Être authentiquement croyant :
tel est le sens de l’enseignement de Jésus à ses disciples et aux foules qui l’entourent.
Cet enseignement se poursuit aujourd’hui avec un appel à une authentique
charité. Un mot qui peut sembler vieillot, ringard ou connoté plutôt
négativement. Pourtant, la
« Caritas » est la marque propre de l’homme qui a découvert le Dieu
de Jésus Christ, le Dieu qui s’est incarné, rendu présent au monde des hommes
par amour, pour délivrer l’humanité du péché et de la mort.
La parabole que Jésus raconte
n’est pas une parabole sur le bien et le mal ; elle n’oppose pas le
méchant riche au gentil Lazare. La parabole que Jésus nous offre vient nous
inviter à une attention à l’autre qui ne soit pas curiosité malsaine, mais bien
élan d’amour envers un frère qui pourrait avoir besoin de moi. Le riche n’est
pas condamné parce qu’il aurait refusé quelque chose à Lazare, ni parce qu’il
serait mauvais : il n’est pas si mauvais puisqu’il a le souci de ses frères.
Ce qui vaut la condamnation du riche c’est son inattention à celui qui est
devant sa porte. S’il s’était soucié de Lazare comme il se soucie ensuite, un
peu tard, de ses frères, il n’en serait
pas là. Le riche n’a pas voulu ou n’a pas su voir que Lazare avait besoin de
lui. Le riche est resté riche toute sa vie ; Lazare est resté pauvre toute
sa vie. L’indifférence de l’un vaut la vie à l’autre quand vient le moment de
la rencontre avec Dieu.
En entendant cette parabole,
faut-il s’étonner que le seul commandement que Jésus ait laissé à ses disciples
soit justement celui de l’attention à l’autre, celui de l’amour de
l’autre : aimez-vous les uns les
autres ? C’est la seule urgence qui vaille. C’est le seul critère qui
authentifie le véritable disciple : c’est
à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que le monde saura que vous
êtes mes amis. Nous ne pouvons donc pas faire l’impasse sur cette charité
qui nous tourne vers l’autre, vers celui qui m’est différent, mais non
indifférent, celui qui n’a pas la même chance que moi.
Cette parabole ne s’adresse pas à
des futurs croyants qui doivent encore se convertir : cette parabole
s’adresse à tous ceux qui veulent suivre ou qui suivent déjà Jésus. Nul n’est
dispensé de cette attention aux plus petits. Benoît XVI, dans son exhortation
apostolique Sacramentum caritatis donnée
en 2007, développe à juste titre dans sa dernière partie les implications
sociales de l’eucharistie. Il rappelle aux croyants que nous sommes que
l’Eucharistie que nous célébrons en ce dimanche nous ouvre à une nouveauté dans les rapports sociaux. En effet, l’union au Christ
est en même temps union avec tous ceux auxquels il se donne. Je ne peux avoir
le Christ pour moi tout seul ; je ne peux lui appartenir qu’en union avec
tous ceux qui sont devenus ou qui deviendront sien. Plus loin, Benoît XVI
poursuit : Nous ne pouvons rester
sans rien faire devant certains processus de mondialisation qui font souvent
grandir démesurément, au niveau mondial, l’écart entre riches et pauvres. Nous
devons dénoncer ceux qui dilapident les richesses de la terre, provoquant des
inégalités qui crient vers le ciel. … Le Seigneur Jésus, Pain de vie éternelle,
nous pousse à être attentifs aux situations de misère dans lesquelles se trouve
encore une grande partie de l’humanité : ce sont des situations dont la
cause implique souvent une responsabilité claire et inquiétante des hommes. … Benoît
XVI rappelle enfin le lien entre l’eucharistie et l’attention aux pauvres, au
cas où nous aurions oublié que le sacrement qui nous rassemble aujourd’hui est
un puissant moyen de conversion personnelle, et un puissant levier pour nous
engager dans ce combat contre la misère. Il écrit : la nourriture de la vérité nous pousse à dénoncer les situations
indignes de l’homme, dans lesquelles on meurt par manque de nourriture en
raison de l’injustice et de l’exploitation, et elle nous donne des forces et un
courage renouvelés pour travailler sans répit à l’édification de la
civilisation de l’amour. Depuis les origines, les chrétiens se sont préoccupés
de partager leurs biens et d’aider les pauvres. La quête qui est recueillie
dans les assemblées liturgiques en est un souvenir vivant, mais elle est aussi
une nécessité très actuelle. Les institutions ecclésiales de bienfaisance, en
particulier la Caritas à divers niveaux, réalisent le précieux service d’aider
les personnes dans le besoin, surtout les plus pauvres. Tirant leur inspiration
de l’Eucharistie, qui est le sacrement de la charité, elles en deviennent
l’expression concrète.
L’acte de communier devient un
acte quasi contestataire s’il est vécu comme ce moment qui m’engage à
transformer le monde et à ouvrir les yeux sur tous les Lazare qui frappent à ma
porte. La prière que Jésus nous a lui-même enseigné et que nous reprendrons
tout à l’heure, nous invite à faire tout
notre possible pour que cesse ou au moins diminue dans le monde le scandale de
la faim. Donne-nous aujourd’hui notre
pain de ce jour est à la fois une demande pour moi – que je reçoive de Dieu
ce qui m’est nécessaire – mais aussi une
prière pour les autres : que par moi, Dieu lui-même puisse donner à
d’autres ce pain nécessaire. A ceux qui pensent qu’un changement de pape vaut
un changement de doctrine, je rappelle juste que le pape François lui-même
rappelle depuis son élection que notre foi est révolutionnaire : elle doit permettre de changer le monde, de
le rendre meilleur pour tous ou elle ne sert à rien. Et aucun chrétien ne
saurait s’y soustraire !
Au moment où je prends congé de
vous, je voudrais vous inviter tous à approfondir le sens de la liturgie, à mieux
comprendre ce que l’Eglise vous demande lorsqu’elle vous invite à célébrer les
sacrements, et en particulier le sacrement de l’amour, l’Eucharistie.
Comprenant mieux ce que vous venez faire chaque dimanche, vous comprendrez mieux,
j’ose le croire, ce qui vous est demandé pour faire de notre monde un monde plus
juste et fraternel. Célébrant mieux votre foi, vous la vivrez mieux. Vivant
mieux votre foi, vous permettrez à d’autres de vivre mieux, de vivre plus humainement
et de découvrir ainsi par vous ce Dieu qui nous veut tous frères en son Christ.
Voilà assurément un beau projet. Que Dieu lui-même vous aide à le vivre. Amen.
Note pour les lecteurs du blog : je déménage seulement, mais le blog continue ! Le "Je prends congé de vous" est adressé aux membres des paroisses de mon lieu de résidence. Je n'ai toujours pas de paroisse territoriale. Je travaille depuis un an auprès de l'équipe diocésaine de l'Enseignement Catholique.
Grand Merci !
RépondreSupprimerjean- canada