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mercredi 10 février 2016

Mercredi des Cendres - 10 février 2016

Le carême, un temps  pour ré-enchanter notre foi !







L’oraison de la messe de ce mercredi des cendres peut laisser croire que ce temps est un temps difficile et rude : elle nous parle de jeûne et de combat spirituel, toutes choses peu réjouissantes pour le commun des mortels. Nous reconnaissons-là la marque des efforts à faire tant enseignés par le passé, au point qu’un évêque de France a parlé un jour du christianisme comme d’une religion qui sent la sueur. Qui s’est déjà réjoui de la venue du temps du carême ? Pourtant, ce temps privilégié n’est pas à vivre dans la tristesse ou dans l’affliction. Au contraire, c’est un moment joyeux, un temps favorable si l’on en croit les Ecritures entendues en cette célébration. 
 
Ecoutez à nouveau le prophète Joël : revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. Ce qu’il annonce, c’est un retour en grâce ; ce qu’il prêche, c’est la conversion, c’est-à-dire un retour sincère vers Dieu pour le redécouvrir tel qu’il est. On ne le répètera jamais assez : il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. Pas de quoi avoir peur donc, mais plein de raisons de se réjouir : Dieu s’est ému en faveur de son peuple, il a eu pitié de son peuple. En ce jubilé de la miséricorde, voilà une bonne nouvelle pour nous tous. Malgré notre péché, malgré nos manques de foi, Dieu est fidèle à sa Parole, Dieu est fidèle à son Alliance. Si nous avions oublié notre part dans cette Alliance que Dieu scelle avec nous au moment de notre baptême, lui se souvient : il s’est engagé envers nous ; sa faveur envers nous est pour toujours. Il nous suffit de lever nos yeux vers lui, et humblement de marcher à nouveau avec lui. 
 
Des siècles après Joël, l’Apôtre Paul nous adresse le même cri, la même supplication : nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. En formulant ainsi sa demande, Paul nous redit bien que la réconciliation est d’abord l’œuvre de Dieu et de sa miséricorde. C’est lui qui en a l’initiative en son Fils Jésus qu’il a envoyé dans le monde pour notre salut. L’engagement de Dieu est total dans cette œuvre de salut ; il ne renonce à rien pour nous sauver. Il va jusqu’à identifier au péché celui qui n’a pas connu le péché, afin qu’en lui nous devenions juste de la justice même de Dieu. Voyez comme est grand l’amour dont Dieu nous aime ! A nous de savoir saisir l’instant, à nous de reconnaître Dieu à l’œuvre dans notre vie. C’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut. Pas demain, pas la semaine prochaine. Aujourd’hui ! En ce moment-même ! C’est dire l’urgence de nous tourner vers Dieu pour bénéficier de sa miséricorde ! 
 
A la miséricorde de Dieu, doit répondre notre propre miséricorde, celle que nous accorderons à ceux qui nous entourent. Les œuvres de miséricorde que Jésus indique (prière, jeûne et charité) sont la réponse à l’appel de Dieu, la marque de notre désir de marcher avec Dieu. La miséricorde de Dieu envers nous ne s’est pas payée de mots ; il a livré son propre Fils pour notre vie. Notre réponse à Dieu ne peut se payer de mots ; elle doit se traduire en actes, en art de vivre qui témoigne de la miséricorde qui nous a été accordée et que nous devons propager. La miséricorde est un don à partager, largement, pour qu’il ne s’épuise pas. Comment pourrais-je n’être pas miséricordieux avec mon frère après que Dieu m’ait accordé sa miséricorde ? Mais notre miséricorde doit rester discrète, faite dans le secret. Il n’y a pas à en tirer gloire ; ce n’est pas quelque chose d’exceptionnel ; c’est la réponse ordinaire et simple à la miséricorde dont nous bénéficions. Point. C’est tout. 
 
Pour vous permettre de vivre positivement ce temps de carême, je vous laisse pour finir un verbe qui est devenu le mot d’ordre dans l’Enseignement catholique. Il a été lancé par notre secrétaire général. Ce verbe, c’est ré-enchanter. Non pas pour faire des trucs en plus, mais pour reprendre ce que nous faisons déjà et peut-être pour le faire avec une conscience renouvelée. Ceci nous évitera au moins de croire que le jeûne, la charité et la prière sont des choses réservées au Carême, nos bons vieux efforts à ressortir une fois l’an et à bien ranger, lorsque nous serons rendus au temps de Pâques. Ré-enchanter notre vie de foi et ne pas faire des choses parce qu’il faut les faire, ne pas se servir des outils de la foi comme de prétextes, mais vivre en vérité les rites et les temps que propose notre foi ; voilà sans doute le chemin à faire pour que notre vie de foi questionne et ouvre un chemin de possible pour qui est non-croyant ou mal croyant ou croyant autrement. Avant de vouloir convertir, cherchons à vivre : c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que le monde saura que vous êtes mes disciples, avertit le Christ. En ce temps de Carême qui commence aujourd’hui, accueillons-donc la miséricorde de Dieu et vivons ! Vivons et aimons largement ! Nous ferons ainsi grandir la vie pour la joie et le salut de tous. Amen.
 
(Dessin de Jean-Yves DECOTTIGNIES, in Mille dimanches et fêtes, Année C, éd. Les Presses d'Ile de France)

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