Un pauvre
crie ; le Seigneur entend. L’antienne du psaume de ce dimanche donne
le ton et nous fait comprendre, dans le foisonnement des paroles entendues, ce
qui est utile, ce qu’il est bon de retenir. Au cœur de la foi biblique, il y a
bien cette certitude, profondément ancrée, que Dieu ne reste pas sourd à celui
qui crie vers lui.
Ben Sirac le Sage proclame aussi cette
certitude : le Seigneur est un juge
qui se montre impartial envers les personnes. Il ne défavorise pas le pauvre,
il écoute la prière de l’opprimé. Voilà prévenus celles et ceux qui ne respectent
pas la justice, celles et ceux qui oppriment, celles et ceux qui exploitent les
hommes. Les pauvres, les opprimés, les exploités ont un défenseur puissant, un
protecteur qui veille. Quand bien même Dieu voudrait rester sourd à leurs
appels, la prière du pauvre traverse les
nuées… il persévère tant que le Très-Haut n’a pas jeté les yeux sur lui, ni
prononcé la sentence en faveur des juste et rendu justice. Il nous faut
alors nous souvenir de la parole de Jésus entendue dimanche dernier : Dieu ne ferait pas justice à ses élus qui
crient vers lui jour et nuit ? Les fait-il attendre ? Je vous le
déclare : bien vite, il leur fera justice. Si donc tu veux que ta
prière soit entendue, présente-la à Dieu comme un pauvre, comme quelqu’un qui
attend tout de lui. Crie vers lui sans cesse.
N’est-ce pas cette même certitude que Jésus
lui-même enseigne encore ce dimanche lorsqu’il raconte la parabole du pharisien
et du publicain qui montent au Temple pour prier ? Pourquoi l’un est-il
entendu et rendu juste et pas l’autre ? Ils se tournent pourtant tous deux
vers le même Dieu, dans le même lieu, le Temple, demeure du Très-Haut au milieu
des hommes. Parce que l’art et la manière de présenter à Dieu leur prière n’est
pas identique. Il y a le pharisien qui est plein de lui, plein des bonnes
actions qu’il réalise assurément. Et il y a le publicain qui se sait pauvre et
pécheur ; il sait qu’il n’égalera jamais Dieu. Il n’a rien d’autre à
mettre en avant que ses limites, ses faiblesses, attendant de Dieu un signe, un
geste, un pardon, un amour renouvelé. Il est un pauvre, y compris dans sa foi,
y compris dans sa manière de la vivre et il attend de Dieu sa miséricorde. Comment
Dieu, source de toute miséricorde, pourrait-il rester sourd à cet appel au
secours ?
Cette certitude que Dieu répond au cri du malheureux
est celle qui remplit l’Eglise lorsqu’elle célèbre le sacrement du baptême. Elle
ne baptise pas des gens parfaits ; elle ne réserve pas seulement son
accueil à ceux qui croient parfaitement. Elle ouvre les portes de son Eglise à
ceux qui savent que Dieu est tout, que tout vient de lui, et que devant lui,
nous ne sommes que petits, pécheurs, faibles. Le baptême est donné pour la
rémission des péchés. C’est le premier sacrement du pardon. L’enfant que nous
accueillons au cours de cette eucharistie et qui passera tout à l’heure par les
eaux baptismales sera ainsi libéré du péché, du Mal et de la Mort. Par ce bain
d’eau, il sera reconnu enfant de Dieu et Dieu l’adoptera comme sien pour une
vie sans fin. Nous ne le présentons pas parce que nous sommes de bons chrétiens ;
nous le présentons parce que nous savons que Dieu peut tout pour lui et qu’il
marchera à ses côtés, veillant sur lui, pour le conduire à la vie éternelle. Le
baptême n’est définitivement pas un sacrement pour les parfaits, mais pour
celles et ceux qui ont besoin de Dieu, qui ont le désir de Dieu. Et parce que Dieu
entend la prière de ceux qui le désirent, il répond favorablement à cette
demande. L’eau de la vie jaillira au milieu de nous, Dieu s’engagera envers cet
enfant, il fera alliance avec lui.
Cette alliance, nous l’avons tous vécu. Sans
doute, si nous avons été baptisés bébé, ne nous en souvenons-nous pas. Mais nous
avons grandi sous le regard de Dieu. Nous ne sommes ni pires, ni meilleurs que
les autres : certains jours un peu plus pharisien, certains jours un peu
plus publicain. Souvenons-nous tout au long de notre vie de ce que le psalmiste
nous a fait chanter : un pauvre
crie, le Seigneur entend. Gardons au cœur le désir vrai de Dieu ; que
le baptême que nous allons célébrer renouvelle la source vive qui coule en
nous. Et nous saurons nous situer en fils devant Dieu qui nous aime ; et
nous saurons rendre grâce à Dieu, non de ce que nous sommes ou faisons, mais de
ce que Dieu réalise pour nous, jour après jour. Qu’il soit le Maître de notre
vie, aujourd’hui et toujours. Amen.
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année C, éd. Les Presses d'Ile de France)
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