Notre Dieu est le Dieu qui nous invite à la joie véritable.
Soyez toujours
dans la joie ! Cette invitation de Paul aux chrétiens de
Thessalonique prend une coloration toute particulière, me semble-t-il, en cette
année où nos vies sont bouleversées par la pandémie qui met nos vies entre
parenthèses depuis neuf mois déjà et sans doute encore pour quelques temps. Les
recommandations faites pour les fêtes de Noël, fêtes heureuses par essence, contrarient
cet appel à la joie, du moins la restreignent aux quelques heureux que nous
aurons le droit d’inviter. La déprime et l’angoisse grandissante qui gagnent une
part non négligeable de la population ne favorisent guère ce sentiment de joie
profonde. Bien au contraire !
Pourtant, nous devons plus que jamais faire entendre cet appel. Il est fondamental, parce qu’il est l’appel de Dieu adressé à toute l’humanité. La Bonne Nouvelle qui est au cœur de notre foi est une Nouvelle heureuse, une Nouvelle qui rend la joie au peuple qui marchait dans les ténèbres. Quand Dieu vient à la rencontre de l’homme, ce n’est pas pour être un embêtement de plus. Quand Dieu vient à la rencontre de l’homme, c’est pour le conduire à cette joie que nul ne pourra lui enlever. La joie de Dieu n’est ni une mièvrerie, ni un peu d’eau sucrée pour faire passer la potion amère de nos vies atrophiées. Non, la joie de Dieu pour nous est la joie véritable, celle qui fait exulter le psalmiste. L’origine de cette joie, c’est la reconnaissance de tout ce que Dieu a fait et ne cesse de faire pour l’homme. Le Magnificat, dont nous avons chanté un extrait après la première lecture, est un bel exemple de cette joie qui prend aux tripes et qui jaillit comme un cri de bonheur à la face du monde. Dans son cantique, Marie n’a rien inventé ; elle se situe simplement mais réellement, dans l’expérience millénaire de son peuple, avec une conscience aigüe que c’est Dieu qui mène la barque, Dieu qui veille sur chacun, en particulier les plus petits, les plus pauvres. La Bonne Nouvelle du Salut, c’est la Justice restaurée, c’est l’homme, tout homme, rendu à sa dignité.
En ces jours difficiles que nous vivons, c’est toujours de cette même joie que nous devons témoigner. Pour la partager, il faut d’abord peut-être en être habité. La Bonne Nouvelle de Jésus Christ venu dans le monde pour notre salut, est-elle une vraie Bonne Nouvelle pour nous ? Nous ouvre-t-elle à cette joie, même en ce temps particulier de restrictions sociales ? La prudence dont nous devons faire preuve pour lutter contre le virus et éviter sa propagation n’a rien à voir avec la peur panique qui a envahi certains de nos contemporains ; la prudence n’a rien à voir non plus avec le fait de s’isoler, de se couper du monde. Prendre de la distance, ce n’est pas couper les ponts. Chrétiens, héritiers de cette joie libératrice qu’annonçait déjà le prophète Isaïe, nous ne pouvons nous laisser aller à la désespérance devant l’incertitude de notre époque. Plus que jamais, nous devons demander à Dieu la grâce de tenir fermes dans la foi, la grâce de savoir reconnaître encore les signes de sa venue et de sa présence au milieu de nous, la grâce d’en témoigner résolument et joyeusement. Plus que jamais, nous devons être les relais de cette présence auprès des plus fragiles pour qui ce Noël risque d’être encore plus triste et plus difficile que les précédents.
Nous pouvons prendre exemple sur le prophète Isaïe. En l’écoutant parler de la mission qui lui est confiée en un temps difficile pour son peuple, nous pouvons ressentir chez lui une joie contagieuse. Ce qu’il doit annoncer le rend lui-même profondément heureux d’abord : je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. La joie de Dieu, ce n’est pas quelques bons mots ; la joie de Dieu à transmettre, c’est une vie transformée : les cœurs brisés seront guéris, les captifs délivrés, les prisonniers libérés, une année de bienfait accordée. N’est-ce pas ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui ? Nous entendre dire que notre vie sera transformée pour quelque chose de mieux ? La joie que Dieu nous invite à vivre, a quelque chose à voir avec la confiance que nous plaçons en lui. Si nous ne croyons plus qu’il puisse toujours quelque chose pour nous, alors le Salut annoncé n’est plus une Bonne Nouvelle, et la joie à venir loin d’être une réalité. Comme Isaïe, nous avons été saisis par l’Esprit de Dieu. Cet Esprit fait de nous des prêtres, des prophètes et des rois. En célébrant notre foi, en proclamant la Bonne Nouvelle du Salut, en la vivant au quotidien, nous accueillerons toujours plus cette joie de Dieu et nous en serons les témoins auprès de tous.
En cette période particulière de notre vie, soyons pour nos proches, en famille, au travail, dans notre quartier, de ceux qui rayonnent de cette joie de Dieu. Soyons les témoins et les relais de la Bonne Nouvelle du Salut que Dieu réalise en son Fils Jésus Christ. Il a fait des merveilles pour nous ; il en fera encore. Isaïe, Marie et Jean le Baptiste en ont été les témoins pour leur époque ; soyons-en les témoins authentiques pour aujourd’hui. Amen.
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