Vanité des vanités, tout est vanité : vraiment ?
Vanité des vanités, tout est
vanité ! Il y a quelque chose de terrifiant dans ce cri de Qohélet,
quelque chose de déprimant aussi. Comme si, avec lui, la vie n’avait aucun sens ;
comme si tout ce que nous faisons, tout ce que nous vivons, n’était que du
vent. Si tel est le cas, nous pourrions nous interroger légitimement : à
quoi bon vivre alors ? Si tout est vain, si rien ne sert, pourquoi se
fatiguer ?
Vous l’aurez compris, même si l’affirmation
de Qohélet est une parole biblique, nous avons le droit de ne pas être d’accord
avec elle. Nous avons le droit de ne pas perdre notre optimisme et de croire
que notre vie, avec ses hauts et ses bas, avec ses joies et ses misères, avec
ses hauts-faits et ses péchés, non seulement vaut la peine d’être vécue, mais
qu’elle a du sens et qu’elle a du prix. Il n’y a rien de plus anti-religieux
que le pessimisme. Cela va à l’encontre même de la foi, c'est-à-dire cette
confiance inébranlable que notre vie est dans les mains de Dieu, parce qu’elle
a été voulue par lui et qu’elle a son sens en lui, avec lui. En ce sens, aucune
vie n’est vaine ! Nous avons tous une place à tenir, un rôle à jouer dans
ce grand projet de Dieu qui veut le salut pour l’humanité. Et si la tâche peut
sembler par moment immense, voire irréaliste, elle n’en est pas moins à conduire
à son terme.
Je dois reconnaître, cependant, que
Qohélet n’a pas tout-à-fait tort, pas plus que Jésus dans l’évangile. La question
de fond qui est posée, c’est celle du pourquoi de nos actions, de nos
décisions. Si ma vie ne me tourne que vers moi, vers ce que je peux en tirer
pour moi et moi seul, alors oui, je crains que Qohélet et Jésus aient raison.
Si j’amasse pour moi, pour être le plus riche, c’est idiot. Un jour, je
mourrai, et que deviendra ce que j’ai amassé. Comme le dit Qohélet, il doit
laisser son bien à quelqu’un qui ne s’est donné aucune peine. Ou comme le
dit Jésus : Cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu
auras accumulé, qui l’aura ? Mais si ma vie est tournée vers les
autres, vers le bien commun, ce que je fais, ce que je vis prend du sens, un
sens qui me dépasse, un sens qui me survivra. Si je suis tourné vers les
autres, ma vie est plus grande que moi. Je n’amasse pas pour moi, je ne vis pas
pour moi, je ne produis pas pour moi, mais pour tous.
Nous pouvons encore faire un pas de
plus grâce à Paul qui nous invite à penser aux réalités d’en haut, non à
celles de la terre. Il nous invite à voir plus loin que le bout de notre
nez, plus haut encore que le seul bien commun. Il nous invite à ne pas oublier
qu’il y a un sens à tout cela et que ce sens vient de Dieu, et de la
résurrection du Christ. Parce que le Christ a donné sa vie pour nous, nous
devons nous attacher à vivre selon son enseignement, pas juste pour être gentil
avec les autres, mais parce que quelque chose de plus grand nous attend dans le
Royaume : la gloire du Ressuscité à partager pour toujours. Le sens de
notre vie n'est pas ici-bas, dans une vie seulement terrestre, qui a commencé sans
que nous y soyons pour quelque chose et se terminera à un moment que nous ne
définissons pas, en règle générale. Le croyant en Dieu est appelé à vivre les
pieds solidement plantés dans cette terre, parce que c’est là qu’il vit et doit
agir, mais avec la tête définitivement tournée vers le ciel, en étant attentif
à ce que Dieu attend de lui. Nous ne venons pas à la vie terrestre pour mourir ;
nous venons à la vie terrestre pour vivre avec Dieu et en Dieu pour toute
éternité. Ce n’est pas une promesse vaine, c’est notre espérance, c’est notre
foi, et notre charité nous y mènera.
A ceux qui veulent donner tort à
Qohélet, et réaffirmer que notre vie n’est ni vaine ni insensée, il est proposé
de vivre dès maintenant et pour toujours avec Dieu, à la suite du Christ, mort
et ressuscité pour notre vie. En apprenant de lui à vivre pour les autres, à
donner notre vie pour les autres, nous trouverons sens et dignité, nous recevrons
récompense et gloire. Il n’est jamais vaniteux de vouloir servir les autres ;
il n’est jamais vaniteux de vouloir pour les autres le meilleur ; il n’est
jamais vaniteux de donner le meilleur de soi au service de tous. Vanité des
vanités, tout est vanité : oui, si je ne vis que pour moi ; mais
jamais si je vis pour Dieu et pour les autres. Amen.
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