Comment accéder à cette vie plus belle ?
Nous sommes presque au bout du chemin de Pâques. Dimanche prochain, nous entrerons dans la Grande Semaine, la Semaine Sainte qui nous conduira aux fêtes pascales. Cette vie plus belle que Dieu nous promet deviendra notre réalité. Pour achever notre préparation, la liturgie de la Parole nous révèle comment y accéder. Trois pistes nous sont données.
Commençons par Jérémie. Dans ce qui est sans doute mon texte préféré de la Première Alliance, le prophète annonce une nouvelle alliance, plus solide que toutes les alliances anciennes. Jérémie fait partie de ces prophètes qui ont averti du danger de rester éloigné de la Loi de Dieu. Il a pressenti le drame de l’exil ; il a cherché à l’éviter, en vain. C’est quand tout est perdu qu’il a cette extraordinaire parole d’espérance : Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où je conclurai avec la maison d’Israël et avec la maison de Juda une alliance nouvelle. Cette terrible épreuve de l’exil ne sera pas le dernier mot de l’histoire du peuple choisi par Dieu. si l’offense doit être réparée, les conditions de cette réparation ne seront pas l’extermination totale du peuple. Quelque chose de neuf est déjà annoncé. L’espérance n’est pas morte, et ne mourra pas en terre étrangère. Une vie plus belle est déjà annoncée. Et sa réalisation future doit donner courage à ceux qui connaissent l’exil. Cette espérance, c’est une alliance nouvelle donc. Plus forte que l’alliance avec Moïse parce que plus intérieure. L’alliance avec Moïse était inscrite sur des tables de pierre ; la nouvelle alliance sera inscrite au fond des cœurs. Elle aura un caractère intime, personnelle. Chacun aura directement accès à cette Loi de Dieu puisqu’il la portera en lui. Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Il n’y aura plus à consulter une table de pierre pour connaître la Loi de Dieu ; chacun la portera en lui. Il n’y aura plus besoin d’apprendre à connaître Dieu ; il fera partie de la vie de chaque membre du peuple élu : Tous me connaîtront, des plus petits jusqu’aux plus grands. C’est le Nouveau Testament inscrit dans le Premier Testament. Comment un chrétien ne peut-il pas lire ici ce que le Christ réalisera dans sa propre vie, à savoir Dieu et l’homme parfaitement uni, parfaitement intime ? Comment un chrétien ne peut-il pas entendre en ces mots ce à quoi il est appelé depuis son baptême, à savoir devenir un autre Christ, un autre homme parfaitement accordé à Dieu ? Comment accéder à cette vie plus belle ? Deviens un autre Christ, accueille en toi Dieu lui-même qui veut établir sa demeure en ton cœur.
Jésus, dans son enseignement rapporté par l’évangéliste Jean, nous indique une autre piste pour parvenir à cette vie plus belle : accepter de mourir. Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruits. Si ces mots s’adresse d’abord à Jésus et à son œuvre à venir (le don de sa vie sur la croix), comment ne pas les comprendre aussi pour nous ? Si nous n’acceptons pas de livrer notre vie pour nos frères, nous resterons seul. Si nous nous replions sur nous-mêmes, nous resterons seul. Si nous ne suivons pas la voie du Christ, nous ne parviendrons pas à cette vie plus belle. Comme Jésus accepte de livrer sa vie pour notre vie, nous devons nous-aussi accepter de livrer notre vie pour nos frères et sœurs en humanité. Il n’est pas besoin de dresser ici la liste de toutes ces morts personnelles auxquelles il nous faut consentir. Chacun trouvera aisément ce qu’il doit laisser de sa vie pour devenir serviteur de ses frères. Chacun sait ce qu’il devrait changer dans sa vie pour que la vie des autres soit plus belle, et partant de là, la sienne aussi. Renoncer à quelque chose pour le bien de tous, ce n’est pas perdre quelque chose, mais c’est gagner ensemble. Qui aime sa vie la perdra ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle.
La dernière piste nous est donnée par l’auteur de la Lettre aux Hébreux. Dans sa grande méditation de l’œuvre du Christ, il nous montre bien que la deuxième piste que nous venons de découvrir est le chemin suivi par Jésus : Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel. Mais vous aurez noté au passage ce détail qui nous révèle la troisième piste : conduit à sa perfection, et non conduit à la perfection. Une lettre qui change tout pour nous. Nous ne devons pas atteindre une perfection générale, la même pour tous, mais notre propre perfection, celle dont Dieu nous rend capable. Ceci nous empêche d’une part de prendre la place du Christ, bien que devenu autre Christ par le baptême ; et d’autre part de courir après une perfection qui serait la même pour tous, certains ayant plus de chance au départ que d’autres. Chacun doit atteindre sa propre perfection, là où Dieu l’attend ! N’est-ce pas une perspective libératrice ? Je dois vivre ma vie, et non celle de mon voisin, ou pire, celle de Jésus ! Mais dans la vie qui est la mienne, je dois accueillir au mieux la vie et l’enseignement de Jésus pour qu’Il puisse transformer ma vie et la mener à sa perfection.
Accueillir Dieu au plus intime de nous, nous
détacher de notre vie et atteindre notre propre perfection : voici trois
pistes pour vivre cette vie plus belle. A moins qu’elles ne forment trois
étapes d’un unique cheminement. C’est parce que nous accueillons Dieu au plus
intime de notre vie que nous pouvons nous détacher d’elle et atteindre ainsi
notre propre perfection. Tout ne serait que grâce ; tout n’est que don
offert par Dieu à celui qui lui ouvre sa vie. La vie plus belle, c’est la vie
sous le regard de Dieu, en permanence. Amen.
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