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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







lundi 28 mai 2018

Très sainte Trinité B - 27 mai 2018

C'est le Seigneur qui est Dieu… il n'y en a pas d'autre.






Sache donc aujourd’hui, et médite cela en ton cœur : c’est le Seigneur qui est Dieu, là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre ; il n’y en a pas d’autre. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je suis frappé par cette ferme assurance à laquelle Moïse nous invite. En l’entendant, il ne saurait y avoir de place pour le doute. Cet homme-là doit avoir raison ! Et pourtant, c’était loin d’être simple d’oser pareille affirmation à l’époque. 

Nous sommes tous trop jeunes pour nous en souvenir, mais nos études en histoire nous l’ont appris : à l’époque où Moïse prononce ses paroles, les hommes sont loin d’être monothéistes, de ne croire qu’en un seul Dieu. L’expérience des hommes et des femmes qui suivent Moïse est marquée par les peuples environnants qui ont tous plusieurs dieux. Il est un des rares peuples, si ce n’est le seul, à oser dire que tous ces dieux ne sont rien, et que le seul vrai Dieu qui existe est celui qui les a sortis d’Egypte à bras fort. Fort d’un seul Dieu, ce peuple est sorti d’Egypte alors que s’y opposait Pharaon et tous les dieux d’Egypte. Dès lors que Dieu s’est tourné vers Moïse, plus personne ne pouvait maintenir ce peuple en esclavage, asservis à des dieux étrangers ; ou bien Pharaon acceptait de libérer les descendants de Jacob et de Joseph, ou bien il goûterait à la puissance du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Nous connaissons tous l’histoire ; Moïse lui-même ne cessera de la rappeler à son peuple lorsqu’il voudra s’éloigner de Dieu ou se donner un Dieu qu’il puisse voir de ses yeux en coulant un veau d’or. Il n’y a qu’un seul Dieu ; c’est celui qui a appelé Moïse, celui qui est à l’origine de toute vie, celui qui s’est choisi un peuple particulier. Fin de la discussion. 

C’est ce même Dieu que nous adorons et servons, nous qui célébrons aujourd’hui la fête de la Trinité, la véritable fête de Dieu. Nous ne faisons rien d’autre aujourd’hui que ce que faisait alors Moïse lorsqu’il affirmait : c’est le Seigneur qui est Dieu… il n’y en a pas d’autre. Sortant des fêtes de Pâques, nous redisons solennellement qu’il n’y a qu’un Dieu, Père, Fils et Esprit Saint. En proclamant la Trinité, nous ne proclamons pas trois dieux, mais le visage véritable de ce Dieu qui avait livré à Moïse son nom, jadis au buisson ardent. Nous disons qu’en Dieu se trouve la vie (il est notre Père et créateur), la croissance (en Jésus qui nous a révélé qui est Dieu, il nous fait grandir dans la vie divine) et l’être (par son Esprit, nous savons que nous sommes enfants de Dieu). Trois personnes, une seule nature, comme le chantera la préface de la fête. Ce Dieu unique en trois personnes vit en lui-même l’amour qu’il nous invite à vivre selon ce que Jean nous a enseigné à travers les deuxièmes lectures des dimanches du temps pascal. Non seulement Dieu est amour, mais il vit de cet amour en lui-même, le communique en Jésus, et nous y maintient par son Esprit. C’est le même Dieu qui nous aime, s’offre à nous et nous garde dans son amour. Nous pouvons être animés de la même certitude que Moïse et la proclamer : c’est le Seigneur qui est Dieu… il n’y en a pas d’autre !

Il n’en est pas moins vrai alors qu’aujourd’hui, comme au temps de Moïse, il ne manque pas d’hommes pour essayer de nous contredire, soit en relativisant cette vérité (puisque tous les hommes ne croient pas la même chose, autant admettre qu’il y a d’autres dieux), soit en niant Dieu tout simplement ; l’homme n’aurait pas besoin de quelqu’un qui l’invite à vivre plus grand, à voir plus haut. L’homme serait son propre maître. Comme diraient deux humoristes français, : y en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes… Non pas que Dieu se venge d’eux et de leur désir de s’émanciper, mais parce que la vie devient impossible pour l’homme sans le Dieu véritable. Que reste-t-il à l’homme quand il refuse la vie et l’amour qui lui viennent de Dieu ? Que reste-t-il à l’homme lorsque l’espérance, donnée par le Christ, d’une vie plus forte que la mort disparaît ? Que reste-t-il à l’homme lorsque l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi, tous dons de l’Esprit, lui sont refusés ? Relativiser Dieu ou nier Dieu, revient à enlever à l’homme ce qui fait la beauté et la force de sa vie. Non pas que l’homme ne saurait aimer, mais son amour même n’aurait plus de source véritable, forte et sûre pour garantir son amour ; son amour ne serait que limité, passager, livré aux méandres de sa propre existence. Dans un monde qui veut écarter Dieu, dans un monde qui se donne des dieux à hauteur d’homme, il nous faut réaffirmer avec force le Dieu de Jésus Christ, Père, Fils et Esprit Saint, le seul qui offre à l’homme sa vie, son amour, sa liberté. 

En célébrant la très sainte Trinité, nous célébrons la splendeur de Dieu et sa vérité. Nous confessons un seul Dieu, Père, Fils et Saint Esprit, et nous travaillons à la venue de son règne. Il ne s’agit pas pour nous d’imposer Dieu, mais de le faire aimer par une vie donnée à Dieu et aux hommes, éclairée par sa Parole, guidée par son Esprit. Plus nous aimerons Dieu, plus nous serons capables d’aimer les hommes. Plus nous aimerons les hommes, plus ils deviendront capables d’aimer Dieu à leur tour. Il n’est pas de cœur assez dur qui résiste infiniment à l’Amour. Aimer la Trinité, c’est aimer l’Amour, aimer le Christ qui nous l’offre et aimer l’Esprit qui nous y maintient, aujourd’hui et pour toujours. Amen.

 

 

dimanche 20 mai 2018

Pentecôte B - 20 mai 2018

Que faisons-nous de l'Esprit Saint ?








             Prendrons-nous l’Esprit Saint au sérieux un jour ? Je pose la question suite à un échange que nous avions hier à table entre prêtres. Elle ne remettait pas en cause l’importance de l’Esprit Saint, les prêtres ne feraient pas cela, n’est-ce pas ! Elle portait sur une question qui peut paraître bien secondaire, mais qui, pour moi, est bien révélatrice : la manière dont nous conservons le Saint Chrême. 

            Vous savez sans doute qu’au cours de la Semaine Sainte, chaque évêque préside dans son diocèse la messe chrismale. C’est la messe au cours de laquelle sont bénies l’huile des catéchumènes et l’huile des malades et est consacré, par l’imposition des mains de l’évêque et de tous les prêtres, le Saint Chrême. Consacré : comme le pain et le vin au cours de l’Eucharistie. Nous admettons tous que, lorsque le pain et le vin sont consacrés, ils deviennent le Corps et le Sang du Christ, le rendant ainsi réellement présent au milieu de son peuple. De même, disais-je hier, la consécration de l’huile sainte fait de ce mélange d’huile et de parfum le signe de l’Esprit Saint, le rendant réellement présent. Si tel est le cas, pourquoi alors conservons-nous le Pain eucharistique dans un tabernacle après la messe alors que le Saint Chrême est relégué à la sacristie, entre le rituel du baptême et la cruche qui contiendra l’eau pour le même sacrement ? L’Esprit Saint ne mérite-t-il pas autant de respect que le Christ ? Ne disons-nous pas quelque chose de l’importance que nous accordons à l’Esprit Saint par la manière dont nous le conservons, comme nous le faisons pour le Christ présent dans le Pain eucharistique ? 

            Le fait est que nous ne savons que faire de l’Esprit Saint ! Pourtant il est tout à fait essentiel à notre foi. La présence de l’Esprit Saint dans notre vie, c’est ce que nos frères orthodoxes appellent la divinisation. Nous devenons divins par sa présence ! Comme le Père Cantalamessa, prédicateur de la Maison Pontificale, le rappelait aux prêtres du diocèse ce jeudi, la Pentecôte n’est pas un appendice de la fête de Pâques : elle est l’accomplissement de la rédemption en nous. Le Christ a ouvert la porte du Salut par sa mort et sa résurrection ; il nous a obtenu le Salut. Mais l’Esprit nous y maintient, dans ce salut, en divinisant notre être. Comme le chante la séquence de la Pentecôte, il est l’hôte très doux de nos âmes ; sans [sa] puissance divine, il n’est rien en aucun homme, rien qui ne soit perverti. Il lave ce qui est souillé, baigne ce qui est aride, guérit ce qui est blessé, assouplit ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid, rend droit ce qui est faussé. Il donne mérite et vertu, il donne le salut final, il donne la joie éternelle. Je n’invente rien ; tout est dans la prière de l’Eglise. Paul, dans sa lettre aux Galates, ne dit pas autre chose quand il affirme que les fruits de l’Esprit sont amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. Il reconnaît tellement l’importance de l’Esprit Saint qu’il ne cesse d’inviter les Galates, et nous par la même occasion, à marcher sous la conduite de l’Esprit Saint. C’est parce que Paul s’était entièrement laissé saisir par l’Esprit, qu’il a pu dire, sans forfanterie, que ce n’est plus lui qui vivait, mais le Christ qui vivait en lui. 

            La fête de la Pentecôte nous invite à redonner à l’Esprit Saint toute son importance, toute sa place dans notre vie. La Pentecôte n’est pas qu’un moment de l’histoire des premières communautés chrétiennes. Elle a existé avant (pour les Juifs, elle était la fête du don de Loi) ; elle existe encore après ce moment historique. En fait, la Pentecôte n’a pas de fin. Aujourd’hui encore, nous vivons de ce don fait jadis aux Apôtres ; aujourd’hui encore, ce don se renouvelle ; aujourd’hui encore, l'Esprit construit l’Eglise et la guide. Aujourd’hui encore, il transforme nos vies pour que le Christ puisse établir sa demeure en nous, définitivement. Aujourd’hui encore, l’Esprit nous divinise ! Cela vaut non seulement une fête qui nous fait célébrer ce premier don, mais encore une attention quotidienne à cet Esprit qui fait de nous son Temple. De la même manière que nous expliquons aux enfants qu’ils doivent être des amis de Jésus, il nous faut leur expliquer que nous devons être des amis de l’Esprit Saint. Nous ne pouvons pas vivre notre foi sans lui ; nous ne pouvons pas vivre comme si cette onction reçue à notre baptême et à notre confirmation n’était qu’un geste de plus. Le geste de l’onction est le geste qui rend tout possible ; l’Esprit Saint est l’ami le plus intime, celui qui nous connaît, nous défend, nous rend fort. Comment imaginer pouvoir nous passer de lui ? 

            En cette fête de la Pentecôte, rendons grâce à Dieu, en Eglise, pour ce don inouï qu’il fait à son Eglise ; et dans notre vie, remercions chaque jour pour la présence de cet ami. Grâce à lui, nous comprenons les Ecritures ; grâce à lui, nous reconnaissons Jésus dans le Pain consacré ; grâce à lui, nous restons disciples, malgré nos limites, malgré nos faiblesses, malgré notre péché. Il mérite mieux qu’une petite place dans une armoire de sacristie. Donnons-lui ce que notre acte de foi proclame : même adoration et même gloire, avec le Père et le Fils. Amen.

(Ampoule d'huile sainte - Couronnement des rois d'Angleterre - Trésor de la Couronne britannique)
 

 

dimanche 13 mai 2018

07ème dimanche de Pâques B - 13 mai 2018

Dieu est amour !






Nous terminons aujourd’hui la méditation de la première lettre de Jean. Pendant cinq dimanches, nous avons découvert avec l’apôtre ce qu’était l’amour. Mesurons le chemin parcouru :

·       2ème dimanche de Pâques : Tel est l’amour de Dieu : garder ses commandements.

·       3ème dimanche de Pâques : En celui qui garde sa parole, l’amour de Dieu atteint vraiment sa perfection.

·       4ème dimanche de Pâques : Voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes.

·       5ème dimanche de Pâques : N’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité.

·       6ème dimanche de Pâques : Aimons-nous les uns les autres puisque l’amour vient de Dieu.  Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu. 

Au terme de notre parcours, voici l’affirmation centrale de la pensée de Jean : Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui. 

            Dieu est amour. En trois mots, Jean a tout dit, tout ce qui compte, la seule chose qui importe. Parce que Dieu est amour, un monde nouveau est possible. Parce que Dieu est amour, les hommes peuvent espérer vivre en paix. Parce que Dieu est amour, les hommes peuvent espérer vivre libres. Parce que Dieu est amour, les hommes peuvent apprendre à aimer vraiment. Au risque de passer pour un radoteur, je redis ici, à la suite de l’apôtre Jean, que tout ce qui n’est pas amour ne vient pas de Dieu. Toute parole qui n’est pas dite au nom de l’amour ne vient pas de Dieu. Tout acte qui n’est pas un acte d’amour ne peut être revendiqué au nom de Dieu. Toute religion qui n’entraîne pas ses croyants à l’amour n’est pas au service de Dieu. Quiconque agit dans le but de détruire, de faire du mal, de faire du tort à autrui n’agit pas au nom de Dieu. Quiconque affirmerait le contraire serait un menteur et un falsificateur, voire un blasphémateur. Comment puis-je me réclamer d’un Dieu dont le nom est Amour si je ne me laisse pas entraîner par cet amour ? Comment affirmer devant les hommes que le Dieu que je sers est amour si mon cœur penche du côté obscur de l’homme, si je cède au pire de ce qu’il y a en l’homme ?  Jean ne s’y trompe pas, et ne nous trompe pas, puisqu’il complète son affirmation par cette phrase : Celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui. Puisque l’amour est la marque de Dieu, l’amour est aussi la marque du croyant. Pas de foi en Dieu sans amour : non seulement sans amour pour Dieu, mais aussi sans amour des hommes, de tous les hommes ! L’amour de Dieu ne fait pas de différence entre les hommes ; l’amour de Dieu ne choisit pas quels hommes Dieu doit aimer ; l’amour de Dieu ne condamne pas les hommes sur leur manière de croire ; l’amour de Dieu ne condamne pas les hommes sur leurs opinions, pas même sur leurs opinions au sujet de Dieu. L’amour pour les hommes est tel qu’il espère toujours que même le pire d’entre les hommes se laisse aimer enfin et change de vie. L’amour de Dieu pour les hommes est contagieux au point que les hommes deviennent capables d’aimer comme lui les aime. 

            Dieu est amour. Si aujourd’hui le Mal a encore cours, si aujourd’hui notre monde n’est pas en paix, si aujourd’hui les hommes ne sont pas encore vraiment libres, ce n’est pas à cause de Dieu. C’est à cause des hommes qui ont rejeté Dieu, préférant une liberté tout humaine, toute factice, justifiant tous leurs excès et toutes leurs déviances. Rejeter Dieu, c’est rejeter l’amour véritable. Rejeter Dieu, c’est refuser la capacité d’aimer vraiment. Rejeter Dieu, c’est entraîner les hommes et le monde dans une insécurité permanente, parce que toujours suspendu soit au bon vouloir, soit à la folie de quelques-uns. La formule Dieu est amour n’est pas une médecine douce à verser sur les plaies d’un monde en folie ; c’est une réalité dont nous devons être convaincus pour pouvoir enfin en vivre. Chaque croyant doit commencer par évacuer le Mal de sa propre vie, refuser tout ce qui pourrait l’y conduire, en vivant humblement à la suite de Dieu qu’il sert. La paix et la liberté deviendront réalité pour tous quand chaque individu aura accepté que son voisin qu’il n’aime pas, qui est différent de lui, qui croit différemment que lui, a le droit à la paix, à la liberté, à la vie. Saint Jean est plus que clair à ce sujet : Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres. C’est bien une obligation ; nous ne saurions nous en dédouaner, sous aucun prétexte. 

Nous ne pourrons mener aucun des grands combats sociétaux qui s’annoncent si nous le faisons dans la haine. Nous ne changerons pas le cœur des hommes par la violence, ni par la violence des mots, ni par la violence des actes. Seul l’amour sauvera le monde ! Seul l’amour transformera le monde en profondeur ! Encore faut-il que nous acceptions d’accueillir cet amour dans notre vie. Laissons-nous donc aimer par Dieu et nous deviendrons capable d’aimer tous les hommes que Dieu met sur notre route puisqu’il nous a donné part à son Esprit. Appartenant à Dieu par notre baptême, vivant de son Esprit, aimons, aimons, aimons. Il n’y a rien de plus grand ; il n’y a rien de plus utile ; il n’y a rien de plus urgent. Amen.
 
(dessin de M. Leiterer)


mercredi 9 mai 2018

Ascension de notre Seigneur - 10 mai 2018

Jésus s'en va ; et nous, que devenons-nous ?






Nous laissons temporairement la lecture continue de la première lettre de Jean au bénéfice de cet extrait de la lettre de Paul aux Ephésiens que la liturgie affecte à cette fête de l’Ascension. En treize versets, Paul parle de nous, du contenu de la foi, du Christ, des dons qu’il nous a faits et de notre mission. Ce passage vaut la peine que nous nous y arrêtions un peu. 

Lorsque Paul écrit cette lettre, il est en prison à cause du Seigneur. Et son souci, ce n’est pas lui, sa vie ou son avenir. Son souci, c’est ce que vivent les chrétiens d’Ephèse. Il les exhorte à vivre selon l’enseignement du Seigneur : dans l’humilité, la douceur, la patience, l’amour, l’unité et la paix. Rien d’autre finalement que ce que Jean n’a cessé de nous répéter durant les cinq dimanches que nous avons vécu depuis Pâques. Il décline à sa manière l’art de vivre du croyant au Christ. Ce que Jean résumait dans : Aimez-vous les uns les autres, Paul le précise : l’amour des autres nous rend humbles, doux, patient ; il nous pousse à rechercher en toutes choses l’unité et à vivre en paix. Là où il y a l’amour, il ne saurait y avoir rien de Mal. Jean l’avait bien compris et l’Eglise à sa suite n’a cessé de nous le redire depuis Pâques : notre vie prend sa valeur dans l’amour. Rappelez-vous ce que nous disait Jean dimanche : celui qui aime connaît Dieu ; et qu’est-ce que connaître Dieu sinon être pleinement vivant ? 

Cet art de vivre, Paul l’appuie sur la foi. Les fidèles du Christ ne peuvent vivre que dans l’amour parce qu’ils sont appelés à ne former qu’un seul Corps vivant dans un seul Esprit. On ne partage pas le Christ, on ne sépare pas le Christ. Fidèles du Christ, nous sommes son Corps visible, nous vivons de son Esprit, cet Esprit qu’il a remis sur la croix afin que tout soit accompli. Nous ne formons qu’un corps parce qu’il n’y a qu’un seul Seigneur (le Christ), qu’une seule foi, qu’un seul baptême (qui nous unit au Christ et nous fait membre de son Corps), qu’un seul Dieu et Père de tous. Tout se tient, tout doit se tenir ou tout s’écroule. Et l’Histoire nous a montré ce que donnait la vie des hommes lorsque les chrétiens ne sont pas unis par la même charité, ni soucieux de l’unité et de la paix. Cela n’a jamais rien donné de bon. Ils se sont tous éloignés de Dieu, le revendiquant pour leur groupe contre les autres. Ne pas vivre cette unité dans la paix, c’est comme refuser l’œuvre du Christ, lui qui a donné sa vie pour tous les hommes.
 
Paul rappelle alors la grandeur de cette œuvre vécue en deux temps : il est d’abord descendu dans les régions inférieures de la terre, puis il est monté au-dessus de tous les cieux pour remplir l’univers. C’est ce mystère que nous célébrons en ce jour. Dieu, en Jésus, s’est abaissé pour nous élever avec le Christ auprès de lui. Dieu n’a pas sauvé l’homme de l’extérieur ; il s’est fait homme pour faire monter l’homme vers Dieu. Il a rendu l’homme capable de Dieu. L’Ascension est une déclinaison du mystère de Pâques. Dans la résurrection est contenu déjà ce retour vers le Père ; c’est un même mouvement. Et nous serons appelés à vivre nous aussi ce même mouvement lorsque nous serons appelés à vivre définitivement auprès de Dieu. C’est toujours la joie de Pâques qui se prolonge dans la fête de ce jour.  
 
Que le Christ retourne vers son Père, voilà qui semble plutôt bien donc. Mais nous, dans tout cela, que devenons-nous en attendant ? La réponse est donnée par Paul : Il a fait des dons aux hommes. Il ne nous laisse ni seuls, ni désorganisés. Il a tout donné pour que se construise le Corps du Christ : Apôtres, prophètes, évangélisateurs, pasteurs, enseignants. La parole du Christ n’est pas tue depuis qu’il est retourné vers son Père. Il a envoyé ses disciples en mission pour qu’ils soient ses témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Nous sommes faits témoins de celui qui est ressuscité des morts et retourné vers son Père. Par notre art de vivre souligné au début de l’extrait de la lettre aux Ephésiens, nous devons édifier ce Corps du Christ vivant. Il ne s’agit pas seulement de l’entretenir en essayant d’en perdre le moins possible, mais de le faire grandir. Il s’agit bien que tous les hommes, de toute la terre, reconnaissent en Jésus le Messie Sauveur, le Fils unique de Dieu venu sur terre pour sauver tous les hommes. Comme le dit si bien Paul, nous devons parvenir tous ensemble à l’unité dans la foi et la pleine connaissance du Fils de Dieu, à l’état de l’Homme parfait, à la stature du Christ dans sa plénitude. Nous devons grandir dans notre foi. Nous avons notre part à prendre dans l’œuvre du Christ pour qu’il soit tout en tous. Le retour du Christ dans la gloire de son Père marque le début de notre envoi en mission. La feuille de route nous est donnée, l’horizon est indiqué.

Le Christ retourne vers son Père et nous confie la terre qu’il a recréée dans sa mort et sa résurrection. Nous nous retrouvons dans la position d’Adam jadis au jardin de la Genèse : co-créateurs avec Dieu, responsables de son œuvre, responsables les uns des autres pour qu’ensemble nous parvenions là où Dieu nous attend, là où le Christ aujourd’hui nous précède. Apprenons des erreurs d’Adam, vivons de l’exemple du Christ ! Et préparons-nous à recevoir le don déjà promis, la force de l’Esprit Saint. Amen.

(Dessin de M. Leiterer)

dimanche 6 mai 2018

06ème dimanche de Pâques B - 06 mai 2018

Se laisser aimer pour aimer mieux.





A lire la première lettre de Jean, nous pouvons avoir l’impression d’une répétition sans fin autour du verbe aimer. Dimanche dernier déjà, il y avait une invitation pressente à aimer en acte et en vérité. Et voici que la liturgie de ce dimanche recommence notre lecture suivie sur ce même commandement : aimons-nous les uns les autres. N’aurait-il rien de plus à nous dire, Jean, dans son épître ? Ce serait lire les différents extraits proposés un peu trop vite, sans mesurer vraiment les progrès qu’ils nous font faire de dimanche en dimanche.

Il faudrait relire les différents extraits à la suite les uns des autres pour mesurer combien jean nous fait approfondir cette notion de l’amour. Petit à petit, il nous emmène plus loin, plus profond dans la compréhension de l’amour véritable. Nous avons découvert progressivement le lien entre la foi en Dieu et l’amour ; que cet amour que nous portons à Dieu devait se vérifier dans l’amour des frères ; que notre propension à pécher n’était pas un obstacle à l’amour que Dieu nous porte et que Jésus avait livré sa vie pour nous en libérer. Nous avons compris aussi que notre filiation divine n’était pas une récompense pour plus tard, mais notre réalité, dès aujourd’hui. Enfin, nous était rappelé l’urgence du devoir d’aimer : l’amour du prochain n’est pas une option, c’est un devoir impératif ; c’est la marque du disciple authentique. Voilà pour le chemin parcouru jusqu’à ce jour. Qu’est-ce que Jean pourrait alors nous dire de plus ?

Il nous dit d’abord que la source de notre amour n’est à chercher nulle part ailleurs qu’en Dieu : aimons-nous les uns les autres puisque l’amour vient de Dieu. L’origine de l’amour dont nous devons aimer, c’est Dieu seul. L’amour n’est donc pas un vague sentiment reposant sur des données sensibles (la beauté d’une personne, ses qualités ou que sais-je encore !) ; l’amour que nous portons aux autres est une prolongation de l’amour que Dieu nous porte. Et en ce sens, il est un amour solide ; en ce sens, il est un amour pour toujours ; en ce sens, il est un amour qui ne dépend ni de mon humeur, ni des expériences bonnes ou mauvaises que j’ai pu avoir avec les autres. Quand bien même j’aurais l’impression qu’aucun humain ne m’aime, je serais toujours invité à aimer, puisque l’amour vient de Dieu. Il dépasse largement toutes les limites que je pourrais mettre à mon amour, parce qu’il m’invite toujours à poser sur les autres le regard même de Dieu. Portant sur le monde le regard que Dieu lui-même porte, je ne peux qu’aimer ce monde malgré ses faiblesses, malgré ses zones d’ombre, malgré ses fragilités. Cet amour qui vient de Dieu est un amour inconditionnel. Dieu n’a pas attendu que les hommes soient parfaits pour les aimer ; mais peut-être les aime-t-ils pour qu’ils deviennent parfaits comme lui est parfait. Peut-être nous aime-t-il pour que nous aimions comme lui aime et qu’enfin notre monde vive en paix, qu’enfin les hommes partagent une même fraternité.

Jean nous révèle ensuite qu’aimer, c’est connaître Dieu. Celui qui aime est né de Dieu et connaît Dieu. Nous avions déjà appris au quatrième dimanche de Pâques que par amour, Dieu faisait de nous ses enfants. Nous apprenons aujourd’hui qu’en aimant à notre tour, nous avons la certitude de ne pas nous tromper sur Dieu : nous le connaissons vraiment. Et il insiste, par la négative, pour être bien sûr que nous comprenions : Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour. Si l’amour que nous portons aux autres est la marque du disciple (5ème dimanche de Pâques), l’amour est aussi la marque que nous connaissons Dieu véritablement. Quand nous faisons les choses par amour, nous ne nous trompons pas sur Dieu, nous ne nous trompons pas sur ce que Dieu attend de nous. Cela signifie aussi que nous ne pouvons pas faire le Mal et le revendiquer au nom de Dieu. Si l’amour vient de Dieu, si l’amour est le signe que je connais Dieu, alors je ne peux pas, en même temps, revendiquer que je fais le Mal au nom de Dieu. Ce n’est pas le projet de Dieu que les hommes fassent du Mal ; ce n’est pas le projet de Dieu que les hommes se fassent la guerre ; ce n’est pas le projet de Dieu que ses fidèles exterminent ceux qui ne croient pas, ni ceux qui croient autrement. Le projet de Dieu, c’est que nous nous aimions les uns les autres puisque l’amour vient de Dieu, et que l’amour est le signe que nous connaissons Dieu. Ne rejetons pas sur Dieu notre capacité à nous laisser entraîner au Mal. Ne répandons pas dans l’esprit des gens une fausse image de Dieu. Dieu est amour, ne cesse de nous redire Jean.

Enfin, Jean nous révèle en ce dimanche en quoi consiste l’amour véritable. il répond à la grande question de beaucoup de nos contemporains : c’est quoi aimer ? Et la réponse est surprenante : Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés, et il a envoyé son fils en sacrifice de pardon pour nos péchés. Voilà la réponse de Jean à la grande question des hommes. Aimer, c’est se laisser aimer de Dieu, c’est accueillir cet amour premier de Dieu pour nous, et accepter d’être pardonné par le sacrifice du fils unique. L’amour, ce n’est pas quelque chose à faire ; l’amour, c’est quelque chose à accueillir. Pour aimer les autres, accepte que Dieu t’aime le premier et te pardonne tes péchés. Puisque l’amour vient de Dieu, il est un don offert avant même que nous ne choisissions d’aimer Dieu. Avant même que nous n’ayons seulement l’idée que nous pourrions aimer Dieu, Dieu nous aime déjà et nous a déjà pardonné le Mal que nous pouvions faire avant de nous sentir aimé. Laisse-toi aimer, et tu sauras aimer. Laisse-toi aimer, gratuitement, totalement. Laisse Dieu être ton Maître en amour et tu dépasseras le sentimentalisme qui ne te fait aimer que partiellement, imparfaitement. Laisse-toi aimer de Dieu pour que son amour puisse déborder de toi e toucher tes frères à travers toi. Laisse-toi aimer de Dieu ; ne sois pas un obstacle à son amour.

Croyez-vous toujours que nous tournons en rond en lisant l’épître de Jean ? Jean est le disciple que Jésus aimait ; il a fait l’expérience de cet amour inconditionnel. Il sait ce que cet amour a changé dans sa vie et il nous transmet son expérience afin qu’à notre tour, nous nous laissions aimer pour mieux aimer en retour. Accueillons son enseignement et nous aimerons mieux parce que nous aurons appris de lui à mieux nous laisser aimer de Dieu. Amen.

 
(Dessin de M. Leiterer)