Tout
avait pourtant bien commencé ! Souvenez-vous : c’était au bord du lac
de Tibériade, la foule qui suivait Jésus était affamée et pourtant, parce que
quelqu’un avait pensé à apporter un peu de pain et des poissons, parce qu’il
avait accepté de ne pas les garder pour lui, et parce que Jésus était là,
chacun a pu manger à sa faim, et il en restait encore de quoi remplir douze
paniers. Tout le monde avait mangé ; tout le monde était content au point
d’en vouloir encore de ce pain. Alors, quand Jésus se lance dans ce grand
discours sur le pain de vie, les choses commencent à déraper. Personne ne le
comprend plus !
Il
faut dire qu’il y a une impossibilité de comprendre au départ. En effet, la
foule pense connaître Jésus. Celui-là n’est-il
pas Jésus, fils de Joseph ? Nous connaissons bien son père et sa mère.
Alors comment peut-il nous dire maintenant : « Je suis descendu du
ciel » ? Forcément, si c’est le voisin de votre quartier qui
demain matin va vous dire : Je suis descendu du ciel, reconnaissez que
vous aurez aussi un peu de mal à le croire ! Et peut-être même ferez-vous
venir un médecin pour une hospitalisation forcée s’il se faisait insistant !
Ne leur en voulons donc pas, à ces braves gens de Galilée et des environs, de
ne rien comprendre aux paroles de Jésus. Je ne suis pas sûr que nous
comprenions mieux d’ailleurs ! Y a-t-il seulement moyen de comprendre ce qu’il
nous dit ?
Jésus
lui-même répond : Personne ne peut
venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire. Il faut donc aller
au-delà de la rencontre purement humaine pour connaître et comprendre Jésus. Il
faut l’accueillir comme un don fait par Dieu aux hommes. Sinon, nous dirons
comme les contemporains de Jésus : celui-là on le connaît ; d’où lui
vient qu’il nous fait la leçon ? Nous ne connaitrons pas Jésus réellement
si nous n’acceptons pas qu’il est le cadeau de Dieu aux hommes, qu’il est Dieu, né de Dieu, comme l’affirme un de
nos symboles de foi. Tout ce discours sur le pain de vie n’est que du vent sans
la foi en Dieu qui nous donne Jésus pour nous sauver. La première chose à faire
pour aborder ces paroles de Jésus, c’est donc de croire ! Croire en Dieu et
croire en celui qu’il a envoyé. D’ailleurs, sans la foi, comment accepter que
quelqu’un donne sa vie pour tous les autres ? Sans la foi, comment
accepter que le salut ne soit pas de mon fait, de mes forces, mais que le salut
vienne de Dieu seul ? Je sais bien que l’homme moderne préfère concevoir
sa vie sans Dieu, se sentant assez fort pour se sauver lui-même. Mais où cela
nous mène-t-il ? Malgré toute la technologie qu’il développe, l’homme n’est
pas capable de sauver l’homme. Il n’est même pas capable d’éradiquer la misère
malgré toutes les richesses qu’il produit.
Réentendons
alors Jésus nous dire : Moi je suis
le pain vivant qui est descendu du ciel ; si quelqu’un mange de ce pain,
il vivra éternellement. Jésus nous redit qu’il est le seul à pouvoir nous
sauver ; Jésus nous redit qu’il est le seul à nous ouvrir la vie véritable.
Sans Jésus, rien d’éternel n’est possible pour l’homme. Sans Jésus, la vie de l’homme
n’a pas pris toute sa dimension. Sans Jésus, les faims qui assaillent l’homme
ne sont pas, et ne seront jamais, vraiment rassasiées. Il est le pain de Dieu offert
aux hommes, le seul pain véritable qui comble toutes nos faims. Il ne vient pas
combler nos faims matérielles ; il ne vient pas nous apporter un bien-être
passager. Il vient nous sauver en faisant de la volonté de Dieu notre
nourriture. Benoît XVI, dans son livre Jésus
de Nazareth, précise : Dans la
rencontre avec Jésus, nous nous nourrissons pour ainsi dire du Dieu vivant
lui-même, nous mangeons vraiment le pain venu du ciel. En conséquence, Jésus avait
d’emblée clarifié que la seule œuvre que Dieu demande consiste à croire en lui (Evangile
de dimanche dernier). C’est pour cela que Benoît insiste : Nous devons accepter le don, et nous devons
entrer dans la dynamique de ce qui nous est donné. Cela se fait dans la foi en Jésus,
qui est dialogue, relation vivante avec le Père, et qui veut redevenir en nous
parole et amour.
Nous
comprenons alors pour quoi Paul invite les chrétiens à vivre dans l’amour, comme le Christ nous a aimés et s’est livré pour
nous. Puisque par notre communion eucharistique nous accueillons en nous l’amour
du Christ qui s’est livré, nous devons répandre cet amour par notre manière de
vivre. Nous ne pouvons pas faire comme si notre communion ne changeait rien. Nous
ne pouvons pas faire comme si ce pain rompu et partagé n’était qu’un morceau de
pain. Il est le pain véritable, Jésus Christ, venu dans le monde pour le salut
de tous les hommes. Si nous l’accueillons en notre vie par la communion, nous
devons le rendre au monde par notre art de vivre. Générosité, tendresse, pardon mutuel : voici les signes donnés
au monde de notre appartenance au Christ ; voici les signes du salut à l’œuvre ;
voici les signes de la présence réelle du Christ au monde de notre temps ;
voici les signes que ce pain, rompu et partagé, est vraiment le pain de Dieu qui
comble toutes nos faims ; voici les signes qu’un monde nouveau est
possible parce que marqué du sceau de l’Esprit
Saint et rassasié du pain vivant qui
est descendu du ciel.
Le
discours sur le pain de vie se poursuit encore sur deux dimanches. Nous aurons
encore le temps d’approfondir ce que nous dit Jésus. Pour aujourd’hui, retenons
que c’est notre foi qu’il nous faut examiner et approfondir pour reconnaître
dans le pain partagé la vie donnée du Christ qui nous sauve. Acceptons ce don
pour n’en manquer jamais. Amen.
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