Je ne le dirai sans doute jamais assez, ni
assez fort, ni avec assez de conviction, mais nul n’est disciple pour lui-même,
nul n’est chrétien pour lui-même. Je suis disciple du Christ, je suis chrétien
pour les autres. Être pour les autres, c’est constitutif de l’être chrétien. N’est-ce
pas ce que nous enseigne Jésus aujourd’hui dans l’évangile ?
Lorsqu’il nous dit : Vous êtes le sel de la terre ; vous
êtes la lumière du monde, ce qui est important, ce n’est pas ce qu’il dit de
nous (vous êtes sel, vous êtes lumière) ;
non, ce qui compte, c’est bien à qui nous sommes destinés : la terre, le monde. Car être sel ou être
lumière ne sert à rien si c’est juste pour nous. Être sel n’a aucune valeur si
nous ne donnons le goût de Jésus à personne. Être lumière n’a aucun intérêt si
nous n’éclairons pas le monde. Toute la force de l’enseignement de Jésus en ce dimanche
tient dans ces destinataires : la terre et le monde. Si nous n’avons pas
le souci d’eux, si nous n’avons pas le souci de leur conversion au Christ, nous
ne servons à rien. Nous sommes comme ce sel qui a perdu sa saveur ; nous
sommes comme cette lampe qu’on a caché sous un lit. Totalement inutiles !
En nous disant : vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde, Jésus nous
renvoie donc à la dimension missionnaire de notre baptême. Il ne veut pas que
nous vivions repliés sur nous-mêmes, mais donnés aux autres. L’Eglise, ce n’est
pas le cercle des amis de Jésus ; l’Eglise, c’est l’envoyée du Christ dans
le monde afin qu’elle y fasse connaître le nom de Jésus, qu’elle y manifeste la
miséricorde du Père, qu’elle entraîne à la suite du Christ ceux qui ne le
connaissent pas encore. Être chrétien, ce n’est donc pas une activité pour le
dimanche matin quand il n’y a pas mieux à faire ; être chrétien, c’est une
qualité de tous les jours, de chaque instant. Le prophète Isaïe le dit à sa manière
à tout croyant quand il invite à traduire la foi en actes : partage ton pain avec celui qui a faim,
accueille chez toi les pauvres sans abri, couvre celui que tu verras sans
vêtement, ne te dérobe pas à ton semblable. C’est une constante dans l’enseignement
donné au nom de Dieu : l’autre, le prochain, le semblable doit être au cœur
du croyant. Parce que c’est l’autre, le prochain, le semblable qui témoignera
du goût de ton sel, de la clarté de ta lumière. Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole
malfaisante, si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles
les désirs du malheureux, ta lumière se lèveras dans les ténèbres et ton
obscurité sera lumière de midi.
La célébration de l’eucharistie qui nous
rassemble chaque dimanche nous permet de revenir à la source, d’entendre le Christ
nous redire ce qui est essentiel pour nous. Mais surtout elle est le lieu où nous
nous laissons envoyer par lui dans ce monde que Dieu aime et à qui il veut se
révéler. Mettons-nous à disposition du Christ et de son projet d’amour pour
tous les hommes et notre monde deviendra plus juste et plus fraternel parce
qu’éclairé par la lumière du Christ. Ne soyons pas disciple pour nous-mêmes
mais pour que le monde croit. Amen.
(Dessin de Mr Leiterer)
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