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samedi 15 août 2015

20ème dimanche ordinaire B - 16 août 2015

3ème tension entre Jésus et la foule : la foule écoute mais n'entend pas !





Cela devait bien arriver, n’est-ce pas ? Ne comprenant pas vraiment qui est Jésus, la foule finit par le laisser parler sans plus rien comprendre à ce qu’il dit. Elle écoute, mais elle n’entend rien à ce qu’il dit. Ce que dit Jésus ne concerne plus l’entendement de la foule. La tension qui oppose celle-ci à Jésus grandit encore un peu. Viendra le moment où elle ne voudra même plus l’écouter, préférant le faire taire une fois pour toutes en le clouant sur la croix. 
 
Quand on sait que saint Jean n’a pas de récit d’institution eucharistique, mais seulement ce chapitre 6 pour nous parler de l’Eucharistie, on peut comprendre cette rupture. Le récit du dernier repas de Jésus chez les autres évangélistes donne un cadre à la présence perpétuelle de Jésus à son peuple ; ce qu’il fait au cours de ce dernier repas, ses disciples doivent le faire à leur tour, à travers le temps et l’histoire pour affirmer la présence de Jésus au milieu de son peuple. Jean, en optant pour un discours sur le Pain de la vie, choisit d’approfondir le sens de ce repas. En un sens, il est plus clair que les autres en explicitant ce rite qui deviendra familier des chrétiens ; mais en l’explicitant, il en donne toute la portée. Et la foule n’est pas prête à entendre tout ce que Jésus dit à ce sujet. Déjà écouter Jésus dire : Moi, je suis le pain vivant qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement, semblait difficile à accepter ; mais là, en conclusion de son discours, il enfonce le clou : Si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. C’est sans doute l’affirmation de trop. Il dit clairement qu’il est la vie même de l’homme. Jésus devient incontournable. L’invitation faite par la Sagesse à partager le repas qu’elle a préparé pour les hommes devient invitation à « consommer » Jésus lui-même. Jésus se fait notre nourriture, notre essentiel, notre vie. Il affirme clairement sa divinité. Quelle prétention ! Et cela vous étonne que ses auditeurs se querellent entre eux ? 
 
Pourtant, c’est bien cela que nous devons comprendre dans les gestes eucharistiques que les prêtres refont depuis lors. En consacrant le pain et le vin, ils rendent Jésus, le Fils unique de Dieu, présent totalement. C’est à lui, c’est-à-dire à Dieu lui-même, que nous communions quand nous entendons sa Parole proclamée. C’est à lui, c’est-à-dire à Dieu lui-même, que nous communions quand nous mangeons le pain consacré, signe de sa présence réelle à l’Eglise. Il nous faut pleinement mesurer que nous nous coupons de la vie si nous ne mangeons plus ce pain consacré, si nous ne mangeons plus le corps de notre Seigneur. Ne pas participer au repas de l’Eucharistie pour un disciple du Christ n’est pas grave, c’est juste impossible. Ce rassemblement dominical n’est pas fait pour compter les troupes mais pour que les troupes puissent puiser à la source même de la vie ce qui est indispensable à leur propre vie. La Parole de Dieu partagée en communauté nourrit notre foi ; le Pain de la vie reçu en communion nous fait participer au sacrifice du Christ qui a livré sa vie pour nous. C’est sa vie que nous accueillons chaque dimanche pour faire grandir notre vie. 
 
Comme autrefois à la foule rassemblée autour de lui, Jésus nous redit en chaque eucharistie qu’il est notre vie ; il nous redit qu’il a donné sa vie par amour pour nous ; il nous redit sa présence éternelle à notre vie. Toutes nos faims trouvent en lui leur apaisement. Notre vie trouve son sens dans le sacrifice qu’il a consenti pour nous ; notre vie trouve son sens dans sa vie donnée, livrée sur la croix. Comment pourrions-nous manquer de nous approcher de lui ? Comment pourrions-nous préférer quelque chose d’autre à cette rencontre hebdomadaire avec Jésus ? Tenons-nous si peu à notre propre vie pour faire le choix de ne pas la nourrir de ce pain rompu, livré pour notre salut ? Tenons-nous si peu à notre vie pour accepter de la voir s’amoindrir par paresse spirituelle et confort personnel ? Participer au repas de l’Eucharistie n’est pas une obligation d’ordre moral ; c’est une obligation d’ordre vital. C’est toute notre vie qui se joue ici, dans la vie donnée du Christ. 
 
Que la célébration de nos eucharisties nous donne d’entendre ce que la foule n’a fait qu’écouter. Puissions-nous toujours garder au cœur le désir de nous approcher de la table eucharistique pour y puiser notre vie pour aujourd’hui et pour l’éternité. Amen.
 
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, éd. Les Presses d'Ile de France)

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