Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 25 novembre 2023

Christ, Roi de l'univers - 26 novembre 2023

 L'Amour vaincra ! L'Amour sauvera !


(Source internet)


 

 

            Il est bon d’avoir entendu le prophète Ezéchiel ouvrir la liturgie de la Parole de notre Eucharistie dominicale. Il nous donnait une parole apaisante et rassurante : La brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la panserai. Celle qui est malade, je lui rendrai des forces. En cette période difficile que traverse notre monde, il est bon d’entendre que quelqu’un a le souci de nous, que quelqu’un a le souci des pauvres, des blessés de la vie, … mais aussi le souci de ceux qui ne souffrent de rien : Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître selon le droit. Dieu veille sur tous, affirme le prophète, mais Dieu, par ce même prophète, dans la même prophétie, annonce aussi un jugement, pour tous : Et toi, mon troupeau – ainsi parle le Seigneur Dieu –, voici que je vais juger entre brebis et brebis, entre les béliers et les boucs. 

            C’est bien cette image que Jésus reprend dans la parabole dite du jugement dernier, dans l’Evangile de Matthieu. Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire. Toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des boucs : il placera les brebis à sa droite, et les boucs à gauche. Comprenons d’emblée que brebis et boucs n’a rien à voir avec le sexe ; il ne dit pas les femmes à droite, les hommes à gauche. La différence brebis / bouc est une différence « morale », la parabole faisant vite comprendre que les brebis, ce sont les bons, ceux qui seront sauvés, et les boucs, les moins bons, ceux qui seront condamnés. Puisqu’elle est d’ordre « morale », il faut préciser aussi que la différence brebis / bouc n’équivaut pas à la différence pauvre / riche, sous-entendant que seuls les pauvres seraient sauvés, et les riches condamnés. Il y a des bons chez les pauvres comme chez les riches ; il y a des mauvais chez les pauvres comme chez les riches. Les artistes lointains qui ont transposé cette parabole en tableaux ou retables, ne s’y sont pas trompés, mettant autant de riches et de pauvres du côté de ceux qui entraient au Paradis que du côté de ceux qui étaient précipités dans les flammes de l’enfer.  Notre salut n’est pas lié à notre condition sociale. Il n’est dit nulle part que ceux qui sont pauvres et qui souffrent ici-bas seront récompensés, et se verront riches et bien-portants dans l’au-delà. Il n’est dit nulle part que ceux qui sont riches et bien-portants ici-bas se verront pauvres et malheureux dans l’au-delà. A ceux qui le penseraient, je rappellerai que nous sommes tous le riche de quelqu’un et le pauvre d’un autre ! 

            Sur quoi portera alors le jugement ? La parabole est claire : sur notre manière d’agir (ou pas) avec ceux que la vie met sur notre route et qui sont moins bien lotis que nous. Le jugement portera sur notre agir vis-à-vis des grands besoins de l’homme qui a faim ou soif, qui est étranger, nu, malade ou en prison. Nous pouvons comprendre que le jugement portera sur notre capacité de relation et notre mode de relation. Suis-je capable de porter un intérêt à celui qui est différent de moi, parce qu’il est plus pauvre, parce qu’il est étranger, parce que sa vie relationnelle est entravée par la maladie ou la prison ? Est-ce que je fais quelque chose pour soulager la faim et la soif des autres, y compris dans ma propre manière de consommer ? Est-ce que je fais quelque chose pour l’étranger, à part le charger de tous les maux de notre société ? Est-ce que je fais quelque chose pour celui qui est malade ou en prison, à part plaindre le premier et dire du second qu’il l’a bien cherché ? A bien réfléchir, je me rends bien compte qu’il ne s’agit pas seulement de donner de l’argent ou de partager, mais bien de cette capacité à entrer en relation avec l’autre, moins chanceux, différent… Peut-être, pour comprendre, faut-il ici réentendre Paul, dans sa première lettre aux Corinthiens lorsqu’il affirme : J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien. Ecoutons alors à nouveau Jésus dans sa réponse, à l’étonnement des brebis comme des boucs : Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait (ou pas) à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (ou pas). 

            Il nous donne là un indice sur la bonne manière d’agir avec celles et ceux qui croisent notre route ; je peux l’exprimer ainsi : agis avec chacun comme tu voudrais agir si tu croisais le Christ lui-même ! Il y a, dans cette manière de comprendre et de faire, l’affirmation que nous avons compris pourquoi Jésus, le Fils de Dieu, est venu dans notre monde. En agissant avec chacun comme on agirait avec le Christ, nous affirmons comprendre ce qu’est la fraternité universelle qu’il prêche, et qu’il est Celui qui fonde cette fraternité. En prenant figure humaine en Jésus, Dieu se fait non seulement proche de chacun, mais il nous dit aussi que désormais chacun porte au fond de lui le visage du Dieu qui s’est fait homme. L’artiste qui a réalisé le dernier vitrail de la cathédrale de Strasbourg l’a bien compris, lui qui a composé le visage du Christ avec les photos des visages des hommes et des femmes qui travaillent, visitent et font vivre la cathédrale. Depuis l’incarnation, nous sommes tous des « Christo-phores », des porteurs du Christ ; et cette page d’évangile nous le confirme : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. Chaque fois… cela veut bien dire que chaque humain porte le Christ en lui. Pour le dire encore autrement, le Christ s’incarne aujourd’hui, pour nous qui ne le voyons plus de nos yeux de chair, dans l’humain qui croise ma route. Comment, si je suis un disciple du Christ, ne pas l’accueillir alors ? Comment, si je suis un disciple du Christ, ne pas le servir ? Comment, si je suis un disciple du Christ, puis-je seulement songer à le rejeter ? 

            Ce dernier dimanche de l’année liturgique nous fait célébrer le Christ comme Roi de l’univers. Ce titre redit notre espérance de le voir régner un jour sur tous. Chrétiens, disciples de Jésus, nous pouvons hâter la réalisation de ce Règne attendu par notre art de vivre dans le monde et notre art de servir ceux qui y vivent. À ceci, nous a dit Jésus, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. Seul l’amour du Christ pour les hommes vaincra le Mal ! Seul l’amour que nous aurons pour tous nous sauvera ! Amen.

samedi 18 novembre 2023

33ème dimanche ordinaire A - 19 novembre 2023

 Risquer avec Dieu.




 (La Parabole des Talents, Andrei MIRONOV)

 

 

 

          

            Comme aurait dit Coluche en son temps : c’est l’histoire d’un mec qui part en voyage… Nous n’allons pas la refaire ; nous n’allons pas la réécrire ; la parabole de Jésus, nous l’avons tous entendu. Elle peut laisser un goût amer, faisant l’éloge de ceux qui réussissent, sans trop d’effort en apparence et condamnant celui qui n’a rien fait… de mal. Car enfin, à part une peur avouée doublée d’un peu de paresse, nous ne pouvons pas lui reprocher grand-chose. Il nous ressemble tellement, n’est-ce pas. 

            Comme lui, nous ne faisons rien de mal, en tous les cas, pas le mal dans ses grandes largeurs, pas le mal qui se poursuit devant les tribunaux. Mais est-ce suffisant de ne pas faire de mal pour être quelqu’un de bien ? La parabole répond, me semble-t-il, assez clairement : non ! Il ne suffit pas de ne pas faire de mal, sauf à prendre Dieu pour un comptable ! Tu m’as donné tant, je te dois donc tant : Voici. Tu as ce qui t’appartient ! Si nous prenons Dieu pour un comptable, ne nous étonnons pas qu’il réagisse en comptable : il fallait mettre l'argent à la banque ! Si nous prenons Dieu pour un surveillant, ne nous étonnons pas qu’il se comporte comme un garde-chiourme, éternellement insatisfait de notre comportement. A la fin des temps, nous rencontrerons le Dieu que nous nous serons construits ! Si tu veux rencontrer le Dieu de tout amour, commence par comprendre qu’il ne suffit pas de ne pas faire de mal pour être un gars ou une fille bien. Commence par comprendre qu’entre faire le mal et faire le bien, il y a toute une gamme d’actions, tout un champ de possibles. Ne pas faire le mal ne signifie pas encore que je fais bien ; cela signifie juste que j’ai renoncé au mal. Mais Jésus nous demande plus : il nous demande de viser le bien, pour nous et surtout pour les autres. Et cela demande plus que juste renoncer au mal ; cela demande de s’engager, cela demande de risquer, cela demande de se bouger. Cela demande de vivre ! 

            Dans la parabole, c’est ce qu’ont fait les deux premiers serviteurs, ceux qui avaient reçu une somme de cinq talents pour le premier, et une somme de deux talents pour le deuxième. Nous ne savons pas ce qu’ils ont fait pour doubler chacun la somme qui leur a été donnée ; nous savons juste qu’ils les ont risquées et qu’elles ont doublé. Ce qu’ils ont fait, comment ils s’y sont pris, n’a que peu, voire pas d’importance. Ce qui importe, c’est qu’ils ont osé ; ce qui importe, c’est qu’ils ne se sont pas senti les gardiens du dépôt qui a été fait chez eux ; ils l’ont considéré comme leur appartenant. Cela leur a permis, je pense, de prendre quelques risques. Ils ont risqué ce qu’ils ont considéré leur bien, ils ont gagné. A son retour, le maître donne raison à cette interprétation. Il ne demande pas à ses serviteurs de rendre ce qu’ils ont reçu ; il leur demande juste de rendre compte de leur gestion. Il ne reprend rien, il laisse tout, et promet plus encore : Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en donnerai beaucoup ; entre dans la joie de ton Seigneur. Le seul à qui il reprend, c’est le troisième, qui se voit qualifier de serviteur mauvais et paresseux, lui qui s’est contenté de creuser la terre et cacher l’argent de son maître. Et ce que le maître reprend, il le donne à celui qui a déjà beaucoup : Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix. A ne rien risquer, nous ne gagnerons rien ; à ne rien risquer, nous perdrons tout. Certes, il n’a rien fait de mal ; mais il a fait pire en ne faisant rien ; il a fait pire en ayant peur de ce maître qui lui avait confié son bien. Il a fait pire en ayant peur de ce maître qui lui avait fait confiance, à la mesure de ses possibilités. Il n’a eu qu’un seul talent non parce que son maître le pensait incapable ; il n’a eu qu’un talent parce que son maître savait que cela, un talent, il saurait le gérer, cela correspondait à ses capacités. En ne faisant pas confiance au maître qui lui faisait confiance, en ne se faisant pas confiance à lui-même, il s’est abîmé lui-même, il s’est jugé lui-même. Il a caché son talent dans les ténèbres de la terre, au fond d’un trou ; il finira dans les ténèbres extérieures, là il y aura des pleurs et des grincements de dents. Sa peur lui fera grincer des dents ou claquer des dents éternellement. 

             La leçon de cette parabole est double, selon moi. Elle est d’abord un appel à ne pas imaginer Dieu à notre mesure, à ne pas fantasmer Dieu ; c’est le meilleur moyen de nous tromper sur lui. Il est temps de quitter nos représentations de Dieu qui surveille, de Dieu qui note, de Dieu qui se venge. Si nous ne le faisons pas, comme je l’ai déjà dit, c’est ce Dieu-là que nous rencontrerons. Mais si nous comprenons enfin que notre Dieu est Dieu de miséricorde et d’amour, alors quand bien même nous aurions perdu une part de ce qu’il nous a confié, son amour sera plus grand que notre perte, sa miséricorde plus large que nos erreurs. Ce qui nous mène à la deuxième leçon de la parabole : nous pouvons risquer les talents que Dieu nous confie parce que lui-même risque en misant sur nous. Il risque avec nous, il risque pour nous en livrant son Fils sur la croix. Puisque Dieu est avec nous, qui sera contre nous ? Puisque Dieu prend le risque de compter sur nous, prenons le risque de compter sur son amour et sur sa miséricorde. Quand Dieu est compris comme celui qui aime infiniment et pardonne infiniment, il ne peut pas décevoir l’homme ! Dieu est amour ; Dieu est miséricorde : il est temps que nous le comprenions pour que nous puissions vivre notre vie, forts de cet amour, sûrs de ce pardon. Amour et miséricorde sont chemins de vie et de joie éternelle. Amen. 

samedi 11 novembre 2023

32ème dimanche ordinaire A - 12 novembre 2023

 C'est quoi, l'erreur des insouciantes ?



(Les vierges prévoyantes et les vierges insouciantes, Enluminure copte, 
Evangéliaire copte-arabe, réalisé au Caire en 1250, Bibliothèque de Fels, ICP - Paris)



 

 

 

            Le royaume des Cieux sera comparable à dix jeunes filles invitées à des noces, qui prirent leur lampe pour sortir à la rencontre de l’époux. Ainsi commence la parabole que Jésus nous offre en ce dimanche. Elle commence plutôt bien ; elle a même un côté sympathique, parce qu’être invité à un mariage, c’est quand même plutôt bien. Qui n’aime pas être invité à un événement où tout respire la joie et le bonheur ? Mais voilà : cette histoire qui commence bien, et qui nous mettait le cœur en joie, tourne au vinaigre car, précise Jésus, cinq d’entre elles étaient insouciantes et cinq étaient prévoyantes, et s’achève dramatiquement pour les insouciantes qui resteront à la porte de la salle des noces, s’entendant dire : Je ne vous connais pas, alors qu’elles avaient été invitées ! Comment en est-on arrivé là, et surtout, quelle est l’erreur fondamentale de ces insouciantes ? 

            L’erreur fondamentale, ce n’est pas qu’elles se soient endormies, ni même qu’elles aient été tête en l’air et n’aient pas prévu assez d’huile.  On ne peut pas vraiment le leur reprocher. Voyez-vous :  l’époux était en retard à ses noces ! Et pas qu’un peu, semble-t-il ! C’est à se demander s’il avait vraiment envie de se marier, celui-là ? Sa dulcinée, dont personne ne parle au demeurant, n’a pas dû être très contente, mais passons. L’époux tarde donc, et ce qui devait arriver, arriva :  les jeunes filles s’endorment, toutes, les prévoyantes comme les insouciantes, en oubliant au passage d’éteindre leurs lampes. Au réveil, un seul constat s’impose : il n’y a plus assez d’huile pour les insouciantes, et les prévoyantes refusent de partager ce qu’elles avaient prévues. Je ne parlerai pas du manque de solidarité, ce n’est pas le sujet ici. Ce qui est dérangeant, c’est finalement que l’époux, lui qui était grandement en retard, reproche aux insouciantes de n’avoir pas été prêtes lorsqu’il a enfin daigné venir ! S’il avait été à l’heure, rien de tout cela ne se serait produit, et la joie aurait été totale. S’il s’était agi d’un mariage ordinaire, toutes ces remarques auraient été justifiées. Mais voilà, il ne s’agit pas de cela. 

            Il nous faut comprendre que cette parabole de Jésus parle de quelque chose de plus grand, de plus important, qu’un mariage ordinaire. Elle nous parle des noces de l’Agneau, comme dit la liturgie avant la communion, ces noces qui unissent l’humanité, sauvée et pardonnée, avec le Christ, mort et ressuscité, dans la gloire du Royaume, à la fin des temps. Jésus l’a bien indiqué au début de sa parabole : Le royaume des cieux sera comparable à… Si l’époux tarde à venir, c’est parce qu’il veut laisser à l’humanité le temps de se préparer, de se convertir. Et c’est là que nous pouvons comprendre l’erreur (ou le péché) de ces jeunes filles insouciantes. Non pas qu’elles aient manqué d’huile, mais elles ont manqué de confiance. Au moment où l’époux arrivait enfin, réalisant leur manque d’huile et l’impossibilité des autres à partager, elles s’en vont voir ailleurs pour trouver ce que seul l’époux aurait pu leur donner : l’huile de sa miséricorde. Elles seraient allées vers l’époux avec des lampes à demi éteintes, elles seraient entrées avec lui dans la salle du banquet. Elles n’ont pas cru que seul l’époux pouvait quelque chose pour elles. Et cela explique du même coup pourquoi les prévoyantes ne pouvaient pas partager leur réserve. Ce n’est pas par égoïsme ou par peur de manquer ; elles ne pouvaient pas partager parce que l’huile de leur amour pour l’époux ne se partage pas. L’amour que vous avez pour le Christ, vous ne pouvez pas le diviser pour en donner à quelqu’un qui en manque ; vous ne pouvez pas donner l’huile de votre confiance en Christ à celui qui n’a pas confiance en lui. Plutôt que d’envoyer les insouciantes vers les marchands, elles auraient dû, les prévoyantes, emmener avec elles les insouciantes, pour qu’elles se laissent remplir de confiance et d’amour par l’époux. Il n’y a qu’en Jésus que se trouve l’huile de l’amour qui nous manque ; il n’y a qu’en Jésus que se trouve l’huile de la confiance qui nous fait quelquefois défaut. Cela ne s’achète pas, et surtout pas ailleurs, chez des marchands quelconques. Non, personne ne peut acheter l’amour ; personne ne peut acheter la foi (même racine que la confiance). Notre manque d’amour, notre manque de foi, cela se confesse à la source de l’amour, à la source de la foi, Jésus, l’époux qui vient à notre rencontre. 

            Le devoir de vigilance auquel Jésus nous invite est double, selon moi. Comme l’indique la parabole, nous ne savons ni le jour ni l’heure. C’est le premier devoir de vigilance : attendre le retour du Christ, sans savoir quand il viendra, et être prêt à l’accueillir. Mais la parabole nous indique un deuxième devoir de vigilance, qui consiste à ne pas nous tromper sur le Christ. Il est le seul qui peut tout pour nous, parce qu’il nous aime infiniment. Il n’attend pas de nous que nous soyons parfaits ; il attend de nous que nous ayons assez d’amour et assez de confiance pour nous approcher de lui, malgré notre indigence. Quand il viendra, ne cherchons pas ailleurs l’amour et la foi qui pourraient nous faire défaut ; ayons assez de simplicité pour nous jeter dans les bras de Jésus pour lui confesser notre manque d’amour, notre manque de foi ; il saura nous combler au-delà de toute mesure. Et nous serons les heureux invités au repas des noces de l’Agneau. Amen.

samedi 4 novembre 2023

31ème dimanche ordinaire A - 05 novembre 2023

 Quand la parole de Dieu se fait difficile...



(Tableau d'Arcabas)


  

  

            Il y a des dimanches où la Parole de Dieu peut nous sembler sévère, difficile à entendre, parce qu’elle a été écrite dans un contexte de crise, à une époque lointaine dont la plupart d’entre nous n’ont que trop peu entendu parler pour en apprécier toute la portée. Et si nous lisons ces textes aujourd’hui en les prenant au pied de la lettre, nous risquons des raccourcis dramatiques. Ainsi la première lecture pourrait nous pousser à dire : les prêtres, tous pourris ; et l’évangile pareillement, mais cette fois-ci des intellectuels et des cathos trop catholiques pour certains (nos scribes et pharisiens modernes). Il n’est jamais bon de sortir un texte de son contexte, même et surtout quand ce texte est Parole de Dieu.  La question qui se pose alors est la suivante : comment ces textes sévères peuvent-ils être parole de Dieu qui fait grandir et vivre ? 

            La première piste que je vous propose, ce sera d’éviter de faire de la religion une morale. Ce sont là deux disciplines distinctes. Et si ma foi, prise au sérieux, entraine une modification de mon comportement envers les autres, elle ne s’en réduit pas pour autant à un ensemble de règles morales à observer. Dieu n’est pas le gendarme de nos vies, même s’il veille sur nous ; il est celui qui veut principalement entrer en relation, en Alliance d’amour, avec nous. La question n’est donc pas de savoir quelle règle je dois observer, mais comment je fais pour aimer mieux. L’évangile de dimanche dernier nous le rappelait à sa manière : tout est accompli de ce que Dieu veut, dès lors que j’aime comme Dieu aime, d’un amour désintéressé, qui met Dieu et l’autre au cœur de mon agir. Et, pour en rester au texte du prophète Malachie, Dieu mérite que les hommes, et les prêtres en premier, célèbrent le culte de telle manière que celui-ci soit à la hauteur de la gloire de Dieu. Pour le dire autrement, et ayant lu la totalité du livre du prophète, les prêtres doivent célébrer correctement, et les fidèles montrer plus de zèle quand ils vont au Temple. 

            La deuxième piste intéressante est de se souvenir toujours de ce que Paul écrit aux chrétiens de Thessalonique et qui leur vaut ses félicitations : ils ont accueilli la parole de Dieu pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre dans les croyants. Nous pouvons ne pas toujours la comprendre ; certains passages de la parole de Dieu ne s’éclaireront peut-être qu’avec le temps, à force de les méditer : elle reste cependant parole de Dieu qui agit, donc parole qui veut le meilleur pour nous, parole qui veut pour nous la vie avec Dieu. La comprenant ainsi, nous ne mettrons pas de côté ce qui ne nous convient pas ; nous ne nous fabriquerons pas une petite bible à usage personnelle ; mais nous entrerons progressivement dans cette parole, retenant ce que nous comprenons immédiatement, approfondissant toujours davantage ce qui nous interpelle, nous interroge voire nous scandalise. Il nous est interdit d’ignorer la parole de Dieu ; il nous est recommandé de la travailler pour la comprendre mieux dans le monde et l’époque où nous vivons. Nous entendons la même parole que les Thessaloniciens de l’époque de Paul, mais nous ne l’interprétons peut-être pas toujours de la même façon, parce que notre époque n’est pas, et n’est plus, l’époque des Thessaloniciens à qui Paul écrit. Mais ce qu’il leur a écrit, peut encore interroger notre époque ; ce qu’il leur a écrit peut encore éclairer notre époque, peut-être avec des accents différents. La parole de Dieu ne change pas ; ce qui change, c’est le monde dans lequel nous avons à la vivre ; ce qui peut changer, c’est donc notre manière de la vivre aujourd’hui. Si nous figeons la parole de Dieu dans l’époque à laquelle elle a été écrite, elle sera juste une collection intéressante de paroles venant d’un passé de plus en plus lointain, et un éclairage sur un modèle de société donné. Mais si nous la travaillons, la méditons avec ferveur, elle sera une parole authentique de Dieu pour le monde d’aujourd’hui. 

            La dernière piste que je vous propose nous vient du bref psaume 130 (131) qui nous a permis de répondre à l’extrait du prophète Malachie. Il nous rappelle l’attitude qui convient lorsque nous nous présentons devant Dieu : une juste humilité (je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux) et une grande confiance en Celui qui vient à notre rencontre (Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais). Je comprends de cela que je dois laisser Dieu être Dieu comme il veut l’être, comme il a promis jadis à Moïse de l’être toujours. Je suis celui que tu auras besoin que je sois selon les étapes de ta vie, dit-il en substance quand Moïse lui demande son nom et qu’il répond :  Je suis qui je suis ou je suis qui je serai. Nous pouvons dès lors ne jamais avoir peur de Dieu, et lui garder la confiance primordiale, celles des enfants vis-à-vis de leurs parents : Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère. Quand nous abordons avec cet esprit la parole de Dieu, qu’elle soit sévère comme aujourd’hui ou plus encourageante, nous reconnaîtrons toujours en elle Dieu qui nous invite à le suivre et nous prévient des dangers de la route, dangers dans lesquels nous nous mettons tout seul quelquefois. Rendre à Dieu la gloire qui lui est due, c’est aussi reconnaître et confesser qu’il est Dieu-avec-nous, Dieu-pour-nous, nous appelant toujours à une vie plus grande et nous donnant de la réaliser. 

            Puisse notre eucharistie toujours nous redonner le goût de la parole de Dieu. Puisse-t-elle toujours nous permettre de le célébrer dignement, d’un culte qui soit à sa hauteur. Puisse-t-elle nous apprendre à toujours nous rapprocher de Dieu qui est notre vie et qui veut pour notre vie le meilleur ; il gardera notre âme dans la paix, près de lui, ici, maintenant et dans les siècles des siècles. Amen.