Qui peut comprendre les
volontés du Seigneur ? Cette interrogation de l’auteur du Livre de la
Sagesse est à la base de tout chemin spirituel. Elle est au commencement d’une
démarche de foi. Elle est comme un fil rouge parcourant toute notre existence. Comprendre
ce que Dieu veut est, en effet, le but même de la vie du croyant et, pour le
chrétien, le chemin sûr et vrai qui mène à la sainteté. Nous ne pouvons donc
pas évacuer cette question sans l’affronter vraiment !
Qui peut comprendre les volontés du
Seigneur ? Il nous faut d’emblée préciser que la volonté du Seigneur
ne se lit ni dans le marc de café, ni dans les horoscopes, ni dans les cartes.
Elle n’est pas non plus ce que certains appellent le « destin ».
Lorsque nous parlons de la volonté de Dieu, nous ne parlons pas magie,
spiritisme ou quelques langages ésotériques. Non, parler de la volonté de Dieu,
c’est parler de son projet : son projet pour le monde, son projet pour
l’homme, son projet pour l’avenir de l’homme. Ce projet, le Christ Jésus l’a
réalisé dans l’acte même de sa mort et de sa résurrection, puisqu’il a offert
sa vie par amour pour les hommes, afin que le monde soit sauvé. Le projet de
Dieu est un projet de salut, donc un projet de vie ! Nous pouvons donc
déclarer que tout ce qui s’oppose au salut de l’homme, tout ce qui s’oppose à
la vie de l’homme est contraire au projet de Dieu. Tout ce qui s’oppose ainsi
au salut et à la vie n’a rien à voir avec Dieu ! Il nous faudrait ici
relire l’essentiel des textes bibliques pour nous en convaincre. De la création
à l’Apocalypse, toute la Bible ne parle que du projet de salut que Dieu formule
pour nous et auquel, quelquefois, nous avons du mal à répondre.
Qui peut comprendre les
volontés du Seigneur ? Il nous faut alors préciser que cette volonté
de Dieu n’est pas inatteignable. Elle n’est pas cachée ; elle se laisse
deviner par celui ou celle qui veut vraiment aller à la rencontre de Dieu.
D’ailleurs tout est là, dans ce verbe vouloir ! A celui qui veut
marcher à la suite de Dieu, la volonté divine est révélée. Il n’y a pas d’autre
effort à faire, si ce n’est celui d’écouter Dieu. Déjà l’auteur du livre de la
Sagesse l’affirmait : Qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais
pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? Découvrir la volonté de Dieu n’est pas un
pouvoir de clerc ou de très bon croyant : c’est un don que Dieu fait à
celui ou celle qui marche à sa rencontre. C’est Dieu qui révèle à l’humanité ce
qu’il attend d’elle ; c’est Dieu qui fait comprendre à l’humanité comment
aller à sa rencontre ; c’est Dieu lui-même qui commence à se révéler à
ceux qui veulent sincèrement le trouver. En Jésus, il s’est même donné
entièrement, donnant en son Fils, sa Parole ultime sur le monde, sur l’humanité
et sur nos rapports avec lui. En écoutant Jésus, nous pouvons découvrir cette
volonté de Dieu pour nous, aujourd’hui.
Qui peut comprendre les
volontés du Seigneur ? Paul, dans l’épître à Philémon, nous fait comprendre
que cette volonté de Dieu pour nous se traduit dans une attitude quotidienne
entièrement pétrie d’Evangile. Le jeune Onésime, dont parle Paul dans sa
lettre, est un esclave qui appartient à Philémon. Nous ne savons pas trop s’il
est en fuite, ou s’il a été prêté à Paul. Toujours est-il que Paul l’a baptisé
et maintenant, il le renvoie à son maître. Dans l’extrait que nous avons
entendu, Paul invite son ami à recevoir son esclave comme s’il recevait Paul
lui-même. Il lui fait comprendre qu’à cause de son baptême, Onésime est
devenu pour lui, et pour chaque croyant,
un frère. Recevoir Onésime comme un frère, c’est entrer dans le projet de salut
de Dieu, c’est traduire en acte concret cette volonté de salut que le Christ
nous a offert. Accueillir cet esclave comme un frère, comme un homme désormais
libre, c’est manifester, par un acte public et social, ce que le baptême avait
déjà réalisé pour Onésime. En Christ, il est devenu un homme libre puisque, en
Christ, il n’y a plus, selon Paul lui-même « ni Juif ni Grecs, ni
esclave ni homme libre, ni homme ni femme, parce que tous, en Christ, nous ne
faisons qu’un ». Le Seigneur a manifesté sa volonté pour Onésime par
le baptême : il reste aux hommes à traduire cette volonté dans ce qui sera
le quotidien de cet esclave.
Qui peut comprendre les
volontés du Seigneur ? Saint Luc, dans la page d’Evangile entendue,
indique quelques pistes pour comprendre et approcher cette volonté de Dieu.
Elles sont au nombre de trois et se situent toutes en rapport avec Jésus. En
effet, faire la volonté de Dieu, c’est devenir vraiment disciples du Christ.
1ère piste : ne rien
préférer au Christ. Une terrible exigence, sans doute, mais qui nous
permettra de toujours accorder plus d’importance à sa Parole plutôt qu’à une
parole humaine. Père, mère, frère et sœur peuvent, quelques fois
intentionnellement, nous éloigner de ce que Dieu attend de nous. Mettre le
Christ au cœur de sa vie, c’est se garantir une totale liberté pour accomplir
en tout ce que Dieu attend de celui qui se fait son disciple. C’est vrai des
religieux, religieuses et prêtres ; c’est vrai aussi de ceux qui
s’engagent dans la vie matrimoniale. Le sacrement du mariage manifeste bien que
les nouveaux époux se reçoivent de Dieu, pour réaliser ensemble, par toute leur
vie commune, ce que Dieu attend d’eux.
2ème piste : accepter de
prendre sa croix. Voilà qui nous rappelle que la volonté de Dieu peut nous
entraîner sur des chemins difficiles. Non pas que Dieu aime que l’homme
souffre, mais simplement parce que faire le choix du Christ peut être mal reçu
par d’autres et entraîner des ruptures, voire des conflits. Il n’a jamais été
facile d’être chrétien : ni à l’origine – les martyrs sont là pour nous le
rappeler – ni aujourd’hui – où l’air du temps semble tellement loin des
pratiques évangéliques. Prendre sa croix, c’est refuser alors cet air du temps,
et tenir bon dans les épreuves qui nous sont imposés par d’autres, à cause de
notre foi.
(Oeuvre de Richard HOLTERBACH, Chapelle du Prado)
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