Qui n’a jamais rêvé la
famille idéale ? Qui n’a jamais préféré l’éducation donnée par les
voisins ? Quel prédicateur n’a jamais harangué les foules en présentant la
sainte Famille comme la famille idéale ? Pourtant, c’est oublier un peu vite
les difficultés qu’elle a aussi
rencontré.
C’est oublier le manque de
communication évident entre Marie et Joseph lorsque celle-ci accepte d’être
mère sans même en référer à Joseph. C’est oublier le projet de Joseph de renvoyer sa future
épouse quand il constate qu'elle est enceinte,
et pas de lui ! C'est oublier toutes les difficultés qu'a dû affronter
le couple à cause de cet enfant depuis sa naissance jusqu'à sa mort : c'est la
fuite en Égypte, c'est la fugue du charmant bambin à 12 ans et l'angoisse dans
laquelle il plonge ses géniteurs, c'est la mauvaise réputation de ce fils
devenu grand dans les milieux bien en place, c'est l’absence singulière du père
social dans l'éducation de ce fils qui a mal fini. C'est oublier enfin la mort
infâmante de ce fils, rejeté et abandonné de tous.
Si l'on regarde de près l'Evangile
de ce jour, on s'aperçoit vite qu'il ne parle pas de la sainte Famille pour
parler de la famille. L'Evangile de ce
jour nous parle d'abord de Jésus, de Jésus qui réalise les Écritures, de Jésus
solidaire du passé de son peuple. Comme
Moïse, comme son peuple, il trouve refuge en Égypte. Comme Moïse, comme son peuple, il reviendra
d'Égypte pour ouvrir un avenir à ce peuple opprimé depuis des générations.
Mieux que Moïse, il va ouvrir le salut à tous les peuples de la terre: c'est ce
que signifie son installation à Nazareth, dans la Galilée des nations.
Si l'on tient absolument à raccrocher cela à
la famille, c'est pour dire ceci :
1°) la famille n'est pas le
lieu de la continuité mais le lieu de la nouveauté, le commencement de quelque
chose d'absolument inédit qui se créera au fil des jours et qu'on ne peut
prédire.
2°) les enfants viennent
aux parents de très loin et vont au-delà d'eux. Les parents sont le lieu de
passage d'une vie qui les déborde de toutes parts. D'où la nécessité d'un grand
respect de cet enfant que l'on conçoit,
éduque, dirige mais qui jamais ne nous appartient.
Nous en arrivons ainsi tout naturellement à ce que disait Saint Paul
dans la deuxième lecture : Parents,
n'exaspérer pas vos enfants ! Voilà est une grande nouveauté pour l'époque ! Voilà une consigne que l'on devrait
quelquefois méditer. Et bien comprendre ! Cela ne signifie pas qu'il faut les
laisser-faire ce qu'ils veulent, mais bien respecter leur croissance, respecter les choix qu'ils
peuvent poser en matière d'orientation professionnelle et de vie
personnelle. C'est respecter un enfant
comme enfant, l'adolescent comme adolescent et le jeune adulte comme jeune
adulte. Si les parents savent respecter
leurs enfants pour ce qu'ils sont, nul doute que les enfants respecteront leurs
parents comme le demandait Ben Sirac dans la première lecture. Tout se tient. On ne récolte jamais que ce
que l'on a semé.
Finalement, c'est Saint
Paul qui a le mot de la fin, la clé de tout : par-dessus tout, qu'il y ait l'amour. C'est lui qui fait l'unité dans la perfection. Un amour solidement
amarré à l'amour de Dieu. C'est d'abord cela qu’a vécu la Sainte Famille. Cela ne
lui a pas épargné les épreuves, cela ne lui a pas donné une vie enviable à vue
humaine, mais cela a fait vivre cette famille selon le projet de Dieu. C'est en
cela qu'elle peut être pour nous une référence, un exemple à suivre. Tout
faire, tout vivre par amour ici-bas, pour goûter avec elle, après les difficultés de cette vie, le bonheur
sans fin,
selon la prière de l’Eglise elle-même (prière après la communion). Sur ce
chemin, il reste sans doute du travail. Mais cela vaut la peine d'essayer.
Amen.
(Photo, détail de ma crèche)
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