De Jésus à nous : une Alliance nouvelle et éternelle scellée dans le sang du Juste.
Il est toujours impressionnant, le silence qui marque l’entrée en liturgie le Vendredi Saint, d’autant plus que nous vivons dans un monde de bruit qui a le silence en horreur, de rumeurs d’autant plus fortes qu’elles nient l’évidence de la vérité, et du bruit des canons dans tant de lieux de notre monde. Faire silence, se taire et contempler… voilà qui convient bien au moment où meurt en croix le Juste pour le salut des pécheurs.
Et pourtant, il n’avait pas commis de violence, on ne trouvait pas de tromperie dans sa bouche. Quand le bruit est plus fort que la vérité, quand le mal triomphe du Juste, cette abomination dénoncée par le prophète Isaïe devient possible. Et l’homme qui cherche, l’homme qui essaie de comprendre, ne le peut plus. Pourquoi Dieu a-t-il permis cela ? Même le Juste condamné garde le silence. N'y a-t-il rien d’autre à faire que de subir la force des forts, le mal des méchants ? A vue humaine, tout cela montre l’injustice triomphante contre laquelle nous nous sentons impuissants ; à vue humaine, tout cela montre que Dieu lui-même semble contre le petit et le Juste. Nous pourrions lister ici la longue litanie des injustices faites en notre monde, en ce vingt-et-unième siècle ; mais cela ne nous donnerait que le dégoût de notre humanité.
Puisque, à vue humaine, nous semblons être dans une impasse, peut-être faut-il alors changer notre regard ; peut-être nous faut-il consentir à entrer dans les vues de Dieu. A priori, cela ne change pas grand-chose : un innocent est tué à la place des coupables. Ce qui change, quand nous entrons dans les vues de Dieu, c’est l’intention derrière le geste. Aussi terrible que cela puisse paraître à énoncer, Dieu a permis cela pour que les hommes puissent vivre. Aussi terrible que cela puisse paraître à énoncer, Dieu a permis qu’un seul meurt pour tout le peuple. A vue humaine, nous assistons au triomphe du mal ; à vue divine, nous assistons à la destruction du mal lui-même ; à vue divine, nous assistons à la fin d’un monde et à la naissance de quelque chose de radicalement nouveau : une vie libérée du mal ; une vie qui n’a pas de fin ; une vie où la vérité triomphe. Pour l’heure, nous n’avons que la vision de la croix dressée ; mais cette vision est parcellaire. L’œuvre de Dieu pour le salut du monde, si elle passe par la mort en croix du Juste, ne s’arrête pas là. Dans le monde voulu par Dieu, le Juste triomphe. Dans le monde voulu par Dieu, le mal n’a plus de place. Dans le monde voulu par Dieu, la vie est éternelle.
Devant Jésus en croix, gardons le
silence qui fut d’abord le sien lors de son procès. Rien ne sert de vouloir
expliquer le mystère du salut ; il nous faut entrer dedans, à la manière
de Jésus, dans l’obéissance à la volonté de Dieu qui est volonté de salut et de
vie pour tous les hommes. Devant la croix, contemplons l’Alliance nouvelle et
éternelle, scellée dans le sang du seul Juste, celui que Dieu lui-même a envoyé
dans le monde, pour sauver ce monde livré au bruit, à l’injustice, à la fureur.
Devant la croix, gardons le silence, mais souvenons-nous de ce que Jésus lui-même
disait à ses disciples : il fallait que le
Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands
prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il
ressuscite (Mc 8, 31). Une
parole alors incomprise par ses amis. Nous, devant la croix dressée, nous
comprenons que la première partie vient de s’achever ; rendez-vous dans
trois jours, et nous comprendrons tout. Enfin ! Amen.
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