Souvenez-vous : dimanche dernier,
Jésus commençait un enseignement en parabole sur le retour du Christ dans sa
gloire. La parabole des vierges prévoyantes et des vierges insensées nous
invitait à nous préparer à la joie des noces de l’homme avec Dieu. Aujourd’hui,
Jésus raconte la parabole des serviteurs à qui un maître confie ses biens, à chacun selon ses capacités. Nous
aurions tort de l’entendre comme une parabole à contenu moralisateur. Elle ne
nous parle d’abord de nous ; elle ne nous parle pas davantage des bons et
des méchants ; elle nous parle d’abord de Dieu et de la confiance qu’il
nous porte. C’est lui qui est au cœur de la parabole ; lui et son œuvre
d’amour pour nous ; lui et sa confiance inébranlable en l’homme. Vous ne
me croyez pas ? Relisons-la ensemble alors.
C’est
comme un homme qui partait en voyage : il appela ses serviteurs et leur
confia ses biens. Tout
commence là. La première parole sur Dieu se trouve dans cette simple
phrase : Dieu confie quelque chose à l’homme. Il ne donne pas, il confie.
Il fait confiance à l’homme dans la gestion de ce qu’il partage. Et il ne
partage pas à moitié ; il ne confie pas la part qu’il ne peut pas emmener
en voyage ; il confie ses biens,
entendons tous ses biens. Quel
homme, aurais-je envie de dire ! Quelle confiance ! Les hommes
ont-ils jamais vu Dieu confier ainsi tous ses biens aux hommes ? Si vous
relisez le livre de la Genèse, vous verrez que dès le commencement, dès la
création, Dieu confie tout aux hommes. Sa confiance n’est pas d’hier, elle est
de toujours et pour toujours. Et malgré le péché qui ronge le cœur de l’homme,
malgré les nombreuses infidélités des hommes à la parole de Dieu, Dieu ne
reprend pas sa confiance ; toujours et encore, il nous confie ses biens… et il part. Il ne se
retire pas pour nous laisser seul ; il ne s’en va pas en nous abandonnant ;
les biens qu’il nous confie, c’est un peu de lui qu’il nous laisse. Mais il
part pour que nous puissions exercer la confiance qu’il nous fait ; il
part pour que nous puissions user de ces biens. Comme il ne nous les donne pas
mais nous les confie, nous pouvons
bien supposer qu’un jour il faudra rendre, un jour le voyage prendra fin ;
un jour, Dieu reviendra. Mais n’allons
pas trop vite ; voyons comment il distribue ses biens.
A
l’un il remit une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième
un seul talent, à chacun selon ses capacités. J’entends déjà les
esprits grincheux qui diront que Dieu ne respecte pas la sacro-sainte égalité
républicaine. Je vois déjà les syndicalistes se lever et protester : le
Dieu des riches, cela suffit ! Comme ils se trompent ceux qui penseraient
ainsi ! Dieu ne fait pas des riches et des pauvres lorsqu’il confie ses biens ; au contraire,
Dieu respecte chacun dans ce qu’il est, il respecte chacun dans ce qu’il est
capable de faire. Il confie ses biens selon
les capacités de chacun. Autrement dit, il ne nous demande rien
d’impossible ; il nous connaît, il sait ce qu’il peut nous demander, il
sait nos capacités et nos limites. Ce qu’il nous demande, il sait que nous
pourrons l’accomplir. Dieu ne veut pas le malheur de l’homme, mais son bonheur.
Dieu ne veut pas que l’homme échoue, mais qu’il réussisse ! Il est l’ami
parfait. Sa confiance en nous est réelle ; pas de piège dans ses
actes ! Il nous fait confiance au moment de son départ en connaissant
bien nos capacités ; nous pourrons lui faire confiance au retour, connaissant
désormais sa justice. La fin de l’histoire ne peut dès lors pas être une
surprise, à moins de ne rien comprendre à Dieu.
Longtemps
après, le maître de ces serviteurs revint et il leur demanda des comptes. Il fallait s’y
attendre, nous l’avons déjà évoqué. Le maître n’était parti que pour un voyage.
Quand il revient, c’est aux serviteurs de rendre les biens, c’est aux
serviteurs de rendre le fruit de la confiance qui leur a été faite. L’histoire
est bien connue : ceux qui ont reçu cinq et deux talents en rendent autant
qu’il leur a été confié. Le choix du maître se révèle judicieux ; ce n’est
pas tant ses talents qu’il a bien placés, mais sa confiance. Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as
été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup : entre dans la
joie de ton seigneur. Quand la confiance est réciproque, les fruits sont
nombreux ; ils se multiplient. Car c’est bien de confiance dont il s’agit.
Voyez et surtout entendez bien le dernier serviteur : Seigneur, je savais que tu es un homme dur… j’ai eu peur, et je suis
allé cacher ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient. Cet
homme n’a eu confiance ni en son maître, ni en lui. Il a eu peur. La peur n’apporte rien de bon, elle ne fait rien
fructifier si ce n’est elle-même. La peur engendre plus de peur. La peur
engendre la défiance. La peur engendre la paresse. La peur engendre le mal. Ce
n’est pas le maître qui juge le dernier serviteur puisqu’il s’est déjà
jugé lui-même. Le maître reprend le raisonnement de ce serviteur et en applique
toutes les conséquences, aussi rudes soient-elles. Personne ne peut avoir peur
de Dieu, se faire de lui un portait sévère et attendre en retour sa
miséricorde. Il est jugé par le maître tel qu’il se le représentait ; il
ne peut pas être surpris de ce jugement. Il n’y aura pas de surprise au jour du
jugement. Ecoutons encore le maître. A celui
qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance ; mais celui qui n’a
rien se verra enlever même ce qu’il a. Quand le Christ reviendra, il
constatera ce qui a toujours été. Il constatera la confiance que nous aurons eu
ou pas ; il ne l’inventera pas au dernier moment. Tu as eu confiance en
moi pendant ton passage sur terre ; tu auras ma confiance pour toute
éternité. Tu n’as pas eu confiance en moi durant ton passage sur terre ;
tu ne pourras pas avoir ma confiance pour l’éternité. Nous sommes donc les artisans du jugement qui
sera prononcé sur nous ; nous sommes les artisans de notre sentence.
Avec ces paraboles sur le royaume de Dieu,
Jésus nous enseigne et nous avertit. Nous ne pourrons pas dire : ah, si
j’avais su… Apprenons de Jésus qui est Dieu. Apprenons de Jésus la confiance
que Dieu a placé en nous. Apprenons de Jésus à placer notre confiance en Dieu,
pas pour plus tard, mais dès maintenant, dans l’ordinaire de notre vie, dans
ses difficultés comme dans ses joies. Ainsi nous aussi nous entendrons le
Christ nous dire au moment de son retour : Entre dans la joie de ton Seigneur. Amen.
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