De quoi nous parle-t-on dans cette parabole ?
Mais de quoi nous parle-t-on au juste dans cette parabole ? A lire trop vite, à croire que nous avons déjà entendu, nous risquons fort de passer à côté du message de la parabole de Jésus et surtout, plus grave, de croire qu’elle n’est pas pour nous.
Alors de quoi nous parle-t-on au juste ? Est-ce une parabole contre les riches qui profitent pleinement de leur argent, même honnêtement gagné, et qui font la fête alors que d’autres souffrent ? Elles ne seraient donc pas pour nous : nous ne sommes pas franchement riches, enfin toujours un peu plus pauvre que le voisin que nous envions tant. Et puis, nous ne faisons pas la fête tous les jours ; nous sommes des gens sérieux, nous !
La parabole de Jésus ne nous parle pas du riche pour condamner sa conduite, ni sa richesse. Jésus ne dit pas que les fêtes qu’il organise, c’est mal. Il n’est même pas dit que cet homme est malhonnête. Tout ce qu’on sait de lui, tient en deux phrases : il y avait un homme riche, qui portait des vêtements de luxe et faisait chaque jour des festins somptueux. Le riche mourut et on l’enterra. C’est peu de choses, reconnaissons-le ; nous ne connaissons même pas son nom. Une manière subtile de nous dire, qu’il peut avoir notre nom. Cet homme-là, ce pourrait être toi !
Par contre, si nous ne savons pas grand-chose de lui de son vivant, nous découvrons pleins de détails après sa mort : au séjour des morts, il était en proie à la torture… il a cinq frères qu’il voudrait bien protéger de pareille souffrance. Et nous découvrons qu’il est croyant : il reconnaît Abraham comme son père dans la foi ; mais non pratiquant, dirions-nous aujourd’hui : il n’a pas écouté les avertissements de Moïse et des prophètes, pas plus que ses frères, apparemment.
Voilà planté le premier personnage, mais nous ne savons toujours pas de quoi parle cette parabole puisqu’elle n’est pas une parabole contre les riches.
Serait-ce alors une parabole en faveur des pauvres ? Une parabole qui, bien avant l’heure, donnerait raison à Karl Marx, quand il dira que la religion est l’opium du peuple ? Souffrez maintenant, et en silence s’il vous plaît, et vous serez heureux plus tard ? Est-ce là l’enseignement de la parabole ? Oh que non ! Certes il y a ce pauvre Lazare (tiens ! on connaît son nom, à lui !), ce pauvre Lazare qui a souffert et qui se retrouve, après sa mort, emporté par les anges auprès d’Abraham. Une belle fin pour quelqu’un qui le mérite sans doute. Mais la parabole n’est pas pour lui, ni pour ceux qui partagent sa condition. Elle n’est pas un enseignement à la patience pour celles et ceux qui souffriraient, ni un appel à la résignation : votre tour viendra ! Elle n’est pas une parabole pour plus tard, quand nous serons morts ; elle est un enseignement pour aujourd’hui, et pour nous, même si nous ne sommes pas vraiment riches, même si nous ne sommes pas dramatiquement pauvres.
Cette parabole nous parle de notre vie aujourd’hui, et de la manière dont nous la vivons, maintenant. C’est une parabole sur le regard que nous portons sur le monde et sur les hommes et les femmes que nous croisons. C’est une parabole qui veut nous ouvrir les yeux. Le riche n’est pas méchant, il est juste aveugle, aveuglé par sa richesse et les amis qu’elle lui procure au point de ne pas voir le pauvre Lazare devant sa porte. Que voulez-vous, ils ne sont pas du même monde ! L’un est fabuleusement riche alors que l’autre est affreusement pauvre ! Et si le riche n’a pas de nom, encore une fois, c’est parce qu’il peut avoir notre nom. Mais nous ne prendrons pas, dans cette parabole, la place du pauvre : le pauvre, c’est Lazare, il nous est connu, comme nous sont connus les pauvres de notre vie. N’avons-nous pas tous un Lazare que nous préférons ignorer, ne pas voir ? Ce n’est pas forcément quelqu’un qui est économiquement pauvre, juste quelqu’un qui est pauvre de notre manque de relation, de notre manque d’attention. Et nous savons que les pauvres de toutes sortes sont les préférés de Dieu, parce que Dieu porte attention à chacun et particulièrement à ceux dont personne ne se soucie. Il est donc juste que Lazare se retrouve auprès d’Abraham, non pas parce qu’il a souffert, mais parce que tous l’ignoraient, à commencer par le riche. Il ne comptait pour personne, sauf pour Dieu. N’est-ce pas ce que nous rappelle le psaume de ce dimanche ? Le Seigneur fait justice aux opprimés, il donne du pain aux affamés, il protège l’étranger, il soutient la veuve et l’orphelin…
Mais de quoi nous parle-t-on au juste dans cette parabole ? A lire trop vite, à croire que nous avons déjà entendu, nous risquons fort de passer à côté du message de la parabole de Jésus et surtout, plus grave, de croire qu’elle n’est pas pour nous.
Alors de quoi nous parle-t-on au juste ? Est-ce une parabole contre les riches qui profitent pleinement de leur argent, même honnêtement gagné, et qui font la fête alors que d’autres souffrent ? Elles ne seraient donc pas pour nous : nous ne sommes pas franchement riches, enfin toujours un peu plus pauvre que le voisin que nous envions tant. Et puis, nous ne faisons pas la fête tous les jours ; nous sommes des gens sérieux, nous !
La parabole de Jésus ne nous parle pas du riche pour condamner sa conduite, ni sa richesse. Jésus ne dit pas que les fêtes qu’il organise, c’est mal. Il n’est même pas dit que cet homme est malhonnête. Tout ce qu’on sait de lui, tient en deux phrases : il y avait un homme riche, qui portait des vêtements de luxe et faisait chaque jour des festins somptueux. Le riche mourut et on l’enterra. C’est peu de choses, reconnaissons-le ; nous ne connaissons même pas son nom. Une manière subtile de nous dire, qu’il peut avoir notre nom. Cet homme-là, ce pourrait être toi !
Par contre, si nous ne savons pas grand-chose de lui de son vivant, nous découvrons pleins de détails après sa mort : au séjour des morts, il était en proie à la torture… il a cinq frères qu’il voudrait bien protéger de pareille souffrance. Et nous découvrons qu’il est croyant : il reconnaît Abraham comme son père dans la foi ; mais non pratiquant, dirions-nous aujourd’hui : il n’a pas écouté les avertissements de Moïse et des prophètes, pas plus que ses frères, apparemment.
Voilà planté le premier personnage, mais nous ne savons toujours pas de quoi parle cette parabole puisqu’elle n’est pas une parabole contre les riches.
Serait-ce alors une parabole en faveur des pauvres ? Une parabole qui, bien avant l’heure, donnerait raison à Karl Marx, quand il dira que la religion est l’opium du peuple ? Souffrez maintenant, et en silence s’il vous plaît, et vous serez heureux plus tard ? Est-ce là l’enseignement de la parabole ? Oh que non ! Certes il y a ce pauvre Lazare (tiens ! on connaît son nom, à lui !), ce pauvre Lazare qui a souffert et qui se retrouve, après sa mort, emporté par les anges auprès d’Abraham. Une belle fin pour quelqu’un qui le mérite sans doute. Mais la parabole n’est pas pour lui, ni pour ceux qui partagent sa condition. Elle n’est pas un enseignement à la patience pour celles et ceux qui souffriraient, ni un appel à la résignation : votre tour viendra ! Elle n’est pas une parabole pour plus tard, quand nous serons morts ; elle est un enseignement pour aujourd’hui, et pour nous, même si nous ne sommes pas vraiment riches, même si nous ne sommes pas dramatiquement pauvres.
Cette parabole nous parle de notre vie aujourd’hui, et de la manière dont nous la vivons, maintenant. C’est une parabole sur le regard que nous portons sur le monde et sur les hommes et les femmes que nous croisons. C’est une parabole qui veut nous ouvrir les yeux. Le riche n’est pas méchant, il est juste aveugle, aveuglé par sa richesse et les amis qu’elle lui procure au point de ne pas voir le pauvre Lazare devant sa porte. Que voulez-vous, ils ne sont pas du même monde ! L’un est fabuleusement riche alors que l’autre est affreusement pauvre ! Et si le riche n’a pas de nom, encore une fois, c’est parce qu’il peut avoir notre nom. Mais nous ne prendrons pas, dans cette parabole, la place du pauvre : le pauvre, c’est Lazare, il nous est connu, comme nous sont connus les pauvres de notre vie. N’avons-nous pas tous un Lazare que nous préférons ignorer, ne pas voir ? Ce n’est pas forcément quelqu’un qui est économiquement pauvre, juste quelqu’un qui est pauvre de notre manque de relation, de notre manque d’attention. Et nous savons que les pauvres de toutes sortes sont les préférés de Dieu, parce que Dieu porte attention à chacun et particulièrement à ceux dont personne ne se soucie. Il est donc juste que Lazare se retrouve auprès d’Abraham, non pas parce qu’il a souffert, mais parce que tous l’ignoraient, à commencer par le riche. Il ne comptait pour personne, sauf pour Dieu. N’est-ce pas ce que nous rappelle le psaume de ce dimanche ? Le Seigneur fait justice aux opprimés, il donne du pain aux affamés, il protège l’étranger, il soutient la veuve et l’orphelin…
Tout est question de regard, semble nous dire cette parabole. Si le riche avait vu Lazare, peut-être aurait-il eu un geste de compassion envers lui et désormais, après sa mort, Lazare pourrait en avoir un envers lui : envoie Lazare tremper dans l’eau le bout de son doigt pour me rafraîchir la langue ! Mais il n’a rien vu, le riche, et donc rien fait ; et maintenant, c’est trop tard ! La sagesse populaire le dit : un bien fait n’est jamais perdu ! Il ne suffit pas que nous menions notre vie sans faire de mal aux autres ; il ne suffit pas de vouloir être bien avec tous. Paul le rappelle à Timothée : et maintenant, voici ce que je t’ordonne : garde le commandement du Seigneur, en demeurant irréprochable et droit jusqu’au moment où se manifestera notre Seigneur Jésus Christ. Le commandement du Seigneur, c’est bien d’aimer les autres ! C’est son unique commandement ! Pas seulement nous abstenir de leur faire du mal, non, mais les aimer comme Dieu les aime, gratuitement, portant leur souci, intervenant en leur faveur. Vivre selon Dieu et aimer comme Dieu : c’est tout ce qui nous est demandé ; mais ce sont deux choses qu’il nous faut partager. Je ne vis pas seul ; je n’aime pas seul.
Si seulement le riche avait ouvert les yeux sur celui qui était à sa porte ! Pour lui, c’est trop tard, mais pour nous, nous qui avons Moïse et les prophètes, nous qui avons même mieux en Jésus, mort et ressuscité, souvenons-nous à temps de son enseignement et nous pourrons être sauvés. N’est-il pas celui qui a dit : Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ? Ou pas. Amen.
(Dessin : Editions CRER, 2005 - B. Debelle)