Je le veux, sois purifié.
(Jésus guérit un lépreux, Mosaïque XII-XIIIème siècle, Cathédrale de Monreale, Sicile)
A trois jours de l’entrée en Carême, il est heureux que la liturgie nous fasse entendre ce récit de la guérison d’un lépreux. Maladie terrible entre toutes à une époque où n’existait aucun traitement, elle était excluante, la communauté devant se protéger de toute contagion. Nous comprenons donc les recommandations faites par le Seigneur à Moïse au sujet de ceux qui sont touchés par cette maladie : ils vivront à l’écart, ils seront impurs. Plus surprenante cependant la réaction de Jésus. Regardons de plus près.
Alors qu’il aurait fallu tenir le lépreux à distance, Jésus se laisse approcher. Lépreux ou pas, voilà quelqu’un qui a besoin de lui, quelqu’un qui a une demande à formuler. Remarquer l’humilité de cet homme : il sait que Jésus peut quelque chose pour lui ; il sait que, grâce à Jésus, il peut être réintégré dans la communauté. Mais il n’exige rien. Il ne vient pas dire : je veux être guéri. Non, il se fait humble, et tombant à ses genoux, dit à Jésus : : Si tu le veux, tu peux me purifier. Non pas je veux, mais si tu le veux. Face à Jésus, son désir de guérison est moins important pour lui que le désir de Jésus. S’il a bien compris qui est Jésus, il sait que Jésus peut réaliser cette merveille pour lui ; il n’a, je crois, aucun doute à ce sujet. Mais il est conscient aussi, me semble-t-il, que Jésus ne fait rien par hasard. Je ne sais comment, mais il me semble que ce lépreux a compris que la mission de Jésus s’inscrit dans quelque chose de plus grand, dans ce que nous appelons le projet de salut de Dieu. Si tu le veux, c’est comme pour dire si j’entre dans ce grand projet, je sais que tu me guériras. Et peut-être qu’il a même accepté qu’il puisse ne pas entrer dans ce projet. Si tu le veux : c’est toi qui décides, je suis prêt à me laisser faire, je m’abandonne à toi.
Comment Jésus aurait-il pu ne pas être saisi de compassion ? Bien sûr qu’il va faire quelque chose. Il étendit la main, le toucha et lui dit : Je le veux, sois purifié. Remarquez la tendresse de Jésus qui n’hésite pas à toucher celui qui se prosterne devant lui. Il ne se contente pas d’une parole, il ose un geste tendre, alors qu’il n’a aucun gel hydroalcoolique. Quelle leçon pour notre époque qui ne parle plus que de gestes barrières, qui abolit toute tendresse, qui anéantit toute humanité ! Jésus vient nous redire que l’autre, quelle que soit sa maladie, est toujours un humain et que tout doit être fait pour le garder dans la communauté humaine. Le projet de Dieu pour l’homme, c’est un homme debout, un homme vivant, un homme en relation. Le Je le veux de Jésus n’est en rien une parole d’enfant gâté qui exige tout et n’importe quoi ; il est la manifestation claire et sans ambiguïté de la volonté de Dieu pour chaque homme. Et puisque, à l’époque de Jésus, une maladie grave est souvent identifiée comme le résultat d’un péché, Jésus vient bien dire que Dieu veut l’homme libre même du péché, c'est-à-dire libre de la source même du Mal. D’où l’injonction de Jésus : Va te montrer au prêtre et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi : ce sera pour eux un témoignage. Témoignage de quoi ? Témoignage de l’intervention de Dieu en faveur d’un de ces petits qui sont ses préférés ; témoignage que Dieu vient à la rencontre de l’homme quand celui-ci exprime son désir de Dieu ; témoignage que le Règne de Dieu est à l’œuvre, qu’un temps nouveau est ouvert ; témoignage que le Mal peut être vaincu.
Dans
trois jours, nous ouvrirons le temps du Carême. C’est justement un temps de
purification, un temps de retour vers Dieu, un temps pour accueillir dans notre
vie le désir de Dieu de nous sauver. Nous pourrons être ce lépreux qui se
prosterne devant Jésus et lui exprimer notre attente : Si tu le veux… Et nous l’entendrons
nous répondre : Je le veux ! C’est une
certitude, ce doit être notre certitude. Dieu ne reste pas sourd à nos appels ;
il veut notre salut. N’ayons pas peur de l’approcher, n’ayons pas honte d’exprimer
humblement notre demande. Jésus veut toujours nous sauver ; il est venu
pour nous sauver. Amen.
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