Nous terminons aujourd’hui la
lecture de la lettre aux Philippiens et, je l’avoue, une lecture trop rapide de
ce passage peut surprendre. En effet, qui connaît un peu la pensée et l’agir de
Paul, sait qu’il n’a jamais compté sur l’aide d’autrui. Il a toujours mis un
point d’honneur à gagner sa nourriture par son travail. Aurait-il eu une attitude
différente vis-à-vis des Philippiens ?
Lorsqu’il écrit aux Philippiens,
Paul est en prison, à cause de sa foi. Il a connu des moments difficiles, des
moments de grand dénuement. Les Philippiens l’ont aidé matériellement, par deux
fois. C’est pourquoi, à la fin de sa lettre, il les remercie. Il n’a pas
renoncé à ses convictions (travailler pour gagner sa nourriture) ; il se
trouvait juste dans une situation qui ne lui permettait pas de vivre comme il
le voudrait, comme il l’a toujours enseigné. Ce qui est intéressant, c’est la
manière dont Paul les remercie. Il ne refuse pas le don qui lui est fait, mais
rappelle qu’il est d’importance toute relative. Je sais vivre de peu, je sais aussi avoir tout ce qu’il me faut. Il
n’a pas besoin de grand-chose. En fait, une seule chose lui suffit pour vivre
et être heureux : il l’a écrit quelques lignes plus haut : pour moi, vivre, c’est le Christ ! S’il a accepté ce don, c’est pour ce qu’il
signifie spirituellement.
Si vous lisez chez vous la
totalité de la lettre aux Philippiens, (ce que je vous recommande ; en
plus elle est très courte), vous découvrirez que Paul accepte ce don parce
qu’il représente la participation active des Philippiens à son ministère
d’évangélisation. S’il accepte ces dons, c’est parce qu’il voit d’abord dans ce
geste le bénéfice pour les Philippiens. En s’intéressant ainsi à la vie de
Paul, ils manifestent qu’ils ne sont pas fermés sur eux-mêmes, mais capables de
charité élémentaire. Les dons qu’ils ont faits démontrent à Paul que les
Philippiens ont bien accueilli le Christ au cœur de leur vie puisqu’ils sont
capables de partage. La vie nouvelle en Christ reçue au moment de leur baptême
se déploie ainsi dans leur quotidien. Chez Paul, les œuvres ne précèdent pas la
foi, elles en sont l’expression. Paul ne remercie donc pas tant pour les dons, que
pour la foi des Philippiens, foi vivante, foi agissante envers ceux qui sont
dans le besoin.
Se situant sur le terrain de la
foi, Paul remet ainsi le Christ au cœur de son enseignement. Je peux tout en celui qui me donne la force.
Il rappelle que l’unique nécessaire, c’est le Christ, qui vient toujours en
aide à celui qui se confie à lui, à celui qui croit en lui. Avec l’aide du
Christ, aucune épreuve ne saurait être trop difficile. Avec l’aide du Christ,
rien ne saurait séparer Paul de l’amour de Dieu. Les Philippiens l’ayant aidé
matériellement, il va les remercier en les aidant spirituellement. Il les
confie à la grâce de Dieu : mon Dieu
subviendra magnifiquement à tous vos besoins selon sa richesse dans le Christ
Jésus. Il ne peut rien faire d’autre que cela, mais cela est tout pour
Paul. Puisque le Christ est tout pour lui, puisque le Christ est sa vie même,
il donne le Christ comme gardien aux Philippiens. Paul nous enseigne ainsi que
donner, c’est surtout recevoir. En faisant un don à Paul, ils reçoivent un
accroissement de la foi, une proximité plus grande avec l’Apôtre, une proximité
plus grande avec le cœur même de Dieu. C’est pour cela que l’Apôtre rend grâce
à Dieu.
D’un simple don fait à un
prisonnier, Paul tire un enseignement sur la foi. Il n’y a pas à se soucier du
lendemain puisque Dieu lui-même veille sur ceux qu’il a éveillés à la foi. Les
croyants peuvent donc, même au milieu des difficultés, se consacrer à ce qui doit
rester premier : l’annonce du Christ. Paul le fait par sa
prédication ; les Philippiens le font en s’unissant à lui, en étant en
communion avec lui par les dons qu’ils lui ont adressés. Chacun, selon ses
capacités, peut donc favoriser l’annonce de l’Evangile, l’annonce du Christ
Sauveur. Puisse notre communion au Christ Eucharistie nous faire comprendre
comment nous pouvons à notre tour annoncer son Règne au monde de notre temps.
Amen.
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