Toussaint :
voilà une fête qui ne fait pas grand mystère de ce qu’elle célèbre : son
nom dit déjà tout. Tous les saints, pris dans une seule célébration. Une fête
au confluent du passé et de l’avenir.
Une
fête qui nous vient du passé, puisque ceux que nous célébrons aujourd’hui sont
déjà morts ; ils sont déjà en Dieu. Les jours de nos années n’étant pas
extensibles à volonté, chaque époque ayant ses propres saints, chaque pape le
souci d’en proclamer de nouveaux (François a déjà dépassé en nombre de saints
créés son glorieux successeur, saint lui-même !), une année ne suffit pas
à célébrer chacun. Entre les nouveaux entrants et les anciens oubliés, il
fallait bien une fête pour les célébrer tous, afin de ne fâcher personne. On
peut voir les choses ainsi. Cette fête nous rappelle surtout que le passé de l’Eglise
n’a pas été que marqué par l’Inquisition et les Croisades, et que beaucoup de
bien s’est fait par l’intermédiaire de ceux et celles qu’elle porte sur les
autels. Le message de l’Evangile a été vécu sans relâche depuis que Jésus a
prêché sur les bords du lac de Galilée jusqu’à aujourd’hui. Pas une époque qui
n’ait ses saints ; pas un continent, pas un pays, où l’Evangile a été proclamé qui n’ait un
glorieux ancêtre dans la foi. Cette fête a de quoi nous réjouir, même en ces
temps moroses. Tant d’hommes et de femmes connus ou oubliés qui ont vécu une
vie chrétienne exemplaire, capable de nous guider nous-aussi à la rencontre du Christ.
Tant d’hommes et de femmes et d’enfants qui sont autant de chemin vers Dieu,
autant de routes de sainteté. Nous aurions mauvaise foi de dire que nous ne
trouvons pas la nôtre. Parmi les saints et les saintes, il y a des enfants, des
pères et mères de familles, des religieux et des religieuses, des papes, des
évêques, des prêtres, des diacres, des laïcs consacrés, des chrétiens de base :
bref, chacun de nous, dans la situation qui est la sienne, peut se trouver un
modèle, ancien ou plus récent, pour le guider vers Dieu.
La
fête de la Toussaint a donc aussi un avenir. Si tant d’hommes et de femmes,
croyants au Christ, ont été reconnus par l’Eglise comme d’authentiques témoins
de la foi, c’est aussi pour nous rappeler que nous sommes appelés à la
sainteté, nous aussi ! Les derniers saints créés sont bien des
contemporains : qui n’a pas connu Jean-Paul II, pour ne citer que lui ?
Si c’est une fête qui marque le passé de l’Eglise, elle dit aussi son avenir :
la sainteté n’est pas épuisée par celles et ceux qui ont été reconnus comme tel.
Il y a toujours de la place pour les saints de demain. La sainteté est notre
destinée à tous. N’est-ce pas ce que proclamera la prière après la communion ?
Dieu qui seul es saint, toi que nous
admirons et adorons en célébrant la fête de tous les saints, nous implorons ta
grâce : quand tu nous auras sanctifiés dans la plénitude de ton amour,
fais-nous passer de cette table, où tu nous as reçu en pèlerins, au banquet
préparé dans ta maison. C’est ce que nous espérons ; c’est ce que nous
demandons dans la prière de ce jour : que nous aussi connaissions un jour
la joie d’être à la table de Dieu dont notre autel est une préfiguration.
Si
donc la Toussaint a un passé et un avenir, il reste une question :
a-t-elle un présent ? Est-elle une fête pour aujourd’hui aussi ? Pour
moi, la réponse est oui. Mais pour qu’il en soit ainsi, il faut que nous ayons
conscience que la sainteté n’est pas une récompense pour plus tard, mais un
état d’esprit, un art de vivre aujourd’hui. Nous sommes tous saints par notre
baptême. Paul nous l’a encore redit dans la deuxième lecture : Voyez comme il est grand, l’amour dont le
Père nous comblés : il a voulu que
nous soyons appelés enfants de Dieu, et nous le sommes. Dès aujourd’hui !
Et si nous sommes enfants de Dieu dès aujourd’hui, c’est donc que nous sommes
saints dès maintenant, appelés à vivre dès maintenant cette sainteté qui nous
vient de Dieu, par grâce. La sainteté n’est décidément pas un hochet pour
enfant sage ; elle est notre condition commune, nous invitant à vivre
chaque jour, dès maintenant, ce don que Dieu nous fait en nous reconnaissant
comme siens. C’est chaque jour de notre vie terrestre que nous avons à vivre en
fidèles du Christ Jésus ; c’est chaque jour que nous devons faire briller
notre auréole, et pas que sous les bras. Etre saint, c’est notre vocation, dès
ici-bas. Etre saint, c’est notre condition commune.
Si
la Toussaint nous donne de nous réjouir de nos glorieux anciens, si elle nous
permet d’entrevoir la gloire qui nous est promise, elle nous tourne donc aussi
vers notre baptême, vers l’appel que nous avons reçu de Dieu pour vivre nous
aussi comme lui : Soyez saints comme
Dieu est saint. Tel est l’appel de Dieu dès l’Ancien Testament. Réjouissons-nous
pour celles et ceux qui ont répondu à cet appel, par toute leur vie. Et stimulons-nous
à les imiter dès maintenant ; ainsi le Royaume espéré deviendra réalité
visible pour celles et ceux qui ne connaissent pas encore Jésus Christ. N’est-ce
pas le meilleur moyen de répandre l’esprit des béatitudes ? Bonne fête à
chacun de nous qui essayons, à travers des vies chaotiques, de vivre l’Evangile
du Christ et d’y rester fidèles, sincèrement. Amen.
(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)
(Dessin de Coolus, Blog du lapin bleu)
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