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Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







vendredi 28 juin 2013

13ème dimanche ordinaire C - 30 juin 2013

Vous avez été appelés à la liberté.

Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres. Cette affirmation de Paul aux Galates nous oblige à nous interroger doublement. Il s’agit de savoir si le Christ nous a vraiment libérés et de quoi il nous a libérés ? Et ensuite, il s’agit de préciser les contours de cette liberté qui nous est ainsi offerte ! Parce qu’en matière de liberté, tout existe, mais tout n’est pas bon.

Affrontons donc la première question : le Christ nous a-t-il libérés ? Et de quoi ? Pour le croyant chrétien, la réponse est affirmative. Le Christ est devenu un pivot de l’histoire de l’humanité dans ses rapports avec Dieu, au point que nous pouvons dire qu’il y a un avant Christ et un après Christ. Avant le Christ, Paul nous l’apprend dans ses enseignements, c’est le règne de la Loi. Cette Loi reste extérieure à l’homme ; elle indique un chemin, des interdits et des obligations, mais elle n’est pas parfaite, même si elle vient de Dieu. En effet, selon Paul, elle est impuissante à sauver l’homme charnel, vendu au pouvoir du péché (Rm 7,14) ; elle ne fait que donner la connaissance du bien, mais pas la force de l’accomplir. Paul le reconnaît dans sa lettre aux Romains : Le bien que je voudrais faire, je ne le fais pas ; et le mal que je voudrais éviter, je le fais quand même… quand bien même je reconnais que la Loi est bonne et sainte. S’il en est ainsi, c’est donc que le péché agit en moi. Avec le Christ, tout change : en effet, celui qui accueille le Christ, accueille en lui sa vie et sa force : il devient capable, avec l’aide du Christ qui habite en lui, de résister au Mal et au péché. La grande liberté que le Christ nous offre, c’est celle-là : il nous rend libre du Mal, du Péché et de la Mort, en livrant sa propre vie en rançon. Il nous a rachetés des griffes du péché par l’offrande de sa vie sur la croix. Nous ne sommes plus soumis à la loi du péché ; nous sommes soumis à la loi du Christ, loi parvenue à la perfection dans un seul commandement : tu aimeras ton prochain comme toi-même.

Vous pouvez alors me dire : malgré le Christ, je tombe quelquefois encore sous les coups du péché. Certes, mais que se passe-t-il lorsque cela arrive ? Lorsque je fais le Mal, alors même que j’ai confié ma vie au Christ par le baptême, je m’éloigne de lui. Lorsque je fais le Mal, je ne vis plus momentanément sous la Loi d’amour du Christ ! Je l’ai oubliée, mise entre parenthèse. Mais si je reste constamment avec le Christ, le Mal ne m’est plus possible, parce que l’amour du Christ vit et agit en moi, et que cet amour ne veut rien de mal, ni pour moi, ni pour celles et ceux qui croisent ma route. Si, devenu chrétien, il m’arrive encore de faire le mal, je dois me convertir sans cesse à cet amour et à cette liberté que le Christ m’offre pour être libéré vraiment du Mal que je veux éviter. Je dois sans cesse me replacer sous l’unique loi d’amour du Christ pour que son amour agisse en moi.

Nous pouvons donc affronter la deuxième question : en vue de quoi le Christ nous a-t-il libérés ? Ou mieux dit encore : que signifie cette liberté ? Laissons-nous encore enseigner par Paul : vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme ; au contraire, mettez-vous, par amour, au service les uns des autres. Etre libre, ce n’est donc pas faire ce que je veux, quand je veux et surtout pas au détriment des autres. La liberté que le Christ nous offre est une liberté en vue du bien commun, une liberté en vue du prochain. Lui-même a marché librement vers la croix pour que nous obtenions la vie en plénitude. Lui le premier a exercé sa liberté au service du bien de tous. Sa mort sur la croix n’est pas une mort gadget ; elle est l’acte le plus libre qui soit et qui nous obtient cette liberté qui nous oblige les uns envers les autres. Après la mort et la résurrection du Christ, je ne peux plus simplement vivre pour moi, en ignorant les autres, puisque lui a vécu et est mort pour moi et pour les autres. Avec les autres, je deviens débiteur de l’amour du Christ ; et je paie ma dette en usant de cette liberté chèrement acquise pour que le Bien désormais triomphe.

L’évangile nous enseigne, à sa manière, un autre aspect de la liberté que le Christ nous offre. Lorsqu’il n’a pas le droit de passer dans un village samaritain au prétexte qu’il se rend à Jérusalem, et que Jacques et Jean veulent « punir » ce village en appelant sur lui le feu venu du ciel, Jésus les reprend vivement ! Les samaritains sont libres d’accueillir le Christ ou non ! De même, nous sommes toujours libres d’accueillir le Christ ou non. Ce n’est pas parce qu’il offre à tout homme la vie et la liberté, que la vie et la liberté de chacun sont soumises désormais automatiquement au Christ. La liberté que le Christ offre aux hommes va jusqu’à cette liberté fondamentale de refuser celui qui nous en fait don !

De la même manière, à l’opposé, la liberté qui nous est offerte par le Christ, est aussi liberté de le suivre dans le quotidien de notre vie. Si je suis libre de le refuser, je suis libre aussi, à n’importe quel moment de ma vie, de revenir et de marcher à sa suite. Nulle force en ce monde ne peut s’opposer à cette liberté tout aussi fondamentale de faire un choix personnel que d’autres ne feraient pas et trouveraient même anachronique aujourd’hui. Mais si j’exerce cette liberté, ce n’est pas, encore une fois, pour moi tout seul, pour faire ce que je veux. Marcher à la suite du Christ, librement et sans contrainte, c’est faire le choix d’appartenir au Christ et de vivre selon sa Loi d’amour. C’est vivre en se laissant conduire par l’Esprit du Christ. Comme nous le rappelle la devise de Mgr Dollmann : Caritas Christi urget nos – La charité du Christ nous presse !

Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres. Cette belle affirmation de Paul nous ouvre des chemins de vie spirituelle insoupçonnés. Si elle nous oblige à un art de vivre conforme à l’esprit du Christ, elle est loin de nous enfermer dans un modèle unique. A chacun d’inventer la manière d’exercer cette liberté, au mieux de ses possibilités, avec la grâce de Dieu et dans l’intérêt de tous. Amen.



(Dessin de Jean-Yves Decottignies, Mille dimanches et fêtes, année C, éd. Les presses d'Ile de France)

vendredi 21 juin 2013

12ème dimanche ordinaire C - 23 juin 2013

La grâce du baptême, une liberté fondamentale !




Il en va du baptême et de la foi comme de l’œuf et de la poule : quelquefois je me demande ce qui est premier. Faut-il avoir la foi pour demander le baptême ? Faut-il être baptisé pour avoir la foi ? Qu’est-ce qui est premier ? 
La réponse qui jaillit assez spontanément, c’est de dire que la foi doit nécessairement être première, puisqu’elle est le préalable au baptême. Personne ne peut être baptisé s’il ne confesse pas la foi au Christ Sauveur ! C’est vrai de tout adulte, libre et consentant, qui se présente à l’Eglise pour en être membre. Son catéchuménat va lui permettre de comprendre toujours mieux ce à quoi il s’engage, que la vie chrétienne, vie baptismale, ne se limite pas à ce beau jour où nous devenons fils de Dieu par la foi. La foi, qui nous fait désirer le baptême, nous entraîne aussi à une vie qui se doit d’être de plus en plus conforme à ce que le baptême signifie. Je me dois d’apprendre ce que cela veut dire d’être fils de Dieu, configuré au Christ, ne faisant plus qu’un dans le Christ avec celles et ceux qui croisent ma route. Je me dois de l’apprendre et de le vivre très concrètement dans l’ordinaire de ma vie. La foi, qui me fait désirer le baptême, me fait désirer être un frère, une sœur, universel. 
Mais qu’en est-il lorsque l’Eglise baptise majoritairement des enfants en bas âge ? La foi est-elle toujours le préalable au baptême ? Dans la théorie, oui, puisque la foi est demandée aux parents qui présentent leur enfant et aux parrains / marraines qui l’accompagneront dans sa vie. Mais il faudrait être aveugle ou naïf pour croire que c’est toujours le cas. D’ailleurs, lors de préparation baptême, nous le constatons bien lorsque nous interrogeons les parents sur le sens de leur démarche. Combien de fois avons-nous entendu dire : nous demandons le baptême pour notre enfant pour qu’il ait la foi ! Et ce de parents qui ne sont pas particulièrement croyants eux-mêmes. Ils vous diront qu’ils ont la foi, mais quand vous les interrogez sur le sens de cette foi, son contenu, c’est plutôt vague. Quant aux parrains et marraines, nous n’en parlerons même pas : souvent ils sont justes baptisés, quelquefois pas du tout, quelquefois vivant une autre foi que la foi chrétienne. Sans que cela ne pose de problème à personne, si ce n’est au prêtre célébrant ! La foi viendra avec le temps pour cet enfant, par un miracle dont seul Dieu est capable. Lui seul peut toucher les cœurs même lorsque le terrain semble bien ingrat au départ. 
Alors qui est premier ? Le baptême ou la foi ? Peut-être faut-il envisager une troisième voie, introduire un autre élément à notre réflexion. Je le formulerai ainsi : quel préalable à la foi et au baptême ? Autrement dit, ne faut-il pas remonter plus haut et comprendre ce qui peut précéder et la foi et la demande du baptême ? L’Evangile, et Jésus lui-même, semble nous y inviter. Il n’interroge pas ses disciples sur la foi des foules, ni sur leur capacité à recevoir un baptême, fut-il celui de Jean qui avait quand même un peu de succès sur les rives du Jourdain. Il les interroge sur la perception que les gens ont de sa personne : pour la foule, qui suis-je ? Le préalable, ce serait donc Jésus, sa vie et son œuvre, et la perception que j’en ai ! Car ne faut-il pas d’abord avoir rencontré Jésus en vérité pour désirer le suivre par une vie conforme à sa Parole ? Ne faut-il pas d’abord avoir rencontré Jésus pour célébrer mon désir d’être comme lui, fils d’un Père unique qui nous aime jusqu’à livrer son Unique fils par amour pour nous ? Ne faut-il pas passer du Jésus, grand homme historique, au Jésus de la foi, le Christ et le Sauveur, pour accueillir pleinement la grâce du baptême afin qu’elle puisse se déployer dans ma vie ? 
Certains diront : il veut une Eglise de purs ; il devient élitiste ! Est-ce être élitiste que de vouloir que les gens prennent au sérieux l’Eglise, le Christ et son message ? Est-ce être élitiste que de vouloir qu’une demande sacramentaire soit vécue avec un minimum de conscience de ce qui se joue ? La foi ne se mesure pas : heureusement ! Et je suis le premier à dire qu’il ne faut pas refuser le baptême à un enfant que ses parents présentent, au motif qu’ils ne correspondent pas totalement à nos critères. Mais il ne faut pas renoncer à dire clairement ce que signifie la grâce baptismale, ce qu’elle suppose, ce qu’elle exige. Avec le secret espoir que notre parole peut toucher les cœurs et les consciences, qu’elle peut permettre cette rencontre avec Jésus qui accueille chacun pour l’emmener plus loin, à sa suite, sur un chemin de vie dont nous ignorons tout au moment où nous l’empruntons. Accueillir tout le monde ne signifie pas accepter n’importe quoi. La miséricorde ne supprime pas la vérité.  Il faut conjuguer les deux en harmonie pour permettre de faire advenir le meilleur pour ceux qui frappent à la porte. 
Mesurant pleinement la grandeur et la beauté de la grâce baptismale (faire de nous des fils de Dieu), nous ne renoncerons jamais à la proposer largement. Conscients de ce qu’elle signifie pour celui qui la reçoit, nous ne la donnerons pas davantage en vain pour ne pas imposer à quelqu’un un fardeau qu’il ne pourrait pas ou ne voudrait pas porter. La plus grande grâce du sacrement du baptême, n’est-elle pas de nous offrir la liberté de reconnaître en Jésus celui qui nous appelle à une vie meilleure et qui nous sauve ? Que cette liberté soit totale, que j’ai le désir d’être sauvé ou pas, que j’ai le désir d’être fils ou pas. Amen.

(Dessin de Jean-François KIEFFER, Mille images d'Eglise, éd. Les presses d'Ile de France)

vendredi 14 juin 2013

11ème dimanche ordinaire C - 16 juin 2013

Quand rien ne va plus, il reste le pardon !


Tout a été dit et écrit sur le péché de l’homme, le pardon de Dieu et son amour pour nous et malgré cela,  il y a des hommes et des femmes qui ont tant de mal à bien vivre une démarche de pardon. Tout a été dit et écrit sur le péché de l’homme, le pardon de Dieu et son amour pour nous, et pourtant, il est encore des prédicateurs pour ne parler que du péché de l’homme, des efforts toujours insuffisants qu’il fait pour obtenir le pardon de Dieu. Tout a été dit et écrit sur le péché de l’homme, le pardon de Dieu et son amour pour nous, et nous avons toujours tant de mal à vivre en frères et en sœurs réconciliés par l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ, mort et ressuscité pour nous. Tout a été dit et écrit. Avec les lectures de ce dimanche, revenons une fois de plus à ce qui a été dit et écrit à ce sujet dans nos textes sacrés. 
 
Commençons dans l’ordre chronologique avec David, le grand roi que Dieu lui-même a choisi et placé sur son trône. Il avait tout eu de Dieu et aurait eu encore plus s’il l’avait demandé. Il était tout pour Dieu et Dieu devait être tout pour lui. Il s’est laissé entraîner par ses passions ; et le résultat est désastreux : une femme entraînée à l’adultère, un homme tué sous les coups de l’ennemi, et pour David et sa maison un avenir sombre. Tout cela pour satisfaire les désirs d’un seul. Vous me direz : il n’a rien fait contre Dieu, il a juste pris la femme de son voisin, un étranger qui plus est ! Bien justement, en méprisant l’étranger, David a méprisé Dieu ; en s’en prenant à l’étranger, il s’en est pris à Dieu. La réaction de Dieu, c’est Nathan qui la livre : L’épée ne cessera plus de frapper ta maison. Les yeux de David s’ouvrent, son cœur se repend : J’ai péché contre le Seigneur. Et Dieu pardonne. Voilà une première chose à garder en mémoire, une chose sûre et vraie : il faut reconnaître son péché, le confesser, pour être pardonné. Avec le psalmiste et le roi David, nous pouvons reprendre le psaume 31 et chanter : Je t’ai fait connaître ma faute, je n’ai pas caché mes torts… Et toi, tu as enlevé l’offense de ma faute. Tu es un refuge pour moi, mon abri dans la détresse, de chants de délivrance tu m’as entouré. 
 
Vient alors la rencontre de Jésus avec la femme pécheresse chez Simon, le Pharisien. Une histoire que les enfants de nos paroisses qui se préparent au sacrement du pardon avec le livret Brise-chagrins connaissent bien. Elle est une des rencontres de Jésus qu’ils travaillent pour découvrir ce qui se passe quand, dans notre vie, rien ne va plus. Parce que, reconnaissons-le, quand nous nous laissons aller à faire le Mal, rien ne va plus dans notre vie, rien ne va plus selon le désir de Dieu. Si c’est le désir de Dieu qui anime notre existence, il n’y a pas de place pour le Mal dans celle-ci ; si nous étouffons le désir de Dieu, alors le Mal s’installe, le Mal se fait, et oui, rien ne va plus. Que faire alors ? Se laisser à nouveau rencontrer par Jésus, ou comme la femme de l’Evangile, aller à sa rencontre. Quand Jésus passe dans la vie de cette femme que les autres ont vite fait de taxer de pécheresse, tout change. Elle vient, mouille les pieds de Jésus de ses larmes, les couvre de baisers et les parfume. Des gestes bien étranges pour nous mais qui disent bien son désir d’accueillir Jésus dans sa vie. Normalement, c’est Simon, celui qui a accueilli Jésus dans sa maison, qui aurait dû se préoccuper de lui laver pieds et lui offrir le parfum en signe d’accueil. Visiblement, les coutumes se perdaient déjà à l’époque. Mais cette femme, qui n’est pas de la maison, s’en souvient. Elle ne parle pas à Jésus, elle agit pour lui. Comme l’écrivait Giovanni Papini dans son Histoire du Christ, la pécheresse qui entre dans la maison de Simon avec son vase de nard n’est plus une pécheresse. Avant ce jour elle a vu, elle a connu le Christ… Elle n’est plus la femme d’autrefois. Sans ces prémisses, on ne peut entendre l’histoire qui suit. La pécheresse sauvée veut donner à son Sauveur un témoignage de gratitude. Et elle prend une des choses les plus précieuses qui lui sont restées : un vase scellé plein de nard… Elle voudrait encore parler à Jésus… Mais où trouverait-elle les mots qu’elle devrait dire ?... Alors ses yeux parlent et non sa bouche : ses larmes tombent rapides et chaudes sur les pieds de Jésus comme autant de muettes offrandes de sa reconnaissance. Voilà une autre chose à garder en mémoire, une chose sûre et vraie : lorsque nous venons vers Jésus, confesser notre péché, avant même d’ouvrir notre bouche, nous sommes déjà pardonnés. Parce que Jésus n’attend que cela ; que nous revenions vers lui. Il a offert sa vie dans ce seul but ! Cela n’enlève rien à la première chose que je vous invitais à retenir : la nécessité de confesser son péché. Au contraire, cela lui donne toute sa force. En reconnaissant mon péché tout en me sachant déjà pardonné, je vais au bout de ma démarche ; ce que j’exprime avec mon corps en me déplaçant à la rencontre de Jésus, je le confesse avec ma bouche pour que cela soit expulsé de moi. Avec le psalmiste et la pécheresse pardonnée, nous pouvons reprendre ces autres versets du psaume 31 : Heureux l’homme dont la faute est enlevée et le péché remis ! Heureux l’homme dont le Seigneur ne retient pas l’offense, dont l’esprit est sans fraude. 
 
Il reste alors l’enseignement de Paul qui reconnaît la grandeur du sacrifice du Christ et son importance dans notre vie. C’est parce que Jésus s’est livré que nous sommes pardonnés ; c’est parce que Jésus a été jusqu’à la croix que nous sommes libérés. En effet, avec le Christ, je suis fixé à la croix : je vis, mais ce n’est plus moi, mais le Christ qui vit en moi. Et le Christ, nous le confessons, est vainqueur du Mal. Il a vécu notre condition d’homme en toute chose, excepté le péché, annonçant aux pauvres la bonne nouvelle du salut, aux captifs, la délivrance ; aux affligés, la joie (Prière eucharistique n° 4). Voici une troisième chose à garder en mémoire, une chose sûre et vraie : lorsque nous confessons notre péché, nous confessons en même temps l’amour que nous lui portons en reconnaissance de ce qu’il a fait pour nous, de ce qu’il ne cesse de faire pour nous. Avec le psalmiste et saint Paul, nous pouvons reprendre ces derniers versets du psaume 31 chanté ce matin : J’ai dit : Je rendrai grâce au Seigneur en confessant mes péchés… L’amour du Seigneur entourera ceux qui comptent sur lui. Que le Seigneur soit votre joie, hommes justes ! Hommes droits, chantez votre allégresse ! 
 
Confesser son péché pour être pardonné ; venir vers Jésus en se sachant déjà pardonné ; confesser notre péché en même temps que l’amour de Dieu : voilà qui devrait nous libérer de nos scrupules et de nos peurs. Voilà ce que l’Eglise nous propose de vivre lorsqu’elle célèbre le sacrement de la réconciliation. Sans doute pourrions-nous dire et écrire encore plus ; d’autres le font mieux que moi. Je reste pour ma part convaincu que cela est suffisant et permettra à chacun d’expulser de sa vie le Mal qui quelquefois le ronge. Si quelquefois dans ma vie, rien ne va plus, j’ai la certitude qu’en venant vers Jésus pour reconnaître mes torts, je suis libéré, recréé à l’image et à la ressemblance de Dieu, car auprès du Seigneur est la grâce, près de lui la pleine délivrance. Aujourd’hui et toujours. Amen.

(Dessin extrait de Brise-chagrins, Vers le sacrement de la réconciliation, éd. Centurion - Cerf, Paris, 1999, p.27)

vendredi 7 juin 2013

10ème dimanche de Temps ordinaire C - 09 Juin 2013

Jalousie ou reconnaissance ?


Devons-nous être jaloux ou reconnaissant en ce dimanche ? Devons-nous regarder ces deux veuves, celle de Sarepta et celle de Naïm avec envie, ou devons-nous tourner notre regard ailleurs, plus loin, plus haut ? Devons-nous les interroger avec colère sur ce qu’elles ont de plus que nous ou au contraire les remercier d’être comme nous ? Selon notre manière de répondre à ces questions, nous entrerons, ou pas, dans une juste compréhension des textes de ce dimanche, et surtout nous révèlerons à coup sûr ce que nous pensons de Dieu. 

La première manière d’aborder la première lecture et l’Evangile qui lui est semblable, c’est de s’interroger : qu’ont-elles de plus que nous, ces deux veuves ? Pourquoi ça leur arrive à elles ? Et en posant ces questions, nous ne pensons pas bien sûr à la mort de leurs enfants, mais bien à la réanimation dont ils bénéficient. Il y a tant d’enfants qui meurent, de manière inexpliquée, injuste. Pourquoi, à ces deux-là, leur rend-t-on leur enfant ? Pourquoi Dieu n’intervient-il pas de pareille manière, aujourd’hui encore, chaque fois qu’un innocent meurt, alors qu’il a encore toute sa vie devant lui ? Notre envie et notre jalousie transforment l’image de Dieu en un juge qui sélectionne qui a le droit de vivre et qui doit mourir. Vous sentez bien, j’espère, que ce n’est pas là la lecture que nous devons faire de ces événements. La veuve de Sarepta, à la mort de son fils, s’adresse au prophète Elie en des termes sévères ; elle aussi a de Dieu une conception erronée. Ecoutez-la bien  quand elle lui dit : Laisse-moi donc, homme de Dieu ! Tu es venu chez moi pour rappeler mes fautes et faire mourir mon fils ! Quel Dieu pourrait ainsi se venger des fautes de l’un sur la vie d’un autre ? Peut-on accorder foi à un Dieu dont la seule occupation serait la comptabilité de nos fautes et la punition de celles-ci ? Si tel était le cas, Dieu ne mériterait ni notre foi, ni notre adoration. Rentrons chez nous, cherchons-en un autre !
 
Mais puisque nous sommes bien ici, puisque nous sommes venus adorer Dieu justement, laissez-moi vous proposer une porte de sortie, qui va renforcer notre foi et rendre à Dieu son visage. La grâce immense dont bénéficient ces deux veuves ne serait pas le fruit d’une loterie ou d’un caprice des dieux, mais bien un geste annonciateur de ce que tous les hommes sont appelés à vivre. C’est encore plus vrai dans l’Evangile. Cette « résurrection » du fils de la veuve de Naïm, est le signe annonciateur de la résurrection de Jésus. En posant ce geste, Jésus s’identifie à Elie, le grand prophète dont on attendait le retour. Il marque ainsi le commencement d’un nouveau temps, le temps où Dieu se révèle à nouveau à son peuple, le temps où Dieu vient libérer son peuple. Jésus annonce déjà qu’il est plus fort que la mort. Il annonce la bonté de Dieu pour son peuple qui souffre. La guérison que pose Jésus n’est pas d’abord un signe de puissance, mais un acte de pitié : Le Seigneur fut saisi de pitié pour elle, et lui dit : Ne pleure pas. Il s’avança et toucha la civière… et Jésus dit : Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi… Et Jésus le rendit à sa mère. Remarquez qu’il n’a interrogé la femme ni sur sa foi, ni sur ses péchés pour savoir si elle méritait quelque considération. Il a eu pitié d’elle. C’est un acte de bonté de la part de Dieu qui devient signe pour les croyants : Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple.
Ce Dieu qui nous visite, le psaume 29 que nous avons chanté en réponse à la première lecture en dresse le portrait juste. Il est le Dieu qui guérit, qui fait remonter de l’abîme, qui fait revivre quand nous descendons à la fosse. Sa colère ne dure qu’un instant, sa bonté, toute la vie. Ainsi, il est le Dieu qui nous ouvre une espérance et un avenir. Ce qui s’est passé là, à Sarepta et à Naïm pour ses deux femmes, arrivera pour nous tous. Quand nous serons appelés à vivre notre grand passage, notre Pâque, il y aura Dieu qui nous relèvera, qui nous fera revivre, désormais avec lui, pour toujours. Ce que Jésus annonce en rendant ce fils à sa mère, il le fait pour nous tous en s’offrant sur la croix. Lui, l’Innocent par excellence, en donnant sa vie, ouvre à tous les hommes un chemin de vie et d’avenir que personne ne pourra plus fermer. Ce qui a été temporaire pour les fils de ces deux veuves sera définitif pour nous. Mieux, nous l’avons déjà. En effet, en Jésus mort et ressuscité, nous revivons ; en Jésus mort et ressuscité, nous avons part à la vie de Dieu. Et la mort, pour difficile qu’elle soit à vivre pour ceux qui restent, devient passage vers plus de vie, passage vers la vie en plénitude auprès de Dieu. Chacun de nous, un jour, s’entendra dire : Je te l’ordonne, lève-toi ! Et nous ferons l’expérience, dans notre chair, de la bonté de Dieu, de sa miséricorde et de son amour. Nos péchés fondront devant lui comme neige au soleil ; il n’y aura plus que son amour. Quelle espérance se dégage ainsi pour nous de l’expérience de ces deux femmes ! Quel avenir s’ouvre ainsi devant nous !
 
Remercions donc ces veuves d’être comme nous ; par leur expérience, elles nous indiquent qui est le Dieu que nous adorons et à quel destin il nous appelle. Il est juste et bon de l’adorer, de le louer et de chanter sa gloire. En ce dimanche, où nous commémorons sa mort et sa résurrection, ne nous en privons pas. Amen.
 
(Photo prise en Iralnde, à Glendalough)