Lentement, nous approchons de la fin du temps pascal. Jeudi, nous
célèbrerons le retour du Christ vers son Père. Et après ? Qu’en est-il
donc de la promesse de Dieu d’être avec nous chaque jour ? Que devient la
certitude donnée par le Christ qu’il sera toujours au milieu de nous ? Sa
mort avait déjà creusé une distance : nous nous sentions abandonné. Avec
les disciples d’Emmaüs, nous doutions que notre monde ait encore un avenir
possible. Mais l’annonce de la Pâque, les manifestations du Ressuscité nous ont
regonflé d’espoir : celui que nous avions fait mourir, Dieu l’a
ressuscité. Nous le retrouvions, presque comme avant, marchant sur nos routes,
partageant la Parole, mangeant avec nous. Et voilà que l’Evangile de ce
dimanche nous rappelle qu’il va nous quitter et nous ne le verrons plus comme
nous nous voyons les uns les autres. Comment saurons-nous qu’il continue de
nous guider ? Comment expérimenterons-nous sa présence au milieu de son
peuple ?
La liturgie de ce dimanche nous en donne déjà un aperçu : Jésus a
promis de ne pas nous laisser orphelin. Au moment même où il annonce son
départ, il nous promet une autre présence, un Défenseur : l’Esprit
de Vérité. Cela devrait nous rassurer, mais qui a vu cet Esprit ?
N’est-ce pas : Dieu fait homme en Jésus Christ avait un visage, un corps,
comme nous. Nous pouvions l’approcher, le toucher, le reconnaître. Mais un
Esprit ? Jésus lui-même affirme d’ailleurs que le monde ne peut ni le
voir ni le connaître. Alors ?
La réponse vient encore de Jésus. Cet Esprit est en nous. Il
nous pousse à vivre selon l’Evangile, selon le commandement de l’amour que
Jésus vient d’offrir aux siens. L’Esprit ne peut être reçu que par ceux qui ont
accueilli le Christ puisqu’il va révéler la Vérité de son enseignement. Il va
révéler au disciple ce qu’il avait pressenti à l’école de Jésus et qu’il ne
pouvait pas encore saisir en totalité, simplement parce que le Christ n’était
pas encore ressuscité. Seul le vrai disciple du Christ peut voir cet Esprit et
le connaître. Il le voit à l’œuvre dans la vie quotidienne de celles et ceux
qui vivent selon l’enseignement du Christ Sauveur. Car c’est bien l’Esprit qui met
en œuvre notre capacité à aimer comme Dieu aime ; c’est bien l’Esprit qui est
au cœur de nos pardons demandés et de nos pardons accordés. L’Esprit est celui
qui nous permet de nous reconnaître frères et sœurs en Christ, membres d’une
même famille. Il nous ouvre à la Vérité de Dieu, il nous ouvre à la Vérité de
l’œuvre d’amour et de salut du Christ ; il nous ouvre à notre propre
vérité, c’est-à-dire à qui nous sommes, ce que nous sommes et combien nous
sommes aimés, infiniment, gratuitement par Dieu. Chaque fois qu’un disciple est
capable d’amour, chaque fois qu’un disciple est capable de pardon, chaque fois
qu’un disciple est capable de se reconnaître vraiment fils du Dieu vivant,
c’est l’Esprit qui est à l’œuvre dans sa vie et qui le lui révèle.
Cet Esprit de vérité agit aussi au cœur de l’Eglise, au cœur de notre
célébration de l’Eucharistie. C’est lui qui nous permet de comprendre ce que
Dieu attend de nous à travers la Parole entendue, méditée, expliquée. C’est lui
encore qui fait de nos offrandes le Corps et le Sang du Christ, rendant présent
au milieu de nous Celui-là même qui l’a envoyé. Les épiclèses que nous chantons
sont des appels à l’Esprit pour qu’il fasse de nous les membres vivants du
Corps du Christ. En agissant ainsi, il nous permet de comprendre qu’à travers
le Pain et le Vin partagés, c’est bien le Christ qui est là, actualisant sa
promesse de ne jamais nous laisser orphelins. En participant au repas de
l’amour offert par Dieu, nous nous approchons du Christ, nous grandissons dans
son amour, nous grandissons dans la connaissance de son Evangile et nous
devenons, communion après communion, davantage ses disciples, heureux d’être
rassemblés, heureux de lui ressembler toujours plus. En nous, peut grandir
l’amour de Dieu ; à travers nous, il peut toucher celles et ceux que nous
connaissons et côtoyons quotidiennement. Par la puissance de l’Esprit, le
Christ se rend présent dans le pain et le vin ; par notre communion au
Christ, l’Esprit se répand en nous et à travers nous. Ainsi nous construisons
ce monde plus juste, plus aimant que le Christ a inauguré dans sa vie
terrestre ; ainsi, nous faisons grandir le Royaume.
L’Apôtre Pierre souligne dans sa lettre la nécessité pour le disciple
du Christ de toujours rendre compte de son espérance. Cela ne peut se faire
avec conviction et sincérité si l’Esprit n’habite pas le cœur du disciple.
Témoigner du Ressuscité, hier comme aujourd’hui, nécessite un courage et une
force que seul l’Esprit nous procure. A chaque eucharistie, nous lui permettons
de grandir en nous, en nous alimentant à la source même : le Christ
vivant. Puisse notre eucharistie de ce jour nous permettre de demander encore
cet Esprit pour qu’il devienne la source même de notre agir et le rempart de
notre foi. Puisse notre communion au Christ Vivant nous faire goûter sa présence
vraie au milieu de nous, aujourd’hui et toujours, selon la promesse qu’il nous
a faite. Amen.
(Dessin de Mr Leiterer)
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