Nous voici donc arrivés près de ce
signe particulier de la crèche où naît en cette nuit l’Enfant-Dieu, promis par
les prophètes. Nous voici à contempler une grotte, une mangeoire, un lieu pauvre,
dénué de toute splendeur extérieure. Ce n’est pas le lieu vers lequel l’homme
court pour passer ses vacances d’hiver. Ici, rien n’est luxe, calme ou volupté.
Ici, tout n’est que rejet, pauvreté, et pourtant grande joie.
Dans une lettre apostolique signée à
Greccio, le premier décembre de cette année, le Pape François nous invite à
méditer ce signe de la crèche, lieu où Dieu non seulement rencontre l’homme,
mais se fait homme. Nous découvrons [là], écrit le Pape, qu’Il
nous aime jusqu’au point de s’unir à nous, pour que nous aussi nous puissions
nous unir à Lui. C’est ce mystère-là qu’il nous faut sans cesse
approfondir : Dieu qui se fait homme pour que l’homme puisse devenir
Dieu ; Dieu qui se fait tout petit pour que l’homme puisse devenir, par
Lui, tout grand. Pour entrer dans ce mystère, il faut donc que l’homme
reconnaisse qu’il vit sa vie en petit, quand il la vit sans Dieu. Seul Dieu
peut faire parvenir l’homme à sa pleine stature ; seul Dieu peut faire
vivre l’homme debout ; seul Dieu peut rendre l’homme vraiment libre.
Méditer le mystère de la crèche,
c’est aussi déjà méditer le mystère de l’Eucharistie. Se situant pleinement
dans la Tradition de l’Eglise, le Pape François nous rappelle que le Christ
s’est incarné pour devenir notre nourriture. En entrant dans le monde, écrit-il,
le Fils de Dieu est déposé à l’endroit où les animaux vont manger. La paille
devient le premier berceau pour Celui qui se révèle comme le « pain
descendu du ciel » (Jn 6, 41). Il nous faudrait donc consentir à plier
le genou devant la crèche comme nous le faisons devant le Saint Sacrement
exposé. Ici, dès le commencement de sa vie, Jésus se donne, se livre
entièrement. Toute sa vie est déjà là, dans cette pauvre mangeoire. Du bois de
la crèche au bois de la croix : il semblerait que le seul élément qui
accueille toujours le Christ, au début comme à la fin de sa vie, soit bien le
bois. Seul avec Marie et Joseph pour entrer dans le monde, seul avec Marie et
Jean pour quitter ce monde : la vie de Jésus n’est qu’abandon. Seul Dieu
le Père veille sur ce Fils qui s’abandonne d’abord à Lui et à sa volonté. A la
crèche, nous touchons du doigt la pauvreté du Fils de Dieu, venu humblement
dans le monde.
C’est cette pauvreté que l’autre François,
le pauvre d’Assise, voulu ressentir. C’est là l’origine de nos crèches que le
Pape nous encourage à installer dans nos maisons, dans nos écoles, sur nos
places. François d’Assise voulait, selon les Sources franciscaines, représenter
l’Enfant né à Bethléem, et voir avec les yeux du corps, les souffrances dans
lesquelles il s’est trouvé par manque du nécessaire pour un nouveau-né,
lorsqu’il était couché dans un berceau sur la paille, entre le bœuf et l’âne. C’est
un homme du lieu qui a tout préparé selon le vœu de saint François. Le 25
décembre, quand François arriva, il trouva la mangeoire avec la paille, le
bœuf et l’âne. Les gens qui étaient accourus manifestèrent une joie indicible
jamais éprouvée auparavant devant la scène de Noël. Puis le prêtre, sur la
mangeoire, célébra solennellement l’Eucharistie, montrant le lien entre
l’Incarnation du Fils de Dieu et l’Eucharistie. A cette occasion, à Greccio, il
n’y a pas eu de santons : la crèche a été réalisée et vécue par les
personnes présentes. Nous sommes, ce soir, les santons de notre crèche.
Nous sommes venus avec ce qui fait nos vies ; nous pouvons déposer tout
cela devant l’Enfant nouveau-né ; nous pouvons lui offrir nos vies,
qu’elles soient bien droites ou toutes abimées, lumineuses ou plongées dans les
ténèbres. La seule chose qui importe au Christ, c’est que nous lui fassions
l’offrande de notre vie. Quand il offrira la sienne sur la croix, il prendra
avec lui toutes nos vies offertes ; quand il entrera dans sa gloire, il
emportera toutes nos vies offertes.
Nous pouvons, devant la crèche,
mesurer pleinement l’amour et la tendresse de Dieu pour nous. Comme nous le
rappelle le Pape dans sa Lettre, en Jésus, le Père nous a donné un frère qui
vient nous chercher quand nous sommes désorientés et que nous perdons notre
direction ; un ami fidèle qui est toujours près de nous. Il nous a donné
son Fils qui nous pardonne et nous relève du péché. Ne cherchez rien
d’autre à la crèche que cet amour et cette tendresse de Dieu pour vous. Vous ne
trouverez pas la gloire ici ; vous ne trouverez pas la richesse ici. Mais
à la crèche, vous trouverez celui qui veut devenir votre gloire ; à la
crèche, vous trouverez celui qui veut être votre unique richesse. Dès à
présent, il vous invite à le suivre sur le chemin de la simplicité et de
l’humilité ; dès à présent, il vous invite à le suivre sur le chemin de
l’amour donné et du service à accomplir. La crèche, on y vient pour trouver du
courage ; on en repart missionnaire, joyeux d’avoir rencontré le visage
véritable de Dieu qui prend soin de tous les hommes.
Aujourd’hui vous est né un
Sauveur. Ce message de l’ange aux bergers est pour nous, ce soir. C’est
Noël, Dieu qui vient chez nous. Nous ne célébrons pas l’anniversaire de sa
venue, mais bien cet aujourd’hui de Dieu qui fait irruption dans notre vie.
Venons à la crèche pour voir le Roi du monde. Venons à la crèche trouvons-y
notre vie, notre paix, notre joie. Amen.
(Photo prise à Greccio, Exposition de crèches venues du monde entier).
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