Est-ce toi qui me bâtiras une maison ?
Au terme de notre Avent, à quelques heures de célébrer dans la joie la naissance du Sauveur, il nous est bon d’entendre l’échange entre le roi David et le prophète Nathan. Il nous dit quelque chose d’essentiel de notre rapport au Dieu qui vient. Tout est résumé admirablement dans cette question : Est-ce toi qui me bâtiras une maison ? C’est Dieu qui parle ainsi à David par son prophète.
Tout part du constat que David fait sur sa situation comparée à celle de l’arche de l’Alliance : J’habite dans une maison de cèdre, et l’arche de Dieu habite sous un abri de toile ! Sa réaction est simple : puisque Dieu a tout fait pour moi (Le Seigneur lui avait accordé la tranquillité en le délivrant de tous les ennemis qui l’entouraient), je vais faire à Dieu une maison digne de lui. Je ne doute pas un instant de la sincérité de David ; mais je ne peux m’empêcher d’être partagé entre prétention et naïveté. Prétention, parce que David ferait à Dieu quelque chose que Dieu ne saurait se faire lui-même, et il le ferait mieux que lui ? Personne n’a songé un instant que cela pouvait plaire à Dieu d’habiter sous une tente, comme jadis, lors de la longue traversée du désert ? Naïveté, parce qu’il se croit à la hauteur de la tâche ! Remarquez : le prophète Nathan se laisse prendre lui-aussi au jeu : Tout ce que tu as l’intention de faire, fais-le, car le Seigneur est avec toi. C’est dans la nuit suivante que Dieu parle à son prophète pour qu’il interroge David : Est-ce toi qui me bâtiras une maison ?
Derrière cette question, se cache une tentation très humaine qui se présente à tous à un moment ou à un autre de notre vie spirituelle : l’envie de faire quelque chose pour Dieu. Devant tout ce que Dieu a fait et continue de faire pour nous, nous pensons qu’il est temps que c’est à nous de faire quelque chose pour lui. C’est la porte ouverte aux très bonnes résolutions qui, sitôt prises sont aussitôt abandonnées, parce que, comprenez-vous, la vie n’est pas simple, il y a tant de choses à faire, … Je ne dis pas qu’il ne faut pas avoir la reconnaissance de ce que Dieu fait pour nous ; je ne dis pas qu’il ne faut pas se bouger pour lui en menant une vie selon sa volonté. Quand nous vivons simplement notre foi, nous ne faisons rien pour Dieu ; nous montrons juste que nous ne sommes pas des enfants ingrats qui ont tout reçu et ne savent pas dire merci. Vivre notre foi, nous le faisons pour nous. Nous ne le faisons pas pour Dieu, nous le faisons à cause de Dieu, parce que sa grâce nous a touchés. Non, les choses que nous voulons faire pour Dieu, c’est cet extra, ce truc en plus dont on pense qu’il fera plaisir à Dieu, sans vraiment savoir, une espèce de radicalité qui nous prend après un événement, une retraite, une épreuve dont on sort grandi. C’est de l’ordre de la tentation, parce qu’elle ne rentre pas vraiment dans ce que Dieu attend de nous. Nous voulons juste faire plus, pour lui montrer qu’on est bien, nous ; et surtout meilleur que les autres !
L’histoire de David, et bien plus tard, l’histoire de Marie, nous montre au contraire que la seule chose à faire pour Dieu, pour ceux qui tiennent absolument à faire quelque chose pour lui, c’est de répondre à sa volonté, ni plus, ni moins. Le vieux principe liturgique qui affirme que chacun fait seulement, mais totalement, ce qui lui revient, s’applique aussi en matière de vie spirituelle. Faire seulement, mais totalement, la volonté de Dieu ! C’est déjà pas mal, croyez-moi ! Cela m’oblige, non pas à imaginer ce qui ferait plaisir à Dieu, mais à écouter Dieu qui me dit ce qu’il attend de moi. Je ne pars pas de moi ; je pars de Dieu. Lui seul sait ce dont je suis capable ; lui seul me propose le vrai chemin pour parvenir à lui ; lui seul peut conduire ma vie au bonheur véritable. Entendons bien Marie quand l’ange lui a tout expliqué. Elle ne dit pas : j’ai compris, je sais ce que vais faire, comment je vais le faire, quand je vais le faire… Elle dit simplement : Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. Et pas un jour ne passera sans qu’elle n’habite cette volonté. Jusqu’au bout, jusqu’à la croix de son Fils, c’est la volonté de Dieu qui guidera sa vie.
Renoncer à vouloir faire quelque
chose pour Dieu pour mieux entrer dans sa volonté : voici à quoi nous
sommes appelés. Nous ne bâtirons rien pour Dieu ; mais lui bâtira notre
vie et notre avenir. Ecoutons-le, suivons-le, mais avant tout, accueillons-le. Amen.
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