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samedi 18 août 2018

20ème dimanche ordinaire B - 19 août 2018

Quand Jésus parle du don de sa vie…






            S’ils avaient su jusqu’où Jésus les emmèneraient dans la réflexion, je doute qu’ils eussent pris le risque de courir après lui pour lui redemander du pain, vous savez, juste après la multiplication des pains sur le bord du lac de Tibériade. Cela fait quelques semaines maintenant que nous assistons à l’enseignement de Jésus sur le pain de vie. Et plus le temps passe, plus l’incompréhension s’installe et plus l’opposition grandit. Nous avons entendu le reproche du jour : Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? Dimanche dernier déjà, nous avions constaté une impossibilité pour les gens de comprendre Jésus : elle reposait sur le fait que ses adversaires pensaient connaître Jésus. Ce dimanche, nous découvrons une deuxième impossibilité fondamentale : elle repose sur le fait que ce discours de Jésus est tenu avant sa mort et sa résurrection. Or, il fait tout entier référence à l’événement de Pâques, c’est-à-dire à sa mort et à sa résurrection. Comment ceux qui s’affrontent avec Jésus pourraient-ils comprendre un argumentaire qui concerne quelque chose qui n’a pas encore eu lieu ? 

            Ecoutons à nouveau l’affirmation de Jésus au début de notre page d’évangile : le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. Notez bien le futur : que je donnerai et non que je donne maintenant ! Comme le souligne le pape Benoît XVI dans son livre Jésus de Nazareth, je le cite : Au-delà de l’acte de l’incarnation, ce mot suggère son but profond et sa dernière réalisation : le fait que Jésus se donne jusque dans la mort et dans le mystère de la Croix. Cela se manifeste encore plus clairement dans le verset 53 où le Seigneur précise qu’il nous donne son sang à « boire ». Ce mot nous renvoie clairement à l’Eucharistie, mais ici apparaît surtout le sacrifice qui la fonde, le sacrifice de Jésus. Pour nous, Jésus verse son sang ; sortant pour ainsi dire de lui-même, il « s’écoule », il se donne à nous. C’est donc bien à la lumière de Pâques que nous devons et pouvons comprendre ce long discours qui nous occupe depuis plusieurs dimanches. Il s’agit d’accepter que la mort de Jésus sur la Croix ne soit pas un accident de l’Histoire, mais bien un acte voulu et assumé par Jésus pour que les hommes aient la vie ; pour que tous les hommes aient la vie, et pas seulement ceux qui ont vécu à l’époque de Jésus. Il s’agit d’accepter que ce sacrifice, réalisé une fois pour toute à Jérusalem, quand Ponce Pilate était gouverneur de Judée, est actualisé, rendu contemporain des hommes et des femmes qui célèbrent l’Eucharistie. Ce sacrifice de Jésus nous est rendu contemporain ce matin, et le pain consacré, auquel nous communierons dans un instant, est bien le Corps du Christ livré, vrai pain descendu du ciel et offert pour notre salut. 

            Lorsque nous parlons de l’Eucharistie, lorsque nous vivons une Eucharistie, il nous faut alors admettre que ce sacrement est à la fois le mémorial du dernier repas de Jésus et le mémorial du sacrifice de Jésus sur la Croix. L’autel est à la fois la table autour de laquelle Dieu rassemble son peuple et l’autel du sacrifice sur lequel son Fils s’offre en victime pour notre salut. Le pain et le vin consacrés sont l’aliment donné par Dieu en nourriture, et le Corps livré et le Sang versé de son Fils sur la Croix. Lorsque nous venons célébrer l’Eucharistie, nous ne nous rassemblons pas pour le repas hebdomadaire du club des amis de Jésus : nous venons communier à la vie de Jésus pour qu’elle fasse grandir la nôtre et la mène à son achèvement. Nous ne venons pas ici parce que nous avons vu de la lumière ; nous ne venons pas ici parce que nous n’avions rien de mieux à faire ce matin. Nous venons ici, semaine après semaine, à la rencontre du Christ qui se livre à nous à la table de la Parole et à la table de l’Eucharistie. Il se donne tout entier à nous pour que nous soyons tout entier à lui. La préface que nous entendrons tout à l’heure, celle du Jeudi Saint, résume admirablement les choses : C’est lui [Jésus] le prêtre éternel et véritable, qui apprit à ses disciples comment perpétuer son sacrifice ; il s’est offert à toi en victime pour notre salut ; il nous a prescrit d’accomplir après lui cette offrande pour célébrer son mémorial. Quand nous mangeons sa chair immolée pour nous, nous sommes fortifiés ; quand nous buvons son sang versé pour nous, nous sommes purifiés. A la question posée par la foule : Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ?, il nous faut désormais répondre : en se livrant totalement à nous sur la Croix et en nous offrant le sacrement de l’Eucharistie en mémorial de son sacrifice. Ici, chaque dimanche, tout est dit ; ici, chaque dimanche, tout est donné ; ici, chaque dimanche, nous puisons la force et la vie nécessaire pour la semaine à venir, car Jésus est notre force et notre vie, et il s’offre toujours encore à nous. Nous ne manquerons jamais de cet aliment du Salut parce que nous ne manquerons jamais de la présence du Christ, mort et ressuscité pour notre vie. 

            Ayant entendu tout cela, ayons ainsi une plus grande conscience de ce qui se joue chaque dimanche. Ayons de plus en plus conscience de l’importance de notre présence au rassemblement hebdomadaire des chrétiens. Certes, nous pouvons penser à Jésus et prier Jésus ailleurs que dans l’eucharistie. Mais ce n’est qu’au cours de l’Eucharistie que je peux réellement communier à sa vie, comprendre sa Parole et recevoir de lui le Pain vivant descendu du ciel. Il n’y a que là, au cœur du sacrement de l’Eucharistie, que la totalité du Christ nous est donnée ; il n’y a que là que sa vie peut jaillir en nous en source vivifiante. Accueillons ce don avec reconnaissance en y participant autant que faire se peut. Amen.

 (Dessin de M. Leiterer)

 

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