Chaque
année, au quatrième dimanche de Pâques, l’Eglise nous invite à prier pour les
vocations. Nos communautés sont invitées à se tourner vers Dieu pour lui
demander les prêtres, les religieux et les religieuses dont elles ont besoins. Cette
journée devrait être l’occasion, dans nos familles, d’oser la question :
et toi, répondras-tu à l’appel que le Seigneur t’adresse ? Car, au fond, c’est
bien de cela qu’il s’agit : être les relais de Dieu pour que son appel à le
servir et à servir les frères soit entendu. La teneur de notre seconde lecture
nous oblige alors, cette année, à nous interroger tous et à découvrir que tous,
nous sommes appelés par Dieu à quelque chose de grand.
Laissez-moi vous relire le début de
cette lecture : Bien-aimés, voyez
quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu
– et nous le sommes. La grandeur de l’homme, c’est d’être reconnu enfant de
Dieu. C’est notre vocation commune. C’est pour réaliser ce grand dessein que Dieu
a livré son Fils unique sur la croix. L’ancienne tradition liturgique était
encore plus précise à mon sens lorsqu’elle proclamait : voyez comme il est grand l’amour dont le
Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu –
et nous le sommes. C’est le désir profond de Dieu que nous soyons ses
enfants ; c’est son désir profond d’appeler tous les hommes à partager sa
vie. C’est le désir profond de Dieu que l’homme réussisse sa vie en la plaçant
sous son regard à lui, qui nous aime passionnément. Mesurons-nous pleinement ce
que cela signifie d’être enfant de Dieu ? Nous le sommes tous par notre
baptême ; ce n’est pas une parole en l’air ; c’est notre réalité. Appelés
enfant de Dieu, partageant désormais sa vie, nous devenons pour les autres le
miroir de cette vie divine. En nous voyant vivre, ils devraient pouvoir
contempler cette vie divine, la désirer et enfin la partager à leur tour. C’est
vraiment la vocation commune à tous les hommes ; c’est vraiment la raison
du sacrifice de Jésus sur la croix. A travers nous, Dieu se donne un peuple. A travers
le Christ, il veut attirer à lui les peuples de la terre.
Bon, il est vrai que ce n’est pas toujours
évident à reconnaître. La vie divine qui devrait rayonner en nous, nous la cachons
bien. Jean précise que le monde ne nous
connaît pas parce qu’il n’a pas connu
Dieu. Il est gentil, Jean, quand il nous dit ainsi que cette filiation
divine ne peut se reconnaître en quelqu’un que lorsque celui qui regarde
connaît lui-même Dieu. Et pour une part, il a raison. Comment puis-je nommer la
présence de Dieu en quelqu’un si j’ignore qui est Dieu ? Il faut connaître
Dieu pour le reconnaître en quelqu’un. Mais il faut aussi que celui qui porte Dieu
soit conscient de qui il porte, de ce qu’il est. Cela facilite quand même grandement
les choses. Je ne suis pas persuadé qu’aujourd’hui, chaque croyant ait bien
conscience de la grandeur qui est la sienne. Nous préférons, par confort,
cacher ce que nous sommes ; que voulez-vous, on nous a tellement dit que
dans une République laïque, ce qui relève de la foi devait rester personnel et
confidentiel ! Mais Dieu ne nous a pas appelé pour rester entre nous !
Il nous appelle à vivre selon sa Parole, comme ses enfants, pour le bien commun,
devant et au milieu de tous les hommes ! Enfants de Dieu, ne sommes-nous
pas sel de la terre et lumière du monde ?
Dès maintenant,
nous sommes enfants de Dieu, dit encore saint Jean. Il faut bien entendre le « dès maintenant ». La filiation
divine est un don fait à chaque croyant dès son baptême. Ce n’est pas pour plus
tard, quand nous serons morts et en paradis ! Il y a urgence à nous
souvenir de cela et à vivre en enfants de Dieu, à témoigner du Christ mort et
ressuscité. Le pape François, dans son exhortation Gaudete et exsultate rappelle bien que la sainteté (l’autre nom de
la filiation divine) est à vivre au quotidien : Nous sommes tous appelés à être des saints en vivant avec amour et en
offrant un témoignage personnel dans nos occupations quotidiennes, là où chacun
se trouve. Es-tu une consacrée ou un consacré ? Sois saint en vivant avec joie
ton engagement. Es-tu marié ? Sois saint en aimant et en prenant soin de ton
époux ou de ton épouse, comme le Christ l’a fait avec l’Église. Es-tu un
travailleur ? Sois saint en accomplissant honnêtement et avec compétence ton
travail au service de tes frères. Es-tu père, mère, grand-père ou grand-mère ?
Sois saint en enseignant avec patience aux enfants à suivre Jésus. As-tu de
l’autorité ? Sois saint en luttant pour le bien commun et en renonçant à tes
intérêts personnels (n°14). C’est bien dans l’aujourd’hui de notre vie que
nous avons à nous reconnaître comme enfant de Dieu, à grandir en sainteté. Le
pape François rappelle encore que le
défi, c’est de vivre son propre engagement de façon à ce que les efforts aient
un sens évangélique et nous identifient toujours davantage avec Jésus-Christ (n°28). Nous sommes enfants de Dieu,
identifiés à Jésus Christ, le Fils unique de Dieu, pour vivre de plus en plus
comme le Christ, entièrement donné à Dieu et aux autres. Certains vivent cet
appel dans une vocation plus particulière, dans un style de vie plus
particulier ; mais cela n’enlève rien au fait que chaque croyant doit
vivre en témoignant de Celui qui le fait vivre, en témoignant de Celui qui
donne sens à sa vie et à son action.
En ce dimanche des vocations,
prions pour que nous devenions toujours plus conscients de notre vocation
fondamentale et première : nous sommes enfants de Dieu. Sans cette
conscience bien ancrée et bien vécue par tous, comment pouvons-nous imaginer
que des vocations particulières puissent naître ? Si nous manquons à notre
être profond d’enfants de Dieu, nous manquerons aussi de pasteurs pour nous guider.
Mais si se lève un peuple nombreux, conscient de sa vocation profonde, Dieu ne
restera pas sourd à ses appels et lui donnera les pasteurs dont il a besoin. J’en
suis convaincu. Amen.
(Dessin de M. Leiterer)
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