L’extrait de la première lettre de
Paul aux chrétiens de Corinthe que nous avons entendu en seconde lecture est
sans doute le texte le plus connu de Paul. Il fait partie des textes les plus
choisis pour la célébration du sacrement du mariage. Et à l’écouter, nous
comprenons bien pourquoi. Cet hymne à la charité nous prend aux tripes et nous
remue. En ce dimanche pourtant, la liturgie vient l’augmenter de quelques
versets, nous invitant ainsi à aller au-delà d’un beau chant d’amour. Parce que
l’intention de Paul était bien de dire quelque chose sur la foi à la communauté
de Corinthe. Alors qu’est-ce qui est rajouté et que nous n’entendons pas le
jour d’un mariage ?
Il est rajouté l’espérance
chrétienne : un jour, le monde parviendra à son achèvement. Les prophéties, le don des langues et la
connaissance seront dépassés, dit Paul. Il faut nous souvenir ici que la
ville de Corinthe est une ville portuaire, donc cosmopolite, qui vit dans l’immédiateté
des plaisirs humains, favorise la recherche philosophique et le mélange des
genres en matière religieuse. Le rappel de Paul que le monde va vers son
achèvement, vient comme heurter ce qui fait la vie à Corinthe. Tout cela
disparaîtra, parce que ce n’est que partiel. Le vrai bonheur n’est pas dans la
multiplicité des expériences sexuelles, ni dans la recherche philosophique
effrénée, ni dans un syncrétisme religieux qui fait perdre la notion de la
vérité. Le vrai bonheur, nous le connaîtrons à l’achèvement du monde quand nous
connaîtrons parfaitement, comme nous avons été connus parfaitement… par
Dieu ! Le long développement de Paul sur l’amour véritable, et le rappel
que le monde va vers son achèvement, doit permettre au croyant de ne pas faire
des plaisirs charnels le sommet de sa vie ; pas plus qu’il ne doit le faire
de la recherche philosophique. Et surtout, le croyant au Christ renonce aux
idoles, aux faux dieux, pour ne suivre que le Christ, l’alpha et l’oméga de sa
foi, de son espérance et de sa charité. L’achèvement du monde n’est pas pour
lui une perte ou un grand malheur ; c’est un don, un gain, un grand
bonheur ! Il faut être tendu vers ce moment où nous verrons face à face.
Si le long développement sur l’amour
s’achève sur l’affirmation que l’amour ne
passera jamais, celui sur l’espérance chrétienne se termine par
l’affirmation que ce qui demeure
aujourd’hui, c’est la foi, l’espérance et la charité ; mais la plus grande
des trois, c’est la charité. Autrement dit, Paul renforce encore son
affirmation sur l’amour. Non seulement l’amour ne passera pas, comprenez bien
qu’il demeurera toujours, mais il est en plus la plus grande chose que l’homme
puisse vivre. La foi et l’espérance lui sont comme soumises, articulées pour
exister vraiment comme foi et comme espérance authentiques. En effet, que
serait la foi si elle n’était pas articulée à l’amour ? Rien ! Paul
l’a déjà dit dans l’hymne à l’amour : J’aurais
beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque
l’amour, je ne suis rien. La foi coupée de l’amour, se transforme en
doctrine sèche, menant les hommes aux pires exactions, comme nous ne le voyons
que trop bien aujourd’hui avec ceux qui commettent des attentats soi-disant au
nom de Dieu ! La foi en Dieu sans l’amour des autres est notre plus grand
danger. De même l’espérance, si elle n’est pas articulée à l’amour, ne sera
qu’une fuite en avant, la recherche d’un bonheur personnel, d’un monde meilleur
pour moi, sans les autres. L’espérance chrétienne, au contraire, nous relie à
nos frères, et nous tend ensemble vers l’achèvement du monde, vers le retour du
Christ dans la gloire. Car nous espérons un monde meilleur pour tous les
hommes ; nous espérons nous retrouver ensemble, à la table du Christ, dans
le royaume du Père. Puisque nous ne pouvons pas faire notre vie tout seul, nous
ne ferons pas notre paradis tout seul ! L’amour est le signe de notre foi
et le témoin de notre espérance. Il ne passera pas ; il est le plus grand
des trois ! N’espérons pas croire sans aimer ; ne croyons pas espérer
sans aimer. Dieu nous donne la foi parce qu’il nous aime ; il nous ouvre
une espérance parce que le Christ nous aime jusqu’au don de sa vie. Nous
pouvons tourner les choses dans n’importe quel sens ; nous n’échapperons
pas au devoir d’aimer si nous voulons croire et espérer. Sans l’amour, tout
n’est qu’illusion !
Tu as la foi, alors aime, nous dit
Paul ! Tu espères un monde meilleur, alors aime, insiste-t-il ! De Paul,
apprenons la foi et l’espérance authentiques conjuguées à la puissance de l’amour
que Dieu nous porte. Et tout ce que nous croyons, et tout ce que nous espérons
deviendra notre réalité, aujourd’hui et toujours. Amen.
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