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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 27 juillet 2024

17ème dimanche ordinaire B - 28 juillet 2024

 Sans tambour ni trompette.







 

            Sans tambour, ni trompette ! C’est, me semble-t-il, un bon résumé de l’action de Jésus, et particulièrement des signes puissants qu’il opère. Quand bien même il sait au fond de lui qu’il va intervenir, il ne fait pas faire le silence, il ne fait pas battre le tambour comme au cirque. Tout est fait discrètement. C’est la foule qui donnera l’éclat au geste accompli. Jésus n’a besoin ni de publicité, ni de louange ; il fait ce qu’il doit faire pour que l’œuvre de Dieu soit manifestée et manifeste pour tous. 

            Regardez le geste de ce jour. Jésus a cherché à se retirer avec ses disciples, mais la foule les rattrape bientôt. On sent le besoin de cette foule à son empressement. On sent qu’elle n’est rien sans Jésus. On sent qu’elle attend beaucoup de lui. Elle ne lui laisse aucun repos. A force de suivre Jésus partout, elle en oublie de veiller sur elle-même. A trop attendre des autres, nous pouvons oublier le bon sens ordinaire. Le bon sens ordinaire aurait voulu que cette foule, qui se presse continuellement vers Jésus, n’en oublie pas pour autant ses besoins essentiels comme boire et manger. C’est Jésus qui en fait la remarque : Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? Ne négligeons pas la réalité de la question en la spiritualisant trop vite : comprenez, Jésus ne parlait pas de la nourriture terrestre, mais de cette nourriture qu’il opposait jadis au diable, lorsqu’il fut tenté au désert (l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole sortie de la bouche de Dieu). Cette fois-ci, c’est bien du pain du boulanger qu’il parle à Philippe. Il est sans doute le seul qui a remarqué que cette foule qui le suit, a oublié le nécessaire vital ; à un moment donné, il faudra manger et nous sommes sur une montagne ! La puissance de Jésus, manifestée par ses actes, ne l’empêche pas d’être réaliste et conscient qu’il y a une vie ordinaire et simple, avec ses besoins propres. Tout ne se résume pas à un miracle ! Que faire ? Philippe lui-même répond à Jésus que sa question n’est pas simple : le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain. Non seulement il faudrait travailler beaucoup, mais chacun n’aurait qu’un peu, et probablement pas assez pour manger à sa faim. 

Sans doute n’est-ce pas un hasard que ce soit un jeune garçon qui possède la clé du mystère à résoudre. Jésus n’a-t-il pas encouragé ses disciples à rester comme des enfants ? Derrière ce jeune garçon, j’aime à penser qu’il se cache une maman ; elle avait le souci de son fils ; elle lui a donné cinq pains d’orge et deux poissons. Elle a fait pour son fils ce que chaque membre de cette foule aurait dû faire pour lui-même : prendre un en-cas pour la journée. Un, sur plus de cinq mille hommes, qui avait trois fois rien pour lui. Le jeune garçon ne semble pas se poser de question quand Jésus, ou un de ses disciples, lui demande de donner ce qu’il a. Un adulte aurait probablement essayé de négocier ; il aurait raisonné comme un grand en disant que cela ne sert à rien de partager. André lui-même n’interroge-t-il pas :  qu’est-ce que cela pour tant de monde ? Une manière de dire : on ne va le déranger, ce serait cruel de lui demander de donner ce peu qu’il a. Et pourtant, le jeune homme donne, et c’est à partir de ce peu que tous vont manger autant qu’ils en voulaient ; c’est à partir de ce peu qu’il y aura douze paniers remplis de restes. Ce jeune homme partage pour toute éternité avec Jésus la réalisation du miracle. S’il ne donne pas, Jésus ne peut rien. Parce qu’il donne, Jésus peut tout ; il peut multiplier à l’infini le peu qui est donné et tout le monde en profite. Comme au début du ministère de Jésus dans l’évangile de Jean (souvenez-vous du signe de Cana), tout commence par une mère attentive, passe par un jeune fils, et se termine par un geste de Jésus qui se tourne vers son Père. Le vrai miracle, ce n’est pas tant que les gens mangent à leur faim ; le vrai miracle, c’est toujours, au départ, la relation entre les personnes, et la relation entre Jésus et son Père ; c’est cela qui fait que tout devient possible. De tout temps, Dieu a voulu avoir besoin de nous pour réaliser son projet d’amour. Ce jeune homme qui partage, nous rappelle qu’il n’y a pas d’âge pour collaborer avec Jésus. Et le tout s’est fait sans tambour, ni trompette, ni de la part de Jésus, ni de la part du jeune homme dont personne n’a retenu le nom ! S’il s’en était vanté, nous le connaîtrions aujourd’hui encore. 

Cette absence de nom nous est bénéfique, à nous qui méditons cet événement. C’est comme si Jean nous disait que nous pouvons chacun faire la même chose que ce garçon et coopérer à l’œuvre de salut de Jésus. Je rappelle que dans l’Evangile de Jean, il n’y a pas de Sainte Cène, mais que ce chapitre six tient lieu d’enseignement sur Jésus qui se donne en nourriture. Revenez les dimanches du mois d’août ; vous l’entendrez de la bouche même de Jésus. L’absence du nom du jeune homme, c’est une manière de nous dire : Faites ainsi, vous aussi, en mémoire de moi. Acceptez de donner, acceptez de partager pour que le Christ puisse encore s’offrir au monde. Il suffit de très peu – cinq petits pains et deux poissons – pour que tous aient ce qu’il faut, par les mains de Jésus. Si Jésus n’a rien à se mettre sous la main, nous n’aurons rien à nous mettre sous la dent. Le miracle, aujourd’hui encore, commence avec nous, unis à Jésus, lui-même unit à son Père. Serons-nous ce jeune homme qui permet à Jésus d’accomplir son signe ? La réponse est au fond de chacun de nous, sans tambour, ni trompette. Amen.

samedi 20 juillet 2024

16ème dimanche ordinaire B - 21 juillet 2024

 La peur n'est jamais la solution.




(icône dite de l'amitié)



 

            Il y a très longtemps, au début de mon ministère, j’ai entendu une catéchiste dire à un enfant lors d’une journée de récollection : « si tu ne manges pas ta soupe, tu vas faire pleurer Jésus ! » Plus de trente ans après, je pensais que l’utilisation de la peur avait (enfin) disparu, du moins en Eglise. Je me dois de constater qu’il n’en est rien. Pour preuve, cette phrase entendue plus récemment : « il faudrait à nouveau prêcher la peur de l’enfer pour que les gens se convertissent ». Et cette autre phrase, entendue ce vendredi, rapportée dans le cadre de mon travail dans l’enseignement catholique, au sujet d’un prêtre qui fait peur aux gens de son entourage et qui affirme que « faire peur, ça a du bon ! »  Relisant alors la première lecture de ce dimanche, je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a encore du travail pour expliquer que la peur n’est jamais la solution, ni même un bien. 

            Dieu, parlant par son prophète Jérémie, est plutôt clair, non ? Je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays où je les ai chassées. Je les ramènerai dans leur enclos, elles seront fécondes et se multiplieront. Je susciterai pour elles des pasteurs qui les conduiront ; elles ne seront plus apeurées ni effrayées, et aucune ne sera perdue – oracle du Seigneur. Le prophète pouvait-il rapporter plus fidèlement l’intention et les sentiments du Seigneur ? Dieu ne veut pas faire peur ; il viendra au contraire chasser la peur de nos vies ; il viendra nous guider, nous rassembler pour que nous puissions vivre libres. La peur emprisonne ; la peur éloigne de Dieu ; la peur détruit la vie. Le psalmiste, en réponse à la lecture entendue, va dans le même sens quand il nous fait chanter : Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi ; ton bâton me guide et me rassure. Le bâton n’est pas fait pour frapper celui qui veut suivre Dieu, mais pour le défendre contre les forces obscures qui veulent le retenir loin de Dieu. N’agitons pas la peur comme le remède à nos églises vides ; n’agitons pas le bâton comme remède à nos manques de fraternité. Si tant d’hommes et de femmes se sont éloignés de l’Eglise, n’est-ce pas parce qu’elle a trop manié le bâton et la peur à certains moments de son histoire ? 

            Observez Jésus. Les foules se pressent autour de lui, ses disciples sont revenus de mission, et mentionne l’évangéliste Marc, ceux qui arrivaient et partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. Que fait Jésus pour avoir un temps avec ses Apôtres ? Il ne chasse personne, il ne fait peur à personne ; il emmène ses disciples en barque, plus loin, à l’écart. Et quand ils rejoignent la terre ferme, et que les gens, les ayant vus s’éloigner, les ont rejoints, il ne dit pas : Zut ! encore eux… mais il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement. De la tendresse pour ses disciples qu’il emmène ailleurs, pour qu’ils se reposent ; de la compassion pour la foule qui les attend. Rien qui ne fasse peur, rien qui n’indique même seulement un début d’irritation. Jésus n’est pas venu pour nous faire peur, mais pour nous rassurer, nous enseigner, nous sauver. 

            Paul, dans sa lettre aux Ephésiens, l’a bien compris, quand il explique l’œuvre de Jésus : Vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ. C’est lui, le Christ, qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine (ce qui fait peur) ; il a supprimé les prescriptions juridiques de la loi de Moïse (dont il fallait craindre de ne pas toujours les respecter toutes). A partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix (unité et réconciliation, toutes choses impossibles quand règne la peur) ; en sa personne, il a tué la haine. Et avec la haine, il a tué aussi la peur qui précède toujours la haine et la sert si bien. Nous ne pouvons pas justifier l’utilisation de la peur en Eglise ; nous ne pouvons pas estimer qu’un peu de peur, ça fait du bien. Seul l’amour touchera les cœurs ; seul l’amour convertira les esprits belliqueux ; seul l’amour nous fera vivre libre. Le salut obtenu par la croix du Christ en atteste largement. 

            Ne revenons pas à nos vieux démons ; ne jouons pas avec la peur ; ne jouons pas de la peur des autres. C’est la conversion que nous devons prêcher ; non pas en démontrant ce qu’elle nous fait éviter, mais en précisant ce qu’elle nous fait gagner. Puisque, par la Croix, le Christ a tué la haine, c’est bien l’amour que nous devons vivre et partager, si nous voulons être ses disciples. Tout ce qui contraint l’homme, tout ce que qui terrifie l’homme, n’est pas de Dieu et ne permet pas d’approcher Dieu. Tout ce qui s’oppose à l’amour, n’est pas de Dieu et ne permet d’approcher Dieu. Tout ce que ne mène pas à l’amour, n’est pas de Dieu et ne permet pas d’approcher Dieu, car Dieu est amour. Pour obtenir le bien, ne prêchons pas le mal. Que cela soit dit ; que cela soit su ; que cela soit vécu ; et le monde trouvera auprès du Christ des raisons de vivre, d’espérer et d’aimer à nouveau. Amen.

samedi 13 juillet 2024

15ème dimanche ordinaire B - 14 juillet 2024

 Pas ici, mais là-bas ! Pas moi, mais eux !



(Jésus envoie ses disciples deux par deux, Source : www.cath.ch)





 

 

            Pas ici, mais là-bas ! C’est en résumé, ce que dit Amazias, prêtre de Béthel, à Amos, le prophète envoyé par Dieu. Pas ici, parce que tu nous casses les oreilles, mais là-bas, parce qu’il n’y a pas de raison que les oreilles des autres soient épargnées. C’est une question d’égalité ! En ce jour de fête nationale, comment ne pas y être sensible ? 

Pas ici, mais là-bas ! Amos a bien compris le message, mais il n’en fera rien. Il rappelle au prêtre Amazias qu’il n’a ni choisi, ni voulu ce poste. En fait, il n’a rien demandé, il a été appelé. Je n’étais pas prophète, ni fils de prophète ; j’étais bouvier, et je soignais les sycomores. Mais le Seigneur m’a saisi quand j’étais derrière le troupeau, et c’est lui qui m’a dit : ‘Va, tu seras prophète pour mon peuple Israël. Amos, à la différence d’Amazias, du roi et du peuple, écoute quand Dieu parle. Prophète, ce n’est pas son métier ; il n’a pas fait d’école pour cela ; il se contente d’écouter Dieu et de rapporter ce qu’il lui demande de dire. En lisant le prophète Amos, nous comprenons pourquoi ses auditeurs sont plutôt mécontents. Son message n’est pas tendre ; c’est une vraie diatribe contre l’injustice sociale, le vol en bande organisée, la traite d’êtres humains et les petits arrangements entre amis riches pour devenir encore plus riches en spoliant les pauvres. Qui a envie d’entendre cela, à Béthel ? Personne ! D’où le pas ici, mais là-bas. 

Dans l’évangile, les disciples auraient pu dire à Jésus : pas nous, mais eux, une autre version du pas ici, mais là-bas. Pas nous, mais eux, parce que lorsque l’on voit le cadre posé par Jésus quand il envoie ses disciples en mission pour la première fois, on se dit que c’est plutôt rude. Ils ont droits à un bâton, une paire de sandales et… c’est tout ! Pas de pique-nique pour la route, pas d’argent pour faire les courses, pas de sac, pas de linge de rechange. Si la mission ne dure qu’un jour, ça peut aller ; mais si elle doit s’étendre dans le temps, c’est un peu crado, dans un pays chaud ! Malgré tout cela, ils sont tous partis, par deux, accomplir la mission que Jésus leur a confiée. Ils ont compris, comme Amos des générations avant eux, que lorsque Dieu appelle et envoie en mission, on ne discute pas. Il veillera sur eux, il leur donnera ce dont ils auront besoin. Pour eux, seule doit compter la mission confiée. On ne s’encombre pas d’autre chose ; on ne sort pas un truc de son sac pour faire plaisir ou pour impressionner. Seule compte la parole qu’ils ont à dire, et le combat contre le mal qu’ils ont à mener : ils partirent, et proclamèrent qu’il fallait se convertir. Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient. Pour savoir si leur mission a réussi, il vous faudra revenir dimanche prochain. Je ne « spoilerai » pas la suite de l’Evangile. Aujourd’hui, il nous suffit de savoir que Dieu appelle et envoie en mission. Ce qui valait pour Amos, vaut pour les disciples, et vaut encore pour nous aujourd’hui. 

Nous aussi, nous sommes appelés. Nous avons d’abord été appelés à devenir fils adoptifs, par Jésus le Christ, comme le rappelle si bien Paul aux chrétiens d’Ephèse. Mais bien plus que cela, ou en conséquence de cela, il nous appelle à vivre saints, dans l’amour, dans la louange de la gloire Dieu, et à vivre dans l’Esprit Saint. C’est notre vocation première, et nous ne pouvons pas dire à Dieu : pas nous, mais eux, ni même pas ici, mais là-bas, sous-entendant que d’autres, ailleurs auraient plus besoin de conversion que nous. C’est l’appel premier, parce que à celui-ci peuvent se rattacher une multitude de petits appels ponctuels. Ils peuvent vous être adressés par un proche ou un voisin, un étranger ou un petit, voire par l’Eglise quand il s’agit d’une fonction permettant à la communauté de vivre mieux sa mission d’évangélisation. Tout le monde est concerné, et nous ne pouvons pas sans cesse nous dérober et dire : pas moi, mais eux ! 

        Quand Dieu appelle, c’est qu’il veut avoir besoin de nous. Si les hommes peuvent bien estimer qu’ils n’ont pas besoin de Dieu, Dieu cependant estime qu’il a besoin de chacun de nous pour poursuivre aujourd’hui la mission du Christ. Et si pendant un temps, nous avons collectivement estimé que cet appel était pour les prêtres, mes religieux et les religieuses, nous découvrons de plus en plus que chaque croyant a une place à tenir, une mission à remplir. Parce que ce qui nous « oblige » à la mission, ce n’est pas une ordination ou un engagement dans une communauté ; non, ce qui nous « oblige », c’est notre commun baptême, qui fait de nous tous des prêtres, des prophètes et des rois. Il est le sacrement fondamental qui nous place dans les pas du Christ. Tout le reste s’ajoute ou découle de celui-là. Quand Dieu nous appelle à le suivre par le baptême, il nous assure de la présence de son Esprit (la confirmation), il nous nourrit pour que notre foi ne défaille pas (l’eucharistie) et il construit son Eglise en veillant à une juste répartition des charismes (mariage, ordre). Enfin, il nous donne des moyens supplémentaires pour parvenir au salut : le sacrement de la pénitence et la réconciliation et le sacrement des malades. Tout cela ne peut se faire que parce que nous sommes d’abord baptisés. C’est ce premier appel qu’il nous faut prendre au sérieux pour vivre dans la fidélité au Christ et parvenir au salut. Amen.



samedi 6 juillet 2024

14ème dimanche ordinaire B - 07 juillet 2024

 Ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse.




 

 

Depuis lundi, le groupe qui assure l’adoration au Mont Sainte Odile, approfondit sa foi à partir de la saga Harry Potter. Un parcours original, sans doute, qui nous a permis d’aborder des questions aussi diverses que l’appel, la question du bien et du mal, comment vaincre le mal, la notion de don de soi et de sacrifice, ainsi que, ce matin même, la plus puissante des magies révélées dans l’œuvre de JK Rowling, une magie que, chrétiens, nous ne pouvons renier : il s’agit de l’amour ! Cette magie ne vient pas d’un sort jeté, ni d’une baguette puissante, mais des hommes et des femmes eux-mêmes. Ainsi, c’est bien l’amour de sa mère qui a sauvé Harry Potter dès sa naissance, et lui a permis de survivre au sortilège de mort prononcé contre lui par Vous-savez-qui. 

La deuxième lecture de ce dimanche n’aborde-t-elle pas à sa manière cette puissante magie de l’amour ? Il faut bien entendre Paul dans sa deuxième lettre aux Corinthiens. Il reconnaît qu’il porte en lui une écharde qui l’empêche de se surestimer. Nous ne savons pas de quoi il parle exactement, mais il est certain que c’est pour lui une limite, une blessure qui le marque et dont il a demandé à être débarrassé. La réponse de Dieu à sa demande peut sembler curieuse : Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. Ce n’est probablement pas la réponse que Paul attendait – pas de libération, pas de guérison – mais il saura se contenter de cette affirmation que la grâce de Dieu l’accompagne. N’est-ce pas la manifestation même de l’amour de Dieu que l’affirmation de la présence de Dieu à notre vie, surtout dans les moments d’épreuves ? Reprenant le vocabulaire de Harry Potter, la puissante magie dont nous bénéficions en tant que chrétiens, c’est bien cette présence aimante de Dieu qui veille sur nous, nous accompagne et nous assure de sa grâce. Cette grâce de Dieu doit nous suffire, même dans nos moments de faiblesse. Il n’y a rien de plus puissant que l’amour de Dieu. Il n’y a pas de péché assez grand et assez fort pour contrecarrer l’amour de Dieu. Il n’y a pas de péché trop grand que l’amour de Dieu ne saurait combattre et pardonner. Le même Paul écrira aux Romains que là où le péché a abondé, la grâce de Dieu a surabondé (Rm 5, 20). Ce n’est pas une permission de nous laisser aller au péché, mais une invitation à ne pas désespérer, ni de nous, ni de l’amour de Dieu quand le péché semble dominer notre vie. L’amour de Dieu sera toujours plus fort que notre péché ; il ne nous manquera jamais. 

Nous ne prendrons jamais assez la pleine mesure de la puissance de l’amour de Dieu pour nous ; nous ne pouvons que l’expérimenter, jour après jour. Cet amour nous saisit et nous transforme lentement. Ici, au mont Sainte Odile, devant le Saint Sacrement exposé, nous pouvons ressentir cet amour pour nous à travers la paix profonde qu’il nous procure. Pèlerins d’un jour ou adorateurs pour une semaine, nous touchons du doigt cet amour à l’œuvre dans notre vie, comme il fut à l’œuvre de notre bien-aimée patronne de l’Alsace que nous célébrons en ce dimanche. L’amour qui n’a jamais fait défaut à Odile, même quand son père a décidé de la faire éliminer, ne nous fera jamais défaut. Nous devons être habités de cette certitude que nous sommes profondément et éternellement aimés, avant même d’avoir seulement commencé à aimer Dieu en retour.  Accueillant la puissance de cet amour divin pour nous, nous ne pouvons que demander la grâce de savoir en témoigner à notre tour et de répandre cet amour autour de nous. Ce n’est pas quelque chose à faire quand nous aurons le temps ; ce n’est pas quelque chose à faire parce que nous n’aurons rien d’autre à faire à ce moment-là. C’est quelque chose qui s’impose à nous. Caritas Christi urget nos – la charité du Christ nous presse, écrit le même Paul dans cette même lettre aux Corinthiens ! Comment, en étant aimés absolument et inconditionnellement, ne pas aimer de même, absolument et inconditionnellement ? Serions-nous des enfants ingrats, revendiquant pour nous seuls ce que nous refusons aux autres ? Nous ne pouvons garder pour nous ce que Dieu nous partage aussi généreusement ! Comme l’écrit saint Jean dans sa première lettre : Nous devons aimer ! Il n’y a pas d’autre choix possible ! Quand j’ai lu, tout au long de la semaine écoulée, dans nos journaux, que des personnes d’origine étrangère se voit rappeler leurs origines, au point qu’elles ressentent qu’elles ne sont pas les bienvenues quand bien même elles seraient pleinement insérées depuis des années, je me dis que nous avons oublié d’aimer et que notre amour pour l’autre, différent, est en grand danger. Comment, en quelques jours, un vrai sentiment de haine a-t-il pu se développer et se répandre ainsi dans la patrie des Droits de l’Homme ? Comment une nation dont la fraternité fait partie de la devise, peut-elle ainsi manquer aussi gravement à ce qui la constitue et la définit ? La fraternité ne serait-elle plus la sœur de l’amour ? 

Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dan la faiblesse. Plus que jamais, demandons la grâce d’aimer à nouveau, profondément, absolument, inconditionnellement, toute personne qui frappe à la porte de notre cœur, à la porte de notre pays. Ne nous contentons pas de recenser et de déplorer les incidents signes d’un manque d’amour ; agissons clairement pour que l’amour dont Dieu nous aime rayonne à travers nous pour tous. Accueillons la puissance d’amour que Dieu déploie pour combler nos manques et nos difficultés à aimer. Amen.