Bienvenue sur ce blog !

Ce blog voudrait vous permettre de vivre un chemin spirituel au rythme de la liturgie de l'Eglise catholique.

Les méditations s'appuient soit sur les textes bibliques quotidiens, soit sur la prière de l'Eglise.

Puisque nous sommes tous responsables de la foi des autres, n'hésitez pas à laisser vos commentaires.

Nous pourrons ainsi nous enrichir de la réflexion des autres.







samedi 16 novembre 2024

33ème dimanche ordinaire B - 17 novembre 2024

 Crainte ou espérance ?






Pour qui est un tant soit peu attentif, il est facile de repérer la fin de l’année liturgique, parce qu’elle est précédée de ces textes aux couleurs d’apocalypse : grande détresse, soleil s’obscurcissant, lune sans éclat, étoiles tombant du ciel, et j’en passe. Qu’ils viennent du Premier ou du Nouveau Testament, ils sont faits à l’identique et peuvent déclencher en nous crainte ou espérance. 

De nombreux mouvements, qu’ils soient politiques ou religieux jouent sans vergogne sur ce sentiment de crainte. La récente campagne électorale aux Etats-Unis nous a montré ce que la crainte engendre : des affirmations à l’emporte-pièce jamais vérifiées, la désignation de boucs émissaires, des mesures drastiques annoncées pour conjurer le mauvais sort (il a quand même été question de déportation !), pour finir par la victoire de l’irrationnel, du mensonge, et une société profondément divisée. Il n’est pas besoin de regarder de l’autre côté de l’Atlantique ; nous possédons les mêmes en tout, en Europe et en France. La crainte a encore de beaux jours devant elle, et ceux qui aiment jouer à se faire peur peuvent avoir la certitude de quelques belles soirées dignes d’Halloween.  

Se pose alors la question suivante : chrétiens, pouvons-nous nous contenter de regarder et de trembler ? Pouvons-nous rejoindre ceux qui crient au loup, pour ajouter encore de la peur à la peur ? Les textes bibliques entendus aujourd’hui, d’ordre apocalyptique, ne sont pas lus pour nous faire peur, mais pour ouvrir notre espérance, et nous mettre en attitude de veille.  De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. Voilà que nous est rappelé que notre histoire a un sens, et que nous sommes tendus vers son accomplissement. Et le sentiment qui doit prédominer en nous, ce n’est pas la crainte, mais l’espérance. Ce jour du retour du Christ, nous l’attendons, comme les enfants attendent Noël : fébriles mais sans crainte, tout à la joie de ce qu’annonce cet événement. Le retour du Christ, quel qu’en soit le moment, marquera le jour de notre récompense, le jour du jugement de notre vie par celui qui est la source de tout amour. Avons-nous à craindre l’amour ? Bien sûr que non ! L’amour ne fait rien de mauvais ; l’amour espère tout ! Comme il l’a fait au moment de son Incarnation, il frappera à notre porte. Nos pourrons alors faire comme les aubergistes jadis, et dire qu’il n’y a pas de place ; ou nous pourrons lui ouvrir notre vie et il viendra prendre son repas avec nous. C’est ce que nous rappelle justement le Livre de l’Apocalypse au chapitre 3, 20 : Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. Il n’y a rien à craindre de celui qui frappe à la porte de notre vie et qui demande à entrer. Au contraire, il y a tout à espérer. Ecoutons la suite de ce passage de l’Ecriture (Ap 3, 21) : Le vainqueur, je lui donnerai de siéger avec moi sur mon Trône, comme moi-même, après ma victoire, j’ai siégé avec mon Père sur son Trône. 

Dans quelques semaines, le pape François ouvrira une année jubilaire qu’il a voulu consacrer à l’espérance. Dans notre monde froid et triste, la petite lumière de l’espérance nous attend. Elle vient nous redire que le meilleur est possible et que chacun est capable du meilleur. Nous ne sommes pas faits pour les ténèbres ; nous ne sommes pas faits pour la mort ; nous ne sommes pas faits pour la désespérance. Dieu nous veut dans sa lumière, Dieu nous veut vivant, Dieu nous veut pleins d’espérance. Il envoie son Fils pour nous le redire. Sa venue est comparable à l’été qui revient. Sachons lire les signes des temps, repérer le figuier qui refleurit. Il porte en lui la vie que Dieu nous communique. Si cela n’est pas source d’espérance, je ne sais pas ce qu’il nous faut. Laissons là notre pessimisme et entrons dans l’espérance du jour de Dieu. Amen. 


samedi 9 novembre 2024

32ème dimanche ordinaire B - 10 novembre 2024

 Un coeur plus qu'un avoir ! 




(Image trouvée sur internet)


D’un côté, beaucoup de riches qui mettaient de grosses sommes dans la salle du trésor du Temple. De l’autre, une pauvre veuve qui n’y mit que deux petites pièces de monnaie. Le match est inégal au possible, les protagonistes ne jouant visiblement pas dans la même ligue. Qui va gagner, si tant est qu’il faut un gagnant et un perdant ? 

Aux yeux des hommes, il n’y a nul doute que les plus regardés, les plus admirés, ce sont les riches et leurs grosses sommes. Nous avons beau ne pas trop aimer les trop riches, nous ne pouvons cesser de les admirer. Leur vie semble plus facile que la nôtre, leurs souhaits bien plus souvent réalisés que les nôtres. Et en même temps, nous n’aimons pas le tape-à-l’œil et cette manière que certains ont d’exhiber leurs richesses. Et je ne parle pas de tous ces parvenus, nouveaux riches, qui, sur les réseaux sociaux, n’arrêtent pas de vous dire que vous pouvez être comme eux et que, s’ils ont réussi, vous pouvez réussir aussi. Cela si vous tenez la réussite financière comme le summum de la réussite. Il serait intéressant de réfléchir à ce que nous considérons comme important pour dire que nous avons réussi notre vie. A ceux qui s’interrogent, je recommande le dernier titre de Jeck, Immortel, et le clip qui l’illustre. Il dénonce bien cette arnaque qui consiste à faire croire qu’une vie réussie se mesure à l’épaisseur d’un compte en banque ! 

Aux yeux des hommes, je ne suis pas bien sûr que la pauvre veuve ait retenu l’attention qui quiconque hormis Jésus. Et si d’aventure quelqu’un l’a vu, je ne suis pas certain que son regard fût celui de l’admiration. De même que nous n’aimons pas les trop riches, nous n’aimons pas davantage les trop pauvres. Ils sont ceux qui nous empêchent de nous plaindre tout le temps d’une vie devenue trop chère. Ce qui pour nous est plus difficile devient pour eux impossible. Là où nous devons commencer à renoncer quelquefois, eux ont abandonné depuis longtemps. Alors pourquoi parler de cette pauvre veuve ? Parce que Jésus ne voit qu’elle, elle et l’effort qu’elle fait pour verser quand même sa part au trésor du Temple. Et elle le fait sans se plaindre. Elle ne met pas grand-chose aux yeux des hommes, mais pour Jésus, c’est plus que ce que tous les autres ont mis, parce qu’elle a pris sur son indigence ; elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre, là où les autres ont juste pris sur leur superflu. Aux yeux de Jésus, le geste humble de cette femme compte plus que le geste tapageur des autres. Donner de son superflu n’est un exploit pour personne. Même les plus égoïstes arrivent à se séparer de ce qui ne leur sert plus. Donner de son essentiel, voilà qui est plus difficile, parce que cela suppose d’avoir appris à renoncer. Et quand on n’a pas grand-chose, et qu’on renonce encore au profit d’autres, voilà qui est admirable ; voilà ce que souligne Jésus. Jésus ne dit pas que ce que font les riches est mal ; il dit seulement que ce que fait la veuve est mieux, parce que les conséquences de son geste pour elle ne sont pas les mêmes que pour les riches et leur geste. 


Nous devrions le savoir depuis longtemps déjà ; le regard de Dieu se porte toujours sur les plus humbles. Comme le chante Marie dans son Magnificat, Dieu élève les humbles et renvoie les riches les mains vides. Ce qu’il nous faut apprendre de Dieu, c’est une autre manière de regarder le monde, de regarder les hommes, et de comprendre ce qui compte vraiment. Non pas le superflu ou le superficiel, mais l’essentiel, le nécessaire pour vivre. Et le nécessaire pour vivre, c’est d’abord un cœur aimant, un cœur généreux, un cœur reconnaissant. Si nous voulons un monde plus juste et plus fraternel, dans lequel personne ne manque de rien, c’est d’abord d’un cœur nouveau dont nous aurons besoin pour que le partage devienne réalité et que tous puissent vivre dignement, sans manquer de rien. Les récentes guerres de postures idéologiques à l’Assemblée nationale, au moment où le premier ministre évoquait la possibilité de prélever un impôt supplémentaire et temporaire auprès des plus riches d’entre les riches, pour que les efforts ne reposent pas tout le temps sur les plus fragiles, est révélatrice d’un manque de cœur et d’un cynisme effrayant. L’idée même qu’il faille débattre de cela et l’inscrire dans la loi montre à quel point l’histoire de cette pauvre veuve reste à méditer et à comprendre. 

      Nous ne combattrons pas la pauvreté avec des idéologies, mais avec un cœur et un regard renouvelé. La pauvre veuve de l’évangile qui devait être bénéficiaire des sommes déposées dans la salle du trésor du Temple et qui y dépose le peu qu’elle a, nous oblige à reprendre le combat pour un monde plus juste, plus solidaire, plus fraternel. Il faudra que chacun s’engage à la hauteur de ses moyens. Et quand on a beaucoup plus que tous les autres, il est normal de mettre beaucoup plus que tous les autres. C’est une question de justice ! C’est une question de cœur ! Quand le cœur compte plus que notre avoir, un monde nouveau est possible. Qu’attendons-nous pour essayer ? Que les deux petites pièces de monnaie de la pauvre veuve ouvrent nos yeux, nos cœurs et nos mains à la mesure de nos moyens. Amen. 


samedi 2 novembre 2024

31ème dimanche ordinaire B - 03 novembre 2024

 Ces paroles que je te donne aujourd'hui resteront dans ton coeur.


(Dessin de Jean-François KIEFFER, in Mille images d'évangile, Les presses d'Île de France)





Vendredi, la Toussaint ; hier, tous les fidèles défunts ; aujourd’hui, dimanche, le jour du Seigneur, jour habituel du rassemblement de la communauté des croyants en Jésus Christ. En trois jours, un petit marathon liturgique qui nous aura donné à entendre de nombreuses paroles venant de Dieu. Alors, si je vous demandais maintenant laquelle aura été la plus importante, peut-être me citerez-vous celle qui vous aura le plus marqués, ou celle qui reviendra spontanément à votre mémoire, ou peut-être vous gratterez-vous la tête d’un air dubitatif, ne sachant trop que répondre, un texte biblique ayant chassé le précédent, et ainsi de suite. Mettez-vous alors à la place de Jésus qui est invité à définir le plus grand de tous les commandements, et souvenez-vous qu’il y en a 613 en tout dans la Torah : 248 positifs qui disent ce qu’il faut faire, et 365 négatifs qui disent ce qu’il ne faut pas faire. Lequel choisir ? 


Jésus ne semble pas hésiter ; sa réponse jaillit, claire et précise. Voici le premier : Ecoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. L’évangéliste qui nous rapporte la scène ne signale aucune hésitation ; c’est cela et rien d’autre. Et l’interlocuteur de Jésus valide sa réponse : Fort bien, Maître, tu as dit vrai. Il est donc vrai que, même si l’on n’est pas du même camp, il est possible de réfléchir ensemble, il est possible de parler ensemble, il est possible de reconnaître que l’autre a raison, et de le féliciter publiquement. Sur l’essentiel, les hommes peuvent s’entendre. Grâce à l’essentiel, ils peuvent progresser. Comment définir alors ce qui est essentiel ? 

La première lecture peut nous y aider, elle qui nous dit : Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. Ces paroles, ce sont celles que Dieu adresse à son peuple. Et pour qu’elles restent dans nos cœurs, il nous faut être comme Jésus : entièrement tournés vers Dieu, entièrement de Dieu. Sans doute pour Jésus, Parole vivante du Père, est-ce plus facile de savoir ou de comprendre quelle parole l’emporte sur toutes les autres. Mais avant d’être une réponse réfléchie, c’est d’abord une réponse vécue. Jésus aime Dieu infiniment, intimement, puisqu’il l’appelle son Père ; et Jésus aime infiniment les hommes et les femmes qui croisent sa route, puisque pour eux, il ira librement jusqu’à la croix pour leur offrir le salut. Quand tu aimes infiniment à la manière de Jésus, qu’importe le nombre de commandements ; l’amour qui te fait vivre et que tu fais vivre à d’autres, l’emporte sur tout le reste. A la fin, il ne reste de toute façon que l’amour. Il n’y a rien de plus beau, il n’y a rien de plus grand, il n’y a rien de plus urgent. Aimer ! Saint Jean l’a bien compris lui qui a tout résumé dans ce verset : Dieu est amour. Il est dit que dans ses vieux jours, quand il prêchait, c’est la seule chose qu’il affirmait ! Dieu est amour. 

Plus je réfléchis à cette question posée, plus je me rends compte que n’importe quel autre commandement, c’est quelque chose que tu décides de faire ou de ne pas faire. Cependant, aimer, tu ne le décides pas vraiment. L’amour s’impose à toi ; c’est quelque chose que tu vis, ou pas d’ailleurs, mais jamais quelque chose que tu fais. C’est quelque chose qui vient de plus loin que ta seule volonté. L’amour te vient de Dieu ; c’est comme une infusion de l’Esprit de Dieu dans ta vie. Si tu fais le choix d’intégrer Dieu dans ta vie, l’amour est donné en plus, et il s’affinera au fur et à mesure que tu affineras ta connaissance de Dieu. Dieu ne peut que mener à aimer plus, à aimer mieux. Si t’approcher de Dieu te faisait éloigner des autres, tu peux avoir la certitude que ce n’est pas Dieu qui s’est approché de toi, et il vaut mieux fuir cette caricature de Dieu. Tu sais que les paroles [de Dieu] sont dans ton cœur quand tu constates que ton amour pour lui et pour les autres grandit. C’est le meilleur critère de discernement. La parole de Dieu est toujours une parole d’amour, même lorsqu’elle te reprend. Dieu corrige avec amour ceux qui l’aiment et ceux qu’il aime. 

Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. Ce sera le conseil du jour ; ce sera le conseil pour chaque jour. Garder la parole, c’est garder Dieu ; garder Dieu, c’est garder l’amour. Garder l’amour, c’est vivre de Dieu et n’être pas loin du Royaume. Que cette eucharistie, mémorial de l’amour du Christ pour nous, nous donne de grandir toujours et encore dans cet amour offert. Que le Pain de vie reçu en communion dilate notre cœur et nous aide à reconnaître en chacun un frère ou une sœur en qui le Christ est présent, en qui le Christ vient à notre rencontre. Amen. 


jeudi 31 octobre 2024

01er novembre 2024 - Toussaint

 Attendus parce qu'aimés.







 

            Au moment où la nature lentement se meurt et prend ses habits d’hiver, l’Eglise nous invite à célébrer tous les saints, c'est-à-dire tous les vivants en Jésus Christ, mort et ressuscité pour notre salut. Cette fête pour eux est aussi une fête pour nous, pour nous rappeler, au moment où les ténèbres envahissent nos jours, que notre vie a un sens et que tout ce que nous vivons n’est pas vain, que la mort et les ténèbres n’ont pas le dernier mot. A ceux que l’hiver fait déprimer, la Toussaint rappelle que nous sommes attendus parce que nous sommes aimés. 

            Oui, nous sommes attendus. Et pas attendus au tournant, après une énième faiblesse ou un péché de trop. Non, nous sommes positivement attendus par Dieu. Le mystère de l’incarnation et le mystère de la rédemption nous redisent que Dieu nous attend. Le mystère de l’incarnation permet à Dieu de franchir lui-même la distance qui nous tient éloignés de lui, en entrant dans le monde par son Fils Jésus ; nous ne pouvons plus nous estimer indignes ou incapables de Dieu, puisque Dieu vient à nous. Le mystère de la rédemption permet à Dieu de nous faire franchir la distance due au péché qui nous tient éloignés de Dieu. Nous ne pouvons plus dire que le salut est impossible puisque Dieu lui-même, par la mort et la résurrection de son Fils, nous ouvre les portes du Royaume. Nous avons entendu un passage du Livre de l’Apocalypse que certains utilisent pour dire qu’il n’y aura que peu de sauvés : 12 fois 12 000, soit 144 000 ; douze milles de chaque tribu d’Israël ! Mais il faut lire attentivement le texte et sa suite immédiate pour comprendre que le salut est pour une multitude. Voici ce que dit Jean : Après cela, j’ai vu : et voici une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues. Dieu attend toutes les nations, tribus, peuples et langues. Le texte se poursuit : Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main. Et ils s’écriaient d’une voix forte : « Le salut appartient à notre Dieu qui siège sur le Trône et à l’Agneau ! » Oui, le salut, notre salut, appartient à Dieu ; mais pas pour le restreindre, pas pour le limiter. Le projet de Dieu, c’est que nous vivions tous, pour toujours avec lui. Ecoutons encore : L’un des Anciens prit alors la parole et me dit : « Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? » Je lui répondis : « Mon seigneur, toi, tu le sais. » Il me dit : « Ceux-là viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau. » La grande épreuve, c’est la participation à la Pâque de l’Agneau, notre propre passage par la mort et la résurrection de Jésus. Ce passage, nous l’avons tous vécu au jour de notre baptême. Heureux sommes-nous ! 

Nous sommes donc attendus par Dieu, attendus parce qu’aimés infiniment par lui. Ce n’est pas parce qu’il n’avait pas le choix que Jésus est mort en croix ; au contraire, en allant à la croix, il a fait le choix de nous sauver, il a fait le choix de l’amour. C’est parce qu’il nous aime qu’il s’est livré ; c’est parce qu’il nous aime, qu’il nous a laissé des signes, des sacrements de son amour. Jean l’affirme dans sa première lettre : dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. C’est quand nous parviendrons au terme de notre histoire que tout sera révélé ; c’est quand nous parviendrons au terme de l’Histoire, que l’amour de Dieu pour nous éclatera au grand jour. Nous lui serons semblables car nous le verrons tel qu’il est. Nous verrons l’Amour dans toute sa splendeur ! Nous verrons l’Amour dans toute sa gloire ! Et nous partagerons cette gloire pour peu que nous ayons essayé, ici-bas, d’aimer de cet amour qui a tout donné. A ceux qui doutent d’être aimés de Dieu, je voudrais redire ma foi que nul d’entre nous n’existe sans l’amour de Dieu ; c’est lui qui nous appelle à la vie à travers nos parents ; c’est lui qui nous fait grandir dans sa force. Son amour est acquis à chacun depuis le premier jour de son existence. Nul d’entre nous ne vit sans cet amour de Dieu ; mais voulons-nous tous vivre de cet amour et dans cet amour ? Dieu a pris la liberté de nous aimer ; prendrons-nous la liberté de répondre à son amour ? Les béatitudes nous ouvrent des pistes pour entrer dans cet amour : être pauvre de cœur ; c'est-à-dire non pas manquer de cœur, mais avoir le cœur ouvert à l’amour de Dieu. Savoir pleurer sur les manques d’amour manifestes pour être consolés par un surcroit d’amour. Savoir être doux ; c’est encore le meilleur signe que nous apprenons à aimer. Avoir faim et soif de justice, pour tous. Être miséricordieux parce que Dieu nous fait miséricorde par amour. Garder un cœur pur pour voir, ici et maintenant, l’amour de Dieu à l’œuvre. Se faire artisan de paix puisque la paix est la sœur de l’amour, et la condition de son existence ; ceux qui se font la guerre ne s’aiment pas ! Savoir tout risquer pour la justice, et accepter d’être moqué à cause de Jésus. Autant de signes que nous sommes capables de Dieu, capables d’amour. 

Attendus par Dieu, parce qu’aimés par lui. Les saints nous montrent les divers chemins possibles pour accueillir et vivre l’amour de Dieu pour nous. Réjouissons-nous avec eux, et avançons, éclairés par leurs vies et leurs exemples, jusqu’au royaume où Dieu nous déclarera bienheureux. Alors l’Amour sera tout en tous. Amen.

samedi 26 octobre 2024

30ème dimanche ordinaire B - 27 octobre 2024

 Que veux-tu que je fasse pour toi ?





 



          Que veux-tu que je fasse pour toi ? La question est surprenante, n’est-ce pas, lorsque nous l’entendons dans l’évangile de ce dimanche ! Que pourrait bien vouloir Bartimée de la part de Jésus ? Pourquoi crier au bord du chemin : Fils de David, Jésus, prend pitié de moi ? Son insistance, quand beaucoup de gens le rabrouaient pour le faire taire, indique sa détermination. Il veut quelque chose de Jésus, et il ne se taira pas tant qu’il ne l’aura pas ! Quand on sait que Bartimée était un aveugle qui mendiait, il ne faut pas avoir fait de grandes études pour deviner. Est-ce que je me trompe ? Pourtant, la première parole de Jésus est bien cette question : Que veux-tu que je fasse pour toi ? 

          La réponse de Bartimée jaillit, claire et assurée : Rabbouni, que je retrouve la vue !  Tu m’étonnes ! Quelqu’un ici aurait imaginé une autre demande ? Nous sommes tous d’accord qu’il n’y avait pas vraiment d’autre réponse possible, surtout quand on sait que c’est son handicap physique, et non sa pauvreté, qui l’excluait de la communauté humaine et religieuse. Si, dans sa pauvreté, il espérait devenir riche, il lui fallait d’abord être guéri. Alors pourquoi cette question qui peut sembler un peu bête ? Parce que même si nous pensons que Dieu sait tout et qu’il peut tout, il nous faut exprimer devant lui notre attente, notre désir profond. Dieu sait ce qu’il nous faut, je n’en doute pas ; mais est-ce que je désire bien ce que Dieu veut me donner ? Et est-ce que je crois qu’il peut le faire ? Exprimer clairement sa demande, c’est poser un acte de foi en la capacité de Jésus de faire ce que Bartimée lui demande. D’ailleurs Jésus le confirme quand il répond à Bartimée : Va, ta foi t’a sauvé. Au-delà de la guérison physique qu’il espérait, il reçoit en plus le salut. Il nous faut donc bien comprendre que ce qui est en cause, c’est la foi ! Rappelez-vous cette autre parole de Jésus : si vous avez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : “Transporte-toi d’ici jusque là-bas”, et elle se transportera ; rien ne vous sera impossible (Mt 17, 20). Cette page d’évangile nous invite donc à examiner deux choses. 

          La première : est-ce que je sais ce que j’attends de Dieu ? Si Dieu venait nous visiter en nous demandant ce qu’il peut faire pour nous, là, maintenant, aurions-nous la spontanéité de Bartimée, un cri du cœur, ou serions-nous comme Aladdin devant le génie de la lampe à nous gratter la tête pour savoir ce que nous pourrions bien lui demander ? Que demander qui ne soit ni présomptueux, ni totalement hors de question pour Dieu ? Cette question en cache une autre que j’exprimerais ainsi : est-ce que je connais suffisamment Dieu pour oser lui demander ce que je sais qu’il peut m’accorder ? Je suis convaincu que la réponse de Bartimée à la question de Jésus vient du fait qu’il connaît Jésus. Il a entendu parler de lui, de tout ce qu’il a déjà fait ; et Bartimée connaît bien Dieu. Il sait les signes avant-coureurs qui permettraient aux hommes de découvrir que le Messie est bien là, au milieu d’eux. Le prophète Isaïe en a donné quelques-uns : Voici votre Dieu : c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver. » Alors se dessilleront les yeux des aveugles, et s’ouvriront les oreilles des sourds. Alors le boiteux bondira comme un cerf, et la bouche du muet criera de joie (Is 35, 4-6). Tous ces signes posés par Jésus, Bartimée en aura entendu parler. Avant de le rencontrer et de s’égosiller pour être entendu par Jésus, il aura entendu que Jésus a déjà guéri un lépreux, un paralytique, un homme à la main desséchée, qu’il a chassé des démons en nombre, rendu à la vie la fille de Jaïre, guéri un sourd-bègue, un aveugle et un épileptique. Il ne lui en faut pas plus pour donner à Jésus le titre de Fils de David, l’un des noms annoncés par Jérémie : Voici venir des jours – oracle du Seigneur–, où je susciterai pour David un Germe juste : il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence, il exercera dans le pays le droit et la justice (Jr 23,5). La foi de Bartimée est grande ; bien qu’aveugle, il reconnaît (il voit) les signes dont il entend parler. Bien qu’aveugle, il reconnaît (il voit) en Jésus le Messie attendu. Il sait que Jésus peut pour lui ce qu’il a déjà fait pour d’autres. Il s’est préparé. Sommes-nous prêts à rencontrer le Christ ? 

La deuxième grande question que cet évangile nous pose découle de tout ce que je viens de dire : avons-nous suffisamment la foi aujourd’hui ? Savons-nous reconnaître la présence de Jésus au milieu de nous, aujourd’hui encore ? Car enfin, c’est la grande promesse du Ressuscité au jour de l’Ascension : Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ! Dans ce monde qui semble avoir chassé Dieu, sommes-nous encore capables de voir le Christ à l’œuvre ? Ou nous lamentons-nous que ce n’est plus comme autrefois, quand tout le monde allait de l’église ? Et surtout, à travers notre vie, donnons-nous le Christ à voir aux autres ? Sommes-nous assez croyants pour vivre en authentiques disciples du Christ, même si cela peut sembler plus difficile quand la foi n’est plus autant partagée qu’autrefois ? Osons-nous nous affirmer chrétiens, c'est-à-dire disciples de ce Christ qui s’est livré pour notre salut ?  Et partant de là, avons-nous bien conscience d’être déjà sauvé par le sacrifice en croix de Jésus ? Vivons-nous de ce salut que Jésus nous offre dès notre baptême ? 

Bartimée est un exemple pour nous. De lui, apprenons la puissance de la foi. De lui, apprenons qui est Dieu pour nous et ce qu’il peut pour nous. Avec lui devenons disciples de Jésus et suivons-le sur le chemin de notre vie, jusqu’au royaume où il nous invite. Amen.

samedi 19 octobre 2024

29ème dimanche ordinaire B - 20 octobre 2024

 Se faire serviteur.



(Jésus lavant les pieds de ses disciples, image du serviteur)


 


            Les dix autres, qui avaient entendu, se mirent à s’indigner contre Jacques et Jean. Ceux qui aiment vérifier comment les autres évangélistes présentent une scène de la vie de Jésus auront découvert que seul Matthieu partage avec Marc une demande pour que Jacques et Jean puissent siéger l’un à droite et l’autre à gauche [de Jésus] dans la gloire. Une petite différence les oppose : alors que Marc attribue cette demande directement aux deux apôtres, Matthieu fait intervenir leur mère qui essaie de placer ses fils. Luc ne connait pas cet épisode. Il ne partage avec Marc et Matthieu que l’enseignement de Jésus sur le pouvoir et le service, quand les disciples se sont bien pris la tête. Luc situe ainsi cet enseignement durant le dernier repas de Jésus ; les disciples en arrivèrent à se quereller : lequel d’entre eux, à leur avis, était le plus grand ? (Lc 22,24). C’est donc bien l’enseignement de Jésus qui importe, plus que le contexte dans lequel cet enseignement est donné. 

            Ce qui est commun aux trois évangiles synoptiques, c’est que les disciples se disputent entre eux sur cette question. Que la mère de deux d’entre eux ose poser la question à Jésus, rend la demande touchante d’amour maternelle, même si cet amour est mal placé. Imaginez le pugilat possible si les autres mères l’avaient entendu ! Crêpage de chignon assuré, toutes les mères voulant que leur fils réussisse mieux que les autres ! J’aurais plutôt vu les apôtres en rire ; mais non, ils en veulent à Jacques et Jean, comme s’ils avaient poussé leur mère vers Jésus. En Marc, la colère des dix autres est plus légitime, puisque ce sont deux d’entre eux qui veulent prendre les premières places. Mais pourquoi cette colère ? Parce qu’ils ont osé demander ou parce qu’ils n’ont pas pensé à le faire avant eux ? Jésus semble aller dans ce sens quand il donne à tous sa leçon sur le service qui doit être la marque de fabrique de ses disciples. Vous le savez : ceux que l’on regarde comme chefs des nations les commandent en maîtres ; les grands font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Pas de place pour les ambitieux qui ne cherchent qu’à commander aux autres dans le groupe des Douze, et partant de là, dans l’Eglise. Ceux qui occupent une quelconque fonction ne sont pas à regarder comme des chefs de parti ou d’état. Et ils ne doivent pas se comprendre ainsi. Le chemin synodal que le pape François préconise souligne ceci à sa manière. Et cette représentation ne concerne pas que les clercs. Toute personne qui occupe une fonction dans l’Eglise, même bénévole, doit la considérer avant tout comme un service. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous. Il n’y a pas d’autre interprétation possible ; il n’y a pas de quoi pinailler. Dès que tu es en position de premier, de leader dans un groupe, tu dois te considérer comme le serviteur du groupe. Le service n’est pas une possibilité ; le service est la règle ! Personne ne commande ; tous servent ! 

            Ce n’est pas parce que le pouvoir serait mauvais ; ce n’est pas non plus parce que certains confondraient trop vite autorité et pouvoir, se plaisant à jouer aux petits chefs exécrables et exécrés. Non, la raison est d'abord d'ordre théologique. Nous devons nous faire serviteurs des autres parce que c’est ce que Jésus a fait. Comme le rapporte Matthieu, Marc et Luc, nous serons serviteurs car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. Il l'illustrera par le geste du lavement des piedsLe disciple n’est pas au-dessus de son maître ; si le maître se fait lui-même serviteur alors même qu’il vient de Dieu et qu’il est Dieu, combien plus le disciple qui n’est pas Dieu doit-il imiter son maître et se faire serviteur à son tour. Ce n’est pas par humilité, ce n’est pas par goût de la simplicité ; c’est parce que Jésus lui-même vit ainsi son ministère d’autorité. Dès lors que tu travailles dans l’Eglise, de manière bénévole ou salariée, tu dois te considérer comme étant au service des autres. Et ceux qui bénéficient de ce service doivent les aider à vivre ce service positivement, non en les critiquant quand ils doivent faire preuve d’un peu d’autorité, mais en reconnaissant ce service et en entrant dans une attitude d’action de grâce pour celles et ceux qui se mettent à leur service ! La critique est facile, toujours ; la reconnaissance a plus de mal à venir au jour, mais elle est précieuse pour que tous puissent bien vivre ensemble, sans jalousie, sans crainte et sans désir de puissance. Le seul qui soit puissant dans l’Eglise, c’est Dieu, Père, Fils et Esprit Saint. A lui seule la puissance et la gloire ! Tous les autres, quel que soit leur poste et leur titre, ne sont que des serviteurs. Même le pape se reconnaît comme le serviteur des serviteurs de Dieu. Dans l’Eglise, nous sommes tous appelés à nous reconnaître serviteurs de Dieu et serviteurs de nos frères et sœurs en humanité. C’est une affirmation dont nous devons faire notre réalité. 

            Ne jalousons pas Jacques et Jean qui ont osé demander à être l’un à la droite et l’autre à la gauche [de Jésus] dans sa gloire. Plutôt que de rejoindre les autres dans leur colère, osons les remercier d’avoir posé une question qui brûlait les lèvres de chacun. Leur audace nous a valu un enseignement clair. Puisqu’ils ont su changer de posture et se faire serviteurs à la suite de Jésus, le premier serviteur, mettons-nous à l’école du divin Maître. Devenons à notre tour serviteurs de Dieu, serviteurs les uns des autres. Amen.

samedi 12 octobre 2024

28ème dimanche ordinaire - 13 octobre 2024

 Quand le salut passe par notre humanité.



(Jésus et le l'homme riche, Source : Jésus et l'homme riche (Mc 10,17-31) | Au Large Biblique)





 

            Il a quelque chose d’attachant, ce jeune homme qui vient vers Jésus. Il nous ressemble tellement, pas méchant, cherchant quelque chose de plus dans sa vie. Il veut être sûr d’être sauvé. Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? En voilà un qui, pour une fois, ne veut pas piéger Jésus. Sa question est honnête et sincère. Il reconnaît en Jésus un maître de vie. Il est décidé à réussir. Bref, tous les ingrédients sont réunis pour que l’histoire soit belle et finisse bien ; et pourtant… 

            Avant de nous précipiter à la fin de l’histoire, il nous faut bien entendre la réponse de Jésus : Tu connais les commandements : ne commets pas de meurtre, ne commets pas d’adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. Quiconque connaît les commandements laissés par Moïse se sera rendu compte qu’il manque les premiers, ceux qui concernent Dieu : Tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi. Tu ne feras aucune idole. Tu n’invoqueras pas en vain le nom du Seigneur ton Dieu pour le mal. Tu feras du sabbat un mémorial, un jour sacré. Voilà, avec ceux-là, la liste est complète. Jésus les aurait-il oubliés ? Pas lui, quand même ! Il n’arrête pas de parler de Dieu comme de son Père ; il nous invite à le prier en ce sens. S’il ne les donne pas, il doit y avoir une raison précise, et je la résumerai ainsi : notre salut ne passe pas seulement par l’amour que nous aurons pour Dieu, mais aussi (et peut-être surtout) par notre manière de l’exprimer à ceux que nous voyons et côtoyons. Autrement dit, c’est ton humanité qui te sauve ; c’est ton inhumanité qui te perdra. Il existe d’autres paroles de Jésus qui vont dans ce sens. Par exemple, Matthieu, chapitre 7, verset 21 : Ce n’est pas en me disant : “Seigneur, Seigneur !” qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux. Et pour ceux qui s’interrogent sur la volonté de Dieu, relisons toujours dans l’évangile de Matthieu le chapitre 25, versets 34-40 : Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation du monde. Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !” Alors les justes lui répondront : “Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu… ? tu avais donc faim, et nous t’avons nourri ? tu avais soif, et nous t’avons donné à boire ? tu étais un étranger, et nous t’avons accueilli ? tu étais nu, et nous t’avons habillé ? tu étais malade ou en prison… Quand sommes-nous venus jusqu’à toi ?” Et le Roi leur répondra : “Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. 

            L’enseignement de Jésus aurait dû satisfaire notre homme venu vers Jésus. En effet, il répond ainsi à Jésus : Maître, tout cela, je l’ai observé depuis ma jeunesse. Il n’avait donc pas de crainte à avoir ; son humanité bien vécue, il n’y a pas à en douter, lui vaudrait en héritage la vie éternelle. La Loi est claire, la Loi est vécue par l’homme, la Loi sera appliquée par Dieu. Mais voilà, lui veut plus. Il ne lui suffit plus d’être juste humain et bon avec les autres. C’est pour cela que Jésus lui indique une voie supérieure : une seule chose te manque : va, vends ce que tu as, et donne-le aux pauvres. La réponse vaut pour lui, et pour tous ceux qui comme lui, veulent plus que simplement déployer toute leur humanité. Mais ce plus proposé par Jésus lui semble soudain inatteignable, irréalisable dans l’immédiat. Cela signifie-t-il qu’il ne sera pas sauvé ? Non, s’il continue à vivre les commandements, s’il continue à être humain, il sera sauvé par Dieu. Cet épisode nous montre qu’il y a des voies différentes, correspondant à différents caractères. Tout vendre pour donner aux pauvres n’est pas une obligation, c’est un plus, proposé à celui qui veut plus que ce que la Loi demande. Plutôt que de se réjouir de ce qu’il fait déjà, notre homme s’en va en pleurant, car il avait de grands biens. Et alors ? Ces grands biens ne sont pas un obstacle à son salut ; ils sont un obstacle à cette voie autre que lui propose Jésus, et qu’il ne se sent pas capable de suivre. S’il continue à vivre comme il l’a fait depuis sa jeunesse, il obtiendra ce qu’il cherche. Dieu ne pas va lui dire : parce que tu n’as pas été capable de vivre le plus que je te proposais, je ne veux plus te voir. Jésus dit seulement que c’est plus difficile à ceux qui possèdent des richesses d’entrer dans le royaume de Dieu, mais il ne dit pas que c’est impossible, voire interdit ! Si la richesse te détourne de tes frères, c’est très compliqué ; elle ne t’achètera pas une place dans le royaume. Mais si ta richesse te permet de mieux faire vivre, d’être encore plus attentif aux autres, très bien. 

            Il nous faut alors encore entendre la fin de l’enseignement de Jésus, celui qu’il ne donne qu’à ses disciples, perplexes eux-aussi. Quand ils interrogent Jésus : Mais alors, qui peut être sauvé ?, Jésus dit : Pour les hommes, c’est impossible, mais pas pour Dieu ; car tout est possible à Dieu. N’est-ce pas une manière de nous dire : ne te préoccupe pas de cela, parce que ce n’est pas en ton pouvoir de décider ? Laisse Dieu être Dieu, et manifester sa miséricorde et son salut. Toi, vis ta vie, du mieux que tu peux. Le reste, c’est cadeau, cadeau de Dieu. Vis, vis bien avec les autres, n’écrase personne de ta superbe, et tout ira bien. Vis, car c’est là que Dieu t’attend, dans l’ordinaire de ta vie. Ton salut, c’est dans ton ordinaire qu’il grandit. Plus tu seras humain, plus tu seras saint. Alors vis, Dieu s’occupera du reste, tout simplement. Amen.