Le
combat spirituel que nous livrons durant ce temps de Carême nous entraîne bien
au-delà d’un simple affrontement avec le Mal. Autrement dit, il ne suffit pas d’affronter
le Mal et de le repousser hors de nos vies pour mener ce combat à son terme. Il
s’agit aussi et surtout d’accepter que notre vie soit placée sous le signe de
la Parole de Dieu, une Parole sans cesse à accueillir, à reprendre et à laquelle
nous devons faire confiance, absolument.
Que
serait devenu Abraham sans cette confiance et cette écoute de la Parole de Dieu
qui s’adressait à lui ? Avec Abraham, nous apprenons que Dieu veut entrer
en Alliance avec l’homme. Cette Alliance est source d’une promesse de vie pour
l’éternité. La descendance promise à Abraham, malgré son grand âge, est le gage
de cette vie éternelle. C’est une vie qui est appelée à ne s’arrêter jamais. Elle
se poursuivra de génération en génération pour peu que l’homme reste fidèle à l’Alliance,
fidèle à Dieu, à l’écoute de sa Parole. Abraham est reconnu juste devant Dieu parce
qu’il lui fait confiance : Abram eut
foi dans le Seigneur et le Seigneur estima qu’il était juste. Abraham est l’homme
qui croit sur parole, sans preuve préalable. Un fils, une descendance sans fin,
c’est le résultat de sa foi et non le préalable. Il n’attend pas que Dieu réalise
sa promesse pour croire en lui ; il accorde foi à Dieu d’abord.
C’est
à cette même confiance que sont appelés les disciples qui contemplent la gloire
de Jésus au jour de sa transfiguration. Nous sommes sur le chemin de la Pâque. Jésus
a annoncé à ses disciples pour la première fois qu’il allait être livré,
souffrir et mourir pour la première fois. Il leur a fait comprendre qu’ils
avaient eux-aussi à prendre leur croix chaque
jour pour le suivre authentiquement. Pierre, Jacques et Jean se souviennent-ils
de tout cela, huit jours après, lorsque Jésus les prend avec lui sur la
montagne pour prier ? Font-ils le lien entre l’annonce de sa mort et la
gloire qu’ils contemplent là, en présence de Moïse et d’Elie ? Ou ont-ils déjà oublié cette annonce de la
mort de Jésus pour ne vivre que ce moment irréel et merveilleux à la fois ?
Nous ne le saurons jamais, mais l’injonction de la voix du Père qui se fait
entendre (Celui-ci est mon Fils, celui que
j’ai choisi : écoutez-le !) et la deuxième annonce de la Passion
qui suivra le lendemain, me laisse croire qu’une certaine confusion règne dans
l’esprit des disciples. Comment Jésus peut-il être à la fois cet homme qui partage
la gloire de Dieu et celui qui va mourir, livré à la folie des hommes ? La
voix du Père nous invite, comme elle a invité jadis Abraham, à la confiance. Avec
Dieu, nous ne maîtrisons pas tout de tous les événements que nous vivons. Le maître
de la vie, c’est lui. Nous devons l’écouter et lui accorder notre confiance,
sachant qu’il ne veut que le meilleur pour nous. L’Alliance faite à Abraham et
la promesse de vie qui l’accompagne est pour toujours et Jésus la portera à son
accomplissement en acceptant d’aller librement à la mort pour que nous
puissions vivre. Seule une écoute attentive de la Parole de Jésus peut nous
faire comprendre ce paradoxe ; seule une grande confiance en lui pourra
nous faire passer de la mort bien réelle de Jésus à sa vie retrouvée,
ressuscitée au matin de Pâques. Le combat spirituel que nous avons entrepris
est aussi le combat d’une écoute attentive et d’une confiance sans limite à
celui que Dieu a envoyé pour récapituler toutes choses. Dans la mort et la
résurrection de son fils unique, Dieu fait miséricorde à tous les hommes.
Nous
goûterons pleinement à cette miséricorde en accueillant sa Parole, et en lui
accordant notre confiance sans exiger de preuve ou de signe. Dieu veut notre
salut ; Dieu veut notre vie ; ce sont là des certitudes. Réjouissons-nous
de cette miséricorde offerte gratuitement et répandons autour de nous cette
bonne nouvelle. Amen.
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