Il est venu chez lui, et
les siens ne l’ont pas reçu. Ainsi parlait Jean dans
le prologue de son évangile entendu le jour de Noël. Il nous rappelait ainsi qu’il
ne suffit pas que Dieu lui-même vienne dans le monde pour que tous accourent. Seuls
quelques bergers se sont dérangés, nous disent les autres évangélistes. Des bergers
et des étrangers. C’est tout le sens de cette fête de l’Epiphanie que nous
célébrons aujourd’hui.
Il est venu chez lui, et
les siens ne l’ont pas reçu. On pourrait un peu vite
dire que c’est bien le cas d’Hérode. Mais ne lui jetons pas trop vite la pierre
en ce jour. Mettez-vous à sa place : des étrangers débarquent chez lui, au
palais, cherchant le roi des Juifs qui
vient de naître ! Enfin, il sait bien qu’il est le roi : il sait
bien aussi que sa femme n’est pas enceinte ; comment un nouveau roi des
Juifs aurait-il pu naître sans qu’il en soit informé le premier, et pour cause ?
Sa surprise n’a rien de déplacé. Vous l’auriez été tout autant à sa place. Elle
n’est même pas condamnable. Il cherche même à comprendre et réunit tout ce que
Jérusalem compte d’intellectuels et de savants. Ils apportent des réponses à
ses questions. Mais il en reste une qui n’est peut-être pas posée : comment
n’ont-ils pas pu voir ce qu’ont vu ces étrangers ? Comment ont-ils pu
seulement permettre une telle surprise ? Il ne suffit donc pas d’être
intelligent pour découvrir le Christ et aller à sa rencontre.
Mais à tous ceux qui l’ont
reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. Ce
qu’affirme Jean ainsi dans son prologue, nul doute que ces étrangers le vivent.
On ne sait pas trop quelle mouche les a piqués pour qu’ils laissent ainsi tout
ce qui faisait leur vie jusqu’à maintenant, pour se risquer dans un voyage
hasardeux et risqué. Ils ont vu une étoile et ils se sont mis en route. C’est
peu de chose, une étoile ! Le ciel en est plein ! Pourquoi, en voyant
celle-là justement, changer sa vie ? Nous ne le saurons jamais ; mais
cela nous apprend que les grandes révélations se font quelquefois par des
petits signes. Nul besoin d’un nouveau big-bang pour que Dieu se révèle à l’homme.
Nul besoin de manifestation extraordinaire pour faire bouger les hommes. Une étoile
dans le ciel a suffi. Une simple lumière nouvelle, et ces hommes se sont mis en
route. Cela en dit long sur cet enfant nouveau-né. Sa venue vient éclairer nos
vies d’une manière particulière ; sa naissance nous remue et nous fait
bouger, si nous savons le reconnaître et l’accueillir. En trois cadeaux, ils
disent qui est l’enfant et son avenir : l’or des rois, l’encens des dieux
et la myrrhe pour l’embaumement des morts. Cet enfant est roi, cet enfant est Dieu,
cet enfant offrira sa vie. Quelle révélation ! Quelle sagesse surtout pour
la saisir ainsi, dès le commencement d’une vie. Assurément c’est un don que Dieu
leur a fait de saisir ainsi ce qu’il a caché aux sages et aux savants de son peuple. Assurément ils avaient le cœur
et l’esprit ouvert à l’irruption de Dieu dans la vie des hommes, dans leur vie.
En venant se prosterner devant lui, ils disent aussi que cet enfant, bien que
né dans un peuple particulier, est venu pour tous les hommes, pour éclairer tout homme, quelle que soit son
origine. Les frontières du peuple de Dieu explosent et s’élargissent dès ce
jour. On comprend mieux que le roi Hérode
fut bouleversé, et tout Jérusalem avec lui. Il n’y a plus de privilège de
caste ou de naissance. Désormais, tout homme a accès au Dieu unique et vrai s’il
désire l’accueillir. Désormais, toutes
les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la
même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Evangile.
Ces
mages et les cadeaux qu’ils offrent nous renvoient à notre propre expérience. Qu’avons-nous
vu en venant à la crèche ? Qu’avons-nous reconnu dans l’enfant qui y est
couché ? Est-il juste pour nous un mignon petit garçon, nouvellement né ?
Ou bien est-il notre roi, notre Dieu, celui qui offrira sa vie pour nous ?
Nous fait-il bouger et nous émerveiller comme ces mages ? Ou nous fait-il
trembler et craindre comme Hérode ? La crèche est-elle un décor joli pour
un mois dans l’année ou est-elle le début d’une aventure qui nous ramènera chez
nous par un autre chemin ?
Au-delà
du côté un peu merveilleux de cette visite des mages, il y a de vraies
questions qui se posent à nous. Nos réponses traduiront notre foi. Si nous
suivons les mages, l’enfant grandira et se fortifiera ; notre vie en sera changée.
Si nous suivons Hérode, l’enfant mourra. Nous le rangerons dans son carton
jusqu’au Noël prochain, mais rien n’aura changé dans notre vie. Avec Noël, nous
nous sommes émerveillés ; avec l’Epiphanie, il faut nous décider. Quel
sera ton choix ? Quelle sera ta voie ? Comme le dit la chanson :
A chacun sa route, chacun son destin,
passe le message à ton voisin. Amen.
(Gustave DORE, Les mages guidés par l'étoile)
(Gustave DORE, Les mages guidés par l'étoile)
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