L'Eucharistie, le don qui surpasse tous les dons.
Si tu devais partir sur une île
déserte, et que tu ne pouvais emporter qu’une seule chose, ce serait quoi ?
Peut-être certains d’entre vous se sont déjà entendu poser cette question, qui
fut très en vogue dans ma jeunesse. C’est une question très simple qui avait
pour seul but de nous faire exprimer ce qui était le plus important pour nous,
la chose sans laquelle nous ne pourrions pas vivre. Bien sûr les réponses étaient
aussi variées que les personnes qui étaient interrogées. Je ne saurais plus
bien vous dire quelle bêtise je jugeais importante autrefois, mais je peux vous
dire ma réponse d’aujourd’hui. Si je devais finir sur une île déserte, j’emporterais
avec moi l’eucharistie. Pourquoi ?
La première raison qui justifie mon choix, c’est parce que ce morceau de pain consacré représente la certitude de n’être jamais seul. Et sur une île déserte, cela me semble plutôt important. Dans ce Pain consacré, Celui que j’aime et que je sers est présent, et il se donne et se redonne à moi autant que j’en ai besoin. Ceux qui ont vécu un temps d’adoration peuvent partager avec moi cette expérience de plénitude qui nous envahit quand nous prenons le temps de visiter le Christ. Vous pouvez vous sentir intérieurement heureux ou misérable, le Christ vous rejoint. Le silence de cette rencontre est un silence habité et vous savez, presque instinctivement, que Jésus est vraiment là. La parole qu’il a laissée à ses disciples après sa résurrection se vérifie : Et moi je suis avec vous, tous les jours, jusqu’à la fin des temps. Elle n’est jamais aussi vraie pour moi que devant le Saint Sacrement. Là je trouve le Christ ; là le Christ me trouve, me rejoint dans ce qui fait ma vie du moment. Là le Christ prend soin de moi ! Il m’est arrivé d’être au milieu d’une foule et de me sentir terriblement seul ; mais cela n’arrive jamais devant le Saint Sacrement, quand bien même je serais effectivement le seul humain présent.
Une deuxième raison conforte mon choix d’emporter l’eucharistie : c’est que ce sacrement est notre nourriture. Comme je le dis lorsque je prêche une première communion, c’est le Pain des forts, qui nous garde dans cette force de Dieu, qui nourrit cette force de Dieu qui est en nous. Mais il est aussi le Pain d’effort, le Pain qui me rend toute force quand je suis épuisé, le Pain qui me donne de pouvoir continuer alors que je voudrais tout arrêter. Dans un monde qui perd la tête, une telle nourriture me permet de ne pas désespérer. Dans un monde angoissant, cette nourriture me fait retrouver l’espérance d’un avenir meilleur. Dans un monde où les faits les plus simples et les plus avérés sont contestés, cette nourriture m’apporte la stabilité dont j’ai besoin. Là, dans ce Pain consacré, je sais que je retrouve le Christ. Là dans ce Pain consacré, je sais que le Christ se donne à moi, toujours et encore. Il se donne entièrement comme il l’a fait dans ce dernier repas partagé avec ses disciples. L’Eucharistie est le mémorial de son sacrifice, de son don absolu pour la vie des hommes. Ce qu’il a fait une fois pour toutes en se livrant sur la croix, est rendu actuel lorsque l’Eglise partage le Corps et le Sang du Christ, au point que nous pouvons dire, vingt-et-un siècle plus tard : c’est aujourd’hui que le Christ se donne, c’est aujourd’hui que le Christ se livre pour notre salut.
L’Eucharistie, que nous célébrons dans cette fête du Corps et du Sang du Christ, est le don par excellence que Dieu nous fait. Ici, il nous donne tout. Il nous donne sa Parole, puisque jamais nous ne célébrons ce sacrement sans l’entendre nous parler ; il nous donne sa vie, puisque ce petit morceau de pain est devenu, par les mains du prêtre, le Corps du Christ offert pour notre vie ; il nous donne l’éternité, parce que ce pain et ce vin nous font entrer dans le monde et le temps de Dieu. Ce faisant, il nous donne tout son Amour, cet Amour qui nous sauve en nous donnant le pardon de nos péchés. Le pain est rompu, le sang est versé pour vous (pour nous qui sommes là) et pour la multitude (ceux qui ne sont pas encore ou qui ne sont plus là) en rémission des péchés. Dieu ne peut rien nous donner de plus que son Fils, parce qu’en lui, il nous a déjà tout donné. Il est le don qui surpasse tous les dons. Comment pourrais-je accepter de vivre sur une île déserte sans emporter ce don ?
L’Eglise affirme avec raison que l’Eucharistie
est la Source et le Sommet de notre foi. J’espère que vous comprenez mieux pourquoi
elle le dit. Toute notre foi part de là, du sacrifice unique du Christ pour
nous ; tout converge là, vers ce repas où Dieu nous attend pour toute l’éternité.
Notre eucharistie terrestre n’est qu’un avant-goût du festin que Dieu nous servira
quand nous le verrons face-à-face. Faisons venir nos frères et sœurs en
humanité à cette source ; ne négligeons pas nous-mêmes cette source ;
et nous parviendrons tous au sommet, à la claire vision de Dieu, à la béatitude
éternelle. Amen.
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