changerons, heureusement, car se préparer à accueillir Celui qui vient change notre vie, ou alors ce n'est qu'une parenthèse dans une vie déjà bien bousculée. 


Ce temps d'Avent, vécu comme un état d'urgence spirituel, doit  nous permettre d'approfondir notre foi, de faire grandir notre espérance en un monde meilleur, où le Mal ne sera plus vainqueur. Nous préparer à accueillir le Fils du Dieu vivant doit nous redonner confiance en la vie, confiance en l'homme, alors même que l'air du temps nous pousse à la méfiance. Accueillir celui qui doit venir, c'est être accueillant envers tous, même envers celui qui ne croit pas comme moi, qui ne pense pas comme moi, qui ne vit pas comme moi. 


En vivant ce temps d'Avent comme un état d'urgence spirituel, nous changerons, non pas parce que nous aurions peur de celui qui vient, mais parce que nous croyons  que son avènement nous permet de devenir meilleurs et de rendre notre monde plus beau. Nous changerons  parce que nous nous laisserons gagner par la paix qu'il offre, la joie qu'il apporte à tous, la vie qu'il donne largement.  Nous changerons, et nous offrirons au monde le visage véritable de Dieu qui vient se faire notre frère pour que nous vivions une fraternité renouvelée. 


Bon Avent à tous, dans l'espérance de celui qui vient réconcilier les hommes et leur faire miséricorde !



Lettre pastorale donnée pour la rentrée 2015


Une nouvelle rentrée, une de plus, et avec elle, son lot d’activités, de choses à faire, à ne pas oublier, des dates qui s’accumulent et très vite remplissent nos agendas. Tout se bouscule, tout s’accumule, et il faut faire des choix… 
Dans l’Enseignement catholique, nous n’échappons pas à cette nécessité : entre les demandes ministérielles qu’il nous faut assumer loyalement (tout ce qui concerne l’enseignement des valeurs de la République) ; les orientations voulues par le pape (Jubilé de la Miséricorde) pour l’ensemble des catholiques dont nous ne saurions nous affranchir au motif que Rome, même à l’ère numérique, ça reste loin ; les priorités de l’équipe diocésaine (relecture du projet diocésain) et de l’évêque accompagnateur (EARS – éducation affective, relationnelle et sexuelle - , enseignement religieux) ; sans oublier ce que nous réserve la vie de nos établissements (APEL, Délégué de classe…), il y a largement de quoi remplir une année et même plus. Nous pouvons choisir de faire un peu de tout, sans vraiment rien faire à fond. On peut choisir d’oublier tout cela et nous recentrer sur notre établissement, nos études ou notre famille : après tout, la vraie vie, elle est là, dans le quotidien à assumer. 
Et pourtant, comme il est juste et bon de sortir la tête de nos établissements et de regarder ailleurs ce qui se passe. Comme il est bon de prendre de ces temps de rencontres, d’échanges en tous genres ; ils nous rappellent une chose essentielle, caractérisant l’Enseignement catholique : nous sommes un réseau, nous devons vivre en réseau. Nul ne peut s’enfermer sans dommage pour lui et pour son établissement. Nul ne peut se dispenser de « venir et voir » ce qui se passe ailleurs. 
Cette année donc, certains iront se former en EARS, d’autres travailleront au projet diocésain sur la base de nos échanges antérieurs, d’autres encore reliront les programmes d’enseignement religieux, tout en travaillant tous au service de nos communautés éducatives. Que nous soyons enseignants, personnels administratifs ou de service, parents d’élèves ou élèves, nous progresserons, nos dossiers aboutiront et nous parviendrons au terme de l’année en nous demandant comment nous avons fait pour tenir une année de plus. 
Le secret, c’est la miséricorde : la miséricorde de Dieu pour nous d’abord, qui nous donne la grâce d’accomplir ce que nous avons à faire. Il ne nous demande rien d’impossible et toujours nous accompagne de son amour en toutes nos démarches. Devant l’immensité de la tâche à accomplir, nous pouvons nous tourner vers lui et lui demander ce supplément d’âme qui nous donnera le courage d’aller au bout de nous-mêmes pour un meilleur service de tous. 
Mais n’oublions pas la miséricorde que nous exerçons envers les autres : en faisant un peu plus que ce que notre travail ordinaire nous demande, nous nous mettons au service de tous. Aux traditionnelles œuvres de miséricorde (visiter les prisonniers, soigner les malades, nourrir les affamés… relire Matthieu 25), on peut donc rajouter ces moments pris sur notre temps pour tous ces groupes de travail, de rencontre et d’échange ou de formation qui quelquefois nous pèsent. Nous voudrions nous en dispenser parce qu’on connaît tout ça, on a mieux à faire, ou pire laisser le travail aux autres, parce que nous avons tous tant à faire, n’est-ce pas ! Mais quand nous y participons loyalement au prix de petits sacrifices sur notre temps personnel, nous constatons souvent qu’à terme, ce travail permet à tous de grandir, de vivre mieux son engagement au service des jeunes qui nous sont confiés. Oui, je crois que c’est faire œuvre de miséricorde de ne pas toujours laisser les mêmes faire le travail qui profitera à tous ; c’est faire œuvre de miséricorde de participer à un temps de formation et de rencontre pour mieux comprendre quelle est ma place dans ce grand tout qu’est l’Enseignement catholique. 
En cette nouvelle année scolaire, soyons miséricordieux comme notre Père est miséricordieux. Ce n’est pas ma demande… c’est celle du Christ à chacun de ses disciples (cf. Luc 6,36). Bonne année scolaire à tous, sous le signe de la miséricorde !



Lettre pastorale donnée pour la fin de l'année scolaire


Une année scolaire s’achève, une page de la vie de nos établissements et de leur communauté éducative se tourne. Ce peut être l’occasion de faire un bilan de nos pratiques, à la lumière de l’Evangile. Cette année nous a-t-elle permis de vivre selon la Parole du Christ, en toutes choses ? L’école catholique se doit d’être particulièrement attentive à cette Parole, dans tous les aspects d’une vie scolaire. L’année qui s’achève nous aura permis de vivre quelques moments forts qui nous ont rappelés notre  caractère propre et les valeurs qui y sont attachées. 

Je pense d’abord au pèlerinage dans le cadre du millénaire des fondations de la cathédrale.  Ce fut une belle occasion de redire notre attachement à l’Eglise diocésaine et de nous sentir partie prenante d’une réalité qui dépasse le cadre de nos établissements. Sans Eglise diocésaine, il n’est pas d’Enseignement catholique en Alsace. Dans son homélie, Mgr Vincent DOLLMANN nous ouvrait à la compréhension de la fête de l’Ascension et nous invitait à mieux comprendre les implications concrètes de notre foi en Jésus, vrai homme et vrai Dieu : « Le Christ dans son humanité éclaire les choix et les engagements pour un monde respectueux des autres et de toute la création. Le Christ assis à la droite de Dieu fortifie nos cœurs pour nous garder dans la fidélité aux engagements et dans la cohérence de vie. C’est lui vrai homme et vrai Dieu qui garantit une vraie fécondité à nos existences. Sans lui, l’enseignement moral demeure un sentiment généreux ou un code de lois tributaires des modes et des idéologies humaines. L’attachement au Christ, homme-Dieu nous engage à promouvoir une éducation des intelligences et des cœurs, à articuler compétence professionnelle et compétence du cœur. » 

Je pense ensuite à la session diocésaine au Mont Sainte Odile qui nous a ouvert à la réalité de notre intériorité. Croyant ou pas, l’homme possède une dimension capable de l’ouvrir à ce qu’il est, capable de l’ouvrir aux autres, capable de l’ouvrir à Dieu. Eveiller à l’intériorité ne sera donc pas un « truc en plus » à vivre dans nos établissements, mais bien permettre à chacun de mieux se connaître. Eveiller à l’intériorité participe ainsi à éduquer l’homme dans toutes ses dimensions. N’est-ce pas là ce qui devrait faire la grandeur de l’Ecole catholique ? 
 

Je pense encore à l’Université de printemps qui nous aura permis de découvrir que l’intelligence ne se limite pas à la réussite dans les matières principales, mais que chacun de nous possède des intelligences multiples. Nous ne pouvons donc pas réduire nos élèves à une matière, à un test, à un Q.I. Un établissement catholique d’enseignement qui, au moment des inscriptions, choisirait ses élèves en fonction de ce qu’ils peuvent apporter au classement de l’établissement ou à sa moyenne de réussite aux examens, devrait alors s’interroger sur sa catholicité et sur la « propreté » de son caractère ! Le Cardinal PAROLIN, Secrétaire d’Etat du Saint Siège, dans son discours prononcé à l’occasion du 70ème anniversaire de l’UNESCO, refusait la culture du déchet pour l’Enseignement catholique en particulier, et pour le monde en général. L’ouverture à tous, au plus faible en particulier, ne saurait devenir un slogan pour nous donner bonne conscience, mais que nous laissons aux autres le soin d’appliquer. Travailler sur les intelligences multiples nous pousse à accueillir chacun dans sa singularité et à l’accompagner dans la découverte de sa vraie richesse qui dépasse largement une moyenne d’établissement. 


En repensant à tous ces chantiers vécus, je me rends compte que si l’année scolaire s’achève, ces questions ne peuvent s’achever avec elle. Nous les retrouverons nécessairement après quelques temps de repos bien mérité. Peut-être même qu’elles nous accompagneront en vacances. En éveillant notre propre intériorité, en sollicitant toutes nos intelligences, nous pourrons reprendre des forces auprès de Celui qui nous appelle à vivre à sa hauteur : le Christ Jésus.  Un vrai petit coin de paradis pour de bonnes vacances ! 


Bon repos à toutes et à tous !




Homélie donnée pour la fête patronale au Séminaire des Jeunes de Walbourg


Qu’as-tu fait de ton frère ? Cette parole, qui nous vient de Dieu lui-même, fut adressée à Caïn après qu’il eut tué son frère Abel, et sert de fil rouge à cette année scolaire au séminaire des jeunes de Walbourg. Tout au long de la matinée, vous avez pu rencontrer des témoins qui ont pu décliner cette question à partir de leur expérience de vie. Permettez que ce soit cette même question qui me serve de fil rouge pour relire avec vous les textes retenus pour cette célébration, au cours de laquelle 5 jeunes feront profession de foi et 5 autres recevront le sacrement de la confirmation. 

Qu’as-tu fait de ton frère ? Cette question, nous pouvons la poser à Jésus lui-même après avoir entendu l’Evangile de cette fête de saint Joseph. D’ailleurs, n’est-ce pas cette même question que Marie, sa mère, lui pose quand, après trois jours de recherche et d’angoisse, elle arrive enfin à remettre la main sur son cher petit. Pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme nous avons souffert en te cherchant, ton père et moi ! Nous nous rendons compte que les bonnes intentions peuvent quelquefois faire bien du mal autour de nous. Et le fait que Jésus soit resté au Temple, avec les docteurs de la Loi pour parler de religion, n’est pas fait pour nous rassurer. Jésus lui-même apprendra, environ vingt ans plus tard, qu’au Temple, il n’y a pas que des gens fréquentables : peut-être même que parmi ceux qui s’extasient sur son intelligence, il y a déjà ceux qui vociféreront contre lui et le condamneront ! Marie a bien raison d’être inquiète ; elle a bien raison de questionner Jésus : qu’as-tu fait de ton frère ?, c’est-à-dire de ton père et moi ? 

Qu’as-tu fait de ton frère ? Cette question, nous pouvons la poser aussi à l'Esprit Saint en constatant la transformation des Apôtres au jour de la Pentecôte. Vous connaissez le contexte. Jésus est mort ; il est ressuscité ; il est apparu plusieurs fois à ces disciples, avant de retourner vers son Père en leur demandant d’attendre le don de l'Esprit Saint. Et voici que, le cinquantième jour après Pâques, les Apôtres se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain, il vint du ciel un bruit pareil à celui d’un violent coup de vent… Ils virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et qui se posa sur chacun d’eux. Alors ils furent tous remplis de l'Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit. Ceux qui étaient à Jérusalem disaient : comment se fait-il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle ? Esprit, qu’as-tu fait de tes frères ? Quand l'Esprit Saint est donné, il change profondément la nature de celui qui le reçoit. Les Apôtres qui, il y a un instant, pouvaient encore se sentir seul et peureux après le départ de leur ami et Maître, ouvrent portes et fenêtres pour annoncer les merveilles de Dieu. En faisant ainsi, ils ouvrent les cœurs de ceux qui les écoutent ; la foi en Jésus, mort et ressuscité pour notre vie, peut se répandre, être accueillie et transformer le monde en mieux. 

Qu’as-tu fait de ton frère ? Voici une question que nous pouvons adresser à Luc, Victor, Romain, Thomas et Tristan qui vont faire profession de foi, ainsi qu’à Morgane, Emilie, Edythe, Gautier et Julian qui demandent à recevoir le sacrement de la Confirmation. En faisant profession de foi ou en accueillant le don de l'Esprit Saint, vos camarades ne font pas quelque chose pour eux, ni pour Dieu d’ailleurs : ils font quelque chose pour nous : ils nous disent d’abord leur courage d’oser un geste croyant dans un monde qui ne croit pas plus vraiment ; ils nous disent ensuite la beauté de croire, que cela vaut la peine encore aujourd’hui, de s’engager à suivre Jésus, de toujours mieux le connaître et d’entrer en alliance avec lui. Leur profession de foi et leur confirmation nous concernent et nous renvoient à notre propre foi. Que nous soyons chrétiens ou non, nous ne pouvons qu’être questionnés par leur démarche. Avons-nous encore ce courage de croire ? Avons-nous encore le courage de témoigner publiquement ? Ou avons-nous fait de la foi quelque chose de si personnelle et privée qu’elle ne change plus rien, et surtout pas ce monde qui aurait tant besoin d’hommes et de femmes de conviction, d’hommes et de femmes qui s’engagent à le transformer pour qu’il devienne plus humain, donc plus à l’image et à la ressemblance du monde voulu par Dieu ? A ces dix jeunes, nous devons tous reconnaissance pour ce qu’ils font pour nous en témoignant ainsi de Celui qui les fait vivre. 


Qu’as-tu fait de ton frère ? Après avoir posé cette question à Jésus, à l'Esprit Saint, à ceux qui font profession de foi et à ceux qui vont recevoir le sacrement de la Confirmation, il reste une personne à qui poser cette question. Et cette personne, c’est chacun de nous tant il est vrai que le premier frère dont nous avons à prendre soin, c’est nous. Et nous comprenons alors que nous n’aurons jamais fini de répondre à cette question parce que notre foi en Dieu doit d’abord être un art de vivre qui permette à tous de faire la rencontre du Christ ; un art de vivre qui donne envie de croire et de s’engager pour un monde meilleur ; un art de vivre qui donne à voir ce qu’est la sainteté que Dieu nous offre. 


Vous qui êtes rassemblés ici, que vous appeliez Dieu YHWH, Allah ou Père de Jésus Christ, que toujours il soit Dieu qui aime l’homme, tout homme. Vous qui êtes rassemblés ici, que vous soyez croyants ou que Dieu reste pour vous une énigme, agissez toujours dans le sens de plus de paix, plus de fraternité. Vous saurez ainsi toujours rendre compte de votre espérance, lorsqu’on vous interrogera : Qu’as-tu fait de ton frère ? Amen.


Lettre pastorale donnée pour le Carême 2015


Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile. Cette affirmation est reprise sur un poster publié en commun par l’A.PE.L., les éditions Paroles de Sagesse et l’Enseignement Catholique. Il nous invite à voir notre vie en plus grand et à sans cesse nous élever.

Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile.  Je sais bien, comme vous sans doute, que la mentalité ambiante est plutôt à se satisfaire de l’inverse. Commençons par faire ce qui est facile : ce sera toujours ça de fait ! On ne peut pas vraiment être contre cette attitude, à condition de ne pas oublier de faire le reste, après : ce qui est bon, ce qui est plus difficile. Parce qu’il y a danger à se satisfaire du facile : celui de ne rien faire d’autre, de se contenter d’une vie en plus petit, en modèle réduit. Une fois le facile fait, et même bien fait, pourquoi faire autre chose ? Je peux bien attendre la prochaine chose facile à faire. Les choses faciles à faire sont faites à cause de cela : elles sont faciles, n’exigent pas d’effort, n’apportent rien d’autre que la satisfaction d’avoir fait au moins cela. Il n’y a rien de fatigant à faire ce qui est facile. Il n’y a rien d’exigeant à faire ce qui est facile. Ce qui est facile est vite fait, bien fait,… et tout le monde peut le faire.

Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile.  Voilà une phrase qui va servir de poil à gratter ! Elle m’oblige à voir plus loin ; elle m’oblige à ne pas me contenter de ce que tout le monde peut faire. Elle m’oblige à ne pas être tout le monde, à être vraiment moi, en développant mes capacités, en soignant mes relations, en acceptant de grandir, de mûrir. Voilà que je suis invité à me dépasser !

Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile. Voilà une invitation qui peut bien accompagner notre temps de Carême. Un temps vu par beaucoup comme un temps plus rude, marqué par toute une théologie de l’effort à faire. Vu sous cet angle, il est tout, sauf un temps du facile à faire. En nous invitant les uns et les autres à choisir de faire ce qui est bon, je voudrais nous inviter tous à sortir de ce christianisme qui sent la sueur à force d’efforts jamais assez nombreux à faire. Contentons-nous donc durant ce Carême de faire ce qui est bon ! Non pas par paresse, pour n’avoir pas d’autre effort à faire, mais parce qu’il vaut mieux choisir une chose bonne et la faire bien que se disperser en une multitude d’activités qui ne m’engagent pas vraiment. Faire ce qui est bon, voilà qui n’est pas si simple. Cela demande d’abord du discernement, un certain regard sur le monde, sur les gens qui m’entourent. Faire ce qui est bon face à une situation donnée, suppose d’avoir vu attentivement, réfléchi sérieusement à ce qui est le meilleur à ce moment précis… et se décider de le mettre en œuvre respectueusement.

Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile. La liturgie du temps de Carême nous propose des moyens pour réussir à faire ce qui est bon : le jeûne en vue d’un meilleur partage, la prière en vue d’une meilleure connaissance de Dieu, la charité en vue de transformer un monde devenu dur, la conversion en vue de répondre au désir d’amour que Dieu porte pour nous et pour tous. Après 22 ans de sacerdoce, je sais que ces moyens sont tout, sauf… faciles ! Mais ce sont de bons moyens pour retrouver le sens de ce qui est important, beau, vrai.

Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile. Après le début d’année chaotique et dramatique que notre pays a connu, que ce temps de Carême soit pour nos communautés éducatives un temps d’ouverture aux autres, de redécouverte de ce qui nous unit vraiment, d’un respect grandissant de tous et de chacun dans ce qui fait leurs richesses et leurs différences, toutes choses bonnes à faire et si peu faciles à mettre en œuvre au quotidien. Fais ce qui est bon ! Pas ce qui est facile : que ce soit là notre seule ambition !  Bon Carême à toutes et à tous !



Lettre pastorale donnée pour l'Avent 2014


Il y a des signes qui ne trompent pas ! Lorsque nous voyons l’agitation dans nos villes et villages pour l’installation progressive des lumières de Noël, des cabanes du Marché de Noël là où la tradition existe, nous savons que le temps est proche où nous allons entrer en Avent. Dans nos établissements, les équipes pastorales sont prêtes à nous faire vivre ce temps de l’attente de manière à nous mener progressivement vers la joie de l’annonce d’une naissance, celle de notre Sauveur. Mais n’allons pas trop vite : le temps de la préparation n’est pas le temps de la réalisation.

Les lectures que vous pourrez entendre au cours de ces dimanches laissent clairement entrevoir que quelque chose de neuf se prépare. Les premiers mots de Marc dans l’évangile que nous entendrons le deuxième dimanche de ce temps d’Avent le rappellent avec force : Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, Fils de Dieu.

Commencement : il s’agit bien de découvrir, dans nos vies souvent répétitives, que quelque chose de neuf peut advenir, qu’un commencement est toujours possible. Nos jours ne sont pas simplement une suite continue et sans fin de gestes, de moments, de phrases… à redire ou à revivre à l’infini. Je vous souhaite de vivre ce temps comme le commencement d’un moment ou d’une rencontre qui peut bouleverser votre vie. Je vous souhaite surtout de pouvoir entrer dans ce commencement en chassant l’idée que ce n’est qu’un recommencement. Les années liturgiques se suivent et ne se ressemblent pas. Il n’y a pas de routine en pastorale. Il n’y a qu’un chemin que nous sommes invités à suivre, à frais toujours nouveau, à la rencontre du Christ. A frais toujours nouveau parce que nous changeons, nous évoluons, nous grandissons, nous mûrissons !

Commencement de la Bonne Nouvelle : ce commencement est une invitation à accueillir une Bonne Nouvelle. En ces temps de crise, voilà qui devrait nous réjouir. Le monde n’est pas foutu ; l’homme n’est pas perdu. Il y a du neuf sous le soleil ! Alors que notre monde semble gris, courant à sa perte, voilà qu’une Bonne Nouvelle nous sera annoncée. Et cette Bonne Nouvelle changera nos vies si nous savons l’accueillir. Ce temps de l’Avent est justement donné pour entendre l’annonce de cette Bonne Nouvelle que Dieu réalisera pour nous, et nous permettre d’en reconnaître les signes quand viendra le temps de la réalisation. Nous ne pouvons donc pas laisser passer ce temps de l’Avent sans rien faire, en pensant qu’aujourd’hui est comme hier, et que demain finalement ne changera rien. Je remercie les équipes pastorales qui vivent toujours le temps liturgique avec un coup d’avance pour que tout soit prêt. Qu’elles aussi profitent de ce temps depuis longtemps préparé pour vivre ce commencement qui porte en lui une Bonne Nouvelle.

Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, le Fils de Dieu. Dans un monde sécularisé, nos établissements portent une originalité que le contrat d’association avec l’Etat ne supprime pas, mais souligne davantage. Dans nos établissements, tout ce qui fait l’humanité est non seulement respecté, mais aussi stimulé. Si nous devons nous garder, avec raison, de tout prosélytisme, nous n’avons pas pour autant à mettre nos convictions dans la poche, avec un mouchoir dessus. Au cœur de nos pratiques, au cœur de notre engagement en faveur de l’Homme, il y a le Christ, celui qui vient sans cesse à notre rencontre, celui qui vient dans notre monde pour le sauver. Les temps de l’Avent et de Noël, que nous allons vivre successivement, nous rappellent l’éminente dignité de l’Homme que nous voulons servir à travers nos diverses professions (enseignants, éducateurs, agents de la pastorale, chef d’établissement, personnels administratifs, économiques et de service). Nos élèves, ainsi que leurs parents, sont engagés dans ce même service qui met l’Homme au centre de nos préoccupations. La Bonne Nouvelle de Jésus Christ est annoncé partout où l’homme est respecté dans sa dignité, partout où l’homme est servi, partout où l’homme est appelé à grandir. Prions le Christ, Dieu fait homme, de mettre au cœur de toutes nos communautés éducatives ce désir de servir l’homme, ce désir de servir tout homme. La Bonne Nouvelle de Jésus Christ n’est bonne que parce qu’elle est partagée, largement, de sorte que personne ne reste enfermé dans sa misère, son désespoir, ses difficultés.

Entrer en Avent ne se limite donc pas à entrer dans un nouveau temps. Entrer en Avent, c’est accueillir le désir de Dieu lui-même de transmettre au monde une Bonne Nouvelle qui ne se paie pas de mots mais se vit en actes. Au moment où Dieu lui-même s’apprête à entrer dans le monde, ne désertons pas ce monde, mais rejoignons-le et proposons-lui de suivre avec nous le chemin qui mène au Christ, source du bonheur véritable.

Bonne entrée en Avent,
et bonne marche vers la crèche, à la rencontre du Messie Sauveur.



Lettre pastorale donnée pour la rentrée 2014


Après des vacances bien méritées par tous et chacun, nous allons lentement reprendre le chemin de l’école. C’est notre travail, c’est notre quotidien. Reconnaissons qu’il y a au moins deux manières de reprendre ce chemin.

Nous pouvons reprendre le chemin de l’école en trainant des pieds, voire à reculons, comme certains élèves. Ce serait plutôt mauvais signe, parce que cela montrerait que l’école nous pèse, que le travail n’exalte plus vraiment celui dont c’est le métier. Or quoi de plus normal que d’espérer trouver dans son travail une source d’épanouissement, un peu de matière à grandir encore en humanité ?

Nous pouvons aussi reprendre le chemin de l’école plein d’espérance, car une nouvelle année scolaire, c’est autant d’opportunités de rencontrer des hommes, des femmes, des jeunes, des enfants qui veulent grandir, s’enrichir, découvrir…

Dans l’Enseignement catholique, nous avons une responsabilité particulière, parce que sur le chemin de la croissance humaine, nous ne sommes pas seuls. Il y a Quelqu’un qui nous précède et nous attend,  Quelqu’un que nous avons à faire connaître : Jésus Christ. Je reprends ici ce que dit un texte récent de la Congrégation pour l’Education Catholique dont je vous conseille la lecture (Eduquer aujourd’hui et demain, une passion qui se renouvelle) : le cœur de l’éducation catholique est toujours la personne de Jésus Christ. Tout ce qui arrive dans l’école catholique et dans l’université catholique devrait mener à la rencontre avec le Christ vivant.

Voilà indiqué le cap pour cette nouvelle année scolaire. Le même texte précise que l’éducation catholique doit contribuer à la découverte du sens de la vie et faire naître de nouvelles espérances pour aujourd’hui et pour l’avenir. N’est-ce pas là une belle mission que la nôtre ? Permettre à nos communautés éducatives, dans un monde en perte de repères, dans un monde plongé dans la grisaille d’une crise dont on ne voit pas la fin, permettre donc que se lève une espérance, que se construisent des vies pleinement humaines parce que totalement reliées au Christ Sauveur.

Ce beau défi, nous avons à le relever ensemble : chefs d’établissements, professeurs, parents d’élèves et élèves, personnels éducatifs (administratifs, économiques et de service), membres de la DDEC. Nous sommes tous, en même temps,  témoin du Christ pour quelqu’un et ayant besoin d’un témoin pour nous montrer le Christ. Aucun de nous n’est arrivé  à la pleine connaissance du Christ. Tous, nous progressons, selon notre rythme, selon notre désir. Mais personne ne doit perdre de vue cet essentiel : nous devons permettre, et pouvoir vivre nous-mêmes, cette rencontre essentielle avec Celui qui est notre enseignant à tous.

Ecoutons encore ce que nous dit l’Eglise dans le texte déjà mentionné : Si l’on veut éviter un appauvrissement progressif, il faut que les écoles catholiques soient dirigées par des personnes et des équipes qui s’inspirent de l’Evangile, soient formées à la pédagogie chrétienne, reliées au projet éducatif de l’école catholique, et non assujetties aux séductions de ce qui est  à la mode, de ce qui, pour ainsi dire, se vend le mieux. Le Christ, heureusement, n’est pas un objet de consommation, ni un article à vendre ! Il est celui qui peut donner sens à nos vies, celui qui veut nous entraîner vers une vie plus grande, plus riche de sens, plus belle. Et cela, gratuitement (par grâce) !

Je formule le vœu que notre relecture du projet diocésain de l’Enseignement Catholique d’Alsace permette à nos communautés éducatives de s’engager plus avant dans cette découverte ; nous y gagnerons tous.

Bonne rentrée scolaire à toutes et à tous,


Lettre pastorale donnée pour le Carême 2014


Les vacances qui viennent de s’achever nous ont vu entrer en Carême. Un temps riche en propositions pastorales dans la plupart de nos établissements : entre bol de riz et opération de solidarité de toutes sortes, il n’y a pas de doute, l’Enseignement catholique en Alsace a bien compris l’importance de ce temps liturgique. Je ne peux qu’encourager les diverses propositions faites dans nos établissements.

Le temps du Carême toutefois ne peut et ne doit se réduire à « des efforts à faire ». Il est un temps éminemment spirituel, qui veut conduire chacun à la source de sa foi, à la source de son existence. C’est un temps favorable pour s’interroger sur ce qui est essentiel dans notre vie. Qu’est-ce qui compte vraiment pour nous, sachant que « là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mt 6, 21) ?

L’important ne peut pas être dans les efforts à faire ; l’important ne peut pas être dans une morale à défendre envers et contre tout ; l’important, pour le croyant chrétien, ne peut être qu’une personne : le Christ, mort et ressuscité, toujours à rencontrer, toujours à suivre. Et c’est bien ce qui donne cette coloration particulière au temps du Carême. Il n’a pas de sens s’il ne nous conduit pas à Pâques ; il n’a pas de sens s’il ne nous conduit pas à rencontrer celui qui veut être le cœur de notre vie, le cœur de notre action, le cœur de notre foi. C’est bien de vivre un Carême fort à condition de ne pas oublier Pâques, source et sommet de notre foi.

Ainsi le Carême nous rappelle que nous sommes toujours en mouvement, toujours en déplacement, toujours en marche. Le Carême nous fait bouger pour nous conduire au pied de la Croix, et par-delà la Croix, au seuil d’un tombeau, vide de ce Christ que nous cherchons, mais pleins d’espérance et de foi à la vue des simples signes offerts : un tombeau vide, des linges pliés dans un coin. Et nous revoilà remis en route pour aller là où le Christ nous attend.

Puisse ce temps de Carême nous mettre en route, à la rencontre du Christ vivant, à la rencontre de nos frères et sœurs en humanité à travers qui il ne cesse de nous faire signe.

Bon temps de Carême, certes. Bonne marche vers Pâques, surtout.


Lettre pastorale donnée pour l'entrée en Avent 2013

Depuis le dimanche 01er décembre, nous sommes entrés en  Avent, temps béni de préparation à l’accueil de Celui qui doit venir faire toutes choses nouvelles. Pour ce premier message du prêtre accompagnant l’équipe diocésaine de l’Enseignement Catholique, c’est par ce biais que je voudrais vous encourager dans les missions qui sont les vôtres.
Faire toutes choses nouvelles : il ne s’agit pas de révolutionner les choses, mais de leur donner de nouvelles perspectives. Celui qui vient, le Christ Sauveur, ne vient pas révolutionner notre vie, mais l’ouvrir à une dimension que l’homme moderne a peut-être oubliée, par manque de temps, d’intérêt, de connaissance. Il vient nous ouvrir au monde de Dieu, et nous rappeler  que toute vie humaine a du prix pour lui, que toute vie humaine est porteuse du visage de Dieu. Quand Dieu se fait homme, l’homme peut retrouver en lui la trace de Dieu et se souvenir qu’il est créé à son image et à sa ressemblance.

Faire toutes choses nouvelles : c’est aussi le projet que je porte avec un groupe de travail en premier degré. Non pas que ce qui se vit est vieillot voire dépassé, mais parce que le temps où nous sommes demande une nouvelle manière d’approcher les choses de la foi. Le pape François ne cesse de nous le rappeler depuis son élection. Avec quelques enseignantes et chefs d’établissement, nous avons commencé un travail sur un référentiel pour l’enseignement religieux dans le premier degré. Le travail avance, sûrement. Nous avons commencé par nous redire ce que nous entendons par enseignement religieux et par préciser les divers termes utilisés (fait religieux, première annonce, catéchèse, pastorale). Le site internet « www. sitecoles.org » propose un document qui permet à chacun de mieux comprendre ce que nous pouvons faire en matière d’enseignement religieux dans le cadre d’un établissement catholique d’enseignement.  Le référentiel auquel nous réfléchissons sera avant tout un cadre pour faciliter le travail de nos enseignants. Il ne sera pas un manuel de plus, mais un chemin à proposer à nos élèves, un chemin indiquant divers documents pastoraux, dans lesquels tout enseignant pourra puiser ce qui lui est nécessaire pour accompagner sa classe. Je remercie les chefs d’établissement qui encouragent leurs enseignants à participer à ce travail de renouveau. Pour celles et ceux qui veulent rejoindre le groupe, il est toujours possible de le faire. La prochaine rencontre aura lieu à la Providence, le mercredi 05 février 2014 de 14h à 16h 30.
Faire toutes choses nouvelles : c’est aussi un souci permanent dans notre manière de vivre notre rapport à la pastorale. Un maître-mot guide mon action : le partage. Je souhaite vraiment que nous puissions mutualiser, à tous les niveaux, ce que nous vivons en pastorale et en enseignement  religieux. Depuis ma prise fonction, je souhaite que les enseignants puissent partager les documents qu’ils utilisent pour l’heure d’enseignement religieux et de les transmettre aussi au service diocésain. J’ai bien conscience que je demande là quelque chose de difficile. Un cours d’enseignement religieux, comme n’importe quel autre cours, est en permanente évolution, et fixer les choses sur un document qui pourrait être utilisé par d’autres, demande un vrai travail. Mais il me semble important, au moment où nous réfléchissons un référentiel pour le premier degré, de consentir à cet effort. L’objectif est double : il s’agit de permettre, en premier lieu, de mettre en avant l’ensemble des documents qui pourraient servir à tous, non seulement des documents publiés officiellement, mais aussi ceux que nous avons pu composer nous-mêmes dans tel ou tel établissement ou cycle. Il s’agit aussi pour moi, en second lieu, de savoir exactement ce qui est vécu pour mieux l’évaluer et pour mieux défendre nos établissements et nos enseignants lorsque des parents se plaignent de ce qui est vécu dans le domaine pastoral. Car cela arrive aussi que je sois interrogé sur les pratiques mises en œuvre et sur le contenu de l’enseignement religieux.  Enfin, comment pourrions-nous être légitimes à parler du partage à nos élèves si nous-mêmes étions incapables de le vivre à ce niveau ?

Faire toutes choses nouvelles : ce n’est pas un slogan de plus, mais un désir réel de mieux servir la réalité qui est la nôtre au sein de l’Enseignement catholique. C’est aussi accepter de sans cesse remettre sur le métier nos pratiques, les évaluer pour en garder le meilleur et améliorer ce qui peut l’être. C’est un travail d’équipe. Nous l’avons commencé en premier degré ; nous le poursuivrons au second degré avec une relecture du référentiel collège, et la mise en place d’un référentiel lycée et d’un référentiel lycée professionnel. Je remercie par avance ceux qui accepteront de me rejoindre pour la réalisation de ces différents chantiers.
Faire toutes choses nouvelles, c’est enfin accepter d’explorer de nouvelles voies. Sur Strasbourg, une proposition nouvelle sera faite à nos communautés éducatives : celle de vivre un dimanche autrement, avec toutes les composantes de nos communautés éducatives qui le souhaiteront. Rendez-vous au printemps très probablement !

Faire toutes choses nouvelles ! Quand Dieu s’engage ainsi pour le bonheur de tous, comment ne pas le suivre et répondre à son appel à faire de même dans notre vie, pour nous-mêmes et pour ceux et celles qui nous sont confiés ? Enseigner, n’est-ce pas au quotidien faire toutes choses nouvelles en faisant grandir nos élèves, en creusant leur curiosité, en leur permettant de s’enrichir humainement et spirituellement  en vue du bien de tous ? Puisse l’esprit de Noël nous pousser à toujours faire toutes choses nouvelles. Que Celui qui vient nous ouvrir au bonheur de Dieu vous bénisse, ainsi que tous les membres de votre communauté éducative.

Bon Avent et Joyeux Noël à toutes et à tous.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire