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samedi 5 novembre 2016

32ème dimanche ordinaire C - 06 novembre 2016

La vie éternelle, une question de confiance !





Mais quelle prise de tête, ces sadducéens ! Ils ne croient pas à la résurrection, et pour mieux appuyer leur position, ils s’en vont inventer une histoire à dormir debout, d’une femme qui épouse un homme qui a six frères, et celui-ci mourant sans lui laisser d’enfant, elle épouse, en respect de la loi, chaque frère, l’un après l’autre, les épuisant jusqu’au dernier, sans avoir eu d’enfant pour autant et surtout sans que cela n’éveille le moindre soupçon. Avec pareille histoire, je ne m’interroge pas tant sur la résurrection que sur la moralité de cette femme. Ses maris successifs sont-ils morts de leur belle mort ou les a-t-elle aidés un peu ? Voyez à quoi cela mène de compliquer les choses en matière de foi : à l’absurde ! Or la foi, c’est plutôt simple. 
 
Regardez ces sept frères du livre des Martyrs d’Israël. Soumis à la dictature d’un pouvoir totalitaire et absurde, ils font le choix de rester fidèles à leur foi, celle-là même qu’on leur demandait de renier, au risque d’y perdre la vie. Ils ne se découragent pas, ils ne renient pas, même face à la mort, bien au contraire. Pour eux le choix est simple : être fidèle à Dieu ou pas. Ce faisant, ils ne choisissent pas de mourir, ils choisissent de vivre, pour toujours, dans cette foi jadis révélée par Moïse lorsque, devant le buisson ardent, il appelle le Seigneur le Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob. Oui, ils font le choix de la vie, selon cette parole du livre du Deutéronome (30, 15-16) : Vois, je mets aujourd’hui devant toi ou bien la vie et le bonheur, ou bien la mort et le malheur. Ce que je te commande aujourd’hui, c’est d’aimer le Seigneur ton Dieu, de marcher dans ses chemins, de garder ses commandements, ses décrets et ses ordonnances. Alors tu vivras… Ce n’est quand même pas compliqué ! Pour ces sept frères, la vie, la vraie vie, passe par leur mort terrestre puisque le pouvoir en place ne leur permet pas de rester fidèles à la foi de leurs pères. Mieux vaut mourir de la main des hommes, quand on attend la résurrection promise par Dieu. Ils disent ainsi clairement, et sans doute pour la première fois avec autant de force dans un texte de la Première Alliance, leur attachement à Dieu, leur espérance en une vie plus forte que la mort et leur certitude que Dieu les récompensera par une vie marquée du sceau de l’éternité. 
 
Dans l’évangile, Jésus ne dit pas autre chose. D’abord, il ne répond pas aux sadducéens ; leur question ne vaut pas la salive qu’il faudrait pour leur répondre. Mais il les invite à voir plus grand et d’abord à vraiment faire confiance à Dieu. Puisque nous savons déjà que le Dieu d’Israël n’est pas le Dieu des morts mais des vivants, pourquoi ne pas lui faire confiance en tout ? Pourquoi vouloir comprendre comment ça marche ? Pourquoi vouloir faire de la vie en plénitude en Dieu une copie de notre vie terrestre ? La vie ici-bas et la vie en Dieu par-delà la mort sont deux catégories différentes. On ne joue pas dans la même ligue ! Pourquoi, dès lors, vouloir comparer ce qui n’est pas comparable ? Pourquoi se fatiguer à vouloir comprendre un don que Dieu nous fait gratuitement ? Si ton Dieu est le Dieu de la vie, il peut bien te faire vivre par-delà ta mort terrestre ! Ta foi ne serait-elle qu’une idée, des mots que tu prononces sans y croire vraiment ? Est-ce seulement encore une foi si tu as besoin de tout comprendre, de tout appréhender avec des catégories de notre monde ? Ce qui compte, semble dire Jésus, c’est de faire confiance à Dieu, à la puissance de vie qui vient de lui. 
 
La prière de l’Eglise, dans l’une de ces préfaces, nous donne à entendre notre foi à ce sujet : dans cette existence de chaque jour que nous recevons de ta grâce, la vie éternelle est déjà commencée : nous avons reçu les premiers dons de l’Esprit par qui tu as ressuscité Jésus d’entre les morts, et nous vivons dans l’espérance que s’accomplisse en nous le mystère de Pâques (Préface des dimanches n° 6). Puisque notre vie vient de Dieu, elle est déjà le signe de la vie éternelle. Par notre baptême, nous avons déjà part à cette vie et nous espérons qu’un jour elle s’accomplira en nous définitivement. Jésus nous a montré le chemin de cette vie : il s’appelle amour de Dieu et amour du prochain. Voilà ce qui compte, en plus de la confiance en Dieu : aimer à en perdre la raison, aimer absolument, à l’image du Christ Sauveur. Dans l’amour, grandit la vie éternelle qui est en nous. Notre espérance se traduit donc dans une confiance absolue en Dieu qui peut tout, même redonner vie à ceux qui sont morts, et dans un art de vivre qui place le frère au centre de nos préoccupations. Tout le reste n’est que littérature ; tout le reste n’est que conjecture. 
 
Fais confiance à Dieu, et tu vivras. Agis selon la Parole de Dieu, et tu vivras. Aime comme le Christ aime, et tu vivras. Il n’y a là rien d’extraordinaire. Tout est donné de manière très claire. Il faut juste le vivre. Mais peut-être est-ce là, le vrai problème pour nous : passer de la parole aux actes et marcher humblement en présence de Dieu, en toute chose. Mais si, pour une fois, nous essayions, sans trop nous poser de question ? Si nous nous mettions à aimer vraiment ? Si nous refaisions une place à Dieu dans notre monde ? Notre monde en serait bouleversé, assurément ; notre espérance deviendrait réalité. Plutôt que de nous casser la tête sur des hypothèses fallacieuses, donnons-nous une chance de vivre ce que nous croyons et de croire ce que nous espérons. Amen.

(Michel-Ange, La création d'Adam, Détail de la fresque, Chapelle Sixtine)

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