Le Christ Jésus, ayant la condition
de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est
anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Cet extrait de la
lettre aux Philippiens donne le ton de ce qui se joue en ce dimanche des
Rameaux et de la Passion. Ce qui se joue, ce n’est pas tant le premier jour des
événements de la Passion ; ce qui se joue, c’est l’apprentissage du chemin
de Dieu. Le salut des hommes ne se fait pas par eux ; c’est le Christ qui
sauve. Mais il ne se fait pas non plus sans eux : ils doivent (nous
devons) apprendre le chemin de Dieu et entrer, comme Jésus, dans la
condition de serviteur. Et si je lis bien l’hymne aux Philippiens, il
revient aux hommes d’apprendre de Dieu à être véritablement hommes.
En effet, il semblerait que ce soit
là la condition première des hommes. Relisez bien ce qui est dit de
Jésus : Il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant
semblable aux hommes. La compréhension que j’ai de ce verset, c’est qu’en
prenant la condition de serviteur, Jésus devient semblable aux hommes. Ou, pour
le dire autrement, en devenant homme, il devient serviteur. Nous devons donc
bien apprendre de Jésus à être pleinement homme, en entrant dans cette
condition de serviteur. C’est là notre condition première. Et les événements de
la Passion, pris dans leur totalité, nous le rediront. Jésus vit cette
condition dans l’obéissance absolue à son Père, en se soumettant à la loi des
hommes. Ce n’est pas Dieu qui condamnera son Fils à mort ; ce sont les
hommes. Ce n’est pas Dieu qui veut faire mourir son Fils ; ce sont les
hommes. Ce n’est pas Dieu qui a besoin d’une preuve de la relation qui l’unit à
son Fils ; ce sont les hommes qui ne cessent de remettre en cause, dans
les jours qui précèdent la Passion, la filiation divine de Jésus. Il suffit de
relire les évangiles de la cinquième semaine de Carême pour s’en convaincre.
Être serviteur : voilà qui ne
semble pas déranger Jésus. Il s’inscrit parfaitement, tout au long de sa Passion,
dans les prophéties faites par Isaïe, présentant le Messie sous les traits d’un
serviteur qui se laisse faire, qui n’oppose pas de résistance, qui accepte tout
dans une grande confiance en Dieu : Le Seigneur Dieu vient à mon
secours. Si notre Seigneur et Maître s’est fait serviteur en devenant
homme, ou s’est fait homme en devenant serviteur, combien plus devons-nous
entrer, nous qui sommes hommes, dans cette condition de serviteur. Là se trouve
la condition de notre salut. Nous ne serons pas sauvés parce que Jésus a été à
la mort ; nous serons sauvés, par Jésus, mort et ressuscité, parce que
nous accepterons de nous situer en disciples de ce Maître, en serviteurs de
Dieu et de nos frères. C’est en acceptant d’être pleinement serviteurs, que nous
deviendrons fils, à la suite du Fils unique, qui livrera sa vie dans un unique
sacrifice pour tous les hommes. C’est parce que nous serons pleinement homme,
donc serviteurs, que nous aurons accès au salut que Jésus propose aux hommes.
Si nous refusons de vivre notre humanité dans toutes ses dimensions, y compris
celle du service, nous ne pourrons pas être sauvés. Refuser la condition de
serviteur revient à refuser la condition humaine, condition nécessaire pour
être sauvé par Jésus. Il s’est fait homme, pleinement, totalement, pour sauver
les hommes. Si nous nous comportons comme des loups, nous ne pourrons pas être
sauvés, parce que nous ne sommes ajustés ni à ce qu’est notre être profond
(être humain), ni à Jésus qui a pris sur lui notre humanité. Il n’y a pas
d’autre choix que d’accepter d’être serviteur.
Prenons le temps de relire ces
textes que l’Eglise propose à notre méditation en ce dimanche. Apprenons de
Jésus le chemin du serviteur pour avoir notre part à sa gloire quand il aura
accompli son chemin jusqu’au bout. Aujourd’hui, prenons sur nous de le suivre
sur ce chemin de la Passion, de le suivre jusque bout, en hommes libres, en
serviteurs fidèles, en témoins véritables. Au bout, il y a la Pâques du Christ.
Au bout, il y a notre Pâques, le passage de tous les serviteurs vers la gloire
des fils de Dieu rassemblés. Suivons Jésus et vivons son enseignement. Amen.
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