Quand le peuple ouvre la voie.
Le saviez-vous ? La fête de l’Assomption est célébrée depuis quatorze siècles lorsque, enfin – pourrait-on dire – le Pape Pie XII décide, le 01er novembre 1950, de proclamer le dogme de l’Assomption qui affirme ce que le peuple croyait et célébrait depuis longtemps, à savoir que Marie, ayant été préservée du péché originel et n'ayant commis aucun péché personnel, a été élevée à la gloire du ciel, après la fin de sa vie terrestre, en corps et en âme. Si c’est bien l’Eglise qui définit le dogme, c’est la foi de tout un peuple, répandu par tout l’univers, qui est ainsi entendue et validée. Selon les données du Saint Siège, entre 1854 et 1945, huit millions de fidèles écriront à Rome en ce sens. 1 332 évêques et 83 000 prêtres, religieux et religieuses viendront s’y ajouter. Probablement la plus grande démarche synodale organisée non pas par la tête, mais par le corps de l’Eglise. Qu’est-ce qui a bien pu déclencher une telle foi ? Pour ma part, deux éléments contribuent à cette démarche.
Le premier élément, c’est la vie de Marie, et son humilité. Celle qui aurait pu gonfler des chevilles lorsque l’ange lui annonce qu’elle portera le Fils du Très-Haut, entre humblement dans la volonté de Dieu : Voici la servante du Seigneur ; que tout se fasse pour moi selon ta parole ! Et elle restera humble toute sa vie durant. L’Evangile de la Visitation que nous venons d’entendre, nous montre la même Marie ayant reçu le message de l’ange, partir avec empressement chez sa cousine Elisabeth pour se mettre à son service. Celle-ci, en effet, dans sa vieillesse, attendait son premier enfant, lui-aussi fruit de la promesse du Seigneur. Marie ne pérore pas, elle ne se vante pas davantage. Elle chante la grandeur de Dieu et sa bonté envers son humble servante. Elle ne tire pas avantage de sa situation, mais proclame que Dieu agira ainsi pour tous les petits, les humbles, les affamés, ceux qui le craignent, sans oublier Israël, son serviteur. Vous pourrez relire, en rentrant chez vous, tous les évangiles qui nous parlent de Marie (c’est assez vite fait, il n’y en a pas tant que cela), jamais vous ne la verrez ou entendrez s’élever, revendiquer, se mettre en avant. Toujours, comme à Cana par exemple, elle renvoie vers Dieu ou vers son Fils. Saint Louis-Marie Grignion de Montfort a bien raison de nous rappeler que nous allons à Jésus, par Marie. Pas seulement parce que c’est elle qui nous donne Jésus, mais parce que toute sa vie nous montre Jésus. Même sa mort, qui la fait entrer corps et âme en paradis, nous montre Jésus et nous dit que le chemin qu’il a été le premier à emprunter, lui premier ressuscité parmi ceux qui se sont endormis, est le chemin commun pour nous tous. Marie, en son Assomption, nous montre que Jésus a bien vaincu la mort, et que celle-ci n’est plus un obstacle, mais le passage vers la rencontre avec Dieu.
Et ceci m’amène au deuxième élément qui justifie, selon moi, cette démarche faite par le peuple de Dieu pour aboutir à la proclamation du dogme de l’Assomption. Nous avons besoin d’être rassurés sur notre avenir. Et la foi en l’Assomption fait juste cela. Bien sûr, nous savons et nous croyons que Jésus est ressuscité d’entre les morts. Paul nous l’a magnifiquement rappelé dans l’extrait de la première lettre aux Corinthiens entendu. Mais c’est Jésus, quoi ! C’est le Fils de Dieu ! Avec Marie, nous avons quelqu’un de chez nous, totalement. Si elle, grâce à son humilité et sa vie totalement menée sous la conduite de l’Esprit Saint, parvient corps et âme en paradis, nous avons l’espérance, malgré notre péché, d’y parvenir nous aussi. Notre corps mortel sera livré à la tombe, mais notre âme pourra s’élever vers Dieu. Nous ne sommes pas que corps mortel ; nous sommes aussi spirituels, animés de l’Esprit Saint que nous avons accueilli au jour de notre baptême, et cette part de nous sera sauvée. Marie nous est donnée comme exemple de vie à mener dans le Christ sous la conduite de l’Esprit Saint ; elle nous est aussi donnée en exemple de ce qui est promis, à la fin de notre vie. Avec Jésus ressuscité, nous pouvions espérer ressusciter nous aussi et participer à sa gloire. Grâce à Marie, nous savons que cela est possible puisque la foi du peuple, avant la foi de l’Eglise, nous disait cela possible quand nous méditions le mystère de l’Assomption avant même qu’il ne fut un dogme. Quand Jésus nous dit qu’il donne sa vie pour nous, pour notre vie, nous pouvons le croire ; il dit vrai et sa mort en croix et sa résurrection d’entre les morts nous ouvrent le chemin vers la vie. Marie, en son Assomption, semble nous dire : comme moi, vivez selon la parole du Christ, et comme moi, vous parviendrez au Royaume où Dieu nous attend. Ne crains pas de croire ; ne crains pas d’être humble ; ne crains pas la mort. La vie éternelle est offerte à ceux qui croient ; la vie éternelle est offerte aux humbles ; la vie éternelle est offerte à ceux qui passent la mort avec le Christ. Il est notre salut, notre gloire éternelle.
Aujourd’hui,
réjouissons-nous que le peuple de Dieu ait montré la voie à l’Eglise. Réjouissons-nous
pour Marie qui entre dans la gloire de Dieu. Réjouissons-nous pour nous qui
sommes appelés à cette même gloire. Et comme Marie, vivons de la Parole du Christ.
Comme Marie, vivons de l’Esprit du Christ. Ainsi, comme Marie, nous parviendrons
là où le Christ nous attend. Amen.
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