Notre filiation divine.
Avec la fête du baptême de Jésus, nous clôturons le temps de Noël. Dès lundi, nous retournerons au temps ordinaire, pour tenter d’y trouver la trace du passage de Dieu au cœur de notre vie. Mais, aujourd’hui, une dernière fois, l’occasion nous est donnée de bien comprendre ce qui s’est joué en cette sainte nuit, où Dieu est devenu l’un de nous. Les lectures que nous avons entendues nous sont familières : elles nous ont, en effet, déjà accompagné durant le temps de l’Avent et les fêtes de Noël. Aujourd’hui, je voudrais m’attarder sur l’épître à Tite dont nous avons entendu un extrait en seconde lecture.
Le passage entendu commence par une évidence paulinienne : Dieu a manifesté sa grâce pour le salut de tous les hommes. Lorsque Dieu paraît, c’est bien pour l’humanité entière, quelles que soient la race, la couleur de peau, les croyances. Dieu vient par grâce (c’est-à-dire gratuitement !) pour notre salut. Il nous faut donc apprendre à accueillir cette grâce. Et peut-être est-ce là déjà que les choses se compliquent : car, si Dieu vient à l’homme, l’homme n’a pas forcément envie d’être visité par Dieu ! La grâce de Dieu ne pourra donc agir que si l’homme s’ouvre à elle, accepte ce Dieu qui vient à sa rencontre. En d’autres termes, il faut que le désir de Dieu de sauver l’homme trouve écho dans le désir de l’homme d’être sauvé. C’est le premier défi de la foi : accepter Dieu tel qu’il est, entrer dans son projet d’amour pour nous. La foi est donc nécessaire au salut. Dieu ne peut pas, malgré sa toute puissance, sauver l’homme malgré lui ! Dieu ne peut pas obliger l’homme à croire en lui.
Paul poursuit en indiquant que celui qui accueille la grâce de Dieu, celui-là apprend à rejeter le péché, à faire ce qui est bien, selon le dessein de Dieu. Ce n’est donc pas l’homme qui pose des actes extraordinaires pour manifester sa foi ; c’est sa foi qui le transforme, qui transforme sa manière d’être et de vivre. Voilà qui devrait faire réfléchir ceux qui pensent qu’il suffit de vivre en homme juste. Ce ne sont pas nos actes qui nous justifient ; ce ne sont pas nos actes qui manifestent notre foi. C’est notre foi qui nous sauve ; c’est notre foi qui nous fait poser des actes en conformité avec ce que nous croyons, parce que par la foi, nous nous soumettons au désir de Dieu et nous y répondons. Vivre en homme juste ne fait pas de nous forcément des croyants ; mais vivre en croyant fait obligatoirement de nous des hommes justes, parce que la grâce de Dieu agit en nous qui l’avons reçue au cœur de notre vie.
Cette grâce s’active par le sacrement du baptême qui nous incorpore au Christ Sauveur et nous identifie à lui ; elle se fortifie par les autres sacrements, en particulier celui du pardon et de la réconciliation qui nous fait retrouver l’image et la ressemblance de Dieu que notre péché, nos éloignements, nos refus momentanés de la grâce avaient estompé ; la grâce se nourrit aussi du sacrement de l’Eucharistie, Pain des forts, Pain du ciel, toujours offert à celui qui veut grandir en sainteté et recevoir de Dieu ce qu’il veut nous donner. Sans les sacrements, la foi ne peut ni grandir, ni s’épanouir. Sans la participation à une vie de communauté, la foi se meurt. C’est bien pour cela que nous sommes invités, fermement, à la pratique dominicale régulière. Il y va de notre vie ! Elles sont nombreuses, les références bibliques et ecclésiales qui insistent sur cette rencontre unique avec les frères et avec Dieu. Un chrétien qui veut vivre son baptême véritablement ne saurait s’en passer ! C’est bien, en effet, dans notre attachement à la communauté des frères et par notre participation à sa vie, que nous manifestons le mieux notre ouverture à la grâce, notre accueil de sa Parole, notre désir de vivre unis à des personnes que nous ne choisissons pas, qui nous horripilent quelques fois, mais que Dieu lui-même place sur notre route pour nous dire sa présence, sa patience, son amour.
En célébrant cette eucharistie, ayons à cœur de redire à Dieu notre attachement à lui, notre désir d’écouter et de suivre le Christ. Par son baptême, il nous indique que ce chemin commence par la conversion, passe par la croix pour aboutir à la gloire de la résurrection. Par son baptême, il nous ouvre à la filiation divine. En recevant le corps et le sang du Christ, ayons bien conscience que Dieu renouvelle pour nous, aujourd’hui, le mystère de sa venue en nos vies pour nous transformer et nous faire vivre de son Esprit. C’est ainsi que nous progresserons vers le bonheur que nous espérons avoir quand se manifestera la gloire de Jésus Christ, notre grand Dieu et notre Sauveur ! Amen.
(Image de Gustave DORE, Le baptême de Jésus)
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