Dimanche
de la divine miséricorde : ainsi s’appelle donc ce dimanche voulu par
Jean-Paul II. On peut être surpris de ce choix du deuxième dimanche de Pâques,
fin de l’octave, pour une mention particulière ; après tout, ce dimanche n’avait-il
pas déjà sa place à part et son nom (Quasimodo) ? Pourquoi n’avoir pas
choisi plutôt un dimanche à connotation plus pénitentielle pour célébrer la
miséricorde divine, pendant le carême par exemple ? Peut-être simplement
pour nous rappeler que Pâques est bien ce moment où Dieu fait miséricorde.
Relisons
l’évangile de ce jour, qui est le même quelle que soit l’année. Nous y découvrons
les disciples, au soir de Pâques, enfermés dans un lieu dont les portes étaient verrouillées par crainte
des Juifs. Notez le moment de la journée : le soir venu. La mention n’est pas innocente ; depuis le
matin, Jésus ne cesse d’apparaître ; les femmes avaient été chargées de
rassurer les disciples. En vain, semble-t-il ! A moins que la crainte des
Juifs ne se double d’une autre peur : la peur de ce que pourrait dire Jésus,
qu’ils ont lâchement abandonné, renié même pour Pierre, au moment du procès. Après
l’annonce des femmes, ils auraient dû être plutôt heureux, rassurés ; il semble
bien que ce ne soit pas le cas. Pour croire les femmes, pour n’avoir plus peur,
peut-être leur manque-t-il une parole de pardon de la part de Jésus ? Plus
que de le voir, ils ont besoin de l’entendre leur dire qu’il ne leur fait pas
grief de leur abandon. On peut légitimement s’interroger : est-ce la mort
de Jésus qui ne passe pas ou est-ce leur attitude durant ce fameux vendredi qui
leur reste en travers de la gorge ? Toujours est-il que la première parole
que Jésus leur dit lorsqu’il était là, au
milieu d’eux, c’est bien : La
paix soit avec vous ! Ce n’est pas un : coucou, c’est moi, ni
même un : je vous l’avais bien dit que je ressusciterai ! Non, mais
un solennel et réconfortant : La
paix soit avec vous, repris deux fois. Soyez en paix, non seulement
vis-à-vis des Juifs, mais vis-à-vis de vous-même. Ne vous torturez pas l’esprit
pour ce qui s’est passé. N’oubliez pas que pour faire un bon ressuscité, il
fallait d’abord que je fasse un bon mort (cf. Fabrice Hadjadj). Oui, dans cette
salutation, se trouve exprimée la miséricorde de Dieu envers ce groupe des
Apôtres, apeurés à l’idée de ce qui pourrait leur arriver. Jésus vient
simplement, il les rassure et les envoie en mission. Il leur fait miséricorde
pour qu’à leur tour ils puissent témoigner de la miséricorde de Dieu pour tous
les hommes. A qui vous remettrez les péchés,
ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront
maintenus.
Avez-vous
jamais mesuré le terrible pouvoir que Jésus livre ainsi à ses disciples, et à l’Eglise
après eux ? Et il est terrible, non pas pour les gens qui rencontrent les
Apôtres ou l’Eglise, mais pour les Apôtres et l’Eglise eux-mêmes. Seront-ils
jamais à la hauteur de cette miséricorde qui leur a été accordée ? Ne
risquent-ils pas de trahir cette miséricorde en ne l’étant pas assez envers les
autres ? Je comprends bien le discours d’un pape François qui ne cesse de nous
rappeler, à nous prêtres, que nous n’avons pas à nous comporter comme des douaniers ;
je comprends son appel à ne pas être avare de miséricorde, bien au contraire !
Nous devons déborder de miséricorde jusqu’à en inonder le monde, parce qu’elle
ne vient pas de nous, mais du don suprême du Christ sur la croix, qui offre sa
vie pour tous les hommes, les bons comme les méchants, pour ses disciples comme
pour cette foule qui hurle à la mort. La miséricorde de Dieu n’épargne personne ;
elle veut toucher tous les cœurs. C’est bien dans le mystère pascal qu’elle a
sa source. Si nous voulons aujourd’hui être les témoins du Christ ressuscité,
nous n’avons pas d’autre choix que d’être les ambassadeurs de sa miséricorde. Nous
ne pouvons pas profiter des fruits de Pâques si nous refusons d’être apôtre de
la miséricorde. Tout est dit dans cette salutation et dans la mission que Jésus
ressuscité confie à ses Apôtres.
Au
terme de cette première semaine de Pâques, quelle joie de pouvoir célébrer la
miséricorde divine et de nous rappeler que c’est par le don de Jésus sur la croix
et sa résurrection que Dieu nous fait miséricorde. Quelle joie d’entendre Jésus
ressuscité nous redire à tous : La
paix soit avec vous. Ne craignons ni de nous approcher de lui, ni de
témoigner de lui : son Esprit, en nous, supprime notre péché et nous donne
force et courage pour rencontrer le monde et lui dire que la miséricorde de Dieu
est pour tous ceux qui reconnaissent en Jésus celui qui donne vie, espérance et
paix. Ne soyons jamais avare de miséricorde ; ne soyons jamais avare de Jésus
Christ. Amen.
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