Dimanche dernier, la liturgie nous
invitait à nous élever à la hauteur de Dieu lui-même. L’horizon qui nous était
indiqué, n’était rien moins que la sainteté de Dieu lui-même : Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu,
je suis saint. Mais voilà, vous et moi, nous savons bien que cela est plus
vite dit que fait. Et si nous n’y arrivions pas ?
La première lecture de ce dimanche
semble se faire l’écho d’un tel échec. Il semble n’y avoir plus rien entre
Jérusalem et son Seigneur. Ecoutez-la se plaindre : Jérusalem disait : Le Seigneur m’a abandonnée, mon Seigneur m’a
oubliée. Le temps de la splendeur est passé ; Jérusalem n’est plus
rien. C’est la catastrophe, la ruine complète. Ce qui est surprenant, c’est l’attitude
très humaine de Jérusalem. Elle ne semble pas se remettre en cause. Elle accuse
Dieu de l’avoir abandonnée. ; il serait la cause de tous ses malheurs. N’est-ce
pas là notre attitude devant les difficultés de la vie ? Trouver un
responsable, autre que nous, qui nous empêcherait de trop nous regarder, de
trop chercher en nous ce qui a pu causer les difficultés. Cela se traduit
parfois par un : Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu ? Dieu, la
cause de tous nos malheurs ! Si tel est le cas, il faudrait s’en
débarrasser. Mais écoutez bien Jérusalem. Dans sa plainte, n’y a-t-il pas aussi
le regret des jours passés et le désir de retrouver quelque chose de sa
splendeur éteinte ? Sa plainte ne serait pas alors accusation, mais bien
lamentation, au sens du lamento, ce chant de tristesse et de déploration. Jérusalem
s’est bien regardée, elle sait ce qui l’a conduit à cet éloignement de Dieu. Et
elle veut croire, dans sa lamentation, que ce n’est peut-être pas trop tard !
En prononçant ce que l’on peut entendre comme une prière, elle espère une
réponse, une réaction. Dieu peut-il rester sourd ?
La réponse ne tarde pas : Une femme peut-elle oublier son nourrisson,
ne plus avoir de tendresse pour le fils de ses entrailles ? La
question peut surprendre et celles et ceux qui sont parents savent bien que
cela est impossible. Quand on a donné la vie, on est engagé à vie. Et quand
bien même le rejeton devait décevoir, les parents n’en seraient pas moins
parents. Pour Dieu, c’est pareil et même plus fort encore : Même si elle l’oubliait, moi, je ne t’oublierai
pas, dit le Seigneur. Quelle belle espérance s’ouvre pour tous les hommes !
Ils ont la certitude de n’être jamais laissé à eux-mêmes ; ils ont la
certitude de n’être jamais seuls. Tous les hommes peuvent bien les oublier y
compris leurs parents, Dieu n’oubliera aucun de ceux qu’il a appelés à la vie. Il
est le rocher sur qui nous pouvons
nous appuyer ; il est le refuge
qui nous protège ; il est notre salut.
Tout est dit par le psalmiste qui répond ainsi à la promesse de Dieu d’être
toujours avec nous : Je n’ai de
repos qu’en Dieu seul, mon salut vient de lui.
Avons-nous cette même certitude
ancrée profondément en nous ? Savons-nous, dans la détresse, crier vers Dieu
avec confiance, sûrs non seulement qu’il peut quelque chose pour nous, mais sûrs
aussi qu’il va intervenir en notre faveur ? Nous sommes à trois jours de l’entrée
en Carême, un temps béni pour réapprendre à crier vers Dieu en confiance. Ce dimanche
nous donne déjà le ‘la’, un avant-goût de la confiance retrouvée, un avant-goût
de la tendresse de Dieu à notre égard. Si la rudesse du Carême à venir venait à
nous décourager, souvenons-nous de ce dimanche qui nous rappelle que nous
recevons tout de Dieu. Il est le seul que nous devons chercher ; il est le
seul dont nous devons avoir le souci parce que lui, le premier, a le souci
permanent de nous : Je ne t’oublierai
pas, dit le Seigneur ! Il nous veut à sa hauteur, il nous met à sa hauteur,
pour sa gloire et notre salut. Amen.
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