Sois humble, sois libre !
Une lecture trop rapide de l’évangile pourrait nous entraîner sur une voie moralisante aujourd’hui. Les paraboles entendues ont un goût de : « fais pas ci, fais pas ça ! » Essayons donc de dépasser cette approche et entrons dans le cœur de ces histoires. Pour mieux les comprendre, ouvrons l’évangile de Luc pour bien resituer le passage que nous avons entendu. Il commence par une guérison le jour du sabbat, après cette question de Jésus : « Est-il permis de guérir ou non, le jour du sabbat ? » Une manière d’affirmer que ce qui compte, c’est l’homme et le bien qu’il peut faire. Le passage que nous avons entendu se poursuit par cette exclamation d’un des convives : « Heureux celui qui prendra son repas dans le Royaume de Dieu ! » Et une nouvelle parabole sur les invités au festin qui s’excusent de ne pouvoir venir et qui sont remplacés par ceux qui traînent dans les rues. Ainsi resituées, nos paraboles prennent leur vrai sens : elles ne sont pas une leçon de moral mais un avertissement adressé à ceux qui veulent entrer dans le Royaume. Elles sont un appel à vivre une plus grande liberté.
Est vraiment libre celui qui est humble ! C’est ce que nous enseigne la première parabole. Elle est pleine de bon sens. Qui d’entre nous aimerait se faire remettre à sa place publiquement lors d’un dîner s’il a pris une place qui n’est pas la sienne ? Imaginez-vous un instant la honte de celui qui s’entendrait dire : « Laisse ta place, elle n’est pas pour toi ! » Pour éviter ce genre de désagrément, Jésus invite à l’humilité. Ne te sur-estime pas ! Ne sous-estime pas non plus ceux qui sont invités ! Ne cherche pas de manière obsessionnelle la première place ; ainsi tu seras honoré lorsque tu seras invité à t’approcher des places d’honneur. Ce qui est vrai de nos repas humains, l’est aussi du repas que Dieu nous prépare. Car c’est bien dans cette perspective que Jésus parle aujourd’hui. Il prend l’exemple de nos coutumes humaines pour nous rappeler que nous sommes invités au repas de l’amour que Dieu donnera lorsque nous lui serons parfaitement unis. Ce qui comptera, ce ne sera pas forcément d’y avoir la première place, d’être celui qui sera tout devant. Ce qui comptera, ce sera simplement d’y participer. La parabole de dimanche dernier nous le disait à sa manière. Le meilleur moyen d’y participer, est de savoir quelle est sa vraie place, de s’y préparer et de tenir cette place dès maintenant. L’invitation à l’humilité adressée et par la première lecture et par l’évangile, n’est pas une invitation à se mépriser. Etre humble ne signifie nullement se rabaisser ! Etre humble, c’est savoir quelle est ma place face à Dieu, savoir et accepter que je ne suis pas Dieu, que je suis créé par lui et écouter sa Parole de vie.
Est vraiment libre celui qui sait s’ouvrir aux autres, celui qui ne se laisse pas enfermer dans des cercles de relations trop étroits ! C’est ce que nous rappelle la deuxième parabole. Lorsque tu invites, n’invite pas seulement ceux qui te ressemblent, ceux qui peuvent faire la même chose pour toi. Invite aussi gratuitement ! Alors toi aussi, tu seras reçu gratuitement dans le Royaume ! Si nous n’invitons que ceux que nous estimons nos égaux, comment pourrions-nous être invités par Dieu ? Aurions-nous la prétention de lui être égal, nous qui sommes pécheurs ? Montre-toi libre dans tes choix, dans tes engagements ; fais des choses gratuitement, sans que cela te rapporte argent, estime ou gloire. Si tu sais te montrer généreux envers les autres, Dieu pourra se montrer généreux envers toi ! Heureux seras-tu alors, car ta générosité provoquera la générosité de Dieu et tu seras reçu à son repas !
Loin de nous présenter des règles morales, Jésus nous indique la route à suivre pour parvenir au repas que Dieu nous prépare. Il nous précise en quoi consiste cette porte étroite qu’il nous invitait à franchir la semaine passée. Sois humble, sois libre : ainsi aucune porte ne te paraîtra trop étroite ! Sois humble, sois libre : ainsi aucune place ne te semblera dévalorisante ! Sois humble, sois libre, et tu connaîtras la joie de participer au repas des noces de l’Agneau ! Heureux ceux qui y sont invités ! AMEN.
(Dessin : Editions CRER, 2005 - B. Debelle)
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