De l'intérêt de la confiance.
Le diocèse de Strasbourg, au service
duquel je suis entré il y a 33 ans maintenant, a essuyé ces derniers jours,
dans une certaine presse qui n’a de catholique ou de chrétien que le nom, une
tempête qu’il ne méritait pas. Je suis personnellement en colère contre ceux
qui n’ont que le courage des lâches, se réfugiant dans l’anonymat le plus
complet, et la force des mots manipulés (‘Les prêtres d’Alsace’ titraient ces
journaux). A lire ces organes de presse, le diocèse est à feu et à sang, ce
qui, je vous l’assure, n’est pas vrai. Cet épisode de la vie diocésaine se fixe
dans ma mémoire quand je lis l’évangile de ce dimanche et particulièrement cette
parole de Jésus : Celui qui est digne de confiance dans la moindre
chose est digne de confiance aussi dans une grande. Celui qui est malhonnête
dans la moindre chose est malhonnête aussi dans une grande.
C’est un verset qui interpelle, forcément. Suis-je digne de confiance ? Qu’est-ce qui me rend digne de confiance ? Je ne suis pas plus saint que les autres ; je ne suis pas plus pieux que les autres ; je ne suis pas meilleur que les autres. J’essaie de mener le plus honnêtement possible ma vie et d’effectuer mon travail au meilleur de mes capacités. Parfois j’y réussis ; parfois je me trompe. Rien de dramatique, je crois. Il y a une chose en laquelle je crois plus que tout, c’est la loyauté : vis-à-vis de la famille, de mes amis, de mes collaborateurs, de mon Eglise. Selon les personnes et les situations, ce n’est pas toujours facile, mais je m’y tiens. C’en est devenu un critère important au moment où je décide d’accorder ou non ma confiance à quelqu’un. Et pas seulement parce que je m’interroge si la personne qui attend ma confiance sera loyale envers moi, mais parce que je me demande d’abord si je peux être loyal avec elle. En la matière, il faut toujours commencer par soi, me semble-t-il ; cela évite de se poser en donneur de leçon et en juge. Il en va de même pour la confiance : se demander si les autres peuvent me faire confiance est aussi important que de savoir si je peux leur faire confiance.
Remarquez alors la sagesse de la parole du Christ : Celui qui est digne de confiance dans la moindre chose est digne de confiance aussi dans une grande. Elle me rappelle que la confiance se mérite. Et si elle se mérite, elle peut s’éprouver. C’est comme si Jésus nous disait : ne fonce pas tête baissée ! Prends le temps de connaître, de comprendre, et pourquoi pas de tester avec une chose simple. Remarquez aussi comment Jésus prend aussi en compte l’opposé, la malhonnêteté. En bien comme en mal, la petite chose sans importance, sera pareillement intéressante à évaluer. L’attitude dans la petite chose déterminera l’attitude dans la grande, parce que ce sera la même !
Faisons un pas de plus encore et envisageons notre rapport à Dieu. Si nous croyons en Dieu (si nous avons foi en lui), nous avons nécessairement confiance en lui. Foi et confiance ont la même racine. La question de savoir si je peux faire confiance à Dieu ne se pose pas alors. Mais Dieu peut-il avoir confiance en moi ? Peut-il croire en moi ? Je suis sûr que Dieu me fait confiance ; c’est dans sa nature. Il ne peut pas faire autrement que de croire en moi, en nous. La question est donc davantage de savoir si je mérite cette confiance que Dieu place en moi dès avant ma naissance. Si Dieu n’avait pas foi en l’humanité, il ne l’aurait pas placé au sommet de sa création ; il n’aurait pas fait de nous ses enfants ! Deux pistes pour accepter l’idée que nous sommes dignes de la confiance que Dieu place en nous. La première consiste à nous abandonner à lui, à garder envers lui un rapport véritablement filial. En acceptant d’être ce qu’il fait de nous par le baptême (c'est-à-dire ses enfants), nous accueillons la confiance qu’il a placé en nous ; en vivant ce baptême qui fait de nous des fils et des filles de Dieu, nous nous montrons dignes de sa confiance. La deuxième piste, c’est d’approfondir toujours plus notre humanité ; elle est le seul chemin que nous ayons pour parvenir au salut que le Christ nous offre. C’est en étant pleinement humain à la manière du Christ, que nous deviendrons pleinement saints à la manière du Christ. En lui, humanité et divinité se conjuguent ; il est parfaitement l’un et l’autre. En devenant parfaitement humain, nous deviendrons parfaitement saints, parce que la présence du Christ en notre vie viendra enrichir notre humanité de sa sainteté. Nous serons authentiquement d’autres Christ ; nous lui serons semblables, éternellement.
Lorsque nous accueillons la confiance que Dieu place en nous et que nous cherchons à vivre de cette confiance, alors celui croise ma route devient un frère ; alors nos différences deviennent des richesses ; alors fraternité et paix ne sont pas juste des valeurs proclamées, mais des réalités vécues. Assurément, cela vaut la peine d’accueillir la confiance que Dieu met en nous et de nous en montrer capables. C’est tout notre monde qui change parce qu’il se fait confiance à la manière dont Dieu lui fait confiance. Amen.
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