Des raisons de célébrer Noël, s'il en fallait !
Voici donc la nuit tant attendue,
préparée depuis le 30 novembre en Eglise, depuis octobre dans certains
commerces. Peut-être, comme moi, avez-vous compté les dodos qui vous séparaient
de cette nuit et vous êtes-vous réjouis de ce beau temps de Noël en préparant
les bredele qui ont vocation à être largement partagés. Mais peut-être
faites-vous partie de ces gens qui, regardant notre pays et notre monde, se
demandent : à quoi bon ? A quoi bon fêter Noël quand le commerce
prend le dessus sur le sens réel de la fête ? A quoi bon fêter Noël quand
le monde ne connaît pas la paix ? Les quatre liturgies qui rythment cette
fête, selon les heures à laquelle est elle célébrée, nous donne quelques bonnes
raisons (s’il en fallait) de fêter, encore et toujours, la naissance de notre
Sauveur.
Les premières lectures sont toutes tirées du prophète Isaïe ; elles nous invitent toutes à l’espérance. Et c’est sans doute la première raison de nous entêter à fêter Noël. Parce que nous avons besoin d’espérer en un monde meilleur, besoin d’espérer que l’homme peut changer et devenir meilleur, que nous pouvons changer et devenir plus humain. L’espérance vient agrandir l’espace de notre regard ; elle nous ouvre à un avenir meilleur auquel nous pouvons croire. Ce que le prophète Isaïe proclame dans les lectures proposées, c’est que nous ne sommes pas seuls ; nous ne sommes pas abandonnés à notre triste sort. Dieu veille, et en plus, il a décidé d’agir. Il vient lui-même redonner un avenir à l’humanité. Tu seras une couronne brillante dans la main du Seigneur, un diadème royal entre les doigts de ton Dieu (Messe de la veille au soir). Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi (Messe de la nuit). Eux seront appelés « Peuple-saint », « Rachetés-par-le-Seigneur), et toi, on t’appellera « La-Désirée », « La-Ville-qui-n’est-plus-délaissée » (Messe de l’aurore). Eclatez en cris de joie, vous, ruines de Jérusalem, car le Seigneur console son peuple, il rachète Jérusalem (Messe du jour). Dieu ne vient pas juste pour une visite, il vient restaurer son peuple, il vient redonner la lumière, il vient établir la paix. Dans un monde plongé encore largement dans la guerre, dans un monde qui se divise et se fracture, voilà une espérance plus que jamais nécessaire.
Les évangiles, racontés par Matthieu, Luc et Jean, nous parlent tous de la naissance de Jésus, Matthieu et Luc de manière très réalistes, contant avec milles détails les circonstances qui entourent cette naissance, et Jean nous invitant dans la messe du jour à prendre de la hauteur, à quitter le merveilleux pour entrer pleinement dans le mystère de cette Nativité. Tous nous disent que les promesses des prophètes sont réalisées désormais dans l’Enfant nouveau-né, trouvé dans une étable par les pauvres et les laissés-pour-compte de notre société. Un monde nouveau, une vie dans la lumière et la paix, ce n’est pas une utopie, c’est ce que Dieu vient réaliser par cet Enfant, humble et fragile. Nous avons là un enseignement précieux : alors que nous pensons souvent que nous sommes trop petits à l’échelle du monde et des gouvernants pour vraiment peser sur les grandes décisions, la naissance humble et cachée du Fils de Dieu nous rappelle que nous avons notre partition à jouer dans le concert des nations. Nous n’irons jamais plaider à l’ONU ou dans les grandes instances de ce monde, c’est sûr. Mais qu’un petit enfant porte l’espérance d’un monde en paix nous rappelle que la paix, ça commence humblement, dans nos familles, nos quartiers, nos associations, nos lieux de travail. Il y a un refrain d’un Agneau de Dieu qui nous le fait chanter, mais peut-être n’y portons-nous plus attention : la paix, elle aura ton visage, … la paix sera toi, sera moi, sera nous, et la paix sera chacun de nous. Ces mots ne peuvent pas, ne doivent pas rester juste de la poésie. Ils sont la réalité des artisans de paix ; et nous avons tous vocation à l’être, parce que personne n’aime vivre dans la guerre et les conflits. Pour construire la paix, lentement, patiemment, il faut commencer, dans nos lieux de vie, à refuser toutes formes de violence, physique ou verbale. Tant qu’il restera ne serait-ce qu’un humain à aimer les invectives et à donner des coups, la paix globale ne sera pas possible. Tant qu’il restera ne serait-ce qu’un individu à ne pas accepter de reconnaître chaque humain croisé comme un frère ou une sœur en humanité, la paix ne sera pas possible. Tant qu’il restera ne serait-ce qu’un humain à dire que certains ne devraient pas vivre ici, qu’ils n’ont pas leur place ici, la paix ne sera pas possible. Une paix construite avec patience et détermination, avec l’aide de l’Enfant de la crèche, voilà une autre raison de fêter Noël.
Les deuxièmes lectures, extraites des Actes de Apôtres ou des lettres du Nouveau Testament, sont déjà une relecture de l’œuvre qu’accomplira cet Enfant quand il sera devenu grand. Jésus n’est pas seulement le Messie annoncé, il est le Christ qui accomplit dans sa chair le salut offert au monde : De la descendance de David, Dieu, selon la promesse, a fait sortir un sauveur pour Israël : c’est Jésus (Ac, Messe de la veille au soir). Ce n’est plus une vague espérance, c’est la nouvelle réalité de notre monde. Cet enfant de la crèche, devenu grand, sera l’homme cloué en croix, accomplissant dans le don de sa vie, le salut de l’humanité : Il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier (Tt, Messe de la nuit). Là où l’humanité ne vivait que désobéissance, il a offert à Dieu son obéissance. Là où l’humanité plongeait dans le péché, il a offert la miséricorde de Dieu, qu’il appelait son Père : il nous a sauvés, non pas à cause de la justice de nos propres actes, mais par sa miséricorde (Tt, Messe de l’Aurore). Là où nous mettions le doute, il a offert la foi. Il est la Parole ultime du Père : A bien des reprises et de bien des manières, Dieu, dans le passé a parlé à nos pères par les prophètes ; mais à la fin, en ces jours où nous sommes, il nous a parlé par son Fils qu’il a établi héritier de toutes choses (He, Messe du jour). Quand nous relisons toute l’œuvre accomplie par Jésus, nous avons une troisième raison de célébrer toujours et encore le jour de sa naissance, non comme un banal anniversaire, mais comme le jour où nous faisons mémoire de ce qu’il a réalisé pour nous et de ce qu’il réalise encore à travers nous, aujourd’hui.
Trois
bonnes raisons de célébrer Noël, même dans un monde imparfait comme le nôtre. Cette
naissance de Jésus, le Sauveur, si elle a eu lieu une fois pour toutes au temps
du roi Hérode, a lieu aujourd’hui, pour nous qui croyons en lui. Et il nous est
demandé, aujourd’hui comme hier, si nous voulons lui ouvrir la porte ou si nous
préférons dire qu’il n’y a de place pour lui dans la salle commune de
notre vie. Aujourd’hui comme hier, il ne force personne ; il vient, humble
et caché. Aujourd’hui comme hier, il vient nous sauver et faire de nous des
fils et donc des frères. Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas
reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de
Dieu (Evangile du jour). Quand vous serez rentrés chez vous et que vous
aurez un moment devant votre crèche, relisez ces textes des diverses messes de
Noël et prenez le temps de réfléchir à cette question simple : pourquoi
j’ai voulu fêter Noël cette année ? Vous serez ramenés à
l’essentiel : un Dieu qui frappe à votre porte et qui demande à entrer
dans votre vie pour votre plus grande joie et pour votre salut. Amen.

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