L’homme
peut-il croire en Dieu de lui-même ? L’homme peut-il croire en Dieu quand
les événements de l’histoire semblent proclamer la mort de Dieu, voire son
inexistence ? Ces questions sont souvent évoquées lorsque je discute avec
des adultes qui découvrent que certains ont une foi inébranlable alors
qu’eux-mêmes sont habités par le doute. Un début de réponse est apporté par les
textes liturgiques de ce 3ème dimanche de Carême. Nous pouvons
résumer cette réponse dans l’affirmation du Christ : Si tu savais
le don de Dieu…
Si
tu savais le don de Dieu. Une phrase
que le peuple hébreu, libéré d’Egypte, aurait déjà pu se poser. Être libérés de
l’esclavage, tous étaient d’accord. Marcher dans le désert vers la Terre
promise, c’était une épreuve acceptable et nécessaire. Mais tourner en rond,
alors qu’avant, la marmite était si bonne et que l’eau ne manquait pas, voilà
qui est inacceptable ! Le but de Dieu était-il donc de faire mourir son
peuple loin d’Egypte ? Ses récriminations incessantes parviennent devant
Dieu. Il aurait pu se fâcher, Dieu, à juste titre. N’a-t-il pas déjà tant fait
pour eux ? Et eux, qu’ont-ils fait, à part se plaindre ? A croire que
tout leur est dû, sans effort de leur part. Plutôt que de se fâcher, Dieu va
répondre à leur attente : il va manifester une fois de plus son amour à ce
peuple difficile. Il donnera l’eau. Sans rien demander en échange. Sans même
demander une foi plus profonde. Sans même attendre une action de grâce pour le
don accordé. Immense amour de Dieu qui comble de ses bienfaits même ceux qui
s’interrogent sur sa présence ! Si tu savais le don de Dieu, si tu
te souvenais de tout ce qu’il t’a déjà donné, peut-être n’aurais-tu pas osé en
demander plus, sans d’abord faire toi-même quelque chose pour ton Dieu !
Si
tu savais le don de Dieu, c’est
l’affirmation de Jésus à la Samaritaine qui s’étonne que celui-ci lui adresse
la parole pour un verre d’eau ! Il l’invite à voir au-delà des
apparences ; il l’invite à s’ouvrir à un Autre, à celui qui peut tout
donner, à celui qui est source vive. Il l’invite à la foi, révélant ainsi que
nul ne peut approcher Dieu, si Dieu ne l’approche d’abord ; nul ne peut
connaître Dieu en vérité, si Dieu ne se révèle à lui. Et lui, Jésus, est justement
la Parole ultime de Dieu. Il est celui qui peut combler tous nos espoirs,
toutes nos attentes. Il est celui qui nous ouvre à la vie, à la vraie vie.
Petit à petit, il invite cette femme à croire qu’il est vraiment le Messie
attendu. A son enseignement, la Samaritaine, mais aussi tous les habitants de
son village, vont croire en Jésus. Ils vont croire d’abord sur la foi du
témoignage de la femme ; ensuite, sur les paroles même du Christ : Ce
n’est plus à cause de ce que tu nous as dit, que nous croyons ;
nous-mêmes, nous l’avons entendu, et nous savons que c’est vraiment lui le
Sauveur du monde. Le don de Dieu réside en cela : c’est la rencontre
personnelle avec lui qui rend possible la foi. Le témoignage des autres est
important pour éveiller la foi, mais il est insuffisant. Il est nécessaire
de fréquenter soi-même la source pour croire. Pourquoi tant de
baptisés par tradition sont-ils finalement loin de l’Eglise et de toute
pratique ? Parce qu’ils n’ont pas fait cette rencontre personnelle de
celui qui les a reconnus comme ses fils ou ses filles. Parce qu’ils n’ont pas
bu à la source de sa Parole. Le don de Dieu, le don de la foi est
inépuisable ; sauf si l’homme ne s’en sert pas !
Si
tu savais le don de Dieu. Jésus nous dit
que Dieu lui-même nous apprend la foi. Il nous en fait don ! Redécouvrons
la force de ce don de la foi ; il nous donne de croire que, dès
maintenant, tout pécheur que nous sommes, nous sommes sauvés dans la
mort/résurrection de Jésus. Accueillons ce don ; il fait jaillir en nous
les sources vives de la foi. Seule une fréquentation personnelle du Christ et
de son Evangile pourra apaiser notre soif de vie, notre soif d’amour, notre
soif de Dieu. Approchons de son autel : Dieu se donne en nourriture pour
notre vie. Connaissons le don Dieu et nous vivrons. Amen.
(Tableau de Philippe de CHAMPAIGNE, La Samaritaine, XVIIème siècle, Musée des Beaux Arts, Caen)
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