Je vous envoie comme des agneaux
au milieu des loups.
C’est avec ces mots que Jésus envoie en mission soixante-douze disciples pour
qu’ils aillent porter au monde la Bonne Nouvelle du salut. Je ne sais pas pour
vous, mais personnellement, je trouve qu’il y a plus accrocheur et plus
encourageant que ces mots pour envoyer quelqu’un en mission. Etre un agneau au
milieu des loups : pourquoi pas ! Mais à tout prendre, je pense que
beaucoup préfèreraient être le loup au milieu des agneaux ! N’est-ce
pas : on voit tout de suite ce
qu’il y a à gagner dans ce cas de figure.
Je vous envoie comme des agneaux
au milieu des loups. Nous
comprenons bien que, même dans la bouche de Jésus, cela ne peut signifier qu’il
les envoie à l’abattoir ! C’est une mission sérieuse qu’il leur confie,
une mission qui doit apporter du bonheur aux gens, une mission qui doit toucher
le cœur des gens. Il n’envoie pas des kamikazes, mais des porteurs d’une bonne
nouvelle ! Les envoyer comme des agneaux au milieu des loups, c’est les
envoyer avec pour seule force l’Evangile qu’ils doivent annoncer. Ils n’ont que
la force de leur faiblesse ! Des casques bleus de l’Evangile, en quelque
sorte ! Parmi les consignes reçues, il y a celle-ci qui témoigne bien de
l’état d’esprit qui doit être celui des missionnaires : Dans toute maison où vous entrerez, dites
d’abord : paix à cette maison ! Ils ne sont pas envoyés pour
forcer les gens à croire, mais pour leur signifier la paix qui vient de Dieu et
les inviter à vivre dans cette paix.
Je vous envoie comme des agneaux
au milieu des loups.
Il y a aussi quelque chose de prophétique dans cet envoi curieux. Il nous faut
ouvrir le livre du prophète Isaïe pour trouver un écho lointain à cet envoi.
C’est Saint Ambroise, qui, au 4ème siècle, prêchait ainsi : Jésus envoie ses disciples à sa moisson
semée par le Verbe de Dieu mais qui demandait la sollicitude de ses ouvriers,
pour que les oiseaux ne pillent pas la semence répandue, et il dit :
« Voici que je vous envoie comme des agneaux parmi les loups. » Voilà
des animaux ennemis, les uns dévorant les autres ! Le bon Pasteur ne saurait
redouter les loups pour son troupeau : ses disciples sont envoyés, non
pour être une proie mais pour répandre la grâce ; car sa sollicitude fait
que les loups ne peuvent rien entreprendre contre les agneaux. Il envoie donc
les agneaux parmi les loups pour que se réalise cette parole d’Isaïe :
« Alors, loups et agneaux seront ensemble au pâturage. » N’est-ce
pas ce que les disciples ont expérimenté : les soixante-douze disciples revinrent tout joyeux. Ils
racontaient : « Seigneur, même les esprits mauvais nous sont soumis
en ton nom. » Jésus leur dit : « Je voyais Satan tomber du ciel
comme l’éclair. Vous, je vous ai donné pouvoir d’écraser serpents et scorpions
et pouvoir sur toute la puissance de l’Ennemi et rien ne pourra vous faire de mal.
Cependant, ne vous réjouissez pas parce que les esprits vous sont soumis ;
mais réjouissez-vous parce que vos noms sont inscrits dans les cieux. »
Je vous envoie comme des agneaux
au milieu des loups.
Cet envoi reste vrai pour nous aujourd’hui. Chaque baptisé est envoyé comme un
agneau au milieu des loups pour témoigner de la force et de la grandeur de
Dieu. Depuis notre baptême, notre nom est inscrit dans les cieux : les
puissances du Mal ne peuvent rien contre nous si nous restons fidèles à notre
baptême, fidèles au Dieu qui sans cesse nous envoie porter au monde l’Evangile
du salut. Le Christ nous envoie, mais il ne reste pas à ne rien faire ; il
nous accompagne, il nous devance même, lui qui a vaincu toute forme de Mal sur
le bois de la croix. Envoyés comme des
agneaux au milieu des loups, nous portons en nous la victoire du Crucifié.
La faiblesse de nos moyens et de nos personnes est compensée largement par la
puissance du message à transmettre et par la force de celui qui nous envoie.
Avec le psalmiste, nous avons raison de chanter : de là, cette joie qu’il nous donne. Il règne à jamais par sa puissance
(Psaume 65). C’est bien de Dieu qu’il
nous parle, de Dieu qui nous appelle, de
Dieu qui nous envoie, de Dieu qui combat avec nous, de Dieu qui règne sur nous,
maintenant et toujours.
D’un
tel Dieu, je veux bien être envoyé comme un agneau au milieu des loups, parce
qu’avec un tel Dieu, ce n’est pas la taille des crocs qui comptent, mais la
taille du cœur. Et celui de Dieu, nous le savons, est sans mesure. Amen.
(Dessin de Jean-François KIEFFER, Mille images d'Eglise, éd. Presses d'Ile de France)
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