Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché
du monde. Telle
est l’affirmation de Jean le Baptiste lorsqu’il voit Jésus venir vers lui.
Les gens qui étaient là, autour de lui,
ont-ils bien compris le sens de cette affirmation ? Et nous, qui reprenons
cette parole dans notre liturgie eucharistique, comprenons-nous bien ce que
nous affirmons lorsque nous prononçons ces mots ?
Voici l’Agneau de Dieu. Déjà rien que
cette appellation singulière, pour la comprendre, il nous faut nous souvenir des
rites de la Pâque juive, lors de laquelle un agneau sans défaut est sacrifié et
partagé au cours d’un repas. Son sang versé est, au moment de la sortie d’Egypte,
le signe de l’alliance entre Dieu et les hommes, le signe de la promesse de Dieu
de ne pas exterminer son peuple en même temps que les premiers-nés des Egyptiens.
Ce sang est source de salut, source de vie pour tous ceux qui sont dans une
maison marquée du sang de l’agneau. En identifiant
Jésus à l’Agneau de Dieu, Jean le Baptiste identifie clairement Jésus comme
celui qui vient sauver les hommes et comme celui qui est la vie des hommes. Ceux
qui sont là, sur les rives du Jourdain, n’en ont sans doute pas conscience,
mais ils pourront le découvrir en marchant à la suite de Jésus, en faisant
confiance au témoignage de Jean le Baptiste. Ce témoignage n’est pas vain,
puisqu’appuyé sur la parole de celui qui l’a envoyé baptiser : Moi, je
ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit :
‘Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans
l’Esprit Saint.’ Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils
de Dieu. Tout est dit ; tout est certifié ; mais tout est-il
entendu ? Tout est-il cru ?
Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché
du monde. Ainsi
est formulée l’affirmation complète de Jean le Baptiste. Il faut nous y
intéresser car elle nous dit comment Jésus nous sauve. Il ‘enlève le péché
du monde’ recouvre une double réalité, un double mouvement. Le premier
mouvement consiste à prendre sur lui notre péché : il nous en débarrasse. Le
Mal auquel nous nous habituons si bien, la violence dont nous sommes friands, l’orgueil
qui nous fait nous prendre pour Dieu, il les ôte de notre vie. Il nous en
libère, rendant à notre humanité son véritable visage. Il fait œuvre de
salubrité publique en nettoyant ainsi nos vies. Il nous redit que nous pouvons
vivre sans tout cela ; le péché n’est pas nécessaire à nos vies d’hommes ;
le péché est même une entrave à notre rencontre avec Dieu. Jésus nous rend à
nouveau beau devant Dieu en prenant sur lui ce qui assombrit notre vie, ce qui
enlaidit notre existence. Libérés du péché par le Christ, nous sommes à nouveau
aimables.
C’est le second mouvement de cette
expression : il enlève le péché du monde. En effet, enlevant le
péché de notre vie, il l’enlève aussi de devant le regard de Dieu. Quand Dieu,
après le sacrifice du Christ, regarde notre vie, il ne voit plus notre péché
que le Christ a fait disparaître. Il nous voit à travers son Fils, ce Fils
plein de grâce et de vérité, ce Fils qu’il a donné par amour du monde, ce
Fils qu’il a offert pour que le monde soit sauvé. Dieu nous voit à nouveau tel
qu’il nous a créés ; il voit en nous son Fils unique qui n’est qu’obéissance
au Père, Amour donné, Amour livré, Amour plus fort que la mort même. Ayant été
aimés du Christ au point qu’il prenne sur lui notre péché et le fasse disparaître,
nous pouvons être pleinement aimé du Père qui reconnaît en nous la trace du
passage de son Fils bien-aimé, celui en qui il trouve toute sa joie. Ainsi
nous savons que nous sommes réellement libérés du péché puisque vivants à
nouveau de la grâce de Dieu, vivants à nouveau sous le regard aimant du Père.
L’expression « Voici l’Agneau de Dieu
qui enlève le péché du monde » n’est donc pas une parole poétique sur Jésus.
Elle nous dit tout de la vie et de l’œuvre de celui qui s’approche de Jean le
Baptiste ; elle nous dit tout de la vie et de l’œuvre de celui qui s’approche
de notre vie pour que nous l’accueillions et le suivions, jour après jour. Il nous
veut sauvés et libres. Il nous veut acquis à Dieu, son Père. C’est celui-là que
nous reconnaîtrons tout à l’heure dans le Pain consacré et partagé : Jésus,
le Christ, qui vient à nous, se fait notre nourriture, pour nous sauver en nous
donnant sa vie, en prenant sur lui notre péché. Il est celui qui rend possible
notre conversion ; il est celui qui rend possible notre vie. Avec Jean,
confessons et témoignons qu’il est l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du
monde. Avec Jean et tous les témoins de l’Evangile qui ont proclamé le Christ
à travers les siècles, témoignons de lui par notre vie renouvelée et libérée, afin
que le monde croie et se convertisse à une vie qui plaise à Dieu. Amen.
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